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Emerelle Firnstay
Emerelle Firnstay
Messages : 6
Date d'inscription : 17/05/2015
Emerelle Firnstay
Nom : Firnstay.

Prénom : Emerelle.

Race : Halfeline.

Âge : Vingt-sept tours.

Sexe : Féminin.

Origine : Les Iles de Jade.

Lieu de résidence : Nomade.

Métier : Cela dépend des situations… Voleuse, danseuse, couturière, charpentière, sage-femme, navigatrice ou politicienne issue de la petite noblesse, selon.

Position sociale : Complexe. Elle est bien souvent prise pour une noble dame de passage, à cause de son apparence et des manières qu’elle se force à adopter, mais en vérité, elle est sans le sous. Elle pourrait faire une fortune en revendant ses bijoux, mais elle s’y refuse. Le vol est sa seule option pour continuer à financer ses maquillages, et elle compte sur l’hospitalité des nobles pour se faire nourrir et loger … hospitalité qu’elle remercie les volant, car il faut bien vivre.

Point de vue religieux : Emerelle a grandi dans une île où le rapport à la mer est omniprésent. Elle a longtemps servi, comme travailleuse de la mer, sur un navire pirate. Il est donc logique qu’elle se sente proche de la Grande garce des profondeurs et qu’elle chercher à attirer ses faveurs en la servant. Cependant, puisqu’elle a définitivement mis pied à terre, elle prie par principe Ohiel, et ce pour des raisons personnelles. A ses yeux, les miséreux ont droit à la justice, et seul lui est capable de la leur procurer.



Caractère : Ayant eu une vie particulièrement cruelle, Emerelle a appris très rapidement quelques règles, comme le fait que l’humour soit la dernière arme du pauvre. Il est donc devenu omniprésent dans sa vie, faisant d’Emerelle une femme insouciante, espiègle, et sujette à l’humour sur tous les plans. Certains aiment même à dire qu’elle serait superficielle. Mais elle est également loyale à ceux qu’elle juge dignes d’être suivis, les critères de ce jugement étant connus d’elle et d’elle seule. Finalement, elle est sérieuse quand on lui donne une tâche demandant de la concentration, courageuse uniquement quand cela est nécessaire, et sait faire preuve d’affection et de compassion. Car Emerelle Firnstay a été traumatisée par son enfance en tant que fille d’une famille pauvre, puis en tant qu’esclave. Et par les remarques formulées à l’égard de sa taille. Sous sa façade joyeuse et superficielle se cache en fait une femme qui souffre grandement, cette souffrance remontant parfois à la surface. Il est à noter qu’elle ne supporte pas qu’on lui fasse des remarques sur sa taille.



Phobies : Emerelle craint la misère, avec tout ce qu’elle implique. Mais d’un autre côté, elle déteste par-dessus tout les riches, et tous ceux qui la jugeront sur sa petite taille. Elle craint aussi de perdre sa rose, de perdre Juri, et de redevenir esclave.

Santé : Emerelle se sent en parfaite santé.

Main : Emerelle est droitière.

Compétences : Emerelle ayant eu à effectuer des tâches diverses au cours de sa vie, elle a développé des compétences dans beaucoup de choses, mais pas vraiment à un haut niveau. Elle est ainsi couturière, mais uniquement pour réparer un accroc, car n’ayant aucune notion de comment tailler un vêtement. Elle est charpentière, dès lors que cela se résume à planter des clous dans une planche ou à la scier. Elle sait récolter des fruits quand ils sont à sa hauteur. Elle sait utiliser un pistolet, mais elle le manie comme un mousquet. Elle peut, en cas de dernier recours, servir de sage-femme, mais uniquement s’il n’y a personne dans les parages. A tout le moins est-elle bonne danseuse et connait assez les lettres pour s’exprimer comme femme de haut rang.



Physique : Quelle petite femme ! pourrait-on, au risque d’éveiller sa colère, dire d’Emerelle. Il faut en effet avouer que la halfeline est minuscule, même selon les critères de sa race. Quatre vingt-dix centimètres de haut ! Et trente-sept kilos seulement. Mais celui qui passera cet aspect de la halfeline (et parviendra encore à lui parler qu’elle lui ait expliqué sa façon de penser s’il avait fait la remarque susdite) découvrira une femme à la grande beauté. Portant d’amples robes financées par son butin, de même pour les bijoux qui vont avec, Emerelle est une femme coquette. Ses longs cheveux lisses sont d’un blond éclatant, proche du blanc. De splendides yeux bleus comme la mer ornent son visage de nacre, conclu par une fine bouche. Telle est Emerelle Firnstay.


Histoire : Séléné, capitale de Tanequil.
Le quartier pauvre de cette ville n’a rien à envier aux quartiers les plus pauvres du continent, quoi que puissent en dire les insulaires. C’est dans l’un des endroits les plus délabrés de ce quartier, dans une maison dont le toit tombait en ruines, que raisonnaient les pleurs d’un nouveau-né.
Tentant vainement de calmer sa fille qui venait de venir au monde, Knud le halfelin marchait de long en large dans l’unique pièce de la maison. Grâce à la fatigue de la naissance plus qu’à ses bercements répétés, le petit paquet qu’il tenait dans les bras finit par cesser de pleurer et s’endormir paisiblement. Knud regarda sa tendre épouse, Elma, qui s’était endormie immédiatement après que la naissance d’Emerelle soit terminée. Bien que sage-femme de métier, elle-même avait été surprise par ses propres couches. Et ce d’autant plus qu’Emerelle était venue trois semaines avant le terme prévu. Elma s’en était inquiété, il y avait quelques heures. Elle avait vu trop de bébés mourir car ils étaient venus trop tôt au monde. Voilà pourquoi Knud, qui tenait sa fille dans ses bras, n’arrivait pas à la lâcher. Une peur instinctive l’en empêchait. Qu’allait-il arriver à sa petite Emerelle s’il la laissait ?
Il ne lui arriva rien.

Emerelle eut une petite enfance heureuse. Bien que de constitution fragile et plutôt maigre, elle allait fréquemment jouer dans la rue, avec les autres enfants qui pouvaient y trainer. Bien que ces enfants soient souvent de mauvais sujets, ses parents ne pouvaient rien y faire. Il fallait bien qu’Emerelle puisse avoir quelques amis après tout. Et tous ces garnements, Elma ne les avait-elle pas elle-même fait naitre un jour où l’autre ? En outre, si Elma restait souvent à son foyer, elle devait de temps en temps s’en aller pour voir une femme dont la grossesse avançait. Quant à Knud, il allait gagner de quoi manger pendant toute la journée, partant à l’aube, et ne reparaissant qu’au crépuscule.
Emerelle jouissait ainsi d’une autonomie forte pour une enfant de son âge. Mais cela ne l’empêchait pas d’être couvée du regard par ses parents, qui s’assuraient qu’elle ne s’éloigne jamais trop. Ainsi, un jour, elle tenta d’aller dans les quartiers un peu plus riches, alors qu’elle avait cinq ans, mais à peine y était-elle entrée qu’elle sentit des bras la soulever pour la ramener en arrière. Sa mère l’empêcha de ressortir ce jour-là.
Mais Emerelle ne s’en plaignit pas. Car si elle appréciait la présence de ses amis, elle n’appréciait personne autant que ses parents. Le soir, il était impossible de la coucher avant que son père ne rentre du travail. A ce moment-là, elle se jetait littéralement dans ses bras, et bien souvent, s’endormait alors qu’il la soulevait du sol pour la serrer dans ses bras.
La nuit, il lui arrivait très fréquemment de faire des cauchemars. Aussi, bien que son père, en tant que charpentier, ait pu lui fabriquer son propre lit, elle allait très souvent s’installer dans celui de ses parents, où elle dormait bien mieux que dans le siens. Et elle se réveillait alors presque toujours en sentant le bras protecteur de sa mère qui l’entourait. Et aussitôt qu’elle remuait, celle-ci la soulevait pour la serrer dans ses bras.
« Tu as fait un mauvais rêve, ma petite ? demandait-elle à chaque fois.
-Non maman, répondait alors Emerelle. »
Cette enfance fut donc une enfance sans histoires notables, à l’exception de deux évènements, qui eurent lieu respectivement le jour de ses sept tours et plus tard dans ce tour là. Le jour de ses sept tours, sa mère l’emmena dans un temple de la Déesse Mère, pour qu’elle puisse y rencontrer une druidesse ou un druide. En effet, Elma estimait que si sa fille apprenait à lire, peut-être pourrait-elle ne pas vivre dans la misère comme ses parents.
La druidesse Tavish, qui était ce jour-là dans le parc du temple, accueillit chaleureusement la petite fille, mais Emerelle s’obstinait à toujours vouloir rester dans les bras de sa mère et ne pas approcher de cette inconnue qui l’intimidait, malgré sa voix et ses manières douces. Alors, Tavish montra à Emerelle une rose dans un massif, une rose rouge.
« Cueille-la, petite, elle est à toi.
-Vraiment ? demanda Emerelle, qui commença aussitôt à avoir un grand sourire sur les lèvres.
-Vraiment, répondit Tavish. »
Aussitôt, et faisant fi des épines qui tracèrent de petits sillons rouges sur ses mains, Emerelle se fit une tâche de cueillir la rose. Lorsqu’elle réussit, elle se précipita vers sa mère pour lui montrer fièrement la fleur.
Une fois que ce fut fait, Tavish toucha délicatement la rose et prononça quelques mots dans une langue inconnue.
« Petite Emerelle, ta rose ne se fanera jamais. »
A partir de ce jour, Emerelle fut heureuse d’aller trouver Tavish pour apprendre à lire, et elle parvint même à y aller sans sa mère au bout d’une semaine.

Le deuxième évènement fut un jour où elle décida de suivre sa mère, qui avait été appelée au beau milieu de l’après-midi par un monsieur qu’elle ne connaissait pas. Chose rare, Emerelle avait vu sa mère lâcher la robe qu’elle était en train de rapiécer pour suivre l’homme en courant. Prenant soin de ne pas se faire voir, car elle pensait être grondée si on la voyait, Emerelle courut aussi vite qu’elle le put derrière sa mère.
Ce fut la première fois qu’Emerelle vit une naissance. La souffrance de la mère, le sang qui avait coulé, la sueur qui coulait à grosses gouttes sur la tête de sa mère à elle… tout cela fit peur à la petite fille, qui pleurait lorsque sa mère sortir de la maison, alors que la nuit était largement tombée. Elle qui s’attendait à être grondée fut surprise de constater qu’il n’en était rien. Sa mère se contenta de la soulever sans mot dire, sans chercher à la consoler ou à la gronder. Emerelle était endormie deux pas plus loin, et ne fut pas réveillée par l’accueil de son père, qui avait cherché sa petite fille partout, lorsqu’Elma arriva à la maison.

Toute chose doit cependant finir un jour.
Alors qu’Emerelle avait huit tours, son père fut renvoyé de son travail sans autre forme de procès. Dès lors, ses parents se mirent à emballer leurs maigres possessions.
« Emerelle, lui dit sa mère, un jour, lors du petit-déjeuner, j’aimerais que tu dises au revoir à tes amis aujourd’hui.
-Oui maman ! dit Emerelle sans chercher à en savoir plus. »
Elle ne leur dit pas au revoir, car durant les jeux auxquels ils se livrèrent, son esprit de petite fille oublia les instructions de sa mère. Ensembles, ils parvinrent à pêcher un poisson dans l’eau du port. L’ainé de la bande sachant le vider, ils se promirent de se retrouver le lendemain pour le manger ensembles.
Mais Emerelle ne participerait pas. Lorsqu’elle revint à la maison, sa mère la souleva de terre. Elle remarqua que quelque chose n’était pas normal quand elle vit que son père était là avant le coucher du soleil, elle qui n’avait pas compris le concept d’un renvoi. Elle ne comprit pas non plus pourquoi ses parents l’emmenaient au port, ils ne faisaient jamais ça normalement ! Puis ils la firent monter dans un bateau.
« On va se promener en mer maman ? demanda Emerelle, enthousiaste.
-Nous partons, ma chérie, répondit sa mère. Ton père ne retrouvera pas de travail à Séléné. Nous allons rejoindre le royaume de Tiy. Là-bas, ils abattent les arbres à la lisière de la Jungle, progressant chaque jour un petit peu plus. Ton père y aura certainement du travail.
-C’est où le royaume de Tiy maman ?
-C’est loin d’ici.
-Mais je ne reverrais pas Tavish ? demanda la petite fille, qui sentait les larmes venir à ses yeux.
-Tu la reverras un jour, promit sa mère, qui savait parfaitement que c’était un mensonge. Regarde, la rose qu’elle t’a donné. Tant que tu l’auras, Tavish sera avec toi. D’accord ?
-Oui maman, répondit Emerelle, qui s’endormait. »
Le voyage par bateau devait durer deux mois entiers. Emerelle passait son temps en dehors de la cabine de ses parents pour jouer sur le pont, mais elle s’ennuyait vite, ne trouvant aucun compagnon de jeu parmi tous ces adultes. Alors, elle se cachait sous une échelle qui descendait dans la cale, et elle chantonnait en serrant sa rose contre elle des berceuses que sa mère lui avait chantée quant elle était plus petite.
Puis vint l’attaque.
Le navire était au large du royaume de Pto quand une voile apparut à l’horizon. Ladite voile battait pavillon de Pto, aussi le capitaine du navire ne fût-il pas méfiant, jusqu’à ce qu’il soit évident que le navire étranger les avaient pris en chasse. Le vaisseau qui venait des Iles de Jade était un navire de commerce conçu à Kelvin pour le commerce, et pas pour la course ou le combat, il fut donc aisément rattrapé.
« Emerelle ! lui dit sa mère, qui vint l’attraper sous son échelle dès que le capitaine demanda aux passagers de se cacher. Emerelle ma petite, vois-tu le placard derrière la réserve de voiles ?
-Là où je n’ai pas le droit d’aller ? demanda Emerelle.
-Oui ma chérie. Vas-y ! Maintenant ! Enferme-toi dans ce placard, et ne sors que lorsque je viendrais te chercher. D’accord ?
-C’est un jeu ?
-Oui c’est un jeu ma chérie. Maintenant vas-y, tout de suite ! »
Emerelle, toute joyeuse, partit s’enfermer là où sa mère le lui avait indiqué. Au début, elle riait, certaine que personne ne la trouverait ici avant sa mère. Puis les bruits du combat résonnèrent au-dessus d’elle. Le cliquetis du fer contre le fer lui était totalement inconnu, aussi se contenta-t-elle de se demander ce qui pouvait bien se passer au-dessus, et à quel jeu jouaient les adultes, mais quand les cris de douleurs commencèrent, elle prit peur. Il faisait noir dans ce placard, et les bruits qu’elle entendait ressemblaient à ceux de ses cauchemars. Voilà pourquoi, alors que le combat perdait en intensité, elle sortit de sa cachette, courant à la recherche du bras protecteur de sa mère.
Elle arriva dans la cabine qu’elle partageait avec ses parents. De son père, aucune trace. Sa mère, en revanche, était au sol. Une flaque rouge commençait déjà à se répandre sous elle, mais son ventre continuait à se soulever et à s’abaisser, à un rythme de plus en plus inquiétant.
Emerelle ne savait rien de tout cela, aussi se contenta-t-elle d’aller se serrer contre sa mère.
« Maman, murmura-t-elle… J’ai peur maman. »
Lentement, elle sentit sa mère l’entourer de son bras.
« N’aies pas peur, ma chérie. N’aies pas peur. Je suis là. Tout va bien, d’accord ? »
Sa voix était faible, et elle avait du mal à parler.
« D’accord, gémit Emerelle, inquiétée par l’intonation prise par sa mère.
-Emerelle, te souviens-tu de la rose de Tavish ?
-Oui maman…
-Garde-la avec toi ma chérie, garde-la toujours avec toi. Où que tu ailles et quoi que tu fasses, garde-la.
-Je ne l’oublierais pas, dit-elle. Parce que … parce que tu seras avec moi pour me rappeler de la prendre, hein ?
-Ma chérie, murmura Elma… Je serais toujours avec toi, même si tu ne me verras pas. D’accord ?
-Non, je veux que tu sois avec moi et que je puisse te voir, murmura Emerelle. »
Pendant qu’elle disait cela, sa mère la lâcha, augmentant la peur de l’enfant.
« Je veux te voir maman. Maman ? »
Si Emerelle avait été adulte, elle aurait réalisé qu’elle n’obtiendrait aucune réponse. Mais Emerelle était une enfant. Elle crut que sa mère attendait qu’elle prenne la rose, aussi alla-t-elle la chercher, et la brandit-elle devant le visage de sa mère.
« Maman, j’ai la rose ! Maman ? »
Elle sentit alors des bras puissants la soulever, et malgré ses cris, fut emmenée sur le pont dans une position des plus inconfortables.
« Regardez ce que j’ai trouvé ! rugit l’homme qui l’avait attrapé. Un petit oiseau tombé du nid !
-Les parents sont pas dans le coin ? demanda un autre.
-Je crois que la petite n’a pas encore parfaitement saisi le côté définitif de la mort, ricana le premier.
-Et tu veux en faire quoi ? Tu veux l’adopter, comme un bon noble hasdrubien que tu es ? demanda un troisième homme, déclenchant des éclats de rire.
-Oh, les hasdrubiens doivent avoir une vie de merde  s’ils adoptent tous les orphelins qu’ils trouvent ! Non, regardez-moi ça ! Une petite, appelée à grandir, et qui n’a plus ses parents ! Un esclave parfait, vous ne pensez pas ?
-Tu connais un acheteur d’esclaves, toi ?
-Je connais un certain Melealon, qui payera très cher pour une esclave de cette valeur. Vous en pensez quoi ? »
Emerelle pleurait, et pleurait, mais ses larmes n’y firent rien.

Ainsi fût-elle vendue à un riche propriétaire sur la côte de Pto. Ce dernier possédait une grande propriété agricole, sur laquelle il produisait une herbe qui, une fois hachée et brûlée, provoquait de puissantes sensations hallucinatoires. Cependant, les prêtres d’Ohiel condamnant l’utilisation d’une telle herbe, la rendant responsable de bien des maux, il était mal vu d’en faire l’usage. Aussi, bien que la plupart de ses clients soient de riches bourgeois ou nobles, Melealon devait employer des esclaves et non des travailleurs réguliers pour entretenir ses cultures.
Il vit rapidement l’intérêt d’avoir une petite fille comme Emerelle dans ses cultures. Beaucoup de ses esclaves devaient cesser de travailler lorsqu’ils avaient mal au dos, à force de se baisser pour ramasser les feuilles plus proches du sol. Bien qu’il eut aimé les en empêcher, Melealon avait bien vite compris que des esclaves trop fatigués impliquaient une forte baisse du rendement. Mais une enfant ? Et une enfant de cette taille ? Elle n’aurait pas se à baisser pour ramasser les feuilles les plus proches du sol.
Emerelle reçut ainsi une tâche « adaptée à ta taille », selon les dires du contremaître, une brute du nom de Pugan. Mais parce qu’elle devait faire quelque chose que les autres esclaves ne pouvaient, pour leur part, pas faire, dans la pratique, elle abattait plus de travail que n’importe lequel des autres, aussi fût-elle rapidement épuisée par l’effort, et tomba-t-elle très fréquemment malade au bout d’un mois dans les champs. Un jour qu’elle n’arrivait pas à se lever du nid qu’elle s’était creusée dans la paille de la grande où logeaient tous les esclaves, elle entendit Melealon et Pugan prononcer son nom. A moitié assommée par la fièvre, elle ne parvint que vaguement à comprendre qu’elle n’était bonne à rien, et qu’elle serait probablement revendue à un bordel dès que possible.
« Après tout, dit Melealon, même si je ne partage pas ces … pratiques, je connais certains de mes amis qui seraient ravis d’avoir une fille de cet âge pour rendre leur soirée plus agréable. »
Emerelle n’avait aucune idée de ce qu’était un bordel, mais elle avait entendu son père en parler un soir. Il disait que son ami y allait, et que lui, par les dieux, il ne comprenait pas qu’on puisse y aller. Il disait que toutes les filles qui travaillaient là-bas devaient être très malheureuses et qu’il fallait soit être incroyablement désespéré, soit incroyablement pervers pour y aller. Alors Emerelle se jura qu’on ne la vendrait pas à un endroit où son père ne voulait pas aller.
Le lendemain, alors même qu’elle n’aurait pas réussi à se lever en temps normal, elle fit d’intenses efforts, et parvint à partir au travail. Mais elle devait fréquemment s’arrêter, et dès que Pugan avait le dos tourné ou était occupé ailleurs, elle s’allongeait un peu, faisant bien attention à ne pas s’endormir. Son rendement en chuta d’autant, et elle n’évita le bordel que parce que les autres esclaves témoignèrent qu’ils n’avaient plus mal au dos depuis qu’on confiait cette tâche à cette gamine.
Voilà pourquoi Melalon renonça à ce projet. Mais d’un autre côté, elle n’arrivait pas à cueillir assez de de feuilles pour que son achat soit rentabilisé, du moins pas avant plusieurs années, aussi fût-elle renommée « Bonne à rien » par les maitres. Quant aux autres esclaves, ne connaissant pas son vrai nom, car elle n’avait jamais osé le leur dire, ils se contentèrent de l’appeler « Petite » ou, pour les moins aimables, « Bonne à rien ».
Cet enfer dura jusqu’à ses seize tours. Lorsqu’elle atteint la puberté, tous craignirent de la voir grandir, et donc qu’elle ne soit plus aptes à la tâche qui lui était habituellement dévolue, mais heureusement, elle resta assez petite pour faire la tâche qui lui était dévolue.
Bonne à Rien, puisque tel était désormais le nom par lequel elle se désignait elle-même, acceptait stoïquement son sort. Elle ne connaissait désormais plus rien d’autre. Elle avait fini par comprendre ce qui était arrivé à ses parents. Elle évitait d’y penser dans la journée, mais dès que la nuit tombait, elle sortait sa rose de sous la paille. La fleur ne se fanait toujours pas. Et elle s’endormait en la serrant contre elle. A son réveil, son premier réflexe était toujours de chercher le bras protecteur de sa mère. Mais il n’était plus là. Il ne serait plus jamais là. Et même quand elle l’eut compris, elle ne cessa pas pour autant de retenir un sanglot, à son réveil. Tel était son rituel.

Puis vint l’attaque des pirates.
Il fallait savoir qu’à l’époque, le sultan de Pto désapprouvait les actions de Melealon, aussi avait-il décidé de mettre fin à ses actions. Mais il découvrit que Melealon était protégé, car aucun procès contre lui ne put aboutir, alors même qu’il était lancé par le sultan en personne. Aussi ledit sultan décida-t-il d’envoyer des soldats pour mettre fin de façon sanglante à ce problème, mais la corruption était telle que tous les soldats qui furent envoyés tombèrent mystérieusement malades en route.
Alors, le sultan décida de faire appel aux pirates. La propriété se trouvant sur la côte, il serait aisé pour eux d’y faire fuir les esclaves, de tuer le contremaitre et Melealon, n’est-ce pas ? En échange, ils seraient payés par le roi en personne, qui se trouverait avec deux de ses gardes en lesquels il avait le plus confiance sur les lieux, avec une forte somme d’argent, et l’équipage aurait le droit de piller la propriété.
L’offre eut un succès immédiat parmi les capitaines pirates, mais ce fut Brecianne Leocadas en personne qui décida de prendre la mission en charge.
Alors que la nuit était tombée sur la propriété, des ombres débarquèrent sur la plage au loin. Ils s’avancèrent vers les champs, qui la jouxtaient immédiatement, avec pour instructions de ne surtout pas y faire du feu, un incendie dans ces lieux étant beaucoup trop dangereux.
Toute la suite se déroula vite. Emerelle, quand elle entendit le fracas des armes et les cris de douleur des quelques gardes de la propriété, qui furent rapidement balayés, fut brusquement renvoyé huit tours plus tôt, quand le navire avait été attaqué. Poussant un cri d’horreur, elle s’enterra sous la paille, pensant être bien cachée, et serrant sa rose contre elle, tandis que les autres esclaves enfonçaient la porte pour mieux fuir le raid.
Lorsque tout fut calme, Emerelle ne sortit pas de sa cachette. Elle se souvenait trop bien de ce qui s’était passé la dernière fois. Elle ne voulait pas être vendue à pire que Melealon. Puis une femme entra. Une grande femme brune, au visage ferme et déterminé. Elle avait un couteau dans une main, un pistolet dans l’autre. Son regard fouilla la pièce puis s’arrêta immédiatement sur Emerelle.
« Sors de là-dessous toi, je ne te veux aucun mal. »
Emerelle sortit, timidement, tremblant de peur.
« Je suis Brecianne Leocadas. Et toi, comment t’appelles-tu, petite ?
-Bonne à rien, dit-elle d’une voix effrayée.
-Ton vrai nom. Pas celui que t’ont donné tes maitres.
-Bonne à ri… tenta d’insister Emerelle, mais une gifle de la part de la capitaine l’interrompit.
-Je peux te laisser ici, ou t’embarquer avec moi. Si je t’embarque, tu partiras, dit simplement Brecianne. J’ai juste besoin de connaitre ton nom.
-Mon nom est … Emerelle Firnstay.
-Tu vois, quand tu veux. Bon, allez, suis-moi Emerelle, quittant la grange. Et juste une chose : les Bonne à rien, c’est fini. D’accord ?
-Oui madame, murmura Emerelle, qui avait encore du mal à croire que quelqu’un l’avait appelée Emerelle.
-Pour toi comme pour tout le monde, ce sera capitaine.
-Oui capitaine… »
Brecianne Leocadas soupira et se tourna vers elle.
« Si je te demandais de monter en haut du mat de mon bateau et de jouer les funambules sans t’accrocher à rien, tu le ferais immédiatement n’est-ce pas ?
-Oui capitaine, dit Emerelle.
-Bon, peut-être ne sais-tu pas ce que ça implique. Alors si je te demandais d’aller briser une statue d’Ariel avant de prendre la mer, que ferais-tu ?
-Je le ferais capitaine.
-Ariel est la déesse de la mer, et je doute qu’elle apprécie l’offense que tu lui ferais. Tu le ferais tout de même ?
-Oui capitaine.
-Depuis combien de temps est-tu ici, Emerelle, demanda Brecianne, une franche pitié dans la voix.
-Depuis que j’ai huit tours, capitaine.
-Et quel âge as-tu ?
-Je ne sais pas, capitaine.
-Elle a seize tours ! intervint un pirate, plus loin dans la cour. Melealon a raconté plein de bêtises quand on a joué avec lui !
-Ma pauvre petite, murmura Brecianne en prenant Emerelle dans ses bras comme si elle était une enfant… Je n’ose pas imaginer ce que tu as vécu ici pour être dans cet état… »
Emerelle se laissa faire sans discuter. Quelqu’un l’avait appelée Emerelle. Quelqu’un l’avait appelée Emerelle. Pour la première fois depuis huit tours. Son enfance était en train de revenir sur elle comme si une barrière retenant ses souvenirs s’était brisée. Alors, elle fondit en larmes.
Brecianne Leocadas n’aimait pas l’esclavage. C’était pour cela, plus que pour le butin, qu’elle avait accepté ce travail. Parmi les esclaves libérés, beaucoup s’étaient enfuis, mais plus encore viendraient s’engager comme pirates à bord de différents navires. Quant à cette petite halfeline qu’elle tenait dans les bras, l’élue d’Ariel se promit de l’embarquer sur son propre navire, au moins jusqu’à ce qu’elle soit remise du choc, si tant est que cela était possible.

Et Emerelle mit plusieurs tours à se remettre du choc. Les voyages à bord du navire de Brecianne firent leur effet, mais lentement. Mais alors qu’Emerelle avait vingt tours, de l’esclave qui avait fondu en larmes dans les bras de sa future capitaine, suscitant l’hilarité générale des marins, il ne restait rien. L’enfant rieuse et joueuse n’était pas de retour pour autant. Aujourd’hui, c’était une troisième Emerelle. Une qui ne se souciait pas de l’avenir, ni du passé d’ailleurs. Toutes ses affaires tenaient dans une malle qu’elle avait dans sa cabine, qui lui avait été mise à disposition par la capitaine lors de son premier embarquement.
Ce retour des enfers s’expliquait par le soin que Brecianne Leocadas et son équipage avaient mis à « soigner » Emerelle. En lui apprenant à naviguer, à réparer le navire s’il s’abimait, et à recoudre les voiles quand nécessaire, la capitaine et les autres marins avaient, par le travail, permis à Emerelle de se libérer. Le plus long avait été de lui faire comprendre qu’elle avait le droit de faire remarquer à la capitaine que certains ordres pouvaient être ineptes, et qu’elle pouvait proposer mieux, même si dans la pratique, cela ne lui servait à rien puisque Brecianne était bien meilleure marine qu’elle, le simple fait de savoir cela avait redonné à Emerelle une certaine joie de vivre.
C’est durant cette période qu’Emerelle apprit ainsi à coudre une voile ou à rapiécer elle-même ses propres vêtements. Elle apprit également à travailler le bois quand nécessaire, et à faire des nœuds de marins. Enfin, Brecianne, qui s’était attachée à la halfeline, lui enseignait des notions de navigation quand les deux femmes pouvaient être seules.
Emerelle apprit également à se battre, lorsque le navire dût passer à l’abordage. Il fut cependant compliqué de lui donner une arme digne de ce nom. Les canons étaient beaucoup trop grands pour elle, de même que les sabres d’abordages et toute autre arme. Elle fit notamment rire aux éclats tout le navire quand les marins découvrirent qu’elle devait manipuler les haches d’abordage à deux mains. Mais à cette époque-là, Emerelle ne se souciait pas de sa petite taille et des remarques que cette dernière pouvait susciter. Pas encore…
Finalement, c’est une femme du nom de Lilly qui trouva la solution. Emerelle manipulerait un pistolet comme s’il s’agissait d’un mousquet, mais elle manipulerait ce pistolet. Brecianne, par la suite, lui confia un glaive, qu’Emerelle manipulait comme une épée. Et elle apprit à le faire.
Elle tua son premier homme lors d’un abordage, presque par erreur, mais en vérité, elle ne s’en souciait que peu. Son rapport à la mort avait évolué, et elle considérait désormais que ceux qu’elle affrontait étaient des esclavagistes potentiels. Son esprit avait chassé de lui-même le fait que ce soient des pirates qui avaient tués ses parents, car sinon, jamais elle n’aurait pu guérir grâce à d’autres pirates. Elle avait donc oublié ces évènements. Heureusement pour elle.

Durant cette période, un grand changement se fit en elle. En effet, Emerelle n’avait jamais connu d’autre véritable amour que celui de ses parents, et ce n’était certainement pas les esclaves qui ou les maitres qui allaient changer cela. Mais maintenant qu’elle était libre et en pleine possession de ses moyens, Emerelle prenait conscience de l’existence du sentiment amoureux, et commença à s’intéresser pour de vrai aux marins qui étaient avec elle à bord du navire. Notamment lorsque le temps du bain venait. En effet, Brecianne Leocadas demandait une hygiène impeccable à ses marins, afin d’éviter un risque d’épidémie. Aussi, tous les quinze jours, on faisait monter de l’eau de mer à bord du navire afin que chacun puisse se laver pour de vrai, et non pas se contenter de faire une toilette sommaire comme ils le faisaient habituellement. Aussi, tout l’équipage, hommes comme femmes, se retrouvait ensemble sur le pont pour se laver. Bien entendu, les sifflements fusaient malgré le drap qui séparait les deux sexes, et les hommes n’hésitaient pas à inviter les femmes à les rejoindre, ces dernières ayant pour principe de les envoyer balader et de les mettre au défi de venir les chercher.
Bien sûr, tout cela n’était qu’un jeu, mais Emerelle prenait pour elle beaucoup de sifflements. Puis un jour, elle réalisa que son nom n’était jamais prononcé par les marins en cette occasion. Elle eut une période de crainte. Etait-elle si laide que personne ne veuille d’elle ? C’est à cette époque qu’elle devint coquette. Ses butins, elle commença à les dépenser en bijoux et maquillages. Si elle ne les portait pas sur le navire en temps normal, elle n’hésitait pas à se maquiller un peu avant de monter sur le pont, le matin. Mais malgré cela, son nom n’était toujours pas prononcé. Alors, elle prit un jour son courage à deux mains, et osa en parler à la capitaine, en qui elle savait pouvoir faire confiance.
Celle-ci éclata de rire.
« Mais voyons Emerelle ! Bien sûr que tu es magnifique ! Tu n’as pas besoin de tous ces accessoires de pétasse, crois-moi ! Je serais même heureuse si tu arrêtais de les mettre d’ailleurs.
-Mais alors, demanda Emerelle, pourquoi ne m’appellent-ils jamais le jour où tout le monde se lave ?
-Pour une raison toute simple Emerelle. Regarde leur taille, regarde la tienne. Déjà que les tiens vous n’êtes pas grands en temps normal, mais toi tu es encore plus petite. Ce n’est pas contre toi, et tu le sais, mais tu es juste trop petite pour qu’un homme puisse te désirer. J’en suis terriblement navrée, car tu mérites de connaitre l’amour… Mais il faudra utiliser une autre arme que ton corps. »
C’est après cette entrevue qu’Emerelle prit conscience de quelque chose qui allait la hanter jusqu’à la fin de ses jours. « Tu es trop petite, trop petite, trop petite… » Ces mots raisonnaient en elle comme une chorale. Elle était trop petite. Elle ne serait jamais totalement acceptée, parce qu’elle était trop petite. Trop petite. Et cela, elle ne pouvait rien y changer, elle le savait. Elle se rappela alors de sa période d’esclave. Certains ne l’appelaient pas Bonne à rien, mais l’appelaient Petite, même quand elle avait grandi. A l’époque, ceux-là étaient ses meilleurs amis. Mais maintenant ? Elle ne pouvait s’empêcher de leur en vouloir. Déjà à l’époque, on la jugeait uniquement sur sa taille… Elle ne pouvait la compenser qu’en relevant sa beauté déjà existante, comprit-elle alors.
Cela renforça sa coquetterie. Mais désormais, elle ne laisserait plus personne l’appeler « petite ». Si certains marins le faisaient encore, elle les pria bien vite de l’appeler Emerelle. C’est à partir de ce moment-là qu’elle ne supporta plus que l’on lui fasse remarquer sa taille.
Mais malgré cela, elle était heureuse. Elle avait trouvé une famille qui, croyait-elle, l’accueillerait jusqu’à sa mort.

Mais Finil est volage, et tout changea à nouveau.
C’est lorsque vint la grossesse de Brecianne Leocadas qu’Emerelle comprit que tout allait bientôt changer. En effet, elle avait raconté à une occasion que sa mère était sage-femme, et, exagérant ce qu’il s’était passé, dit qu’elle lui avait montré comment aider à une mise au monde. Bien sûr, elle avait totalement déformé la réalité, ne se rappelant elle-même plus très bien de ce qui s’était passé, et étant juste sûre qu’elle n’était pas entrée dans la pièce. Mais il était trop tard. Brecianne avait pris un amant, Brecianne était enceinte. Et elle attendait d’Emerelle qu’elle soit sa sage-femme si la naissance devait avoir lieu en haute-mer. Et celle-ci fit l’erreur d’accepter la demande, et de ne pas refuser.
La naissance, lorsqu’elle vint, fut en haute-mer. Pour Emerelle, ce fut une épreuve, car elle ne savait absolument pas quoi faire, et Brecianne en étant à son premier enfant, elle ne savait pas non plus comment tout cela se passait. Emerelle se contenta de faire semblant de savoir et de rassurer Brecianne lorsque celle-ci montrait des signes d’angoisse, mais elle-même était trop angoissée pour faire autre chose.
Heureusement, l’accouchement fut naturellement facilité. L’enfant était petit, et Brecianne était une femme forte. Mais lorsqu’il vint au monde, la capitaine s’endormit néanmoins rapidement, tandis qu’Emerelle enveloppait l’enfant dans un drap prévu à cet effet. C’est alors qu’elle entendit une voix qui l’appelait, venant de la fenêtre. Elle s’y avança, et, se penchant, découvrit la tête d’une sirène qui émergeait de l’eau.
« Halfeline, dit la sirène… Je suis ici au nom de ma maitresse.
-Et que veux ta maitresse, sirène ?
-Le paquet hurlant que tu tiens dans tes bras, répondit la femme poisson.
-Quoi ? Mais … Vous ne pouvez pas le lui prendre à sa mère quand même ! Laissez-moi au moins le lui en parler !
-Non, halfeline. Ma maitresse veut cet enfant, car il est le fils de son élue. Donne-le moi,et je le lui amènerais.
-Pour ça, dit Emerelle, il faut que je descende jusqu’à la mer… »
Choisissant de prendre le risque de tromper la sirène sur ses pouvoirs, Emerelle passa sur le pont, où elle fut accueillie par des marins heureux de voir le fils de leur capitaine, qui hurlèrent de protestation quand Emerelle leur raconta l’affaire de la sirène. Mais lorsqu’ils se penchèrent à leur tour par-dessus le bastingage, ils virent la tête de la femme-poisson, qui attendait tranquillement à côté du navire.
Alors, les marins décidèrent d’un commun accord de dire à leur capitaine que son fils était mort-né.
« On lui dira qu’on l’a immergé avant qu’elle ne se réveille, de peur qu’elle ne nous en empêche, suggéra Lilly. »
La proposition fut acceptée par tous, et rapidement, la sirène s’enfonça dans les profondeurs de la mer, l’enfant dans ses bras.
Est-il vraiment besoin de dire quelle fut la réaction de Brecianne Leocadas, lorsqu’à son réveil, elle demanda des nouvelles de son enfant ? Elle aurait pu tourner sa colère vers n’importe qui. Elle choisit sa sage-femme.
Emerelle fut débarquée à terre, avec pour ordre de ne jamais remettre les pieds sur ce navire. Elle avait avec elle sa male, qui contenait ses affaires personnelles. Ses armes lui avaient été reprises.
Elle fouilla la malle, à la recherche de ce qu’elle pouvait porter sur elle. Des bijoux, elle pouvait les mettre dans sa poche ou sur elle-même. Son nécessaire à maquillage, elle décida de l’abandonner… Elle trouva un rose au fond, écrasée par tout ce qu’il y avait dessus. Elle la prit, en se demandant ce que cela pouvait bien signifier.
Puis elle reconnut la rose.

C’est à cet instant que la folie commença à naitre dans l’esprit d’Emerelle. Avec la rose, tout ce qu’elle avait oublié lui revint en mémoire. Emerelle fille d’Elma et Knud, Bonne à Rien, et Emerelle la pirate. Trois personnalités différentes pour une seule personne.
Emerelle erra pendant plusieurs jours, ne sachant plus où est-ce qu’elle en était. Ses trois existences avaient pris fin. La famille qu’elle pensait avoir trouvé l’avait rejetée. Elle chercha un embarquement à bord d’un navire pirate, mais Brecianne avait pris ses dispositions pour qu’elle n’en trouve aucun.
Alors, Emerelle erra. Tout ce qu’il lui restait, c’était une part de ses trois personnalités précédentes. D’un côté, elle n’avait pas envie d’être pauvre. De l’autre, elle détestait les riches, surtout quand ils considéraient les autres comme inférieurs. Et finalement, elle ne supportait plus qu’on la rejette pour son physique.
Alors, elle cessa d’être elle-même, et se fabriqua un masque aux yeux du monde entier. Elle était Emerelle Firnstay, dame de noble extraction. Avec son peu d’argent, elle s’acheta de quoi passer pour ce qu’elle prétendait être, et était désormais de toutes les mondanités. Lorsque la nuit venait, elle volait ses hôtes, pour revendre ses bien mal acquis quelques jours plus tard, s’achetant de quoi s’embellir à nouveau. Personne ne devait savoir qu’elle était une voleuse. Personne. Tous devaient désormais penser qu’elle était une noble dame. Et cela marcha. Elle eut même un prétendant un moment, qu’elle éconduit, car il fit allusion à sa taille en disant « Malgré votre petitesse, vous êtes un véritable joyau ».

Puis cela changea à nouveau.
Un jour, elle croisa un champ de bataille. Sur ce dernier, des cadavres à piller. Alors qu’elle s’attelait à la tâche, elle fut remarquée par une étrange femme.
Elle était en train d’arracher une dent en or à un cadavre quand elle entendit une voix.
« Je peux aider ? demanda ladite voix. »
Elle fut tout d’abord surprise par cette intrusion dans sa vie quotidienne. La jeune femme était une humaine qui avait l’air musclé. Elle se promenait pieds nus sur le champ de bataille, ce qui étonna grandement Emerelle. Elle était plutôt belle. Elle avait d’étranges yeux violets, et des cheveux relevés en deux chignons pointus maintenus par des rubans assortis à ses yeux. Son corps fin bien que musclé était mis en valeur par sa tenue : en haut, une sorte de sous-vêtement noir qui formait le motif d'une araignée sur son dos, et un pantalon blanc, rose et violet ample la laissant libre de ses mouvements. Elle portait également des gants long violet foncé recouvert de mitaines renforcés roses, et des bracelets à pique noirs.
« Je n’ai pas besoin d’aide pour fouiller les cadavres, merci, dit Emerelle, alors même qu’elle peinait à arracher une dent en or.
-Je vois ça, dit l’étrangère, qui sans prendre en compte son avis, alla fouiller d’autres cadavres pour lui rapporter ses trouvailles. »
Ainsi, elles pillèrent ensembles le champ de bataille. Puis vint le moment où Emerelle estima son butin correct, et proposa à sa nouvelle amie d’aller boire un verre. Son projet était de s’en aller pendant la nuit. L’étrangère était une menace pure et simple. Parce qu’elle savait qu’Emerelle n’était pas une noble dame, mais une vulgaire mendiante qui pille les cadavres, Emerelle ne pouvait pas rester avec elle. Mais d’un autre côté, elle ne pouvait pas la tuer. Elle doutait d’être capable de mettre à mort une guerrière qui avait l’air aussi expérimentée.
Elles arrivèrent dans une auberge, où Emerelle proposa de boire un verre et de passer la nuit. Toutes deux se firent servir une pinte de bière.
« Tu vois, lui dit Emerelle, j’irais pas au bout de ce verre. Pas que je sois trop petite, juste que j’ai pas envie. »
L’étrangère, qui répondait au nom de Juri, acquiesça, avec le visage de quelqu’un qui savait pertinemment la vérité mais qui admettait la version d’Emerelle. Puis Juri lui fit remarquer qu’un groupe de mercenaires les observait, en leur jetant des regards qui en disaient long sur leurs envies.
« Tu crois ? demanda Emerelle, qui se sentait flattée. Allons les voir dans ce cas, qu’en penses-tu ?
-Tu es sûre ? demanda Juri.
-C’est pas eux qui vont me choquer. On les fait taire et on retourne boire. »
Elles s’avancèrent vers les mercenaires, sourire aux lèvres. Juri parla la première.
« On a remarqué votre manège, les garçons, dit-elle.
-Vous êtes subjugués par notre beauté ou quoi ? ajouta Emerelle, ironique.
-Ta copine oui, lui répondit un mercenaire. Toi ? T’es trop petite, dégage. »
Emerelle était à moitié ivre après toute la bière qu’elle avait déjà bue. Et elle détestait qu’on lui dise qu’elle était trop petite ?
« Répète un peu pour voir ? demanda-t-elle, en passant la main vers un couteau qu’elle avait dans le dos.
-Tu es trop petite pour être intéressante, désolé. »
Il ne pouvait pas plus mal parler. Avant qu’il n’ait eu le temps de dire ouf, Emerelle avait bondit sur la table, lui avait planté son couteau dans la main, pris sa tête, la frappa violement contre la table, et commença à l’étrangler.
« VAS-Y ! Répète encore ! Répète-le encore une fois ! Je te mets au défi de le répéter ! »
Elle hurlait à son visage, postillonnant copieusement, et ne se doutant pas que derrière, les trois mercenaires restant avaient tiré leurs armes, et que seule l’intervention de Juri, qui les combattait tous les trois à la fois, les empêchaient de mettre fin à ses jours.
« Excuse-toi tout de suite ! hurla-t-elle.
-Je m’excuse, essaya vaguement de dire le mercenaire, qui déjà étouffait.
-J’ai rien entendu !
-Je m’excu… »
Il ne terminerait jamais sa phrase.
« Crétin, marmonna Emerelle, les larmes aux yeux. »
Elle repartit vers sa pinte de bière, qu’elle se mit à boire à grandes gorgées.
« Euh Emerelle… dit Juri. Tu n’avais pas dit que tu ne boirais pas tout ?
-Je suis une grande fille, marmonnait Emerelle, tout en finissant sa bière.
-Oui c’est ça, murmura Juri, qui dût rattraper la halfeline qui tombait de sa chaise. Maintenant viens, on va se coucher.
-J’ai pas besoin que tu me portes, protesta Emerelle, qui essaya tant bien que mal de marcher, mais ne put faire plus de deux pas avant de tomber. J’suis une grande fille. Je peux le faire tout seul…
-Mais oui c’est ça, dit Juri, qui la souleva de terre et la porta jusqu’à son lit, en ignorant copieusement les marmonages d’Emerelle, trop ivre pour protester. »
Juri coucha la halfeline dans le lit unique de la chambre, et s’allongea à côté d’elle, s’endormant malgré les ronflements d’Emerelle.

Lorsque cette dernière se réveilla, son premier réflexe fût d’aller se passer la tête dans le puits de la cours, pour dégriser rapidement. Faisant ceci, elle vit arriver une quinzaine de cavaliers, lourdement armés, menés par l’aubergiste. Elle comprit de quoi il en retournait. Il était vrai qu’elle et Juri avaient légèrement tué quatre personnes hier soir.
C’est à cet instant qu’elle eut le choix. Elle pouvait encore s’enfuir, laissant Juri se faire tuer par les hommes, ou elle pouvait aller réveiller sa nouvelle compagne. Le calcul fut vite fait. Emerelle était devenue calculatrice, mais pas ingrate pour autant. Elle devait une vie à Juri, qu’elle alla donc réveiller rapidement.
Mais tandis qu’Emerelle se préparait à fuir par la fenêtre, attendant que les hommes entrent dans l’auberge, Juri, elle, se prépara au combat.
Emerelle s’enfuit, la laissant combattre. Après tout, elle ne lui devait qu’une seule vie, pas deux.  Mais elle fut surprise d’être rapidement retrouvée par une Juri couverte de sang, qui lui demanda pourquoi fuyait-elle. Lorsqu’Emerelle lui fit remarquer qu’il y avait quinze hommes prêts à les tuer toutes les deux, Juri l’emmena à l’intérieur de l’auberge, où Emerelle découvrit un véritable carnage.
« Peux-tu me laisse seule… demanda-t-elle, sous le choc. J’ai besoin de réfléchir. »
Et en effet, elle devait réfléchir. Juri serait une excellente protectrice, maintenant elle en était sûre. Mais d’un autre côté, pouvait-elle rester auprès d’elle ? Après ce massacre, elle lui semblait dangereuse même pour elle. Si elle n’arrivait pas à la maitriser ? A moins que…

Elle emmena Juri jusqu’à Kelvin, où le duc Medron donnait une réception. Il s’agissait pour elle d’une sorte de test. Elle allait voir si elle pouvait maitriser Juri. Si oui, elle marcherait à ses côtés longtemps. Si non, elle s’enfuirait à la première occasion. Amener Juri à la réception fut compliquée. Il fallut lui montrer comment faisait-elle pour se faire passer pour une dame, et donc faire passer Juri pour une dame, chose qui semblait la déranger.
Mais elles y arrivèrent néanmoins.
Emerelle vit tout de suite que Juri n’était pas dans son élément, aussi l’emmena-t-elle immédiatement dans la chambre qui lui avait été dévolue.
« Nous avons deux chambres, lui dit-elle. Mais je ne veux en utiliser qu’une. »
Juri n’eut pas le temps de réagir, car Emerelle se dressa sur le lit, pour se mettre à son niveau, et lui apposa ses lèvres sur les siennes. Juri répondit à cet appel, tranquillement, comme si cela était pour elle naturel. Ce qui suivit fut la suite logique du baiser. Emerelle essaya tant bien que mal de retirer la robe de Juri, mais cette dernière restait trop grande pour elle, et retira ladite robe elle-même, tandis qu’Emerelle, un peu vexée, gardait la sienne. Elle eut alors le loisir de contempler le corps nu de Juri. Elle avait vu des femmes nues sur le pont du navire, mais aucune n’égalait en beauté sa nouvelle compagne, qui déjà lui rendait son baiser, retirant aisément la petite robe de la halfeline. Juri s’allongea sur le lit, prenant Emerelle par-dessus elle. Les deux échangèrent des caresses et des baisers à ne plus que savoir en faire. C’était la première fois d’Emerelle, et elle n’en savait rien pour Juri, mais elle n’avait pas l’intention de le lui avouer. Lorsque vint l’orgasme, elle l’accueillit sans faire attention aux gémissements qu’elle poussa. Elle pouvait sentir les seins de Juri entre ses cuisses, conséquence immédiate de de sa trop petite taille, mais qu’importait ? Juri également semblait y prendre un certain plaisir, dès lors…
Plus tard, lorsque Juri s’était endormie, Emerelle réfléchit. Juri l’aimait-elle ? Si cela était vrai, alors pour la première fois depuis ses huit tours, elle avait trouvé quelqu’un à qui elle pouvait se confier. Elle remua dans le lit, allant sortir de sa robe la rose de Tavish, qui n’était toujours pas fanée. Etait-il possible qu’elle puisse se confier à Juri, lui dire tout ce qu’elle avait sur le cœur ? Elle s’endormit sur ces pensées agréables.
Lorsqu’elle se réveilla, elle chercha instinctivement le bras de sa mère, et pour la première fois depuis des tours et des tours, elle trouva un bras là où elle le cherchait. Juri l’avait enlacée dans son sommeil, dans un geste protecteur. Emerelle dût se retenir pour ne pas pleurer. Elle réalisa son erreur. Elle aurait voulu dire à Juri qui était-elle, mais elle ne pouvait pas. Juri était tombée amoureuse d’Emerelle la pilleuse de cadavres, qui se faisait passer pour une noble. Elle rejetterait sans aucun doute Emerelle, la jeune femme qui avait besoin d’être aimée, qui n’aspirait à rien d’autre que la paix et la sérénité. Elle trouverait ce besoin avec Juri, elle en était certaine. Mais à quel prix ? Elle ne pouvait pas être elle-même pour aimer Juri.
« Je suis morte, mumura-t-elle. »
Emerelle Firnstay était morte. Il n’y avait plus ici qu’une noble. Une fausse noble. Mais une fausse noble aimée. C’était tout ce qui lui importait.
Lorsqu’elles repartirent de Kelvin, elle avait sérieusement pensé à laisser sa rose dans la chambre, mais elle y avait renoncé. Même si cela la déchirait, même si cela représentait la façon dont elle basait son bonheur sur un mensonge, elle ne pouvait pas laisser cette rose derrière elle. Cette simple fleur représentait tout ce qu’elle était réellement, tout ce qu’elle aurait dû être…

Emerelle parcourut ainsi le continent pendant des lunes et des lunes avec son amante et garde du corps. Récemment, elle fut cependant capturée au cours d’une embuscade par des elfes noirs…
Dim 17 Mai 2015 - 22:24
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Kyu
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