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[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer
Abad El Shrata du Khamsin
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Sacha:

'' Attrapez les !! '' dit le plus grand des gardes en pointant les deux adolescents qui détalaient en se frayant un chemin dans la ruelle bondée.
Sacha courrait à toute vitesse, donnant de violents coups d'épaules à la populace qui se mettait en travers de sa route. Il décimait derrière lui des fruits qui tombaient de la cagette remplie à raz bord qu'il avait volé sur le marché avant de prendre les jambes à son cou.
'' Par là '' cria-t-il en s’arrêtant au tournant de la ruelle sur sa gauche.
''Allez ! Allez ! On se magne '' dit il en direction de Phadransie puis, à peine lui était-elle passé devant, qu'il donna un coup de pied dans un monticule de tonneau de rhum qui dégringolèrent et s'éclatèrent par terre en bouchant l'entrée de la rue dans un flot d'alcool.
Il ricana et voyant les gardes s'approcher et repris sa course de plus belle suivant la longue chevelure de jais devant lui avant de disparaître dans la foule.

*

Au bout d'un moment, ils débouchèrent dans une rue déserte et enjambèrent les fondations d'une maison réduite en cendre. Un peu caché parmi les décombres se tenait un petit garçon blond, de 11 ans tout au plus qui crapotait une cigarette roulée. A sa gauche reposait une grosse plaque de taule, qui cachait l'entrée de leur Quartier Général.
'' Le mot de passe , dit l'enfant tandis que que Sacha et Phadransie arrivaient à leur niveau, les bras chargés de provisions.
Sacha esquissa un sourire, posa sa cagette sur le sol puis lui tira une droite qui lui fit cracher sa cigarette :
'' On a passé l'âge de donner le mot de passe à l'abruti de service qui garde l'entrée, le nouveau. Ramasse cette clope '' dit -il en désignant l'objet d'un signe de tête.
La petit s'exécuta et tandis qu'il la remettait à la bouche. Sacha lui prit des mains, tira une bouffée puis lui envoya une gifle qui le jeta à terre :
'' Tu fumeras le jour ou tu sauras comment fumer. Ah ces jeunes il faut tout leur apprendre ! ''
Il poussa la plaque de taule qui faisait office de trappe, la cigarette toujours au bec, reprit en mains sa cagette et descendit l'échelle d'une main, tenant la cagette appuyée contre son torse de son autre main.
La salle plongée dans la pénombre était remplie d'une quarantaine d'enfants, âgés de 8 à 17 ans, assis dos au mur sur des coussins défoncés ou discutant debout au milieu de la pièce. C'était là que se réunissaient les orphelins de Port Argenterie, ceux dont les parents avaient oubliés leur existence, ceux dont la vie n'avait pas fait de cadeaux, ceux qui devraient tout apprendre par eux même.
Tous les regards se tournèrent vers eux tandis qu'ils marchaient vers le fond de la salle. Quelques exclamations se firent entendre, puis quelques sifflements par ci par là et enfin des applaudissements remplirent la pièce. Sacha et Phadransie se pavanèrent fièrement, tenant leur précieux butin bien serré entre leurs mains.
Sacha posa sa cagette sur un tonneau faisant office de table basse et s'affala comme un pacha sur un matelas défoncé qu'ils avaient trouvé dans les poubelles du port quelques jours plus tôt, tout en tirant théâtralement de grands bouffées de cigarette.
''Waouh les gars, comment z'avez fais pour s'choper un truc auss'chi gros qu'sh'ça ? demanda avec excitation un petit garçon rouquin à la coupe au bol et aux taches de rousseur avec un cheveux sur la langue.
''Oh, ça n'a pas été une partie de plaisir, on a du couper quelques gorges, abattre quelques gardes dans le dos, mais maintenant on est habitué hein Phadr, dit il en reniflant.
- On est passé maître, repondit-elle en posant à son tour sa cagette sur un des tonneaux.
On entendit des ''Waouh'' s'élever parmi les plus jeunes, et des soupirs d'exaspération parmi les plus vieux. Les premiers les regardèrent avec admiration tandis que les autres levèrent les yeux au ciel.
Phadransie se saisit d'une pêche bien mure qu'elle croqua à pleine dents, les yeux à demi clos et libérant un flot de jus sucré qui dégoulina le long de son menton. Tous la regardèrent avec envie.
Quand elle se rendit compte que tous les regards étaient pointés sur elle, elle essuya son menton d'un revers de manche avant de déclarer
'' Bah servez vous bande d'enculés, c'est fait pour ! ''
Tous se jetèrent sur la cargaison, bien sur les plus grands se servirent en premier, virant les plus petits d'une revers de main, petits qui se battirent ensuite entre eux pour être les premiers dans la queue.
Cependant Sacha ne participa pas au festin. Il fixait les trois jeunes, un peu plus vieux que lui bras croisés et appuyés contre le mur au fond de l'autre côté de la pièce et qui soutenaient son regard avec défi. Il posa son mégot dans le cendrier à ses cotés et lança un regard à Phadransie qui le comprit immédiatement. Il se leva et ils allèrent ensemble à la rencontre de l'autre groupe.
Sacha âgé de 15 ans et Phadransie de 14 ans n'étaient pas les plus vieux du groupe et pourtant c'étaient sans aucun doute les plus respectés, et ça ça ne plaisait pas à tout le monde, surtout au trois caïds de 17 ans qui se trouvaient maintenant à leur niveau.
Celui du milieu s'appelait Tony, ses deux gorilles de collègues Marco et Kévin.
'' Vous ne participez pas au festin les gars, lâcha Sacha en s'approchant les bras grands ouverts, suivit de Phadransie qui continuait de croquer dans sa pêche tout en soutenant le regard des trois balourds.
Depuis quelques temps, tout ce qu'elle faisait avait pris un côté sensuelle, et Marco ne pouvait s’empêcher de regarder le jus de pêche qui dégoulinait des commissures de ses lèvres avec envie et excitation.
Tony lui envoya une tarte sur le crâne qui le sortit de ses rêves érotiques :
'' Non, on a pas très faim, répondit-il.
- C'est bizarre ça, dès que Phadr et moi ramenons de la bouffé, vous perdez l’appétit.
- C'est qu'on ne mange pas ce qui a touché à la merde.
- C'est pas ce que disait ta de mère avant de sucer en tout cas, dit Sacha en serrant son entrejambe.
L'autre mit quelques secondes avant de comprendre puis il se jeta sur Sacha, mais il fut retenu de justesse par ses deux abrutis d'acolytes.
Derrière eux, tout le monde avait cessé de manger et regardait la scène :
'' On t'embête Sacha ? demande le plus grand des jeunes, aussi large qu'une armoire.
- Non non, ça va, ça va, on discutait seulement entre amis, hein les gars ? dit-il en lâchant un clin d’œil à Tony qui se remit à gigoter avec force.
- Ce soir, on verra qui d'entre nous est le meilleur voleur, cria- il en pontait Sacha du doigt, les dents serrées.
-J'attends de voir ça '' répondit Sacha en ricanant avant de retourner vers le groupe.
'' Allez les gars amusez vous, ce soir c'est la fête !'' dit il en se jetant une nouvelle fois sur son matelas et en reprenant sa cigarette la ou il l'avait arrêtée, fixant Tony d'un regard supérieur.

*

La nuit était tombée à présent, Sacha demeurait allongé sur son matelas, Phadransie non loin à côté de lui. Ils gardaient les yeux ouverts pendant qu'autour d'eux s'élevaient les ronflements des premiers endormis
'' On a fait fort aujourd'hui hein Phadr, murmura Sacha, les yeux fixés vers le plafond.
- Ouais ... Sacha ? demanda-t-elle après quelques secondes.
- Ouais.
- Demain c'est ...
- Ton anniversaire, je sais, fini-il calmement.
Phadransie déglutit.
- Et tu sais qu'aux premières lueurs du jour, j'irai poser ma signature dans le carnets des engagés en mer.
- Quel est ton plus grand rêve Phadransie ? demanda Sacha, tournant la tête vers elle et la regardant droit dans les yeux.
- Mourir en mer, répondit-elle sans réfléchir.
- Alors tu sais ce qu'il te reste à ...
- Viens avec moi, le coupa -t-elle, tapant main à plat contre son matelas.
Elle avait parlé un peu trop fort et quelques maugrements se firent entendre. Sacha resta silencieux, fixant les grands yeux noirs de Phadransie.
- Non Phadr, dit Sacha qui se remit à regarder le plafond. Ma place est ici, je dois veiller sur mes poulains maintenant, il leur faut un leader et ... je pense que j'ai ça en moi.
-Alors demain nous ...
- nous ferons nous adieux ; oui, dit il en se tournant.
Tout à coup, l'ado qui avait pris la ronde de nuit, fit pivoter la plaque en taule dans un vacarme qui reveilla tout le monde. Sacha se redressa brusquement, le regard levé vers l'autre :
- Les gars on a un problème ! Tony s'est fait choper et il rammène les flics droit sur la planque !
- Quoi ?! cria Sacha en se relevant d'un bond. Quel Abruti, dit-il en plaquant la main contre son front, puis, se tournant vers les autre : Allez vous avez entendu Alex, tout le monde dégage ! Allez cassez vous de là ! Vite !
Un vent de panique se propagea dans toute la cave et tout le monde se leva d'un trait. Les enfants coururent dans tout les sens et se durent se frayer un chemin à coup de poing pour gagner le peu de sortie que comptait la planque.
Sacha et Phadransie se dirigèrent vers l'entrée principale, celle qu'ils avaient empruntés pour rentrer un peu plus tôt. Sacha se placa à côté de l'échelle et fit monter les jeunes à grand coup de tape dans le dos
'' Allez Allez on se bouge ! ''
'Allez Phadr à toi '' dit il avant de grimper à son tour.
Quand ils sortirent la tête dehors, c'était la débandade. Des jeunes essayaient de sauter par dessus les murets donnant sur les rues parallèles . Certains se firent rattraper en vole par les gardes qui les jetèrent au sol avant de les rouer de coup de pied. Tout à coup, il aperçut au mileu de la foule le garde qui les avaient poursuivis, lui et Phadr un peu plus tôt. Il lui foncait dessus. Il n'eut pas le temps de réagir qu'il fut éjecté dans les airs avant d'attérir avec fracas sur le dos.
L'homme s'approcha et le saisit par les cheveux
'' Alors comment on se retrouve blanc bec !
'' J'invoque la première règle de Confrérie des Pirates de Port Argenterie !!'' hurla Sacha, un filet de sang giclant hors de sa bouche.
Lun 8 Juin 2015 - 23:22
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Noire
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Ce RP se situe plus de 7 Tours avant la rencontre entre Phadransie La Noire et Brecianne Leocadas.


[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Phadra10


Phadransie s'était élancée droit devant elle, sans chercher à tenter quoi que ce soit d'autre que sauver sa peau. Autour d'elle, déjà, les gamins tombaient comme des insectes nuisibles que les adultes cherchaient à écraser, exterminer sans attendre. Elle voyaient les plus jeunes, âgés de même pas dix tours, se faire prendre à coups de pieds dans les côtes, et ceux ci ne cessaient pas de tomber malgré leurs supplications, et en vérité, elle le savait, ceux là ne cesseraient plus jamais pour eux.

N'étant pas armée, Phadransie avait préféré éviter une quelconque confrontation avec ce qui s'apparentait le plus à la garde locale de Port-Argenterie. Elle avait vu Sacha se précipiter lui aussi, et avait fait de même. Ici, la survie était une lutte quotidienne. Connaissant très bien les quartiers mal famés que ses pieds nus foulaient, la jeune fille n'eut pas besoin de beaucoup réfléchir pour ruser. Elle rusait à son aise, et empruntait telle ou telle ruelle sachant pertinemment où elle aboutissait, et quelle serait la ruelle suivante qu'elle emprunterait, où elle conduirait, et ainsi de suite. Un coup de feu retentit soudain derrière elle, passant à quelques centimètres de son oreille. Elle l'avait bien entendu. Phadransie maudit les gardiens, ces ivrognes ! Ivres, ils visaient mal. Mais ça n'était pas ça le problème. Même ivres, ils courraient vite, peut être pas plus qu'elle, mais presque tout autant. Et pire, même ivres, ils avaient des armes, eux. Des pistolets, des tromblons, qui plus était. Un second coup de feu fit grimper en flèche l'adrénaline dans ses veines. Phadransie accéléra, elle se jeta sous une palissade, roula dans une rue merdeuse, se fichant des merdes et des nappes de vomis qui lui faisaient comme une couverture, et la coupa transversalement. Elle percuta un homme qui semblait fort aisé, tricorne sur la tête et sabres aux côtés, mais n'avait pas le temps de le détrousser. Il lui semblait bien que ses postulants ne la collaient pas aux basques. Elle avait un peu d'avance. Elle évita de justesse le corps d'un homme, soit ivre mort, soit mort tout court. Les duels au premier sang ou les règlements de comptes ne manquaient jamais ici, à Port-Argenterie. Enfin, elle zigzagua entre les femmes à demi nues qui s'élevèrent sur son chemin, et passa la porte du premier bordel qu'elle repéra.

Phadransie prit quelques secondes afin de recouvrer une respiration tout à fait normale. Elle était dans une sorte de salon, pas très grand, entouré de rideaux, d’étoffes et de tentures de moindre qualité, entourant des couples assis sur plusieurs fauteuils, d'encore moindre qualité, eux, songeait Phadransie. Une femme qui ne devait pas dépenser les trente tours lui sourit, et se leva du fauteuil en cuir sur lequel elle reposait. Tout en elle, de sa démarche jusqu'à son sourire envoûtant, en passant par sa longue chevelure blonde comme les blés, son regard bleu azur et ses doigts fins, longs et impeccables, se mêlant les uns aux autres, évoquait l'artifice. Elle sourit à Phadransie. Cette dernière ne le lui rendit pas. On ne sourit pas aux putes.

-Je ne resterai pas longtemps cette fois, dit elle froidement en regardant dans les yeux la femme.
-Encore des ennuis ma belle.
-Mais non !

Entendant les voix graves et visiblement peu satisfaites derrière elle, Phadransie monta quatre à quatre les marches menant à l'étage de l'établissement.

-Retiens les dans les chambres, Galia, je partirai.
-Nous sommes complets Phadransie, souffla la femme en affichant un air las.
-Je partirai, répéta Phadransie en entrant dans une des chambre à l'instant où la porte du rez de chaussée s'ouvrait dans un tapage.

Phadransie colla son oreille contre le bois amoché de la porte. Elle ne comprenait pas tout mais l'essentiel. Elle faisait confiance à Galia. Elle avait horreur de devoir faire confiance à d'autres, mais elle n'avait pas le choix dans sa situation. Et puis, après tout, Galia lui avait sauvé la mise plus d'une fois, deux ou trois, peut être. C'était la maîtresse de ce bordel.
Dans la chambre, deux femmes toutes occupées à leurs affaires qu'elles étaient, ne l'avaient pas remarquée. Phadransie savait que l'une des deux était une pirate. Elle le reconnaissait au tatouage en forme de P, au dessus d'un navire au voiles déchiré, étalé sur son dos. Elle le reconnaissait aussi à son paquetage, jeté à même le sol. Il y avait là du bel acier, songea-t-elle. Trois tromblons, un sabre, un poignard. Phadransie s'approcha furtivement, elle tendit la main. Si seulement je pouvais posséder un tromblon, un vrai. Rien qu'à moi. Au moment où ses doigts allaient se reposer dessus, elle fut interpellée par la pirate qui repoussa derrière sa nuque son épaisse chevelure brune. Elle la foudroyait du regard.

-Hé ! Qu'est-ce que tu fous salope ? Touche pas à ça !

Ne voulant pas s'attirer des problèmes supplémentaires, Phadransie s'éloigna d'un pas de ce paquetage ci.

-Je voulais juste regarder.
-Ouais c'est ça, glapit la pirate. Sans déconner tu as rien de mieux à faire ? Tu t'appelles comment ?
-Phadransie, répondit-elle.

Elle ajouta en voyant que la pirate semblait se radoucir en l'observant.

-Mais je ne suis pas une pute.
-Sans blagues ? Alors tire toi de là siresse de merde avant que je ne te plante une balle en pleine tête.

Phadransie jugeait plus sage d'obtempérer. De toute façon elle ne comptait pas rester. Le rez de chaussée était calme, et il n'y avait plus de trace de ses poursuivants. Phadransie courut afin de quitter au plus vite l'établissement quand une main ferme la saisit par le poignet. Elle prépara sa riposte, prête à mordre ou décocher un coup de pied à celui qui allait lui faire une ou deux propositions écœurantes, mais son geste cessa. C'était Galia. Qui la relâcha aussitôt d'ailleurs.

-Tu comptais aller où encore ?
-J'ai à faire.
-Sans déconner Phadransie. J'ai un commerce à gérer moi, j'ai plus de trente putes sous mon aile, des clients par groupe de dix, parfois vingts. Je n'ai pas que ça à faire de sauver tes petites miches. Tu n'as aucune idée des types qu'il m'arrive de ramasser. Cet établissement a même vu des Élus lui rendre visite.
-Je m'en branle des élus, moi.
-Tu sais, si tu décidais de rester ici, travailler pour moi, tu pourrais accomplir des prouesses...d'un autre genre, termina-t-elle en cherchant soigneusement ses mots. A condition que tu arrêtes de traîner dans la merde, ajouta Galia en dévisageant ses vêtements, tu serais vite ma meilleure gagneuse, j'en suis persuadée.
-Non, j'ai pas envie. Je ne suis pas une pute.
-Non c'est vrai, pour l'heure tu es de la vermine. Ca n'est pas vraiment mieux considéré tu sais. Les putes on leur donne de l'argent, à défaut de respect. La vermine ils n'ont que du mépris car ils nous dépouillent.
-Ca changera vite, s'enflamma Phadransie. Demain j'aurai quinze Tours, je prendrai la mer ! Je pourrai m'inscrire dans les registres, rejoindre un vrai équipage, naviguer pour de vrai sur un vrai bâtiment de guerre. Je vais devenir pirate, une écumeuse des Grand'Eaux !
-Qu'Ariel t'exauce, lui sourit Galia d'une manière presque tendre.
-Au fait, tu n'as pas vu Sacha ?
-Sacha ? Ton acolyte ? Pourquoi l'aurai-je vu ici ?
-Le QG s'est fait baiser, il a fui en même temps que moi. Bon c'est pas grave, laisse tomber.

Phadransie ouvrit la porte.

-Donc c'est un au revoir je présume, dit Galia. Mais n'oublie pas ma belle, si la vie de pirate ne te convient pas, j'aurai sans doute une place pour toi ici.
-Plutôt crever.

Phadransie claqua la porte derrière elle.


*

Phadransie porta à sa bouche un peu de tabac, tout en arpentant le port. L'aube était levée depuis à présent plusieurs heures. Elle rêvait des Grand'Eaux depuis son plus jeune âge. Elle se laissait bercer par le son des vagues emportant son esprit au large, toujours plus loin à l'horizon. L'air marin la grisait. Elle avait déjà dit à Sacha que c'était encore mieux qu'être raide bourré. Lui ne comprenait pas ça. Elle en était désolée. Elle aimait beaucoup Sacha, mais elle allait devoir suivre sa propre voie à présent. Elle aurait voulu lui dire au revoir avant d'embarquer. Sacha devrait savoir qu'il la retrouverait au port. Elle était toujours au port de toute façon. Alors pourquoi ne l'avait-il pas encore rejointe ? Devait-elle se mettre à sa recherche ?

Elle aimait à emplir ses yeux de toutes ces silhouettes tellement singulières, toutes si différentes. Il y avait les clochards, les ivrognes, les putes, les prêtresses, les pirates et les capitaines. Elle fantasmait sur le fait de pouvoir porter un jour un Tricorne noir, et avoir son propre Navire. Lorsqu'elle jouait au jeu de l'abordage, étant plus petite, qui consistait à renverser dans le port deux chaloupes et fixer sur leur sommet un drapeau, elle gagnait toujours, était la plus rapide, la plus habile parmi son équipage d'infortune. Elle désirait aborder pour de vrai à présent. Elle avait déjà tuer auparavant, mais uniquement pour se défendre. A Port-Argenterie, il fallait apprendre à tuer, ou être tué. Dorénavant ça serait elle qui lèverait son épée en premier. Elle se voyait déjà hurler sur le pont ennemi, épée en main. Elle terrifierait ses adversaires, elle serait la mort personnifiée. Elle leur prendrait tout. Leur vie, leur or, leur âme. Elle faisait souvent des rêves ainsi.

Elle avait hâte de ne plus rêver, et vivre !

Mais Sacha ne lui avait pas dit au revoir. Sacha ne lui avait pas dit au revoir, et ça, ça l'embêtait et ça minait ses projets. Résignée, Phadransie fit demi tour, à la recherche de son acolyte. Elle gardait les yeux fixés sur les navires amarrés. Ceux qui était immobiles, ceux qui arrivaient, ceux qui partaient. Ceux qui partaient la fascinaient. Ces voiles que le vent gonflait, ce pavillon tendu, claquant. Ces ordres que les Capitaines hurlaient. Les hommes torses nus qui s'activaient à l'appareillement. Phadransie allait encore devoir attendre un peu avant de vivre cela. Elle écrasa sa feuille de tabac sur le port et cracha.

-Sacha, espèce de fils de pute.

Elle voulait lui dire au revoir.
Mar 9 Juin 2015 - 1:55
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Abad El Shrata du Khamsin
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Abad El Shrata du Khamsin
La cellule dans laquelle ils l'avaient jeté était plongé dans la pénombre et sentait le moisie, au final ça ne le changeait pas trop du Quartier Général.
Tout à coup la porte en bois s'ouvrit à la volée devant lui.
'' Ah bah c'est pas trop tôt, dit Sacha en s'approchant du garde qui avait ouvert la porte.
PAF ! Il se prit une méchante gifle qui lui fit regretter d'avoir voulu faire le malin.
'' On va t’escorter jusqu'au Bureau des Enregistrements, l'avorton. Si tu ne fais ne serais-ce qu'un pas de travers, t'es mort, c'est bien compris ? dit le garde sur un ton menaçant.
- Compris, répondit Sacha essuyant le sang de sa blessure à la lèvre que le garde avait rouverte.
Ils lui passèrent les menottes et l'accompagnèrent le long du couloir qui menait à la sortie de la prison. Dans les cellules, uniquement des enfants, beaucoup provenant du QG, les seuls qui ne pouvaient pas payer leur sortie en marchandant avec un garde véreux. Sacha regardait ses pieds, il ne voulait pas croiser leurs regards.

*

Arrivé sur le port, Sacha fut conduit jusqu'à un bureau, devant lequel une dizaine de personne à l'air louche faisaient la queue. Finalement, la file avança vite et en quelques secondes, il se trouva face au vieux secrétaire à l’œil de verre qui se chargeait des registres, qui écrivait quelques mots dans un énorme livre quadrillé.
'' Nom ? demanda-t-il sans même l'avoir regardé.
- Aucun.
- Prénom ?
- Sacha.
- Âge ?
- 15 ans.
- Profession ?
- Voleur.
Le vieillard leva un œil vers lui, le seul qui lui restait puis il reprit.
- Le seul navire dans lequel il reste de la place est le Grand Val, il fallait venir plus tôt. Tu peux émarger, dit-il en lui tendant sa plume d'oie et en tournant le grimoire vers lui.
Sacha s'en saisit et regarda un instant l'immense livre qui se dressait devant lui, l'air perplexe. Les livres l'avaient toujours effrayé, les lettres se mélangeaient dans sa tête. Quand le vieillard s'en aperçut, il pointa la ligne où il devait signer de son doigt cagneux
- Là, juste sous cette Phadransie, si tu ne sais pas écrire, tu peux simplement faire une croix. ''
'' Phadransie ?! '' le nom avait résonné dans sa tête comme un coup de feu au moment où il traçait les deux barres obliques.
Mar 9 Juin 2015 - 19:58
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Noire
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Sacha t'es vraiment qu'un connard, un fils de pute voilà c'que t'es ! Sans déconner c'est trop te demander de réussir à fuir une bande d'ivrognes, ce ne sont que des sacs à merde. Et toi t'as pas été fichu de leur échapper ! Maintenant tu vas crever en prison, comme une merde Sacha, et moi je vais partir en mer, voilà ! C'est pas la peine de m'en vouloir l'ami, t'aurais dû prendre exemple sur moi : courir. Etait-ce si difficile de prendre ses jambes à son cou  ? Tu comprends vraiment rien à rien enculé. C'est pas grave Sacha, on ne se reverra plus jamais. Je vais devenir pirate, et toi tu vas mourir en prison, comme un crevard. Enfin, moi ça m'embête de te laisser crever comme ça, tu vaux mieux que ça. Donc tu sais ce que je vais faire ? Je vais devenir riche. Je vais devenir une pirate riche et redoutée, et quand je ferai escale à Port-Argenterie de nouveau, je viendra sauver ta peau. Ta peau de p'tit merdeux, mais ça fait rien, t'es quand même un bon pote, Sacha. A Port-Argenterie de toutes façons pour s'en sortir, suffit d'être riche. Je serai riche du coup, pour ça. Pour toi, mec.

« Tu peux pas faire attention gamine ?
-J't'avais pas vu c'est bon soûle pas.

Phadransie s'écarta du nain trapu qui venait de la percuter sur la jetée. Perdue dans ses pensées, son monologue mental du moment, elle ne l'avait pas vu venir, et quand elle l'avait vu, il était déjà trop tard pour s'écarter de sa route, parce que d'une manière ou d'une autre il allait la percuter. Phadransie le laissa passer, il lui expédia un regard noir qui devait vouloir signifier quelque chose comme : « Va crever » et Phadransie lui rendit le même regard, mais encore plus noir, ce qui était toujours assez impressionnant avec son jeune visage. Son regard à elle, il signifiait « Va crever, puis va te faire violer en enfer » Ou quelque chose se rapprochant de ça.

Phadransie avait passé plusieurs heures à chercher Sacha dans tout le bordel qu'était Port-Argenterie, et elle ne l'avait pas retrouvé. Donc il était en taule. Donc elle ne pouvait pas l'attendre. Elle était retournée sur les quais, et avait demandé à prendre la mer.

-Je serai pirate, avait-elle craché à la figure du type qui s'occupait des registres, un vieux qui puait l'alcool et la sueur, et qui avait un œil de verre.

Phadransie était habituée à croises des borgnes ou des estrophiés dans les rues d'Argenterie, mais elle était toujours autant écoeurée en songeant à ce que devait être la perte d'un œil où d'un membre. Elle ne connaissait pas vraiment la guerre. Elle ne savait pas ce que c'était que de devoir faire des concessions, renoncer pour toujours à un bras, ou une jambe, en échange de sa vie. Toujours était-il que le viellard ne semblait pas complexé du tout, il avait pris son nom, qu'elle connaissait : Onda. Un nom de pirate. Un nom qu'elle ne portait jamais, mais qu'elle connaissait, car depuis toute petite on la pointait du doigt sur les quais du port en clamant : « Oui, c'est bien elle, la morveuse d'Anduse Onda. »
Son nom ne signifiait rien pour elle, mais quand on lui avait demandé, elle l'avait révélé machinalement. Voilà. Phadransie Onda. Ca ne voulait rien dire, c'était comique même à prononcer. Non, elle, ses potes la connaissaient sous le nom de Phadransie Toutcourt. Ou Phadr parfois. Ca lui convenait très bien. Elle vomissait ses parents.

-Je serai pirate, avait-elle dit avant d'ajouter fièrement : et j'aurai un vrai nom de pirate un jour.

Le viellard à l'oeil de verre avait haussé un sourcil en marmonnant une injure, à n'en pas douter, puis lui avait demandé de signer. Elle avait tracé une croix tremblante. C'était la première fois de sa vie que Phadransie tenait une plume.

-C'est bon, ça suffit de toute manière, avait-elle dit.
-Ouais, ça ira gamine. Le Grand Val appareille bientôt, tiens toi prête. »

Prête ? Cela faisait 15 Tours que Phadransie l'était.  

Le Grand Val était un soixante quatorze canons. Il possédait de larges voilures, taillées en carré qui lui faisaient comme une chevelure de femme, selon Phadransie. Il avait une capacité d'accueil de près de cinq cent membres d'équipages, et trainait derrière lui une sanglante réputation, faisant feux de tous bois. Phadransie resta plantée là, sur le port, durant plusieurs minutes à contempler son futur chez elle. Le Grand Val. Rien que le nom avait de l'allure à ses yeux. Grand.

[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Grand_11

La passerelle était déployée. A tous vents, y montaient et y descendaient des marins de toutes races, tout âges et toutes carrures. Le Grand Val était également réputé pour la diversité de ses membres d'équipages. Phadransie distingua des halfelins, une halfeline, un groupe de gobelins et même un nain.

« ...et le Capitaine du Val est un Elfe Noir, disait à côté d'elle deux marins humains barbus. De mémoire d'homme, personne n'est capable à ce jour de dire depuis combien de temps il arpente Argenterie lorsqu'il revient d'une course.
-Il doit être camarade de Tarenzione, ricanait son compère. Lui aussi il se balade sur le port depuis des générations.
-Penses-tu camarade ! Cet elfe là, il n'y a pas plus solitaire. Il ne parle à personne lorsqu'il est à quai, il paraît qu'il se montre jamais lorsque le Val est au large, ou uniquement lorsque abordage il y a. Tu parles chicot ! Ce diable là, c'est un putain de solitaire.
-Et pourquoi ça ? surenchérit le pirate.
-J'sais pas. Apparemment c'est un exilé parmi les Corsaires Noirs. Bien que plus noir que lui, ça doit être dur à trouver qu'je dis !

Ils rirent. Phadransie avait les yeux complètement scotchés sur le Grand Val, mais ses oreiles n'étaient pas closes, au contraire.

-Ah bah tiens, regarde qui voilà chicot !
-Qui ça ?
-Andelzzer. C'est le Capitaine du Val. Il va monter à bord j'imagine.

Phadransie se retourna immédiatement.

-Il a un prénom ton Andelzzer ? Demandait l'autre.
-Bai non, t'es con ou quoi l'ami ? C'est un putain d'elfe.
-Ah oui, c'est vrai. »

Phadransie alors, le vit, et sa seule vision subjugua tout son être, comme si elle venait de se heurter à la plus grande des vagues de Ryscior.

[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Lumino10

Le Capitaine était entièrement vêtu de noir, il ne portait pas de Tricorne sur la tête, mais une large capuche. Phadransie était entièrement soumise à l'attraction de son regard d'acier. Il portait trois longues épées aux côtés, chacune dans leur fourreau. Trois épées...Mais comment peut-il porter trois épées à la fois ? Il n'a que deux mains.
Le Capitaine avait une démarche directe, sure. Devant lui, les humains s'écartaient. Certains chuchotaient à son passage. Et pourtant, l'elfe tout de noir vêtu n'en avait cure. Son regard était braqué sur son Navire. Il savait où il allait. Il savait ce qu'il avait à faire. Phadransie comprit trop tard qu'encore une fois, elle n'avait pas reussi à prendre l'initiative de s'écarter au bon moment. Elle était désormais seule au milieu de la ligne droite reliant le Capitaine du Grand Val à la passerelle. Ce dernier s'arrêta à son niveau et baissa ses yeux d'un bleu glacial sur sa personne. A côté d'un tel personnage, Phadransie se sentait insignifiante. Elle avala sa salive, gênée, et s'ecarta. Il ne répondit pas, et continua son trajet. Le regard qu'il venait de braquer sur elle l'avait brûlée comme un tison incandescent. Ce fut l'une des premières fois de sa vie que Phadransie baissa les yeux. Elle mit plusieurs minutes à se remettre de cet échange muet, et faillit bien louper le départ du Grand Val. Elle embarqua, peu de temps avant que la passerelle soit remontée. L'équipage déjà s'activait. Les voiles furent affalées par de solides bras. Les écoutes réglées selon l'angle du vent. Phadransie vit les gobelins s'élancer dans les grééments, agiles et léger qu'ils étaient. Elle ne repéra pas de pavillon noir en revanche. Son regard enchanté s'arrêta un instant sur la proue du navire, et elle pu en détailler la figure. Un squelette taillé à même le bois, impressoniant par son réalisme, prédominait l'avant du bâtiment. Toutes ces nouveautés, tous ces événement faisait se sentir Phadransie toute chose.

« Tu fais quoi toi là ?

L'homme qui venait de l'interpeller la braquait de ses deux yeux gris, dominants une épaisse barbe rousse. Il devait avoir à la baisse au moins cinquante Tours, et devait peser pas loin de quatre vingt dix kilos. De bière, et de muscle, pensa Phadransie.

-Rien, répondit-elle.
-Et bien tu vas faire quelque chose ! Tu viens d'embarquer ?
-Oui.
-Tu m'appelles monsieur morveuse.
-Oui monsieur, soupira-t-elle.
-Tu as quinze Tours ?
-Ouais.
-Ok, on s'en va vous enseigner les bases de la navigation alors, avec les autres mousses là bas.
-Ah ?

Il avait pointé une direction de son doigt calleux, que Phadransie avait suivi du regard. Sept jeunes se tenaient debout sur le pont, l'air penaud, sous le regard sévère d'un colosse torse et pieds nus. Mais c'est en le voyant Lui qu'elle avait sursauté !

-Sacha !

Bousculant Barberousse, elle avait rejoint son camarade en trois foulées.

-Putain Sacha ! Qu'est-ce que tu fous là ? Je pensais que...Je pensais que...

Sans prévenir elle lui décocha une gifle en plein visage.

-Tu me fais chier ! J'ai cru que t'allais crever putain !

Elle allait surenchérir avec un coup de poing mais Barberousse l'arrêta. Il l'arrêta avec une gifle qui devait valoir au moins trois fois celle qu'elle venait de coller à Sacha. Son nez saigna et elle fut précipitée sur le pont. Barberousse serrait un cordage entre ses doigts qu'il fit claquer trois fois tout près de Phadransie, comme un fouet. Il lui ordonna de se relever, ce qu'elle fit non sans lui avoir balancé un regard des plus chaotique.

-Déjà la première chose que je vais vous apprendre avant que nous soyons au large, c'est que vous êtes des sous-merdes ici. Vous êtes tous une sacrée bande de branleurs qui viennent tout juste de poser les pieds sur le pont d'un Navire, ce qui fait de vous des...moins que rien, conclut-il après s'être donné le temps de la reflexion. Ca ne vous plait pas de l'entendre les mômes, je le sais, mais mettez vous bien ça en tête. Et puis il falait que ça soit dit. Ensuite la deuxième chose que je vous enseignerai c'est qu'en tant que moussaillons, vous devrez executer absolument tous les odres qu'on vous donnera, et ce sans réfléchir ou discutailler. Si vous protestez, si vous êtes lents à la manœuvre ou à la détente, si vous faites preuve d'indiscipline -son regard se posa sur Phadranse- ça sera le fouet la première fois, la cale la seconde et...la corde ou l'ancre autour du cou, selon le bon vouloir du Capitaine Andelzzer, la troisième. Ai-je été clair ?

Tous approuvèrent plus ou moins bruyamment.

-Laissez moi vous présenter Monsieur Cubitus. Cubitus parce qu'il en a déjà brisé plus d'un à la seule force de ces poings, alors jouez pas au malins avec le Quartier-Maître que voilà, moussaillons. Maintenant passons à "l'enseignement" :

Il pointa un à un chacun des jeunes gens du bout de sa corde.

-Toi tu vas assister le coq. Toi, toi et toi, vous me faites briller le pont de ce Navire. Toi rejoins le Maître voilier, il a pas mal de tissus à recoudre. Quant à vous deux, qui me semblez bien proches...

Il s'approcha de Phadransie et Sacha.

-Avec le Calfat.

Phadransie et Sacha échangèrent un regard à la fois entendu et interrogateur.

-C'est qui ça le caflat ?
-Le Maître Calfat, pas Caflat idiots. Il se charge de boucher toutes les fuites possibles sur la coque, et en assure l'étanchéité.
-Ouais, mais elle ne fuit pas la coque, fit remarquer Phadransie à Barberousse.
-Crois moi la mousse, dès que bordée il y aura, elle fuira. Allez, déguerpissez vermisseaux !

Phadransie et Sacha se sentirent soudain seuls lorsque Barberousse -comme elle l'avait officiellement surnommée- et Cubitus -Cul Bite Us, comme elle l'avait officiellement surnommé aussi- s'écartèrent et les laissèrent en plan.

-Bon, on le trouve comment le Maître Calfat, nous ? Demanda Phadransie à son acolyte.

Elle fut coupée dans l'attente d'une réponse miraculeuse par une voix dans son dos.

-Pas besoin de chercher plus moussaillons. Je suis le Calfat de bord.

Phadransie s'était attendu à devoir travailler sous les ordre d'un autre grand barbu, d'au moins quarante Tours, mais il n'en était rien. Le gars qui se tenait devant eux ne devait pas dépasser les vingt-cinq Tours.

[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer 8a581c10

-T'es vraiment le Maître qui rebouche les trous toi ? Demanda Phadransie l'air hautin.
-Ouais la donzelle, c'est moi. Enfin, moi je ne suis pas le Maître Calfat, juste son Second. Appelez moi Daniel.

Il ajouta en regardant Sacha.

-Vous vous attendiez à quoi en vérité ? Que le Maître en personne accepterait de perdre son temps avec deux sous merdes comme vous ? Allez suivez moi enfants de siresse !

Il emmena les deux compères sous le pont, leur présenta rapidement les dortoirs communs, nomma vite fait les différentes parties du Navire -ce qui se limita à un « voici le pont, la proue, la poupe, la dunette, les chaloupes, la passerelle et les cabines, du Second Tomas Reddar et du Capitaine, notament. »

Phadransie apprit plus tard que Tomas Reddar et Barberousse étaient père et fils. L'un était Second et l'autre Maître d'Equipage. Elle aurait bien voulu en apprendre plus sur ce Capitaine, qui se faisait appeler Andelzzer, mais selon Calfat -elle l'avait surnommé par la place qu'il occupait à bord- il ne sortait jamais de sa Cabine sauf pour noyer le pont du Grand Val dans le sang.

-Dommage, songeait Phadransie.
Mer 10 Juin 2015 - 22:32
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Abad El Shrata du Khamsin
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Abad El Shrata du Khamsin
Elle se tenait devant lui. Ses yeux s'étaient croisés et il l'avait tout de suite reconnue. Elle s'approcha de lui à grand pas.
PAF !!
Et encore une gifle. De fillette comparée à celle que lui avait mise le garde, mais une gifle quand même et l'humiliation qui allait avec, surtout celle de s'être fait taper par une fille.
Il entendit les autres mousses ricaner derrière lui. Il serra le poing et tendit ses muscles mais quand il leva ses yeux noirs de rage vers Phadransie, il ne vit son visage. Elle était par terre, comme une conne tenant son nez ensanglanté dans ses mains.  
'' T'as de la chance, c'est pas que le nez que je t'aurai explosé '' pensa-t-il.
Devant se tenait un grand gaillard à la barbe rousse.
-Déjà la première chose que je vais vous apprendre avant que nous soyons au large, c'est que ...
Il ne l'écoutait déjà plus, lui et et sa voix monotone qui l'emmerdait. Il prenait le ton des gens qui vous donnent des leçons. Sacha n'avait des leçons à recevoir de personne. Il ne détourna pas les yeux de Phadransie.
Il s'approcha de lui. Sacha n'avait pas remarqué que tous les autres étaient partis et que seul Phadransie et lui étaient resté devant BarbeRousse.
- Quant à vous deux, qui me semblez bien proches... -tu parles- dit-il en les pointant tour à tour du doigt.
Il hésita une seconde puis dit :
- Avec le Calfat.
'' Le Calfat, c'est quoi cette merde. '' pensa-t-il. Les marins et leurs termes de marins... lls pouvaient pas parler comme tout le monde ces cons.
- C'est qui ça le caflat ? demande Phadransie.
 -Le Maître Calfat, pas Caflat idiote. Il se charge de boucher toutes les fuites possibles sur la coque, et en assure l'étanchéité. 
-Ouais, mais elle ne fuit pas la coque, fit remarquer Phadransie à Barberousse.
-Crois moi la mousse, dès que bordée il y aura, elle fuira. Allez, déguerpissez vermisseaux ! ''
Idiots, vermisseaux, on ne faisait que l'insulter depuis ce matin. Il prenait sur lui pour ne pas répondre. De toute façon il prenait sur lui pour ne pas sauter par dessus le pont. Il détestait la mer, les navires, les pirates et toutes les conneries qui vont avec. Pourquoi avait-il fallut que sa putain de mère se soit fait engrosser à Port Argenterie. Un comble.
De toute façon il avait déjà prévu de s'enfuir au premier débarquement. C'était une question de temps et de patience.
-Bon, on le trouve comment le Maître Calfat, nous ? Demanda Phadransie à son acolyte.
Elle le sortit de ses pensées. Encore une fois, il n'avait pas remarqué que Barberousse les avait quitté. 
- Ta gueule, murmura-t-il les dents serrées.
Phadransie n'eut pas le temps de répliquer qu'un jeune de 25 tours environ s'approcha d'eux, habillé de noir. Pour le coup, ça changeait radicalement de BarbeRousse.
Il leur expliqua qu'il était le Calflat... euh Calfquat ? Caflat ? ... Casse couille.
Il dut le suivre tout le long du bateau, comme un chien. Phadransie semblait fascinée. Il leur montra chaque putain de recoins, du pont à la poupe, des chaloupes aux cabines. C'est là qu'ils allaient devoir dormir ? Putain.
Du dortoir ils descendirent un petit escalier et gagnèrent les cales.  De chaque côté se trouvait des sceaux remplis d'un liquide noir et pateux. Autour se trouvaient des cordages, des longes lames plates et de gros ciseaux en fer.
- Bon je vous fais le topo. Vous coupez des morceaux de corde, les trempez dans le mélange qui put là, dit-il en pointant le sceau et vous les rentrez dans les interstices de la coque avec ces lames. Ca devrait permettre d'atteindre la prochaine escale sans couler... l'avenir de ce bateau est entre vos mains.
- Prochaine escale ? C'est quand la prochaine escale ? demanda Sacha.
- Quand il y aura tellement d'or ici que le bateau sera à deux doigts de couler. C'est pour ça travaillez bien, parce que de l'or il en manque pas dans ce bateau. Allez j'vous laisse, dit-il en tournant les talons.
Phadransie s'était déjà accroupie, avait pris les cordages en mains, les avaient coupés et trempés dans le liquide que Sacha était toujours planté là.
- Allez Sacha bouge, j'ai envie de me faire bien voir là pour mon prem ...
- Mais tu vas fermer ta gueule putain !! hurla-t-il en donnant un coup de pied dans le sceau dont le mélange odorant se déversa sur la coque.
- Mais bordel qu'est ce que tu fous ? dit elle en se retournant brusquement.
- TOI QU'EST CE QUE TU FOUS !! hurla t-il la pointant du doigt. TU ME PARLES COMME SI RIEN NE S’ÉTAIT PASSE. MERDE OU T’ÉTAIS PENDANT L'ATTAQUE ?
Phadransie ne répondit pas.
- OU ÉTAIS TU HEIN ?! PENDANT QUE NOS FRERES SE FAISAIENT MASSACRER A COUPS DE PIED DANS LA GUEULE. OU ÉTAIS TU ?! JE N'AI MÊME PAS OSE LES REGARDES DANS LES YEUX QUAND ILS ÉTAIENT DANS LEURS GEÔLES ET TOI TU ME PARLES DE CE PUTAIN DE RAFIOT COMME SI C’ÉTAIT TA NOUVELLE MAISON. TU ME PRENDS POUR UN CON OU QUOI ? ON A TOUT PERDU ET J'AI L'IMPRESSION DE NE JAMAIS T'AVOIR VU AUSSI HEUREUSE.
- C'est pas comme si on avait beaucoup à perdre.
Le coup partit tout seul. Son pied s'éclata contre sa mâchoire et Phadransie tomba sur le sol, renversant le sceau au passage.
- Je comprends mieux pourquoi tu t'entends si bien avec les putains du port. C'est toi la pire pute de Port Argenterie, lui cracha-t-il, se retournant pour se mettre au travail.
Phadransie s'était relevée et s'était jetée sur son dos. Elle le rouait de coup de ses petits poings frêles. Sacha l'ejecta sans peine sur le côté. Il se mit à califourchon sur elle et arma son bras au dessus de sa tête.
PAM !
Son poing passa à un cheveu de son visage, brisant la lame de bois à coté d'elle -et brisant au passage quelques phalanges de sa main, vu la douleur qui était remontée le long de son bras.
- Je ne te reconnais plus, Phadransie murmura-t-il en la fixant dans ses yeux effrayés.
Au même moment on entendit une voix dans les escaliers.
- Mais c'est quoi ce boucan vous .... PUTAIN MAIS QU'EST CE QUE VOUS AVEZ FOUTU BANDE DE CONS ! hurla BarbeRousse en rentrant dans la pièce sans dessus dessous.

*

'' Ne lui montre pas que tu as mal à ce connard '' se répétait intérieurement Sacha.
SHLACK !
Le premier coup fusa à la vitesse de l'éclair. Il lacéra son dos de l'épaule jusqu'au commencement de sa hanche. C'était son premier coup de fouet, et putain les rumeurs étaient vrais : ça faisait un mal de chien. Il refoula une grimace et réussit à garder une expression neutre. 
Le coup partit sur Phadransie avec la même puissance que celui qui avait ouvert les chairs de Sacha.
Contrairement à lui, elle avait été autorisée à garder sa chemise et comme Sacha elle ne broncha pas. 
Attachés tous les deux à quelques mètre d'intervalles, ils s'étaient lancés le même regard et le jeu avait commence : qui flancherait le premier.
Barberousse avait ordonné 5 coups de fouets, plus que ...
SHLACK !
Le deuxième coup s'abattit avec encore plus de puissance que le premier. C'était une sensation indescriptible, encore pire qu'une coupure à l'arme blanche. Ici la blessure ne s'ouvrait pas au contact du fil de la lame, laissant une trace net, mais les chairs explosaient, comme si l'ont tranchait une bombe à retardement. Chaque explosion de douleur laissait place à un flot de sang qu'Abad sentait couler le long de son dos. Phadransie reçu la même sentence. Le coup fit un trou dans sa chemise qui la protégeait comme une deuxième peau. Elle le regardait avec un air de victoire, Sacha en était sur.
SHLACK !
Au troisième coup, Sacha ne put retenir un rictus. Il serra les dents et les poings et les muscles de son dos se tendirent malgré lui. Phadransie assista à cet instant de faiblesse et un sourire se dessina sur ses lèvres. Sourire qui s'évanouit à l'instant même ou le fouet frappa contre sa peau, Barberousse avait visait pil dans la surface dénudée, on voyait qu'il avait l'habitude. Phadransie leva les yeux vers le ciel et son corps se raidit. Le coup avait déchiré au passage totalement sa chemise. Il lui avait laissé une marque rouge vif et même si la blessure n'était pas ouverte, de petits gouttelettes de sang perlaient sur la peau à vif. 
SHLACK !
Le quatrième coup s'abattit sur son dos perpendiculaire au troisième et une croix ensanglantée se forma sur son dos. La douleur le lançait crescendo, c'était insupportable. Il faisait une chaleur à crever et le sang sur son dos se mélangeait à sa sueur. Il sentait sa respiration accélérer, son sang fuser dans ses tempes aussi vite que la queue du fouet. Son corps tout entier était en alerte. Quand le coup s'abattit à son tour sur Phadransie, elle ne put retenir un petit cris.
'' Vas-y, frappe qu'on en finisse '' murmura-t-il les dents serrées.
SHLACK !!
Barberousse avait sortir un deuxième fouet de sa ceinture et les avait frapper en même temps, de toutes ses forces. Tous deux ne purent se retenir d'hurler, en regardant le ciel et en gigotant comme si cela pouvait faire passer la douleur. BarbeRousse fit un signe de la tête et deux pirates vinrent immédiatement les détacher. Ils tombèrent tous deux genoux sur le sol, épuisés. 
La chaleur lui faisait tourner la tête, il en avait la nausée. Tout cet afflux de sang dans son cerveau lui avait donné la migraine. 
Tout l'équipage les regardait, certains avec une certaines excitation, se délectant du spectacle, d'autres avec neutralité, les bras croisés, d'autres encore, avaient détourné le regard, presque honteux. Après tout ce n'était que des gamins. Les mousses les regardaient effrayés, c'est certains qu'ils avaient compris la leçon, ils ne feraient pas d'écart.
'' Séparez moi ces deux abrutis, emmenez la furie en cuisine quand à l'autre con il va aller nettoyer le bordel qu'il a foutu dans les cales et finir le travail '' dit BarbeRousse aux deux pirates qui acquiescèrent.
Le pirate l'empoigna par le poignet et tira pour qu'il se relève. La douleur lui filait la gerbe, il tituba mais le suivit.
Il lui fila un coup de pied dans le dos qui l'envoya sur le sol de la pièce.
'' Et t'as intérêt de tout faire ou on te jette par dessus bord. Tu appartiens à Andelzzer maintenant, tu ne vaux pas mieux qu'un chien, bâtard ! '' dit-il en tournant les talons.
A quatres pattes sur le sol, Sacha tenta de se relever mais il ne le put. Le simple fait de redresser son dos ravivait des douleurs atroces. Il se traina jusqu'au sceau encore plein et se saisit de la corde d'une main mais son autre bras trop faible ne put soutenir tout son poids : il bascula sur le dos.
'' AAAAAAAAH !! '' hurla-t-il. Il maudissait ce rafiot, il maudissait BarbeRousse, il maudissait Phadransie, son bras trop faible et ce cordage de merde. Des larmes montèrent à ses yeux. Son cerveau bouillait, le bateau tanguait de plus en plus. Les bords de sa vision se brouillèrent. Le pièce s'assombrit à mesure qu'il lutait pour garder ses paupières ouvertes.
'' Du nerf, lève toi '' murmura-t-il à bout de force.
Mais ses yeux lâchèrent et il sombra dans le chaos.
Jeu 11 Juin 2015 - 0:01
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Noire
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-PUTAIN MAIS QU'EST CE QUE VOUS AVEZ FOUTU BANDE DE CONS !  beuglait Barberousse comme un goret qu'on égorge.

Phadransie était dessous. Sacha dessus, le poing fermé, levé, il semblait hésiter à lui éclater la gueule et la regardait dans les yeux. Phadransie sentait la douleur qui avait envahi tout son visage, et particulièrement sa bouche. Elle sentait le sang, le sien, sur sa langue. Le coup de pied de Sacha ne l'avait pas loupé. Elle se mit à hurler comme une démente et se tortiller sous le poids de son adversaire. Barberousse l'aida à se dégager en tirant Sacha par les cheveux.

-Il s'est passé quoi ici morbleu de chiasses ?!

Sacha serrait les dents.  Phadransie lui bondit dessus.

-Je vais le buter ! Il m'a cogné, je vais le buter !

Barberousse stoppa Phadransie d'un coup de pied dans le ventre qui lui coupa le souffle et l'envoya cogner contre la coque. Deux coups en moins d'une minute, joli score, même pour elle !

-Morbleu, répéta le pirate en postillonnant au visage de Sacha, même pas une heure qu'on a pris les Grand'Eaux et vous foutez déjà la merde ! Tous les deux !

Il poussa le jeune garçon jusqu'à la trappe menant au pont extérieur. Phadransie les suivit, ses yeux aptes à lancer la foudre d'un ciel orageux sur Sacha. Fils de pute. Lorsque le soleil envahit son regard et pu illuminer son visage, elle vit que déjà les marins s'était rassemblés autour de Sacha. Deux types plutôt costauds, de simples marins, l'avaient empoigné par les bras et le tenait plaqué contre le Grand Mât, de dos. Phadransie sourit. Il allait se faire éclater la gueule Sacha, pour l'avoir traité de pute. C'était bien fait.

-Les bagarres sont interdites à bord du Val, traîne misère ! postillonnait Barberousse. Si vous avez des comptes à régler tu attendras d'avoir mis pied à terre ! Vous ferez un bon exemple pour tous l'équipage !

Sans crier gare, il avait arraché la chemise de Sacha puis sorti un fouet. Et Cul Bite Us s'était déjà approché d'elle, un sourire malsain sur ses lèvres pâles, prêt à déchirer la sienne. Barberousse l'arrêta d'un geste de la main.

-Pas la fille. Elle peut garder sa chemise et préserver le peu de dignité qu'il lui restera.

Elle fut attachée à la Misaine.


~

Phadransie n'était pas mécontente de pouvoir un peu s'allonger une fois la nuit tombée. Son dos l'avait élancée toute la fin de journée, elle en pouvait plus. Sa deception fut grande lorsqu'elle vit qu'il n'y avait plus de place dans les hamacs et lits d'infortunes du dortoir aménagé. Il y avait bien quelques trous par ci par là à même le sol. Même dans leur Quartier Général ils avaient des matelas pour poser leur cul. Phadransie soupira et s'assit à même le sol, économisant chacun de ses mouvements. Putain qu'elle détestait cet enculé de Sacha ! Le repas du soir consistait en un potage absolument sans goût, et un biscuit sec infect. Mais elle s'en branlait, puisque c'était toujours meilleur que manger des mouettes ou des rats. Bien qu'elle n'avait jamais mangé de mouette ou de rat, en fait. Alors elle vit Sacha. Il passait au milieu du dortoir, se cherchant un petit bout de place. Il lui lança un regard si noir, si sombre, que Phadransie dû le détourner en premier. Depuis quand Sacha était-il expert des regards noirs ? Depuis quand ils étaient devenus ennemis en fait ?

Il y avait un halfelin parmi l'équipage qui jouait de la pythare tout en chantant des mélodies de pirates, ceci afin de mettre un tantinet d'ambiance avant de s'endormir. Phadransie l'ecouta avec attention. Sa voisine de gauche lui demanda alors comment elle s'appellait. Phadransie reconnut à son visage qu'elle faisait parti du lot des sept nouveaux mousses du Grand Val.

-Moi c'est Sally, lui dit-elle, c'est mon premier voyage en mer tout comme toi.
-Phadransie. Tu viens d'Argenterie ?
-Ouais, j'ai dix sept Tours. Et toi ?
-Quinze Tours. Pourquoi tu t'embarques que maintenant ? avait demandé Phadransie pour qui il était inconcevable de préférer le travail à terre plutôt qu'en mer.
-J'ai bossé deux ans dans l'un des bordels du Port.
-Ah.
-Puis ça m'a gavé, j'ai voulu tester autre chose.
-T'es une pute en fait.
-Ouais, enfin, vu la façon dont ta chemise est arrangée on pourrait dire la même chose de toi.

Phadransie saisit l'allusion.

-Va crever.
-Ca va le prend pas mal. Tu vas comment ?

Elle ne répondit pas. Je ne me suis jamais sentie aussi bien de toute ma vie pauvre traînée !

-Au moins, ajouta Sally, tu as mieux tenu les coups que ton pote. Il s'est évanoui tout à l'heure, ça a bardé pour lui.

Un sourire se posa délicieusement sur les lèvres de Phadransie. Un léger sourire. Elle avait finalement eu sa victoire sur Sacha. Ce putain de coup de pied dans la machoire.

-Ils l'ont cogné encore ? demanda-t-elle.
-Non, ils l'ont jeté à la mer.

Phadransie chercha immédiatement Sacha du regard. Ne venait-il pas de passer à quelques mètres d'elle il y avait deux minutes ?

-Enfin, Cubitus a voulu le jeter à la mer, mais le Second du Capitaine l'en a empêché. Il est sorti de sa Cabine comme ça sans prévenir, il a arrêté Cubitus qui avait déjà sorti la planche tu vois. Plus personne il parlait, tous se taisaient. Tomas Reddar c'est le père de Hanselm Reddar, tu vois.

Barberousse, comprit Phadransie.

-Il est genre vieux mais il sait se faire respecter, puis surtout il est comme cul et chemise avec le Capitaine il paraît. Il a simplement saisit le poignet de Cubitus et lui a dit de laisser l'enfant en vie. Il a parlé d'un abordage, bientôt, et que tout l'équipage sera utile. Tu n'étais pas là quand tout ça s'est passé tout à l'heure ?
-J'étais dans les cuisines.
-Du coup Cubitus il s'est incliné et il a laissé partir ton pote.
-C'est pas mon pote !
-Bref, tu m'as comprise. Ce Tomas Reddar il a plus de cinquante Tours en mer il paraît. C'est l'un des plus vieux pirates humains des Eaux du sud ! Et on dit de lui que c'est un épéiste hors pair.
-Putain mais comment tu sais tout ça toi ? s'exclama Phadransie.
-J'ai bossé dans un bordel de Port-Argenterie l'amie. Ça t'étonne tant que ça que je sache quelques trucs sur les pirates ?
-Quand les hommes baisent ils parlent pas.
-Tu en sais quoi, tu as déjà baisé toi ?

Phadransie fut arrêté par cette question. Putain mais qu'est-ce qu'elle en a a foutre. Elle refusait de donner une réponse négative, et refusait encore plus de ne pas en donner. D'une voix glaciale elle lâcha un "oui" qui sonnait faux avant même d'être sorti de ses lèvres. Sally lui sourit.

-En fait t'es vierge.
-Je m'en fous de baiser moi.
-T'inquiète, la coupa Sally. Ça arrivera quand ça arrivera. Tiens prends ça avec toi, lui dit elle en lui tendant un tromblon. On sait jamais, ça évitera que ça arrive quand tu t'y attendras pas.  

Phadransie se saisit discrètement de l'arme, les yeux écarquillés. La prénommée Sally l'avait simplement sortie de son décolleté, entre ses seins. Phadransie n'avait jamais songé à dissimuler une arme là. Sa nouvelle amie sourit.

-Et alors quoi ? Tu ne planques jamais rien là ? Pourtant tu as de quoi. Un tromblon c'est bien, une bouteille c'est toujours mieux.
-Je suis d'accord l'amie, mais un tromblon c'est..c'est très bien aussi.

Phadransie rangea son arme suivant les conseils de sa nouvelle amie. Elle venait de faire sa première journée en mer. Elle avait le dos zébré de cinq traces de coups de fouets. Mais elle s'en branlait en fin de comptes ! Elle était pirate. Et elle avait une arme à feu ! Un pistolet à poudre ! Un vrai ! En temps normal elle aurait été pressée d'aller s'en venter auprès de Sacha. Les deux jeunes femmes passèrent quelques minutes à bavasser discrètement, puis s'endormirent. Le réveil était brutal à bord d'un Navire, Phadransie l'apprit à ses dépends.

~

Environ huit jours passèrent sans qu'il ne se passe rien de notable. Phadransie gardait précieusement sur elle son tromblon. Elle avait appris et retenu le nom des principaux commandants, ainsi que des sept moussaillons. Il y avait bien sûr elle, Sally et Sacha. Puis Jack, un ancien esclave de dix neuf Tours, Warren et Guilhem, quinze Tours, fils de pirates, et Logan, un halfelin quoique plutôt grand pour sa taille, seize Tours. Elle se fit très rapidement à la vie en mer, au langage marin et toute autre subtilité. Cul Bite Us usait souvent de son fouet, et cela prenait parfois une allure théâtrale. Phadransie aimait ce genre de spectacle. Dès le lendemain de son accrochage avec Sacha, le Coq l'avait confiée aux directives du Knife, un marin surnommé ainsi car il n'y avait pas plus habile manieur de poignard à bord que lui, se disait-il. A part le Capitaine, bien sur. Knife passait ses journées dans les haubans et les voilures et un peu d'aide ne lui avait pas déplu. Il enseigna Phadransie, bien que la patience n'était pas son fort. Heureusement, la jeune fille apprenait vite. Autrement je serai morte depuis longtemps, songeait-elle. Knife avait une vilaine cicatrice sur le menton, il lui manquait un lobe d'oreille et une couille, se disait-il parmi l'Equipage. Il marmonnait tout le temps et grattait d'un air las ses cheveux épais et en bataille. Souvent, il foutait des beignes à Phadransie, quand il jugeait qu'elle n'apprenait pas assez vite, ou était trop lente à grimper aux cordages.

-Tu es pas plus lourde qu'un gobelin, et eux grimpent dix fois plus vite que toi, quand bien même je leur lierai un boulet aux chevilles !

Phadransie n'aimait pas Knife. Il disait « Hé gamine. Fais ça. Et après il y aura ça à faire puis ça et ça. » et quand il venait vérifier, il disait toujours « Morbleu, mais tu n'as fais que ça ? Même ma grand mère est plus vive ! » et là PAF ! Généralement les gifles pleuvaient.

Mais Phadransie devait au Knife le fait de ne plus travailler aux côtés d'un mec qui ne désirait rien de plus que lui éclater la gueule.

Sacha et elle ne s'étaient plus adressés la parole depuis plus d'une semaine, et chaque fois qu'ils se croisaient c'était un concours de regard noir qui se jouait. Lorsqu'ils mangeaient, il l'évitait. Lorsqu'ils allaient dormir, il l'évitait. Lorsqu'il se croisait sur le pont, il l'évitait. Quand ils ne pouvaient empêcher leurs regards de s'éviter, c'était une tempête de noirceur qui plongeait de l'un à l'autre. Phadransie voyait Sacha contracter ses poings quand ce petit duel durait plus longtemps que prévu. Il se retenait de ne pas se jeter sur elle et la taper. Du moins c'est ce qu'elle pensait. Elle connaissait Sacha depuis des années, elle aurait été incapable de dire depuis combien de temps ils traînaient ensemble. C'est comme si ils avaient été abandonnés ensemble sur le port, côte à côte, à leur naissance. Ils avaient grandi ensemble, s'étaient forgés ensemble. Elle se souvient que lorsqu'ils étaient encore tout jeunes, qu'elle ne devait pas dépasser les six ou sept Tours, Sacha était ce qui se rapprochait le plus d'une famille pour elle, bien qu'elle haïssait ce mot. En grandissant, leur relation était devenue compliquée. Ils se disputaient plus souvent, avaient commencé à se gueuler dessus. Vers leurs douze, treize Tours, ils s'étaient un peu éloignés. Sacha ne l'accompagnait plus quand elle allait au bordel pour telle ou telle raison, détrousser un vieux forban par exemple. C'était toujours plus facile quand ils laissaient d'eux même leurs habits sur le sol. Sacha avait commencé à lui sortir des excuses à la con style "J'ai autre chose à foutre de mes journées" ou "les putes ça me dégoûte trop." Est-ce qu'il déclinait son invitation à la suivre dans ces bâtiments parce qu'il était trop gêné pour se mouvoir au milieu de tant de femmes nues ? Phadransie n'avait trouvé que cette raison. Ils s'étaient un petit peu perdu de vue durant cette période, Sacha traînait avec des mecs et disait davantage de trucs de mecs. Puis récemment il était revenu vers elle, et le duo avait repris leurs quatre cent coups, encore plus sournois, plus incroyables et plus payants qu'avant. Peut être que les potes mecs de Sacha ils avaient commencé à dire des trucs pas flatteur sur elle ? Peut être qu'ils voulaient la baiser. Peut être que Sacha avait plus d'estime pour elle que pour eux, et qu'il avait quitté leur compagnie pour ça ? Toujours était-il qu'elle s'était très bien entendu avec lui, d'aussi loin que remontent ses souvenirs, et même si ils s'étaient parfois disputés et crachés des insultes à la gueule, jamais ils n'étaient restés fâchés plus d'une semaine. Jamais ils n'étaient restés fâchés aussi longtemps qu'aujourd'hui, car trois semaines s'étaient écoulées depuis la flagellation de Phadransie.

Trois semaine d'écoulées, et vint le temps d'un premier mois en mer pour Phadransie. Ce mois passa plus vite que toutes les semaines de sa vie. Il y eut en tout trente morts, dont trois exécutés. Deux types qui s'étaient étripés à mort sur le pont avaient finis la corde autour du cou, le nœud noué par Tomas Reddar, le Second du Capitaine. Tomas était bien le père de Barberousse comme l'avait souligné Sally. Il était plus grand, plus musclé, plus vieux, et sa barbe encore plus rousse -si d'ordinaire c'était possible-. C'est Tomas qui avait dit « Pas de bagarres comme ça à bord. Vous passez par la corde. » Et les deux hommes avaient été pendus. Phadransie avait regardé la pendaison jusqu'au bout, bien que ça n'était pas la première à laquelle elle assistait.

Le troisième type avait craché son ressentiment aux pieds de Cul Bite Us en maudissant ce « raffiot d'Azma » et ce « putain de Capitaine qui ne se montrait jamais. » . Il venait d'être accusé d'avoir tenté de lever une mutinerie à bord. C'était vrai, Phadransie le savait et l'avait entendu comploter, mais presque personne l'avait suivi dans sa folie. Phadransie avait espéré apercevoir le Capitaine fouler le pont du Grand Val de ses bottes afin de tuer l'homme lui même. Il n'en fut rien, et ne se montra pas, mais le rageux fut envoyé sous la quille le soir même, encore une fois sur ordre du père Reddar. Ses plaies furent aspergées de vinaigre et de gros sel et son corps agonisant accroché à la Misaine où il resta exposé plusieurs heures, en plein soleil. Il mourut avant la nuit. Phadransie avait trouvé ce spectacle extatique.

-Tu aimes le sang toi hein ? lui avait sourit le Knife le lendemain de l’exécution.
-Je suis une pirate, morbleu ! Avait répondu Phadransie en terminant d'attacher les voiles.
-Non mais j'veux dire, tu aimes beaucoup ça. Ca se voit dans ton regard.

Il avait extirpé un poignard de sa ceinture et l'avait fait sauter en tourbillonnant de sa main droite avant de le rattraper, faisant honneur à sa réputation.

-Tu aimerais que j't'enseigne un peu les bases concernant les couteaux, gamine ?

Si elle aimerait ?

-Putain oui !
-Mais avant tu me ramènes au maximum cette putain de voile.
-Dis, le Knife ?
-Mmh ?
-C'est vrai que t'as qu'une couille ?

Pour la première fois depuis qu'il lui filait des ordres, Phadransie le vit éclater de rire. Il fit glisser une main jusqu'à son entrejambe.

-Tu veux vérifier par toi même ?

Elle avait terminé de ramener et serrer au mieux la voilure. Les plaies dans son dos s'étaient refermées. Plus les jours passaient et moins elle songeait à Sacha. Lui devait passer ses journées à combler les interstices entre les planches, sous le pont.
Jeu 11 Juin 2015 - 4:41
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Noire
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On remontait parfois sur le faux pont un tonneau d'eau claire, et les hommes ou femmes désirant entreprendre un semblant de toilette trouvaient ainsi en cette occasion la possibilité de le faire. Accablé par le labeur ainsi que la chaleur, la plupart des membres d'équipages ne se firent pas prier. A un détail près. Il y avait un tonneau pour près de cinq cent marins. Les plus âgés et gradés eurent le droit de sentir en premier sur leur peau douloureuse la caresse d'une eau limpide et douce. Tôt ou tard, leurs confrères finissaient par vivre cet instant. Barberousse, le Maître d’Équipage et fils du Second qui plus était, ainsi que tous les Quartier Maître -ils étaient au nombre de cinq. Cul Bite Us, Mervin Volosdün le Novien, Charles le Chauve, Goliath Reliath et Elsi Salienso, dont tous se moquaient secrètement de son nom à sonorité féminine- ne se lavaient pas, pour la simple et bonne raison qu'ils disposaient d'une cabine individuelle et avaient la possibilité de se nettoyer quand ils le désiraient. Phadransie les enviait tout haut, et elle se ventait déjà auprès du Knife de posséder un jour sa propre cabine.

« Cause moins moussaillon, et va donc prendre un bain. Par les enfers de la Garce, t'en a bien besoin. On dirait une pute de gaupe comme ça »

Comme quoi ? Lui avait la chevelure bien plus désordonnée que la sienne, songeait Phadransie, et quand bien même il travaillait moins qu'elle, il puait plus. Bien qu'elle ne se sentit pas spécialement éprise de l'envie de prendre un bain, Phadransie dû bien admettre qu'elle était heureuse de quitter un peu ses voilures. Le dessous de ses pieds s'était renforcé, lui permettant de se déplacer aisément dans les haubans et le gréement. A ce jeu là, elle avait pour ambition d'égaler les gobelins. Elle savait qu'elle ne ferait jamais des bons aussi haut que les leurs, mais elle voulait pouvoir se mesurer à eux sur le plan de la souplesse. Elle était légère et élancée. Elle se savait capable de cela et même plus. Suite aux leçons du Knife, la jeune femme avait également développé l'acuité de ses capacités sensorielles. La concentration nécessaire avant de viser une cible impliquait bon nombres d'éléments. Il fallait voir la cible, la regarder, l'analyser, se fondre en elle. Il y avait une certaine façon de tenir son arme avant de la lancer, aussi, on ne lance pas un couteau comme on lance une bouteille de rhum à un ivrogne à la sortie des Pièces de Huit, par exemple. Il fallait contrôler le mouvement de son bras, la tension du corps, les muscles, l'inclinaison, l'angle de tir. C'était un art d'apprendre, retenir et mettre en pratique tout cela. Et Phadransie n'avait pas vraiment de sens artistique. Cependant, elle s'en était mieux sortie que son précepteur d'infortune ne l'aurait cru, et ainsi, ils étaient passé de leçons en leçons, complexité variant crescendo. Mais jamais durant le temps de travail. Le Knife disait que « le travail à bord du Val c'est le travail, faut pas déconner avec ça. » Alors Phadransie attendait le soir pour rejoindre son supérieur. C'était malgré les apparences une élève appliquée et studieuse. Orgueilleuse, mais studieuse. Jamais le Knife ne l'avait cogné durant leurs séances d'entraînement. Parfois il la traitait de « conne » ou de « pauvre idiote », mais ces élocutions se limitaient là. Alors qu'en journée, elle avait depuis longtemps perdu le compte mental des gifles qu'elle se mangeait.
Lorsque Phadransie atteint enfin le tonneau d'eau au centre du faux pont, l'eau n'avait plus rien de limpide. Grommelant, Phadransie ôta ses vêtements et s'aspergea copieusement. Malgré tout, cela lui fit du bien. Elle entendit derrière son dos des rires graves, et constata d'où ils provenaient et qui en étaient les responsables. Seraient-ils assez cons pour tenter quelque chose de déplacé ? Visiblement non, car rien ne bougeait. Phadransie se rhabilla et entreprit de rincer ces cheveux. Elle remonta sur le pont, et passa devant le petit groupe de mâles à l'excitation difficilement contenue. Eux, elle s'en foutait. En revanche, ce dont elle se foutait moins, c'était la présence de Sacha à quelques pas d'eux dans un recoin, dissimulé dans l'ombre. Alors lui aussi s'était rincé l'oeil ! Elle changea cependant d'avis, lorsque ses yeux se posèrent sur l'expression de son compère. Sacha ne l'avait pas vu s'arrêter avant de grimper la passerelle menant au pont. Ses yeux étaient braqués sur les hommes qui la reluquaient tout à l'heure. Sacha n'était pas du tout venu se rincer l'oeil. Phadransie ne sut jamais pourquoi il était là, si il s'agissait d'un hasard -peut être attendait-il pour faire un brin de toilette lui aussi- ou d'autre chose mais toujours est-il que si rixe il y avait eu avec ces connards, Sacha lui aurait prété main forte malgré leurs différents. Phadransie pensa qu'il était pas si chiant que ça en fait, Sacha. Elle l'avait chassé de sa mémoire ce dernier mois, c'est tout juste si elle s'était rappelé de sa présence à bord du Grand Val ces derniers jours. Et elle venait de le revoir, juste là, en cette circonstance. Leurs duo lui manquait un peu. Un petit peu seulement. Mais même un peu, c'était déjà beaucoup, en vérité.


~

« Pavillon en vue Monsieur Reddar !

La nouvelle avait ébranlé l'équipage entier ! Après plusieurs semaines de navigation en calme plat -ou presque- il se passait enfin quelque chose ! Tomas Reddar, qui pour une fois était à l'extérieur de sa cabine, boussole de navigation en main, prit l'information telle qu'elle venait avec un calme désorientant. Puis l'information tant attendue était tombée.

-C'est un Sultan, Monsieur ! Avait glapit la Vigie. Une galère des Sultanats !
-Branle bas de combat, tout l'équipage armé et sur le pont ! glapit Barberousse.
-Enfin nous leur avons mis le grappin dessus, souffla Tomas. Je n'ai pas la patience du Capitaine, hélas, et nos rations en nourriture en ont pâtit. De la vermine à bord a rongé ce qu'elle a trouvé à son gôut.
-Il était donc grand temps Monsieur, dit le fils à son père.
-Oui Hanselm. Grand temps. » Répondit le père à Barberousse.

On jeta dans les mains de Phadransie un sabre, qu'elle trouvait difficile à manier à cause de son poids. Bien qu'elle n'était pas maigrichonne, elle mangeait peu et cela se lisait sur sa consistance physique. Phadransie n'était pas très musclée, malgré ce mois en mer. Le Knife lui tendit par la lame l'un de sesjouets.

« Reste près de moi la moussaillon si tu veux voir un vrai homme au travail. »

Le Grand Val avait serré le vent, déployé ses voiles. Tomas Reddar avait prit la barre, à défaut d'un Capitaine pour le faire, son grand tricorne noir et sa chevelure rousse au vent. Malgré les années, cet homme là semblait taillé dans du granit. Aucun pavillon n'était hissé. Sans doute pour perturber les adversaires du Grand Val.

Le reste ne fut qu'instinct, sang et violence.

L'abordage avait rapidement eut lieu. Le Sultan avait tenté de prendre le Val de vitesse, mais ce dernier avait le vent en poupe, et la voilure entièrement déployée. Il fut rattrapé et les grapins lancés. Tomas Reddar ordonna de préparer les canons, mais aucune bordée ne devait être tirée. Telles des bêtes, les pirates avides de sang s'étaient élancés sur le pont du Sultan, armes aux poings. Phadransie s'était saisie d'une corde à pleine main, poignard entre les dents, pistolet entre les seins et sabre empoigné. Elle s'était laissée porter jusqu'à tomber sur le pont. Sa première crainte fut de différencier ses alliés de ses ennemis. Tout se mélait autour d'elle, les hommes se jetaient les uns sur les autres, brandissant sabres, couteaux ou haches d'abordages. Barberousse combattait au fouet, Phadransie le vit étrangler un natif des Sultanats.

« Hardis flibustiers ! Et pas de quartier excepté pour les beaux morceaux si il y en a ! »

Phadransie avait cherché le Knife du regard, mais déjà son temps accordé venait de s'écouler. Deux hommes se jetaient sur elle, armés de mousquets. Eux, elle savait que c'étaient des ennemis ! Phadransie para le coup qui avait pour but de lui dessiner un trou dans la poitrine. Elle avait paré par réflexe, et avait fait mouche par chance. Elle recula de trois pas, cherchant à se replacer, quand son dos heurta celui d'un autre homme. Ce dernier venait de tuer son adversaire, il se retourna et attaqua Phadransie, hache en main. Cette dernière se jeta à terre, roula boula et passa sous les jambes de ses deux ennemis. Elle se prépara mentalement, physiquement, et lança. L'un des trois hommes s'ecroula au sol, le couteau du Knife planté dans le ventre. Cela donna du courage à Phadransie qui fonça sur les deux restant, en criant. Elle ne comprit pas d'où il venait, mais Calfat venait de surgir à ses côtés. Lui aussi emporté par l'élan et l'ivresse du combat, il portait un sabre à bout de bras et hurlait. Les quatre lames s'entrechoquèrent plusieurs fois. Phadransie parvint à porter à son adversaire un coup affligeant à la jambe. Il eut un instant d'hésitation. Elle s'hesita pas. Elle lui transperça le crâne de son sabre. Elle avait mis toute sa rage, et toute sa force dans ce coup. Elle n'avait pas explosé en deux la boite cranienne, mais son sabre s'était suffisement enfoncé dans la face du gars pour en rester coincé quand Phadransie voulut le retirer. Désarmée, elle vit que des dizaines d'armes se trouvaient à ses pieds, auprès des corps morts des éternels vaincus. Elle récupéra le couteau du Knife et se saisit d'un mousquet. Elle chercha d'autre adversaires du regard. Une sensation étrange l'envahissait. Elle voulait tuer. Non seulement pour survivre, ce qui était déjà un point primordial de cette nouvelle motivation. Mais également pour la sensation de tuer. Chaque fois qu'elle était prise dans des rixes lors de ses jours à Port-Argenterie, elle s'animait et changeait. Elle perdait le contrôle d'elle même, tapait plus fort, criait plus fort, bougeait plus vite. Et cette fois, on lui avait demandé de tuer ! L'ordre venait de Barberousse qui devait probablement l'avoir entendu de son père. Pas de quartier ! Mais il avait dit autre chose, Barberousse, non ? Pas de quartier, excepté pour...pour qui ? Phadransie cracha. Rien à battre.

-Pas de quartieeer bande de fils de putes  !! hurla-t-elle en se jetant de nouveau dans la mélée.

Son visage était déjà taché de rouge. Elle s'amusa à en ajouter. Alors que son mousquet s'enfonçait dans le dos d'un de ses adversaires, elle prit même le temps de passer la langue sur les comisures de ses lèvres. Elle goûta au sang de ses ennemis, et un frisson particulièrement impudique prit d'assaut son échine. Elle avait bel et bien perdu de vue le Knife.


~


Les combats duraient depuis plusieurs minutes maintenant, et il était clair qu'avec son équipage de cinq cent hommes, et des fines lames comme Calfat, le Knife, Barberousse ou Tomas Reddar, les Sultans et les galériens ne feraient pas long feu. Phadransie acoompagnée de Sally et une dizaine d'autres marins fracassèrent les portes des cabines à grands coups de sabre. Elle avait perdu le couteau du Knife dans la bataille, mais n'y pensait plus. L'adrénaline semblait cogner si fort dans son cerveau qu'elle devait en empêcher tout fonctionnement.

-Par là ! Par là morbleu ! criait Phadransie en fracassant la poignée de la porte close qui céda.

Deux femmes tentaient de se cacher du mieux qu'elles le pouvaient dans une armoire. En vérité une femme et une jeune fille. Qui devait avoir l'âge de Phadransie. Cette dernière tira la plus petite par les cheveux, mais celle qui devait en être la mère s'y aggripa. Alors Phadransie leva son sabre et le laissa retomber sur la main. Encore du sang. Elle en était recouverte. Elle jeta la fille sur le sol, cette dernière semblait térorisée et en pleurs.

-Où est le capitaine de votre galère ! Glapit Phadransie.

La gamine ne disait rien, ses dents claquaient.

-Si tu ne veux pas nous le dire, tu le diras à Reddar ! Dit un pirate dans le dos de Phadransie tendis que les autres se jetaient sur la mère et l'extirpaient de sa cachette si peu salvatrice.

-Parle ! Cria Phadransie. Il est où ? On veut trouver ton Capitaine ? Il est où !!
-S'il vous plait, s'il vous plait ! sanglota la jeune femme. C'est mon premier voyage en mer ! Ne nous faites pas de mal !
-Chut, tais toi !

Phadransie abaissa sa lame et la tua.

-Idiote !

L'un des marins la gifla.

-Tu es conne ou quoi la mousse ? Reddar a dit : on épargne les beaux morceaux ! Les beaux morceaux c'est quoi pour toi ? Les femmes, pardi !
-Ca n'était pas un beau morceau ça !
-Cesse de prendre tout le monde de haut. C'est pas parce que tu tiens une épée que ça fait de toi la chef, salope. Reste à ta place !

Folle de colère, Phadransie s'était jetée sur lui, littérallement. CLANG ! Il avait levé son épée pour se protéger.

-Répète un peu pour voir fils de siresse ! Un jour je serai Capitaine d'un putain de navire !

CLANG ! Encore un entrechoquement. Phadransie suait à grosses gouttes, le sang maculait son visage et ses habits. Ses paumes étaient glissantes. Elle savait qu'elle était blessée, à plusieurs endroits, mais ça n'était que des égratinures et elle n'avait pas le temps de toutes façons de les regarder. Elle réussit à toucher son adversaire au bras, et il cria de surprise et de douleur. Il cria de douleur. Phadransie enchaîna avec un coup latéral. Quelques échanges d'armes encore, et ce fut fini. Pour le matin.

-Ca va ? Lui demanda Sally.
-Impèc !
-Viens ! Je crois que le Capitaine n'a toujours pas été trouvé !

Phadransie courut en tête.

-On se sépare, cria-t-elle au reste des marins derrière elle, Sally et moi on va chercher par là bas, il reste quelques cabines de fermées !

Phadransie explosa toutes les portes. Elle sentait ses muscles s'allourdir. La fatigue l'avait gagnée très vite. Elle voulait lacher son sabre et se reposer quelques instants, pour mieux frapper ensuite. Mais c'était bien sur hors de question. La dernière porte de la denrière cabine lui résista plus longtemps que prévu, et elle s'acharna longtemps sur la poignée, hurlant telle une démente.

Elle y entra, Sally sur les talons. Le Capitaine était là, pas armé, adossé contre son bureau. Il avait la peau mate et deux beaux yeux verts, pénétrant comme des tourbillons. Une chemise large blanche, des bottes de cuir, une veste vert emeraude avec des boutons d'argents et un tricorne de même couleur. Etrangemment, il ne portait aucune arme.

-Tu es le Capitaine ? Avait clamé Phadransie.
-Le Capitaine Falcon Qeshdarr, oui. Et vous même ? Êtes vous la Capitaine du trois Mâts qui nous aborde, mademoiselle ? avait-il lancé avec ironie.
-Phadransie, je m'appelle.
-Et bien ? Ne dois-tu pas m'amener à ton Capitaine, Phadransie ?

Il avait écarté les bras très légèrement dans une attitude qui se voulait volontairement provocatrice.

-On ne peut pas se battre contre lui Phadransie, avait dit Sally.
-Si on peut ! Il est pas armé ce con.
-Tu t'es cru invincible ou quoi ? Laisse moi faire les choses à ma façon !

Sans crier gare, la pirate avait sortie de sa chemise un pistolet qu'elle pointait sur le Capitaine. Classe le coup du flingue entre tes nichons, pensa Phadransie.

-Suis moi, Capitaine, dit elle.
-C'est ça, faites de moi votre prisonnier mesdemoiselles !

Il avait hurlé les derniers mots et s'était élancé. La distance le séparant de Sally était assez élevée, peut être huit mètres. Phadransie ne comprit rien à ce qu'il se passa. Le Capitaine sembla disparaître tant il allait vite. Le coup partit tout seul. Le pistolet de Sally fit mouche. En plein dans l'épaule connard, psalmodia Phadransie.

Le reste les surprit toutes les deux.

Le Capitaine avait sacrifié son épaule mais savait pourquoi il l'avait fait. Il était devenu une véritable tornade humaine, tournant sur lui même. Il frappa Sally à mains nues. Un premier coup lui fit bondir le tromblon des mains. Le second la toucha à la poitrine, le troisième au côté. Mais tout s'était déroulé si rapidement, que Phadransie n'avait pas réussi à séparer les mouvements. Ce qu'elle pu analyser fut un coup, qui fit voler le pistolet et mordre le bois à Sally. Ses doigts se crispèrent, de façon lente mais certaines, un peu comme les pattes d'une araignée lorsqu'elle meurt. Sally venait de mourir aussi. Elle était morte. En une seconde. Comme ça. Pas de sang sur elle. Ses yeux étaient encore ouverte, sa bouche aussi, un filet de salive en coulait. Elle semblait raide comme si la mort était vieille de plusieurs heures déjà. Le Capitaine avait-il un pistolet dissimulé sur lui ? Non, sinon Phadransie aurait entendu le tir ! Alors quoi ?

-Tu viens d'assister à mon arc de trois, dit le Capitaine une main sur son épaule saignante, le rouge gouttant de sa chemise.
-Un quoi ? Un arc ? Je ne vois pas d'arc !

Elle tenait braqué sur son adversaire son propre pistolet. En cet instant, son sentiment de toute puissance et sécurité venait de chuter. Elle se savait démunie face à cet homme. Elle avait peur de ce qu'il était capable de faire.

-Il ne s'agit pas d'un arc à proprement parlé Phadransie la pirate, mais d'une technique secrète que je maîtrise. Elle a plusieurs noms selon les époques et les guerriers qui l'utilisèrent. Tu as un pistolet braqué sur moi. Pourquoi ne tires-tu donc pas ? Tues moi ou écarte toi, et laisse moi passer par la porte. J'ai deux mots à dire à votre putain de Capitaine.
-Tu es un homme mort de toutes façons, Barberousse a dit pas de quartier !
-Ca m'étonnerait que tes supérieurs veulent me tuer. Je suis le Capitaine en chef de la marine commerciale d'Arsérrya. Je suis important aux yeux du Sultan d'Arsérrya, des pirates ne manqueraient jamais une telle occasion.
-Quelle occasion ?
-Une rançon.

Il avança de deux pas. Phadransie en recula de trois, en prenand grand soin de le garder en joue.

-Reste où tu es connard !

Le coup de feu partit. Il n'atteignit jamais sa cible. Falcon Qeshdarr s'était élancé sur le côté afin de l'éviter. Phadransie n'avait rien vu venir, mais avait senti dans tout son corps l'impact de ce qui suivit. Les trois coups étaient la combinaison parfaite permettant d'ouvrir le cadenas de l'assujetissement. Elle fut touchée un peu en dessous de l'épaule, sous le sein et à la poitrine. Les muscles se contractèrent d'un coup sous les doigts du prodigue. Phadransie sentit, elle sentit ses poumons se pincer. L'air lui manqua, elle etouffa. Elle tomba au sol. Tout ça s'était passé en moins d'une seconde. Les larmes lui montaient aux yeux. Plus d'air. Son corps entier semblait peser plus lourd que la seconde précédente. Elle n'avait plus d'arrivée air, ne suffoquait pas mais ne parvenait pas à parler non plus. Où était ce Falcon Qeshdarr ? Sans aucun doute il avait fui. Phadransie ne voulait pas mourir là, comme ça. Pourquoi Sally était-elle morte de suite et elle, vivait encore. Elle paniquait à cause de la paralysie totale dans laquelle elle venait de sombrer, et le manque d'air qui l'etouffait. Ses nerfs et ses muscles paraissaient avoir été étirés au maximum, puis tordus sur eux même. Elle était incapable de lever le petit doigt si elle le désirait.

-Phadr ! Putain Phadr !

Cette voix.

Sacha...


-Phadransie !

Il était à genoux, près d'elle. Il la releva comme il le pouvait. Phadransie pu lire de l'inquiétude et de la détresse dans ses yeux. Et de la peine.

Je suis désolée Sacha.

-Putain pourquoi il faut toujours que tu te foutes toi même dans la merde ! Et pourquoi tu es aussi raide ? Réponds moi ! Réponds putain, je vois bien que tu n'es pas morte !

Je ne peux pas parler. Je vais mourir Sacha ! Ne me laisse pas là, il faut que tu m'aides ! Désolée d'avoir été une garce avec toi tout ce temps, au fond je t'aime bien. Il faut que tu me croies.
Sam 13 Juin 2015 - 5:18
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Abad El Shrata du Khamsin
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Abad El Shrata du Khamsin
Abad se tenait adossé contre le mur menant au cabine, qui surplombait le pont. Il était accompagné de plusieurs autres garçons mousses comme lui. Un peu plus bas, Phadransie épongeait son corps parmi la foule qui s'était amassée autour du tonneau d'eau claire. Mais malgré ce grouillement, on ne voyait que elle et ses formes généreuses. Elle pencha la tête en avant et laissa ses cheveux flotter dans le vide, découvrant sa nuque. Sacha sentit une petit sensation dans son pantalon et dut détourner la tête pour ne pas bander. Les autres mousses eux se rincaient l'oeil.
'' Détourne les yeux enculé " dit Sacha en filant un coup de coude à son voisin, un gros balourd au visage gentil dénommé Rodolphe.
- Ouch dit-il en se frottant les côtes. Putain ça va on a compris qu'il fallait pas toucher à Phadransie mais si on peut même plus la regarder ! '' dit-il d'un ton plaintif.
Au moment ou Phadransie remontait le pont, Sacha fit mine de ne pas la reconnaître et tourna la tête très loin, au bord du torticolis. Elle passa devant lui, le regarda un instant et traça sa route sous les sifflés des marins.
- Vous deux vous êtes vraiment incompréhensibles ... 
- Cherche pas à comprendre, répondit Abad qui avait tourné les talons et se dirigeait vers les cales.

Depuis l'incident qui avait failli lui coûter la vie, Sacha avait passé tout son temps libre dans les cales à boucher chaque interstices de la coque, une par une, de 8 heures du matin à 8 heures du soir, sans manger. Il avait quand même eut le droit à trois jours de repos, afin que ses cicatrices se referment un peu, mais après, il n'avait pas arrêté. C'était sa punition pour s'être évanoui comme une tafiole. 
A force de rester dans les profondeurs sombres du Grand Val, il en avait même perdu son bronzage. 
''Putain mais t'es blanc comme un cul en fait, lui avait sortit un autre mousse dans le réfectoire.
Il était allé s'asseoir ailleurs, pour ne pas lui filer son poing dans la gueule et prolonger sa sentence d'encore un mois.
- Bah ça va revient je rigolais ''
- Ta gueule. ''
Phadransie, elle, s'en sortait bien. Le cuisinier l'avait à la bonne et elle passait plus de temps dans les cordages et à s’entraîner au lancé de couteau avec le Knife qu'à éplucher des patates.

Un jour où Sacha était vraiment à bout de nerf, Barberousse était entrée dans la cale :
'' C'est bon, arrête de reboucher trou du cul et ramène ta tête de nœud sur le pont, aujourd'hui tu commences ton entrainement de pirate ''
'' Et ben putain, c'est pas trop tôt, pensa-t-il en lâchant le cordage qu'il s’apprêtait à couper.

*

La journée fut éprouvante et le soir, même blottit dans son hamac, il n'arrivait pas à trouver le sommeil tellement ses courbatures le lançait. Ces séances d'entrainement avaient réveillé des muscles depuis longtemps endormis à force de rester accroupi pour faire rentrer des cordes dans des fentes ... 
Par groupe de deux, le Knife leur apprit à attaquer, parer, esquiver, contre attaquer. Il leur enseigna comment frapper d'estoc et de taille avec un sabre et une épée. Y avait pas à dire c'était un prof génial ! Sévère (gare à la joue de celui qui n'y mettait pas du sien), mais génial !
Au fil des jours, Sacha se surprit à aimer cette petit routine qui s'était installée. Le matin, les garçons mousses étaient de corvée (même si pour Sacha c'était des vacances comparé au Calfat) : il passaient la persillère, récuraient le pont, lavaient les casseroles, etc. Puis l'après midi, quand le soleil tapait bien fort, ils s’entraînait dans la sueur sur le pont qu'ils avaient laver le matin.
Les filles, elles, étaient plus chanceuses, elles s’entraînaient à la fraîcheur du matin et faisaient leurs corvées l'après midi.
A force de répéter ces gestes encore et encore, Sacha s'aperçut un jour qu'il avait des progrès : quand il réussit à désarmer un par un tous ces collègues.
'' Toi petit, tu as un truc '' lui avait simplement dit le Knife.
Le soir, dans le réfectoire, ils discutaient et rigolaient autour d'un ragoûts des exploits qu'ils avaient accomplis l'après midi. Depuis qu'ils n'étaient plus enfermé dans les cales, Sacha était beaucoup moins sur les nerfs et il se surprenait à sourire et parfois même à rire aux blagues de ses acolytes. Néanmoins, dans un coin de sa tête, Phadransie revenait toujours au galop. Il ne pouvait s'empécher de penser à elle. Alors du coin de l'oeil il regardait sur sa gauche et il l'apercevait assise, comme à son habitude dans le coin de la salle, avec Sally qui semblait être devenue sa nouvelle amie.

De jour en jour, Sacha avait remarqué que les membres de l'équipage étaient de plus en plus excités. Dans le refectoire, des mots comme ''baston'', ''trop hâte'', ''ça va saigner'' parvenaient à ses oreilles. Apparemment, le prochain abordage serait pour bientot à en croire la fébrilité ambiante. 
D'un côté, Sacha était excité lui aussi, il avait hate de mettre en pratique tout ce qu'il avait pu apprendre pendant ce mois d'entrainement, mais de l'autre, il avait peur. Et si il mourrait dès la première minute ? Ou pire se faisait trancher un membre ? Il préférait ne pas y penser. Et Phadransie ? Si elle mourrait.
'' Hé Sacha tu m'écoutes '' lui dit Rodolphe le désignant de sa fourchette.
'' Ouais, ouais '' dit Sacha qui se remit à découper sa saucisse.
'' Et qu'est ce que je disais ? ''
...

*

Ca y est, le jour J était enfin arrivé. Ils avaient été réveillé par le marin dans le nid de pie qui avait sonné la corne de brume quand il avait aperçu le pavillon ennemi : une galère Sultane.
Sacha avait fait la queue pour récupérer ses armes puis s'était élancé sur le pont. Il se sentit un peu perdu dans toute cette foule. D'habitude l'équipage était dispersé dans le bateau : certains sur le pont, d'autres dans les cales, les cabines, les cuisines ou le réfectoire. Mais là, tout le monde était présent sur le pont : 5oo pirates bruyants et excités comme une puce à la vue d'un chien à sucer. 
Tout le monde s'affairait avec brouhaha sur le pont à des occupations diverses et variées, certains cognaient dans le mat comme dans un mannequin de bois, puis faisait mine d'esquiver des coups invisibles, d'autres faisaient des pompes et plus loin Sacha aperçut des nains se saouler avant l'abordage en s'enfilant cul sec des litrons de bières à même le tonneau. Les gobelins sautaient et courraient partout, du pont sur les cordages et des cordages sur le pont en poussant des petits cris d'excitation suraigus. Certains essayaient de se mettre à l'écart pour aiguiser tranquillement leur épée, sorte de rituel d'avant combat et Sacha en vut même quelques uns prier.
Sacha et Rodolphe étaient bousculés de toute part, comme pris dans une vague humaine. Tout à coup, Sacha discerna la voix de BarbeRousse qui trancha net avec le vacarme ambiant :
'' Les mousses en première ligne ! ''
- Quoi ?! mais ils n'eurent pas le temps de répliquer que déjà tout l'équipage les poussait vers l'avant jusqu'à ce qu'il soient plaqués au bastingage.
- Le premier abordage, ça se fait en première ligne. Tradition oblige ! cria Barberousse sous l'acclamation de tous les pirates. Un ébouriffa même les cheveux de Sacha.
- C'est surtout pour qu'on crève les premiers, réplique Sacha.
- C'est pas faux ! répondit BarbeRousse sous les rires  des autres membres d'équipages.
Le coeur de Sacha battait la chamade et plus ils s'approchaient du bateau, plus il tapait fort dans sa poitrine.
Sacha posa une main sur la rembarde et se pencha un peu en avant pour vomir, mais rien ne sortit. Il tourna la tête vers la gauche et aperçut Phadransie. Elle regardait le lointain d'un oeil déterminé tandis que le Knife qui était juste derrière elle, murmurait à son oreille.
'' 1 ! cria Barberousse repris par tous l'équipage.
Sacha releva la tête, le bateau était juste devant eux ! Putain déjà !
- 2 !!
Le bateau n'était plus qu'à quelques mètres. Blurp..
- 3 !!! YAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!!!!!!!!!!!!
Au moment même ou les coques des deux bateaux s'entrechoquèrent, tous les membres de l'équipage sautèrent sur la galère sultane, toutes armes dehors prètes à trancher dans le vif.
Sacha fut éjecté malgré lui sur le bateau, par chance, il rattérit sans trop de mal mais ce ne fut pas le cas pour tout le monde et beaucoup se prirent une balle qui les envoya à l'eau. Ce fut le cas pour Rodolphe  qu'une balle perdu avait percutée pile entre les deux yeux. Sa tête était repartie en arrière et sa nuque avait hurté le bastingage du Grand Val dans un craquement puis il était tombé à la mer, 20 mètres plus bas.
Sacha n'avait pas le temps de s'appitoyer, il le savait. Il se redressa aussi vite qu'il le put et se saisit de son sabre. Autour de lui c'était la débandade. Les hommes s'affrontaient dans les cris et le sang giclait de toute part à gros bouillon. A côté de lui, BarbeRousse mis à genoux un marin en agrippant sa jambe de son fouet puis lui trancha la gorge de son sabre sans vergogne avant de se jeter à nouveau dans la bataille en criant. 
Sacha ne savait quoi faire, il n'osait attaquer et en même temps il savait qu'il ne pouvait pas rester planté là. 
Mais le ciel se chargea de lui trouver un adversaire : il entendit un cri qui se rapprochait derrière lui. Il se retourna et eut juste le temps de placer son sabre devant lui. 
Les deux lames s'entrechoquèrent dans un CLONG sonore.
L'homme qu'il devait affronter faisait à peu près sa taille et ils étaient à égalité niveau force Ile se toisaient et essayer de faire céder l'autre en forcant le plus possible sur leurs lames, mais les deux sabres ne bougeaient pas d'un milimètre. Mais brusquement, Sacha retira son sabre, l'homme qui forcait comme un fou, fut surpris et perdit l'équilibre. Sacha en profita pour le décapiter, d'un coup sec, net. Sa tête fut ejectée quelques mètres plus loin et un instant il admira ce corps à genoux et cettes jugulaire qui pissait du sang aussi haut qu'un geyser et qui retombait en pluie sur le pont. Ca en avait un côté presque artistique. C'était son premier corps. Il s'en souviendrait toute sa vie. 
Mais il n'eut pas le temps de se reposer que déjà, deux pirates le montraient du doigt un peu plus loin et le prirent en chasse, sauf que cette fois, ils faisaient le double de sa taille. Sacha courrut vers le met et grimpa aux cordages pour leur echapper. Les hommes aveint du mourir entre temps ou le perdre de vue car ils ne le suivait plus. Ilétait seul dans les cordages et regardait la bataille d'en haut ce qui lui donné un côté bien plus épique. Le combat était allé vite , la moitié des hommes étaient par terre et le pont baignait dans une mare de sang. C'est fou comme le combat nous fait perdre la notion du temps, songea Sacha. Il souffla quelques instant mais il fut bien vite rappelé à l'ordre : sous lui, il aperçut le Knife en difficulté, il était à genoux, pret à se faire pourfendre par un grand gaillard qui se tenait devant lui. L'information n'eut pas le temps de monter à son cerveau que déjà elle redescendait dans son bras. Il coupa la corde qui maintenant une poutre perpendiculaire à celle du Grand Mat. L'immense morceau de bois vint s'écraser avec fracas sur le bandit et écroubouilla par la même occasion une dizaine d'autres marins sultans. Le Knife leva les yeux vers les cordages et l'apeçut. 
'' Merci petit ! dit-il avant de retourner lacérer des chairs aussi agile qu'une fouine.
C'est là que Sacha aperçut Phadransie, elle se dirigeait vrs les calles accompagnée de Sally et quelques autres mousses. 
'' Elle ne vas tout de même pas chercher le capitaine cette folle ''..... Il la vit défoncer la trapper menant vers les cales. Apparemment oui. 
Sans tarder, il sauta sur le pont et se fraya un chemin à travers la foule, esquivant au passage plusieurs lames qui passèrent très près de son visage. Il enjamba une bonne centaine de corps et vit même des marins encore vivant essayer de recoller leur memebres amputés.
Il atteint les cales non sans peine et traversa un couloir à la recherche de Phadransie. En fait c'était facile; il suffisait de suivre les portes défoncées. Tout à coup, il vit surgir un homme habillé d'une tunique de parade vert émeraude. Il fonça sur lui a toute vitesse et Sacha dut sauter dans des pièces adjacentes pour eviter cette toupie humaine. L'homme ne prit même pas la peine de faire demi tour et quand Sacha sortit la tête de l'ouverture, il le vit courir vers le pont. Il remarqua néanmoins que son épaule était en sang. Il fallait vite qu'il retrouve Phadransie. Il remonta le couloir jusqu'à l'endroit ou l'homme avait déboulé et attérit dans une large pièce dont la porte avait elle aussi été défoncée. Par terre gisait Sally et .. 
'' PHADRANSIE ! '' 
-Putain pourquoi il faut toujours que tu te foutes toi même dans la merde ! Et pourquoi tu es aussi raide ? Réponds moi ! Réponds putain !! Phadr !
Elle ne bougeait pas, ne respirait même pas, même ses pupilles étianet statiques. Elle semblait vraiment être morte.
Sacha mit une main derrière sa nuque et l'autre derrière ses genoux et la porta à travers le corridor.
'' Putain ma vieille t'as pas intêret d'être morte, le jeu n'est pas fini, t'as compris, LE JEU N'EST PAS FINI !! '' hurla-t-il en sortant sur le pont.

[en cours, pas gaffe aux fautes]
Dim 14 Juin 2015 - 2:42
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Noire
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Phadransie courrait parmis l'équipage, au travers les centaines de pirates amassés sur le pont. Elle contourna les plus petits, se faufila entre les jambes des plus grands afin d'atteindre sans tarder le bastingage. Elle s'y crampona et pencha en avant son visage. A quelques mètres du Grand Val la galère Sultane sombrait dans les Grand'Eaux corps et âmes. Tous assistaient à ce funeste spectacle aux allures de funérailles sanglantes. Bientôt, il ne resta plus rien de la galère ennemie. Phadransie détourna les yeux assez vite de ce spectacle, lassée. Elle s'apprétait à retourner à son poste, sous les ordres de Barberousse, quand une douleur vive la surprit en la tiraillant au niveau des jambes. Sans comprendre le pourquoi du comment, Phadransie s'écroula sur le pont, alors que tous les pirates retournaient à leurs postes, faisant fi de la jeune femme couchée sur le ventre. Phadransie tenta de se lever mais ses jambes étaient raides, ses muscles paralysés la faisait souffrir atrocement. Deux bottes noires comme la plus profonde des nuits vinrent se poser près de son visage. Elle leva les yeux, et les siens croisèrent ceux du Capitaine du Grand Val. C'était la seconde fois qu'elle le voyait, et ce second échange ne fut pas plus agréable que le premier. Elle n'arrivait pas à se relever, et le regard glacial de l'elfe noir la mettait à nue et la clouait au sol. Elle voulait parler, lui demandant de l'aider, mais n'osait pas le faire. Il était si grand, si froid, si autoritaire. Il ne l'avait pas lâché du regard. Une éternité s'écoula, Phadransie tenta à plusieurs reprises de se relever. Bon sang, le Capitaine arpentait le pont du Val et personne ne semblait l'avoir remarqué, comme si sa présence était quelque chose de tout à fait normal ! Il porta une main à sa ceinture, elle glissa avec lenteur jusqu'à la garde de son sabre -un parmi les trois- qu'il portait au côté. Il dégaina.

-Capitaine ? voulut demander la jeune femme, mais ses lèvres refusaient de bouger.

Phadransie savait qu'il allait la tuer. Un pirate sans jambe était inutile, et un pirate inutile était un poids mort. Et les poids morts, il fallait les balancer à la flotte. Elle n'avait peut être que quinze Tours, mais savait cela, et c'était une évidence pour tous à bord. Elle voulut supplier le Capitaine de ne pas abattre sa lame sur elle, elle était trop jeune pour périr et ainsi. Elle n'avait pas survécu à l'abordage pour crever comme ça et ici ! C'était injuste ! Des larmes coulèrent de ses yeux. Le Capitaine Andelzzer abaissa son bras.

-Phadransie ! Nooon !

Sacha avait bondi de derrière elle, comme un lapin d'un chapeau d'un trouvère. Il s'était penché sur elle, faisant bouclier de son corps au moment où le sabre tranchait l'air. Sacha fut transpercé en deux sur le coup.


~


Phadransie ouvrit les yeux dans un haut-le-corps irraisonné. Elle transpirait abondement. Elle mit un moment à comprendre où elle était et se souvenir de l'abordage. Sur elle, un drap était posé. En réalité pas un drap, mais sa chemise, jadis blanche et à présent repeinte avec le sang de ses ennemis.  Elle fut soulagée de constater que ça n'était pas le sien. Elle était seins nus, et du sang tachetait encore son corps et son visage. Elle ne pouvait le voir mais le sentait. Phadransie se redressa sur les coudes. Morbleu qu'elle était raide ! Ses muscles la faisaient souffrir, un peu moins que dans son rêve néanmoins. Elle se souvint alors. Les trois coups ! La paralysie. Le Capitaine de la galère. Et Sacha. Alors elle n'était pas morte ? C'est Sacha qui l'avait sauvé ?
Tout doucement, elle étira ses bras, ce qui eut pour résultat de fixer sur son visage un rictus de douleur. Elle tendit ses jambes lentement et fit de même avec ses mains, ses pieds et ses orteils. Elle se sentait bizarre, mais rien ne semblait cassé. Elle était allongée dans un coin sous le faux pont, non loin de l'endroit où quelques jours auparavant, elle avait fait un brin de toilettes à l'eau claire. A l'extérieur, sur le pont, il faisait jour -elle le voyait à la lumière qui filtrait à travers la trappe- et l'équipage devait suer comme jamais. Elle avait très soif, mais il n'y avait pas d'eau autour d'elle. Elle tenta de se lever mais n'y parvint pas, et savait qu'il était encore trop tôt pour que son corps le lui permette. Combien de temps était-elle restée ainsi, paralysée entre la vie et la mort ? Phadransie avait le choix entre ramper jusqu'à la trappe ou sombrer de nouveau. Elle se rendormit.


~


Elle se réveilla de nouveau, environ deux heures plus tard. Le jour était encore là, à quelques mètres d'elle, au dessus de sa tête. Phadransie fit de nouveau jouer ses articulation, mais le bilan fut le même que lors de son premier réveil. Ses muscles étaient lourds et engourdis, mais pas brisés. Bientôt, des bruits de pas se firent entendre, et elle distingua une silhouette qui descendait les marches de bois. Un jeune garçon brun à la mine inquiète.

« Sacha...
-Tu arrives à parler ? C'est pas trop tôt.
-Combien de temps j'ai...
-Plusieurs heures, la coupa son acolyte, en fait presque une journée complète.

Sacha vint s'asseoir à côté d'elle. Phadransie ramena un peu sa chemise sur sa poitrine. Elle n'aimait pas avoir l'air faible devant Sacha. Durant plusieurs minutes, il lui parla de façon normale, comme lorsqu'ils étaient encore au QG à Port-Argenterie, comme si elle n'avait pas failli mourir sous ses yeux comme une conne. Il lui détailla l'attaque, lui expliqua que les pirates avaient pillés vivres, vêtements, armes et tout objets précieux sur la galère désormais au fond de l'eau. « Les galériens en bonne santé ont été parqués à fond de cale, les autres, Reddar les a buté. Il a sorti la planche, et les a fait marcher dessus. Si tu étais là pour voir ça ! » Durant près de dix minutes, il lui raconta comment Reddar avait saisi son tromblon à bout de bras et les avait pointé sur les prisonniers, un a un. « La poudre ou la planche ? » Phadransie resta pendue à ses lèvres. « J'ai même eu droit à un sabre d'abordage, ajouta Sacha le sourire aux lèvres. Et les prisonniers de valeurs, les Quartiers Maîtres et Reddar les ont mis à fond de cale aussi, au biscuit sec et à l'eau. Ils seront échangés contre une rançon là où les autres seront vendus comme esclaves. On va devenir riches, Phadr ! » Un sourire se dessina sur les lèvres de Phadransie. Sacha parlait avec ferveur et entrain. Lui qui prétendait ne pas aimer les pirates. Phadransie pouvait bien deviner qu'il avait au moins pris plaisir à l'abordage. Puis vint le moment d'évoquer ce qui devait être évoqué. Un silence. Phadransie n'avait pas envie de se lancer en première, mais Sacha ne disait plus rien.

-Sacha. C'est toi qui t'es occupé de moi ?

Il ne dit rien et acquiesça d'un signe de tête.

-Ta copine, Sally. Elle est morte. Et mon pote Rodolphe est mort aussi, dès les premières minutes de l'abordage. Il n'y a plus que nous deux.

Que voulait-il dire par « il n'y a plus que nous deux. » Quand à la mort de Sally... Phadransie s'en souvenait. Elle baissa la tête, attristée par le contrecoup de cette nouvelle.

-C'est le Capitaine de la galère qui a buté Sally ! Qui c'est qui a tué ton pote ?
-Rodolphe ? C'était...une balle perdue.
-Putain.
-Ouais...
-Sacha je...

Elle allait devoir se lancer.

-Merci Sacha. J'ai cru que j'allais crever, j'ai eu peur. Je voulais pas mourir comme ça, tu vois. Et je suis désolée pour la dernière fois. Le fouet tu sais. C'était con, en fait.
Sacha ne répondit pas, mais hocha la tête. Cela était du passé désormais pour les deux amis.

-Moi non plus Phadr je voulais pas que tu crèves comme ça tu sais. Putain tu m'as fichu une peur bleue ! Parfois t'es vraiment conne quand même.
-Je suis pas conne !
-Sans moi tu serais crevée !
-Je ne t'ai pas demandé de veiller sur moi ! s'emporta-t-elle.
-Mais tu es bien contente que je l'ai fais, avoue le !
-T'es chiant putain !
-Toi t'es conne !

Un silence. Les deux s’arrêtèrent là. Ce fut Sacha qui reprit, d'une voix posée.

-Ne me fais plus jamais un coup comme ça Phadransie.

Tout en disant cela, il avait approché son visage du sien. Il voulait l'embrasser. C'était quoi ce plan de merde ? Phadransie hésita puis elle ferma les yeux. Elle sentit les lèvres de Sacha se poser sur les siennes. Putain c'était trop bizarre cette situation ! Sacha était son pote. Ils se connaissaient depuis toujours. Et là il l'embrassait. Elle recula un peu, sans pour autant le repousser. C'était son premier baiser, et les lèvres de Sacha étaient douces et salées. Alors qu'elle s'était reculée de quelques centimètres, la main de Sacha se posa sur son flanc et remonta doucement jusque sur sa poitrine. Elle sentit sa langue dans sa bouche. Là il faisait chier, vraiment. Phadransie finit par le repousser, fermement. Elle lui découvrait une expression étrange, non violente sur le visage. Elle prit une voix énervée.

-Putain mais c'était quoi ça ?

Sacha la regarda dans les yeux en goûtant ses lèvres, l'air malicieux.

-Maintenant, on est quitte.

Phadransie, pour une fois, ne trouva rien à répondre à son acolyte. Ce dernier se leva et se saisit d'une carafe d'eau non loin, il lui servit un verre qu'il lui tendit.

-La prochaine escale est pour bientôt, les terres approchent. Et Barberousse t'autorise à te reposer jusque là. Tu pourras rester ici, personne ne t’embêtera. Avec un peu de chance nous jetterons l'ancre au port de Puerto Blanco, une petite île au sud du Continent. Je te ferai apporter de la nourriture ce soir et de l'eau quand tu en auras besoin.

Il quitta la pièce et regagna le pont du Grand Val.
Mar 16 Juin 2015 - 21:09
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Abad El Shrata du Khamsin
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Abad El Shrata du Khamsin
Trois jours s'ecoulèrent depuis la prise de la galère sultane. L'excitation de l'abordage avait laissé place à la joie du butin : les cales étaient pleines d'or et de prisonniers ! De plus les pertes n'avaient pas été nombreuses. Un des meilleurs abordages depuis longtemps disait-on.
Mais ce qui enjoué le plus l'équipage c'était l'escale. Escale qui allait se faire à :
'' Puerto Blanco ? C'est où ça ? répliqua Sacha à un des mousses qui s'appelait Igor.
- Tu connais pas Puerto Blanco . C'est le plus grand port de l'archipel de Grande Lagoon !
Devant la mine de Sacha qui ne semblait pas connaitre, il reprit :
- En apparence, c'est un port marchand mais c'est surtout le troisième plus grand port pirate de tout Ryscior !
- Dans ce cas, pourquoi ne pas retourner à Port Argenterie ? C'est le plus grand et nous étions plus près.
- Un pirate ne fait jamais escale deux fois dans le même port. Toi tu as encore beaucoup à apprendre, dit-il les yeux remplis de dédains avant de s'éloigner.
Sacha le regarda avec mépris, lui et sa tête d'ampoule. Il paraissait si jeune et pourtant il en savait deux fois plus que lui sur la vie pirate...
Sacha apprit plus tard que cela faisait en fait presque un an qu'il était sur le Grand Val et qu'il n'avait pas toujours été promu... aucun mérite.
    Lorsqu'ils virent terre, Sacha était penché sur le bastingage. Devant lui se dressait une île tropicale verdoyante qui s'étirait sur les cotés puis se déchirait en une multitude de petites îles, semblables à des rochers surmontés de palmiers.
Dans le ciel volait une petite nuée de perroquets de couleur rouge et verte et devant lui nageait un petit groupe de dauphin qui ouvrait le pas du Grand Val.
L'archipel de Blue Lagoon portait bien son nom, l'eau y était transparente comme de l'eau de roche et en même temps d'un bleu très clair, comme si l'on y avait mélangeait le ciel et les nuages. C'était un spectacle magnifique !
''Alors c'est ça Puerto Blanco ? dit une voix familière à côté de lui.
Sacha tourna brusquement la tête : c'était Phadransie. Elle se pencha sur la rambarde à sa gauche.
- Phadr ? Tu devrais te reposer !
-T'inquiète gros, je me sens mieux. En plus j'ai entendu quelques conversations de mon lit et apparemment ce soir, ça va être la soirée du siècle, je pouvais pas rater ça ! dit-elle en fixant l'île. Et puis pour toi c'est le grand soir, ajouta-t-elle en lui lançant un regard du coin de l'oeil.
Elle avait vu claire dans ses intentions, comme à son habitude. Sacha se tourna à nouveau vers l'immensité azurée : mais était-il sur de vouloir encore s'enfuir ?


*

On parqua le bateau dans le port, à côté de deux galions aux voilures dorées dont le propriètaire devait être richissime, puis Sacha mit le premier pied à terre depuis plus d'un mois. Devant eux s'étirait la magnifique ville de Puerto Blanco, et sa multitude de maisons cubiques et blanchies à la chaux d'ou elle tirait son nom. 


[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Le-vil11





'' C'ést une ville bien calme pour le troisième port pirate de Ryscior '' pensa Sacha.
Ici, contrairement à Port Argenterie, on sentait bien qu'il résidait une séparation entre les pirates et le reste de la population. 
Ils remontèrent l'allée principale. Même les rues étaient calmes. Les gens semblaient sympathiques et les femmes, qui portaient d'amples voilures d'un bleu profond, faisaient leurs courses avec le sourire aux lèvres, non troublées le moins du monde à la vue des pirates. 
'' C'est le paysage qui les rend si aimable ? ''
C'était la première ville que Sacha voyait en dehors de Port Argenterie et ses yeux, avides de sensations, se posaient sur tous les coins de rue. 
Devant eux marchait Thomas Reddard, qui tenait fermement la chaîne d'esclave qui traînait le pied derrière lui suivit de près par Barberousse.
Andelzzer se tenait à ses côtés, ténébreux et à la fois si gracieux, il faisait froid dans le dos. Avec une tête pareil en tête de peloton, il ne fut pas difficile de se frayer un chemin à travers la foule qui s'écartait pour laisser passer l'équipage. Derrière eux les suivait le knife qui machouillait un cure dent comme à son habitude.
Ils s’arrêtèrent devant un immense escalier qui serpentait vers les hauteurs de Puerto Blanco, le groupe de pirate se sépara. Tous partirent vers la gauche en direction des auberges, et quelques mousses suivirent qui se firent vite rappeler à l'ordre par Reddard.
'' Les mousses, suivez moi, vous devez voir à quoi ressemble le marché aux esclaves '' dit-il avant de monter la première marche.
Ils aboutirent au premier niveau de la ville et tournèrent à droite le long d'un belvédère qui offrait une vue magnifique sur la mer et les ilots alentours. Mais ils n'eurent pas le temps d'apprécier la vue, puisqu'ils s’engouffrèrent presque immédiatement dans une ruelle au milieu des petites maisons carrées. Au fond du cul de sac, ils débouchèrent sur une petite place sans issue, cerclée par des murs sans fenêtres.
Contre le mur du fond avait été érigé une plate forme en bois sur laquelle un grand gaillard parlait fort dans un dialecte mêlant langue commune et expressions sudiste. Il montrait en faisant de grands gestes trois esclaves enchaînés à ses côtes, leurs corps recouverts de cicatrices.
Devant l'estrade se tenait cinq rangées de bancs presque tous vides. Seulement 3 personnes avaient remplis les trois premiers et une dernière s'était assise sur le banc du fond.
Ils se regardèrent avec Phadransie.
'' Eh ben, tout ça pour ça '' pensa Sacha.
Reddard leur expliqua par la suite que le marché aux esclaves de Puerto Blanco était la génèse de toute les traites d'esclaves du Sud du continent, puisque c'est là que les revendeurs achetaient en gros et à bas prix les esclaves qu'ils revendaient ensuite aux particuliers, c'est pour cela qu'il n'était pas rempli comme celui de Port Argenterie par exemple.
Andelzzer s'assit, accompagné du Knife et de Barberousse. Les mousses se placèrent au fond et Reddard se dirigea vers l'estrade en attendant son tour pendant que acheteurs enchérissaient :
'' 5 pièces d'or !
- 1o ! 
- Vendu pour 1o pièces d'or '' dit le gaillard en direction de l'acheteur assis au premier rang à gauche. 
Les trois esclaves descendirent de l'estrade et Reddard monta accompagné de la trentaine d'esclaves enchaînés, dont certains durent rester sur la terre ferme, faute de place.
Reddard murmura quelques mots à l'oreille du gaillard puis quand ils eurent fini leur messes basses, l'autre se mit à parler tout haut, en langage commun cette fois :
'' Vend ce lot de Marins des Sultanats fraichement capturés. Entrainés par les plus grands maitres des mers Sultanes, capables de faire avancer n'importe quel bateau de leurs bras puissants, ils sont à vendre avec leur capitaine, dit-il en pointant l'homme à la tunique verte maintenant crasseuse et que Sacha reconnu à peine tellement il avait maigri, dont les exploits pendant l'abordage ne sont pas à démontrer puisqu'il exécute à la perfection le Coup des Trois Aiguilles. ''
A ces derniers mots, les trois revendeurs ne purent se retenir d'écarquiller les yeux, malgré leurs efforts pour rester impassible.
Tout à coup une main remplie de bagues en or serties de rubis fendit l'air au dernier rang. Elle appartenait à un homme de couleur, à l'air détaché, et à la tunique aussi doré que ses bagues. Quand Reddard vit la main se lever, il esquissa un sourire et descendit immédiatement de la rambarde, sans attendre l'approbation du ''juge''. Apparemment, il avait eu ce qu'il cherchait.
'' C'est qui celui là ? demanda Phadransie dans le vide.
- Tu ne le connais pas ?! s'empecha de répondre Igor en murmurant. C'est Piccolo, le plus grand revendeur d'esclave de Puerto Blanco et surement de tout le Sud de Ryscior. Les deux galions dorés à l'entrée du port, ils sont à lui ! Il est obligé de stocker ses esclaves à l'intérieur, puis quand ils sont pleins il les revend sur tout le continent. Il est surement l'une des plus grosse fortune de Ryscior. Pour une soi disant pirate, tu ne t'y connais pas vraiment en ...
- Les enfant, vous feriez mieux de rejoindre les autres à l'auberge, coupa le Knife qui s'était faufilé derrière eux sans que personne ne le remarque, nous avons à faire avec Reddard et le capitaine.
Il était arrivé juste à temps. Phadransie serrait le poing. L'intervention du Knife avait surement sauvé le nez d'Igor. Sacha esquissa un sourire, décidément Phadransie n'avait pas sa patience. Ils redescendirent les marches menant au port accompagnés de Barberousse et trouvèrent sans peine l'auberge en suivant le vacarme que faisaient les pirates. Phadransie et Sacha se lancèrent un de ces regards complice.
Que la fête commence !


'' BOIS ! BOIS ! BOIS ! '' scandaient les mousses en tapant du poing sur la table.
Sacha avala son verre cul sec et le reposa bruyamment sur la table en lâchant un cri de victoire qui fut accompagné des applaudissements des autres mousses. Phadransie lacha un ''WOOOOOh'' en faisant tourner son poing qui se détacha des autres cris. Décidément, il tenait toujours aussi bien l'alcool.
Sacha était assis sur une petite table, en face se tenait, ou plutot se maintenait, Igor et entre eux se dressait une vingtaine de verres d'un alcool local vides. On voyait qu'Igor luttait contre l'alcool. Il transipirait et avait viré au vert. Il tendit une main tremblante vers le verre plein qu'un des mousses lui avait rempli, l'approcha de ses lèvres, respira un grand coup et le but cul sec. Tout le monde retint son souffle, puis au bout de quelques secondes :
'' Putain Igor tu nous avais caché que ... 
- BLUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUURP ! ''
Il dégobilla sur la table. Une fois, deux fois, trois fois il regurgita tout l'alcool qu'il avait avalé dans un ralement sous les rires des autres. Certains échangèrent de l'argent, ceux qui avaient parié sur Igor n'étaient pas nombreux mais ils avaient quand même perdu gros.
Phadransie se pencha jusqu'à la ceinture du perdant et en tira un bourse remplie d'or puis de son autre main elle se saisit de ses cheveux, épongea son vomi avec sa tête et l'envoya à terre. 
'' Les vrais pirates ça sait boire, tafiole ! '' dit-elle en s'asseyant à son tour devant Sacha. Les filles du groupe se mirent à crier :
'' Allez Phadr, montre leur qui c'est le sexe fort ! ''
Cris qui furent repris par les garçon :
'' Sacha porte tes couilles ou on te casse la geule !! ''
Phadransie envoya la bourse à Sacha qui l'attrapa en vol (l'alcool ne semblait même pas encore avoir affecter encore ses réflexes). Il en inspecta l'intérieur. C'était beaucoup plus que ce qu'il avait parié avec Igor mais en fait, il n'en avait rien à foutre. Il la fourra dans sa poche.
'' T'es prêt à mordre la poussière Sacha, dit Phadransie en tendant son verre sur le côté qui fut aussitôt rempli par un des mousses.
- Je t'attends'' dit Sacha en l'imitant.
Tout à coup la porte de l'auberge s'ouvrit à la volée, jetant un froid dans toute la pièce. Tout le monde se retourna. C'était Andelzzer, Reddard et le Knife. Le Knife arborait un sourire malicieux, à son habitude, quant à Reddard et Andelzzer ils arboraient une mine froide, et dans le cas du dernier, même sinistre.
Dans le silence ambiant, Andelzzer se dirigea vers l'escalier menant aux chambre. Tout le monde le suivait du regard sans dire un mot. Le premier murmure fut laché uniquement quand on fut sur, au son distinctif du claquement distinctif d'une porte qui se ferme, que le capitaine était rentré dans sa chambre. 
Bien qu'arborant aucune émotion sur son visage de marbre lorsque Andelzzer était passé près de Phadransie, Sacha avait tout de même cru discerner quelque chose dans ses yeux bleus cristalins. L'espace d'un instant, ses pupilles s'étaient comme dilatées. Mais Sacha mit ça sur le compte de l'alcool, même si il était sur qu'Andelzzer avait regardé en direction de Phadransie.
Reddard et le Knife se dirigèrent vers la tables des pirates expérimentés, les loups de mers comme on les appelait, ceux qui naviguaient déjà alors que Sacha était encore dans les couilles de son con de père.
Le Knife brisa le silence en commandant une tournée de bière pour toute sa tablée puis petit à petit les langues se délièrent et bientôt on atteint le même brouhaha que quelques minutes auparavant.
'' Bon on en était où ? dit Phadransie en se remettant droite sur le dos de sa chaise.
- Euh .. au moment ou je te flanquais la honte de ta vie ? dit Sacha en buvant cul sec, suivit de son acolyte

*
'' BLUUURP ! ''
Sacha vomi sur les seins nus d'une des filles de joie qui se tenait sur ses genoux. Elle se releva en poussant un cri de dégoût puis lui fila une gifle qui l'affala à plat ventre sur la table envoyant valser au passage une dizaine de verres. Il redressa avec peine la tête et leva es yeux vers Phadransie :
'' Phadr .. blurp.. je dois m'avouer vaincu. Mais ..blurp.. je tiens à dire que ce n'était pas mon premier défi et que j'ai plus bu que toi ! Tu n'as donc aucun mérite..., puis son front retomba contre le bois dur de la table.
Phadransie qui elle aussi était dans un état d'ébriété avancé mais n'avait pas encore vomi brandit son index devant elle :
- Tu ne peux rien contre Phadransie la reine des mers. '' Elle abaissa son bras mais son coude rata le bord de la table, son front percuta la surface en vois dans l'hilarité générale.
- Ah Ah Ah ! Reine de la bière oui ! ... bluuuurp ! ricana Sacha avant de lacher un rot.
- Phadransie, dit Reddard parvenu à leur table.
Sacha ne bougea pas mais Phadransie essaya tant bien que mal de se remettre droite sur sa chaise tachant de faire bonne figure :
- Oui c'est moi !
Sacha ricana.
- Andelzzer te veut dans sa chambe. Maintenant.
A ces mots, Sacha redressa la tête. Son regard avait changé. Il était sérieux à présent.
Phadransie aussi avait changer d'expression, elle tourna la tête vers Reddard :
- Maintenant ?
- Maintenant. 
Elle se releva doucement. Tous les mousses s'étaient tus et la regardait avec des yeux écarquillés. Voulait-il la féliciter pour son premier abordage ? La punir pour avoir blessé le capitaine ? Allait-il la tuer ? pensa Sacha. Après tout on se savait rien du caractère de ce capitaine fantôme. 
Sacha s’apprêta à sa lever mais Phadransie lui lança un de ces regards qu'il connaissait si bien et qui voulait dire '' je m'en occupe''.
Elle suivit lentement Reddard, monta les escaliers et disparut. 
'' Moi je vous dis qu'elle va être promue, allez buvons à sa santé ! '' cria une des mousses aux crâne rasé.
Sacha tenta de se redressa mais il glissa et dans un BOUM sonore, se retrouva à terre sur le dos. 
Finalement on était pas si mal ici pensa-t-il. 
Et prit dans le flot de l'alcool qui le berçait, il s'endormit. 
Sam 27 Juin 2015 - 18:45
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Trois jours s'étaient à présent écoulés à dater de ses réconciliations avec Sacha. Phadransie se sentait beaucoup mieux suite à son état paralytique dû à l'arc de Trois. Elle avait passé ces derniers jours à remettre en question tout ce qu'on lui avait dit et enseigné à bord du Grand Val. Dans sa tête, trois mots dansait sans halte, se dessinant devant ces yeux. L'arc de Trois. Les Trois Coups. Elle ne pouvait pas en rester là, d'autant plus que, selon Sacha, le Val allait très bientôt faire escale dans un port où les prisonniers seraient tous vendus en tant qu'esclaves. Aussi, au bout du troisième jour, Phadransie descendit dans les cales du Grand Val.


~


Elle avait réussi à assommer sans se faire voir les deux jeunes mousses qui servaient de gardes, bien que ce n'était pas eux qui gardaient les clés des geôles. Phadransie était plutôt fière de son exploit. Elle s'en venterait sûrement auprès de Sacha plus tard. Les prisonniers s'étaient redressés derrière les grilles, levant vers elle des regards interrogateurs et pour certains, désespérés. Phadransie chercha longtemps celui pour qui elle venait de friser tant de risques. L'espace d'un instant, elle craint qu'il fut déplacé autre part, isolé. Elle repassa plusieurs fois entre les différentes cellules, sentant la contraction monter en son estomac. Putain, tout ça pour rien. Puis elle le repéra enfin. Le Capitaine ! Elle se rendit compte qu'il ne portait plus son grand tricorne, ainsi que son manteau d'or et d’émeraude, et c'était probablement à cause de ce fait qu'elle n'avait pas réussi à le repérer de suite. Il était isolé dans une cellule. Elle s'en approcha jusqu'à être presque collée aux barreaux rouillés.

-Hé toi.


[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Soakin10


Il était assis au fond de la cellule, adossé contre le mur couvert d'algues. Il faisait sombre car Phadransie avait prit soin d'éteindre toutes les torches censées brûler. Le Capitaine Sultan leva les yeux vers elle. De beaux yeux verts, songeait Phadransie. Il était torse nu et avait un corps parsemé de muscles puissants, fidèle reflet d'un parfait instituteur de cette technique secrète. Phadransie l'interpella de nouveau.

-Qu'est ce que tu me veux ? cracha-t-il.
-C'est quoi ton nom encore ?
-Falcon Qeshdarr, pour vous défendre ou vous pourfendre, selon mon bon vouloir.
-Ouais ben tu vas être vendu comme esclave bientôt, et tu pourras plus pourfendre beaucoup de gens.
-Je m'évaderai.
-Non, tu pourras pas.
-Je préfère mourir maintenant que vivre enchaîné jusqu'à la nuit des temps.
-Tu es pas obligé de mourir tu sais ?

Elle laissa passer un silence. Le Capitaine Qeshdarr croisa les bras en la regardant. Il souriait. Un sourire mauvais.

-Vraiment ? Rappelle moi ton nom à toi encore ?
-Phadransie.
-C'est ça oui, la naïve Phadransie.  Tu me veux quoi ?
-J'ai une proposition à te fa....
-Je ne suis pas intéressé, tu peux t'en aller Phadransie.

Elle fronça les sourcils et le foudroya du regard comme elle l'aimait à le faire. Tout puissant qu'il était, c'était lui qui se trouvait derrière les barreaux en ce moment, pas elle !

-Putain mais laisse moi finir connard.
-Je sais très bien ce que tu vas me proposer.
-Non tu sais pas fils de pute !
-Tu vas me proposer l'apprentissage de mon arc de Trois en échange de quoi tu me ferais quitter les cales de ce navire de ténèbres, je me demande bien comment d'ailleurs.
-Facile, je vole les clés à Cul-Bite-Us, on met une chaloupe à la mer et on atteint le port le plus proche, avant le Val.
-Très ingénieux.

Il laissa descendre ses bras le long de son corps, l'air parfaitement serein. De toute évidence, il ne croyait pas aux chances de réussite de ce plan là.

-C'est quoi ton problème ? cracha Phadransie.
-Pars vite avant que les pseudos gardiens ne se réveillent et ne t’exécutent. Tu es jeune et jolie, ça serait bête de mourir comme ça, surtout après que je t'ai volontairement épargné sur mon Trois Coups.
-Mais putain je te fais une proposition en or espèce de connard, s'emporta Phadransie ! Tu préfères devenir un esclave ?
-Je t'ai dis que je me libérerai.
-Mais tout seul t'y arriveras jamais !
-Bien sûr que si. Tu n'as aucune idée des situations desquelles je me suis déjà libéré, petite.
-Mais t'es con. Moi je peux t'aider !
-Si tu veux vraiment m'aider, je ne suis pas contre le fait que tu me fasses apporter un peu de pain. Si ton Capitaine veut tirer le maximum de fric de ses prisonniers, il devrait songer à mieux les nourrir.
-Ecoute moi. Toute ma vie on m'a dit que pour avoir ce qu'on voulait, pour se protéger et se défendre, il fallait savoir se battre. Porter un sabre ou tirer au pistolet. Et je l'ai toujours cru ! Mais à quoi ça sert d'avoir un pistolet dans la main, ou un sabre à la ceinture si on n'a même pas le temps de tirer ou dégainer ! Toi tu disparais, comme ça, et tu tapes ta cible, et elle s'écroule de suite ! C'est mieux qu'une putain d'arme !
-Et tu sens sous tes doigts les muscles se bloquer. C'est cela que je trouve spécifiquement plaisant dans cette technique.
-Apprends moi, supplia Phadransie en espérant qu'il dise enfin oui.
-Aurevoir Phadransie la pirate, je suis ravi d'avoir pu voir que tu te portes bien.

Elle lui balança un crachat au visage, fort bien visé car il s'éjecta lui même entre les barreaux de la cellule.

-Va crever fils de pute.

Il essuya sa joue du revers de la main.

-En homme libre et en enfer de préférence. Le paradis me dégoûte.


~


-Tu vas rouler Sacha !! Tu vas rouler !
-Ta gueule ! rit son acolyte.

Sacha but cul sec le verre qui se trouvait devant lui. Phadransie le voyait déjà tanguer. Putain il va se mettre minable ce con. Sans comprendre le pourquoi du comment, son bras à elle dérapa sur la table et elle faucha un des shooters qui s'écrasa et se brisa sur le sol. Elle laissa échapper un « morbleu » et éclata de rire avant de s'en saisir d'un autre et de le remplir de rhum à ras bord. Elle avait toujours aimé le rhum, en fait. Elle se souvenait que toute petite elle détestait ça quand elle trempait les lèvres. Puis en grandissant, quand elle avait parfois la chance de trouver une bouteille abandonnée pas trop vidée avec Sacha, ils s'amusaient à la descendre avec tous les orphelins du QG. Une bouteille de rhum a demi pleine, pour des miséreux qui ne possédaient rien, c'était aussi précieux qu'un coffre empli d'or et de joyaux, et une formidable occasion de réjouissance. Chacun y allait de sa gorgée, et la bouteille se vidait très rapidement. Trop rapidement d'ailleurs, elle ne lui avait jamais laissé le temps de devenir raide bourrée. Ca tournait un peu souvent, mais c'était tout. Et puis se mettre minable ça ne la tentait pas. Si elle n'était plus capable de veiller sur ses arrières, personne n'était là pour le faire à Port-Argenterie. Sacha ? Il l'avait bien embrassé, non ? Avait-il des...comment on disait encore...des « sentiments » pour elle ? Ou tout cela c'était de la connerie, encore ?

-Allez Phadr ! Mets lui la mine à ce con !

Phadransie dessina sur ses lèvres le plus large de ces sourires. L'adrénaline coulait dans son sang. Elle la sentait marteler ses tempes de l'intérieur de son crane. Elle se sentait tellement légère et bien, trop pour songer à ces conneries. Elle porta la shooter à sa bouche et le descendit d'une traite. On l'applaudit. Elle aimait être le centre d'attention ainsi.

-A toi Sacha. Tu vas rouler je te dis, mon pote !

Sacha était mal, cela se lisait sur son visage. Il porta le verre à ses lèvres, le descendit. Il sourit. Putain, joli coup ! Puis sans prévenir, il gerba comme une merde sur les seins de la pute sur ces genoux. Cette dernière se prit un raz de marrée dans la gueule sous les yeux de tous les pirates, et Phadransie éclata de rire derechef. C'était bien fait pour sa gueule. Elle avait qu'à pas être là cette salope !

-Tu ne peux rien contre Phadransie la reine des mers !
-Ah ah ah ! Reine de la bière oui !
-Phadransie, les interrompit le Second du Capitaine, Tomas Reddar parvenu jusqu'à eux.
-Ouais, c'est moi !
-Andelzzer te veut dans sa chambre. Maintenant.

Phadransie dû consommer quelques secodnes afn que tout se stabilise autour d'elle, et qu'elle assimile l'information. Andelzzer...Andelzzer...Andelzzer ! Le Capitaine ! Il voulait la voir...elle ?

-Maintenant ?
-Maintenant.

Il y avait quelque chose de différent au fond des prunelles de Reddar. Quelque chose de retiré, de froid. Mais Phadransie était trop ivre pour le voir et tenter de mettre le doigt dessus. Elle monta de sa chaise et se leva jusqu'aux escaliers, menant à la chambre du Capitaine. Reddar ne l'avait pas accompagné. En fait elle n'était pas sure qu'il était bien là. Il y avait plusieurs portes et plusieurs chambres. Putain, si elle se gourait de chambre ? Elle essuya son visage transpirant d'un revers de la manche, espérant gommer de ce même coup le rhum qui devait le tacher.

-Allez, j'y vais !

Elle frissonna avant de poser sa main moite sur la poignée de porte et l'abaisser. Un Capitaine pirate demandait à la voir en privée, elle. Il y avait quelques mois encore, les putains la désignaient du doigt lorsqu'elle déambulait dans les ruelles merdeuses d'Argenterie. Aujourd'hui était son jour de gloire, bordel ! C'était un putain d'honneur !


~



Dès lors que la porte se referma dans un son grave et sec, Phadransie savait qu'elle s'apprêtait à toucher du doigt les nimbes du succès. Elle voulait faire la meilleure impression possible au Capitaine Andelzzer, de quelques façons que ça soit. Elle croisa les bras derrière son dos et abaissa le regard en le voyant. Il était si impressionnant, auréolé par l'éclat bleuté et froid des bougies.
A la gauche de Phadransie se trouvait une commode en bois noir, pourvue de trois tiroirs fermés. Une fine pellicule de poussière saupoudrait ladite commode, sans pour autant ajouter une impression de désertion à la chambre. Un chandelier était posé dans l'un des angle de la chambre, mais la lumière qui s'en dégageait, bien que rougeoyante, avait un petit quelque chose qui la faisait paraître frigide et délicate. La chambre était sinon, plutôt simplement agencée. Il y avait là, en plus de la commode, un miroir plein pied qui devait faire bien 1 mètre 80 de hauteur, une petite table soutenant les trois sabres du Capitaine Andelzzer et un lit aux draps blancs. Et l'éclatante blancheur des draps contrastait de façon plus que violente avec la noirceur qui se dégageait de l'elfe. Il était assis sur le lit, et lorsque Phadransie eut terminé de refermer la porte derrière elle, il se redressa et se dirigea vers la table basse, lui tournant le dos. C'était un elfe grand, vêtu du plus noir des noirs, fin, élégant et terriblement fascinant. Phadransie éprouvait pour lui un mélange de crainte, d'admiration et de respect. C'était en plus, le premier elfe qu'elle voyait. Elle se concentra afin de repousser au fond d'elle même l'effet de l'alcool. Elle désirait être pleinement elle même, pour vivre cet entretien avec ce personnage si majestueux.

-Vous vouliez me voir, monsieur ?
-Tu m'appelles Capitaine.

Elle ravala sa salive. Putain, quelle conne.

-Pardon, Capitaine.

Putain, que sa voix était froide et tranchante comme la lame d'une épée. Phadransie s'avisa que c'était la première fois qu'elle l'entendait. Il parlait en détachant un légèrement les syllabes de chaque mots, sur un ton dissonant. Quand il lâchait ses mots, on pouvait ''sentir'' que ce n'était pas un homme qui s'exprimait. Il avait un petit quelque chose en plus. Qui le rendait si différent. Et si passionnant aux yeux de la jeune Phadransie. En même temps, une part d'elle même était troublée. Elle se sentait si insignifiante à côté d'un tel homme, son aura semblait planer au dessus d'elle.

Phadransie attendit qu'il prenne la parole. Il passait ces doigts doucement sur le fourreau de ses trois épées, en prenant son temps. Fourreau d'un noir d'encre. Un silence s'était posé entre eux. Phadransie avait diablement chaud. Puis le Capitaine Andelzzer se tourna lentement vers elle. Ses yeux étaient du plus profond des bleus d'acier, on aurait dit que la glace la plus froide du monde se trouvait en leurs seins. Immédiatement encore, Phadransie baissa le regard.

-Pourquoi baisses-tu les yeux ?
-Je ne sais pas.
-Alors, ne le fais pas.

Phadransie eut tout le mal du monde à soutenir la pression du regard du Capitaine. Il semblait la pourfendre, l'atteindre en plein cœur. Personne n'avait jamais réussi à lui faire autant d'effet jusqu'à ce jour.

-Rappelle moi ton nom, trancha-t-il.
-Phadransie, Capitaine.
-Phadransie, oui c'est ça.

Encore un silence. N'y pouvant plus, Phadransie braqua son regard ailleurs.

-Je peux vous être utile à quelque chose Capitaine ?
-Je le crois, oui.

Il s'approcha d'elle, et posa son index sous son menton. Il n'y avait aucune hostilité ou expression naturelle dans ses yeux. Il la fixa quelques secondes.

-Reddar m'a rapporté que tu étais une femme qui se démarquait du lot. Il y aurait en toi...de la noirceur.

Elle ne savait que répondre. Il reprit la parole.

-Laisse moi juger ça.
-Comment faites vous pour voir ça, Capitaine ?
-Ca se voit dans les yeux. Les yeux sont la portée de l'âme. Et les tiens sont très noirs, Phadransie.
-Ca ne veut pas dire que je suis..noire.
-Il paraît que c'est toi qui a fait prisonnier Qeshdarr lors de la prise de sa galère.
-Je ne l'ai pas fais prisonnier, Capitaine. En fait je l'ai juste...
-Déniché, oui, termina-t-il. Et tu as été frappée par son Trois Coups aussi. Il semblerait que tu était à la tête d'un groupe de jeunes mousses, et tu hurlais le ''pas de quartier'' en traînant une ombre rougie par le feu et le sang de tes ennemis.
-Je..J'essayais de me rendre utile, et de mettre en pratique ce que le Knife et monsieur Reddar m'ont appris.

Le Capitaine Andelzzer esquissa un rictus hautin et lâcha un rire étouffé et court.

-Knife et Hanselm Reddar me sont nuisibles. Ce ne sont que des petits humains qui m'importunent. Les humains..leur vie est si brève. Elle équivaut à un battement de cil pour un elfe noir. Le seul qui m'est utile sur ce continent, c'est Tomas.

Un nouveau silence tomba. Phadransie n'avait pas grand chose à répondre à cela.

-Et si Tomas est capable de me servir convenablement, Phadransie, c'est parce que je l'ai dressé moi même, lorsqu'il avait environ le même âge que toi.
-Que..Que voulez-vous dire Capitaine ? Tomas Reddar est bien plus vieux que vous pourtant.
-Tu ne dois pas connaître grand chose aux elfes.
-Non, Capitaine. C'est même la première fois que je vois quelqu'un...comme vous.
-Les Elfes Noirs sont une race supérieure. Sais-tu quel âge j'ai ?
-Non Capitaine.
-Six cent quatre vint huit Tours.

Phadransie écarquilla les yeux. Le Capitaine Andelzzer lui mentait-il ? Non, c'aurait été d'aucun intérêt.

-C'est..C'est vrai Capitaine ?

Il ne lui répondit jamais.

-Tomas est un humain, et il se fait vieux. Il est promit à la vieillesse, la maladie et la mort, très bientôt. J'ai besoin de me trouver un nouveau Lieutenant qui me servira pour un demi siècle encore. Phadransie, c'est pour ça que tu es ici.

Il abaissa sa main, qui était restée sur son visage tout ce temps. Il avait les doigts doux et froids, songea Phadransie.

-Vous...Vous voulez faire de moi votre Seconde, après Monsieur Reddar ??
-Je le veux, oui.
-Vraiment ?

Un sourire illuminateur avait pris d'assaut son visage. Je vais devenir Seconde du Grand Val putain ! Moi, Phadransie, Seconde du Capitaine Andelzzer !

-Oui. Si tu me prouves que tu as les capacités nécessaires pour me seconder.
-Ho, ne vous en faites pas pour moi, Capitaine ! Je saurai être à la hauteur, je vous le jure ! Je m'entraînerai dur, et j'obéirai à chacun de vos ordres, j'ecouterai les conseils de Monsieur Reddar, je coulerai tous vos navires ennemis, Je serai la mort personnifiée qui portera votre pavillon ! Vous pouvez me faire confiance !
-Il ne s'agit pas que de ça. Je hais les humains, ce sont des êtres narcissiques, orgueilleux et pourtant si faibles, qui tombent le nez dans la poussière au premier obstacle qu'ils rencontrent. Mon Second doit posséder la Noirceur s'imposant à son rang. Je ne veux pas d'un Homme comme les autres, faible et insignifiant. Je cherche à faire de lui un être supérieur, qui, à défaut d'être digne de son Capitaine, pourra au moins contenir une part de ténèbres. Je veux qu'ils atteignent la transcendance.

Phadransie ne comprenait pas ce qu'Andelzzer tentait de lui faire parvenir.

-Quelle transcendance Capitaine ?
-Je vais te dresser à me plaire, Phadransie. Montre moi ce que tu vaux.

Il avait refermé soudainement avec violence sa main sur la chevelure de jais de Phadransie, la faisant sursauter.

-Aïe ! Lâchez moi !
-Les humains me font vomir, alors je les transcende et j'en fais des être à mon image..tout aussi noirs !

Phadransie se sentit soulevée du sol, et éjectée dans les airs. Elle cogna contre l'un des murs de la chambre et tomba lourdement. Tout s'était opéré en une fraction de second, la pièce tournait autour d'elle. Elle n'analysait plus rien, son corps la faisait souffrir. En titubant, elle tenta de se mettre sur pieds.

-Je t'ai demandé de me prouver ta valeur. Alors ne reste pas là à rien faire !

Il s'était jeté sur elle, tellement rapide que Phadransie ne le vit pas la percuter. Il l'avait saisit de nouveau par les cheveux, et avait cogné deux fois son visage contre les rebords en bois du lit. Du sang coula de son nez, elle cria et des larmes coulèrent de ses yeux. Elle ne comprenait rien à ce qui lui arrivait. Le Capitaine Andelzzer la lâcha, et elle tomba au sol, sonnée.

-C'est tout ? Je suis déçu Phadransie. Tomas au même âge m'avait tenu tête avec bien plus de vigueur. Tu aurais pu devenir quelqu'un d'intérressant pour moi.

Il avait sorti de sa ceinture un poignard fin serti d'or et d'argent. Un diamant noir brillait au centre de la garde. Il s'agenouilla au dessus de Phadransie et plaça la lame contre sa gorge. Avant qu'il n'execute le geste fatidique, Phadransie avait réussi à lui saisir le poignet. Elle avait usé de toutes ses forces en un ultime réflexe pour éloigner ce bras puissant de sa gorge. Elle le devait si elle ne voulait pas crever comme ça, comme une chienne ! Mais hélas, il était bien plus fort qu'elle. Un uppercut dans la bouche la sonna encore, elle cracha du sang. Elle allait le tuer ! Elle allait buter ce fils de pute qui osait lever sa sale main d'elfe sur elle ! Un incendie de ténèbres et de rage s'échappa de ses yeux et alla foudroyer -si seulement c'était possible- Andelzzer. Ce dernier n'eut même pas un haut-le-cœur.

-Jamais je serai ta Seconde fils de pute !! Je vais te crever putain de siresse !
-Je suis un Elfe Noir Phadransie. J'étais là bien avant ta naissance, et serai encore là, toujours debout, bien après ta mort.

Elle hurla et usa de ses pieds pour le repousser. Elle réussit à se dégager un minimum et courut vers la porte. Son corps tremblait. Elle se saisit de la poignée plus morte que vive mais encore une fois le Capitaine Andelzzer fut plus rapide qu'elle. Il la tira par les cheveux puis saisit sa nuque et la souleva d'un seul bras, comme si elle ne pesait rien.

-Finalement, je veux bien tenter de te modeler un peu. Une fois transcendée, tu deviendras une magnifique œuvre d'art. La mienne .

Phadransie lui cracha une glaire de sang en plein visage. Une tache rouge sur ce visage blanc si parfait, qui la gonfla de plaisir et d'orgueil. Des éclairs et des ouragans de haines et de rage s'échappaient en vrombissant de ses yeux noirs. Le Capitaine Andelzzer ne prit pas la peine de l'essuyer. Il balança sa proie, visage contre le haut du miroir qui se brisa en quelques morceaux. Phadransie hurla, sentant les tranchants de verre s'incruster dans sa peau. Ses yeux furent épargnés elle ne sut jamais par quelle chance. Des éclats de verre lui percèrent la langue et les gencives et sa bouche devint une petite flaque de sang qui s’écoula sur son menton. Le Capitaine plaqua Phadransie au sol. Cette dernière cria de douleur en sentant son dos cogner contre le sol avec autant de puissance. Elle avait l'impression que sa colonne vertébrale venait de se briser en deux, et que jamais plus elle ne saurait se tenir debout. Elle détestait pleurer, mais tout ça faisait trop mal. Elle haïssait l'impuissance et elle haïssait le Capitaine du Grand Val. Elle vomissait sur ceux de sa race ! D'un geste immédiat et précis, il trancha verticalement ses vêtements en deux parties. Elle tenta de le repousser à coups de pieds encore une fois, mais cette fois ci il était préparé et avait bloqué ses genoux avec les siens. Elle essaya alors de le toucher au visage avec un coup de poing, qu'elle espérait le plus puissant possible, mais elle ne fendit que de l'air. Andelzzer planta son couteau au diamant noir à pas plus de deux centimètres du visage de Phadransie. Elle sauta sur l'occasion et tenta de s'en saisir. Il avait fait exprès.
A ce moment précis, elle sentit une lanière de cuir s'enrouler et se serrer autour de son cou, tandis que ses vêtements tombaient en lambeaux, révélant presque tout de son corps. Elle n'arrivait plus à hurler et ses doigts cherchèrent à retirer cette laisse qui l'étranglait. C'était en vérité une ceinture que le Capitaine Andelzzer tirait d'une main ferme, toujours plus puissante. L'air lui manqua, elle se sentit partir. Elle paniqua et pleura encore et encore. Tout allait donc se finir ici, sur le sol de cette chambre, et comme ça. C'était terminé. Ses doigts ne trouvaient pas comment desserer la ceinture, il n'y avait pas de possiblité de le faire !
Le Capitaine Andelzzer poussa sur son menton et lui fit basculer la tête en arrière. Il lui sembla que l'air parvenait à mieux pénétrer dans sa gorge ainsi. C'était une sensation horrible que celle d'etouffer comme ça ! Mais elle savait qu'il y avait pire que ça. Andelzzer n'avait pas trop serré. Il avait entouré la ceinture suffisament pour la rendre malléable mais pas assez pour la tuer. La tête penchée ainsi, elle voyait la scène qui se jouait se reproduire dans le miroir. Ce dernier était incliné de façon à ce qu'elle puisse assister exactement à tout ce qu'il allait lui faire subir. Il avait vraiment prévu ça depuis le début ?

-Je vais implanter ma marque sur toi, jusqu'en toi. Regarde, Phadransie. Je veux que tu regardes et subisses en face la réalité de ta propre impuissance.

Elle était incapable de produire le moindre son, bien trop concentrée sur le peu d'air qui parvenait à emplir ses poumons. Ses doigts étaients resserrés nerveusement autour de sa laisse improvisée, Andelzzer faisait pression sur elle de tout son poids et avec sa main, l'obligeait à regarder. De toutes façons elle avait les yeux embués à cause des larmes de détresses qui inondaient son visage constellé de taches de sang.

-Regarde. Regarde, je te dis !

Elle le détestait. Elle le détestait. Elle le détestait.

Elle le sentait la toucher et çeci multiplia sa rage. Putain qu'elle voulait le tuer ! Il ne disait plus rien à présent mais son regard glacé parlait pour lui. Elle était prisonnière de la froideur dominatrice qui exhalait de tout son être ! Elle savait ce qui était sur le point de se passer, mais demeurait bien trop occupée à cracher le verre et le sang dans sa bouche, et tentait de tirer au maximum sur la laisse qui bloquait son champ respiratoire tel un anneau dément.
Il avait la peau douce et glaciale comme le plus froid des hiver. Un hiver inhumain ! Qui n'aurait jamais dû exister et la toucher. Elle ressentait ce froid mordant entre ses cuisses. Elle sentait son ordeur et la brûlure de son regard infernal sur sa poitrine. Elle pensait que cela serait rapide maintenant. Mais elle se fourvoyait car les minutes qui durent suivre comptèrent parmi les plus longues de sa vie.
Phadransie ressentit tout d'abord une douleur repliée, tordue, qui monta en pics aiguës jusque dans son ventre. Elle crachait toujours autant de sang. Le verre craquetait dans sa bouche. Son corps entier tremblait, elle luttait, même sans forces, contre cette douleur qui s'invitait à l'intérieur d'elle même. C'était pire que tout, parce qu'elle n'arrivait pas à localiser avec précision le point douloureux. Ca semblait émaner de son entrejambe et se diffuser, comme une onde, dans tout son corps jusqu'à marteler avec force et horreur chaque recoin de son crâne. Elle voyait Andelzzer face à elle, striée par les rainures du verre brisé. Il était partout. Ses doigts cherchaient toujours une ouverture sur sa nuque, elle soufflait comme une forge et détestait les bruits qu'elle produisait en tentant à chaque seconde d'inspirer suffisament d'air pour ne pas en mourir. Du sang coula de ses cuisses, la tacha elle et le sol. Et Andelzzer probablement. Ce fils de pute avait son sang sur elle. Son premier sang. Elle était trempée, un odieux mélange de sang -le sien- et de sperme elfe noir. La douleur redoubla alors, tellement que ses doigts se refermèrent définitivement sur la ceinture, et ne cherchèrent plus à libérer sa personne de cette étreinte. Elle serra le cuir jusqu'à le faire presque blanchir, jusqu'à ne plus sentir ses phalanges. Son ventre la brûlait de l'intérieur, elle ne sentait plus du tout son corps. En fait, son corps entier était devenu un immense brasier fumant. Elle pleura tout du long.

Et quand le Capitaine Andelzzer se rhabilla et quitta la chambre, elle ne s'en rendit même plus compte.
Une tache de sang large de plusieurs centimètres s'aggrandissait avec lenteur sous elle.


~


Combien de temps prit-elle pour oter la laisse serrée autour de son cou ? Elle n'aurait su le dire. Phadransie réussit à rouler sur le ventre, tremblante de la tête aux pieds. Jamais elle n'aurait la force de se lever. Jamais plus...
Elle refusait de crever ici et comme ça. D'un geste du bras, elle essuya les larmes. Mais les larmes continuaient de couler. Elle les essuya encore. Elle rampa jusqu'au lit et aggripa la couette qu'elle tira jusqu'à elle, et enfoui son visage à l'intérieur. Puis se hissa à genoux à l'aide des couvertures. Son sang tambourinait violement dans sa tête, encore et encore et encore. Elle regarda ses jambes. Elle allait se relever. Elle ne laisserait pas ce fils de pute d'Elfe Noir la vaincre ! Si elle devait mourir, alors ça serait pour l'emmener en enfer avec elle !

Phadransie chuta trois fois. La quatrième, et en acceptant enfin le fait de devoir s'aider de la table puis des murs, elle parvint à avancer. Elle se rhabilla du mieux qu'elle put. Ses vêtements, de toutes façons étaient en lambeaux. Mais elle ne pouvait pas descendre nue, se souvenant que Sacha et tous les autres membres d'équipages étaient à l'étage inférieure. Elle avait terriblement honte. Elle ne voulait pas que Sacha la voit comme ça. Jamais. Elle allait descendre en courant pour pas qu'il la voit ! Mais...Mais elle avait besoin de lui. Elle tira un drap sur elle, qu'elle enroula par dessus ses vêtements déchirés et trouva le courage d'ouvrir la porte. Là, elle s'arrêta net. Tomas Reddar était debout, stoïque, dans un coin sombre du couloir. Il savait. Et elle savait que ce connard savait. Elle n'allait pas baisser le regard devant cet enculé. C'est yeux dans les yeux qu'elle le dépassa d'un pas encore tremblant. Tomas Reddar ne dit rien.

-Sacha. J'ai besoin de ton argent.

Phadransie lorgnait son ami, à demi mort dans une flaque de vomi. Il était tellement ivre qu'il ne comprenait rien de ce qu'elle disait.

-Sacha, où est ta bourse ? Demanda-t-elle d'une voix froide.

Il marmonna quelque chose en entrouvant une paupière. Phadransie crut avoir compris. Elle chercha la bourse qui se situait sous sa chemise. Suite à leur dernier abordage et les esclaves qui venaient d'être vendus, elle était bien lourde. Alors que Sacha retombait sur le sol de l'auberge, Phadransie fit un volte face. Elle marcha sur plusieurs mètres, puis dès qu'elle le pu, elle courut. Elle courut en hurlant, de toutes ses forces, quitte à réveiller tout Puerto Blanco à quelques heures de l'aube ! Elle tomba deux fois mais se releva à chaque fois. Elle se dirigeait d'un pas résolu vers le port.

-Andelzzer..tuer...Andelzzer..tuer...Andelzzer...tuer...

Elle aperçut le Navire qu'elle cherchait et  monta dans une chaloupe amarrée là. Elle appela du bateau et un cordage lui fut lancé. Elle dû réaliser la prouesse physique de se hisser sur le pont à la force de ses bras. Elle voulut s'écrouler et dormir lorsque ses pieds bottés le touchèrent, mais elle ne devait pas se laisser aller. Au dessus de sa tête, les voiles du galion étaient dorées. Un homme à la peau noir, celui qui avait lancé le cordage, la reluquait d'un air sévère.

-Je veux voir Piccolo.

Il ne dit rien, et exécuta un volte face. Phadransie le suivit, plus déterminée que jamais. Elle pénétra dans la cabine dorée d'un homme de couleur, portant une tunique dorée et des cheveux jais nouées sur sa tête.
Phadransie jeta sur son bureau deux bourses emplies de pièces de bronze, d'argent et d'or.

-Je vous rachète sur l'heure le Capitaine Falcon Qeshdarr.

Ses yeux rougis étaient témoins de la plus Noire des résolutions.
Mar 30 Juin 2015 - 22:13
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Abad El Shrata du Khamsin
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Abad El Shrata du Khamsin
Les deux mercenaires conduisirent Phadransie jusque dans un couloir sombre dans lequel planait une forte odeur d'épice.
Le garde à sa droite désigna le fond du couloir du menton, puis les deux remontèrent sur le pont, laissant Phadransie seule avec elle même.
Celle-ci hésita un instant, puis elle repensa à ce que lui avait fait subir Andelzzer. Elle serra le poing et avança à grands pas, déterminée.
Au fond du couloir, à droite, se tenait une ouverture, calfeutrée par un fin rideau à franges rouges. L'odeur d'épices s'était intensifiée. Elle avait pris le musc des écorces fibreuses de la Jungle mélangée aux puissantes épices des Sultanats. De l'encens, Phadransie n'en avait pas souvent sentit. Elle détestait cette odeur, ça lui donnait envie de vomir.
Elle entendit quelques gémissements provenant de derrière le rideau.
Elle écarta les franges du rideau de ses deux mains et pénétra dans une large pièce, richement décorée. Les murs étaient capitonnés de cuir rouge et des lanternes d'or pendaient du plafond. Ici, l'odeur d'encens lui était devenu insupportable. La fumée des lampes à huile qui remontait au plafond et formait une voûte blanchâtre n'arrangeait pas les choses. La fumée l'empêchait de respirer et lui piquait les yeux. Elle apporta une main devant son nez et une autre devant ses yeux. Puis elle les rouvrit difficilement. C'est alors qu'une bien étrange scène s'offrit à elle.
Assis sur de coussins de soie, Piccolo regardait d'un œil lubrique des jeunes filles s'adonnant à des préliminaires endiablés. Une avait la tête entre les cuisses de l'autre, qui serrait avec force les draps de ses poings en gémissant.
Piccolo jeta un regard en biais vers Phadransie, puis reporta son attention sur les deux magnifiques jeunes filles.
Phadransie ne put s'empêcher de détourner le regard, même si elle aurait voulu sauter sur la couchette, égorger ces deux putains, saisir Piccolo par le col et lui ordonner de lui amener le capitaine sultan sur le champ, mais elle se retint.
Elle était en position de faiblesse ici, si elle voulait que Piccolo accède à sa requête, il valait mieux se faire petite.
Elle resta quelques secondes à regarder ses pieds. Puis les gémissements se firent de plus en plus sonores, jusqu'à ce qu'un cri de jouissance perce l'atmosphère.
''Enfin.''
Phadransie releva la tête. Les deux femmes se tenaient à présent la tête allongée sur les genoux de Piccolo comme deux chattes en chaleur.
''Tu veux te joindre à nous ? Demanda celle de droite, une beauté des terres du Sud dont les cheveux de jais descendaient en cascade sur ses seins nus.
L'autre fille, à la crinière de feu ricana en mordillant son petit doigt et regarda Phadransie de ses yeux verts émeraudes.
''Je ne suis pas une pute ! Cria Phadransie.
Le visage des deux jeunes filles se renfrogna. Pourquoi se sentait-elle toujours obligée de le préciser. Elle n'était plus à Port-Argenterie dorénavant.
Elle se ressaisit et tira sa bourse de sa chemise, s'approcha un peu et la jeta sur la couchette où quelques minutes plus tôt les deux filles s'en étaient données à cœur joie.
''-Je vous rachète sur l'heure le Capitaine Falcon Qeshdarr.''


*


Un filet de lumière filtra à travers les volets et vint finir sa course sur la paupière close de Sacha, remplissant sa vision d'un écran rouge sang.
Il se retourna dans sa couche avec un grognement mais une douleur aiguë lui assaillit le crane.
''Ouch !''
Il se redressa péniblement sur un coude et se gratta la tête. Il fit un tour d'horizon.
Il se trouvait dans une des chambres de l'auberge. C'est quand il vit ses habits gisant près du lit qu'il s'aperçut qu'il était nu comme un vers.
Mais par terre il y avait beaucoup trop de vêtements pour que ce soit tous les siens. Il distingua des vêtement...de femme.
Sacha tourna la tête. WOW !
A ses côtés, emmitouflée dans les draps se tenait une véritable beauté. Ses cheveux noirs et bouclés se mêlaient aux plis des draps et quelques mèches de cheveux pendaient devant son visage fin. Elle s’étira en lâchant un petit murmure plaintif.
''Euh...salut, lui répondit simplement Sacha.
-Salut, lui répondit-elle en tournant vers lui deux grands yeux verts et dorés.
Sacha déglutit.
''Euh..toi et moi, on a ?
- Oh oui, et plus d'une fois ! Où as-tu appris tous ces trucs. Je n'ai jamais autant joui de toute...
-Okay, faut que j'y aille, la coupa Sacha qui se pressa de se lever. Il sautilla sur un pied pour enfiler son pantalon.
-Quoi ? Déjà, reste au moins pour le petit déjeuner !
-Non, désolé mais je suis déjà en retard.
-En retard pourquoi ?
-Mon bateau ne va pas tarder à partir et ils ne m'attendront pas, dit-il en enfilant son tricot de corps avec précipitation.
-AHH, un marin ? Dit-elle en se redressant sur le dos.
-Non un pirate.
Sacha se dirigea vers la porte. Il se saisit de la poignée, passa l'embouchure et se tourna pour fermer la porte quand il croisa une nouvelle fois le regard de la fille.
Elle le regardait avec ardeur puis d'un doigt, elle découvrit le drap qui recouvrait ses seins nus.
-Tu es sur que tu ne veux pas rester un peu plus ? Lui dit-elle, plein de sexe dans la voix.
Sacha demeura pantois quelques secondes, les yeux écarquillés et la bouche entrouverte. Pendant un instant, il voulut retourner dans les draps avec elle mais il se ressaisi. Il secoua la tête et ferma la porte. Il traversa le couloir qui menait à l'escalier.
Mais qu'est-ce qu'il avait bien pu faire hier soir ? Il ne se souvenait même plus de cette fille, aussi magnifique soit-elle ! Il ne se souviendrait jamais de la nuit où il avait perdu sa virginité ! Il ne put s'empêcher de lancer un juron.
Il descendit l'escalier, traversa la grande salle vers la sortir quand il entendit une voix rauque derrière lui :
-Hep hep hep, ou crois-tu aller comme ça ?
Sacha fit vole face, c'était le gérant de l'auberge. « Si tu veux partir, il va falloir payer. » Ah oui, la chambre ! Sacha s'approcha du comptoir et envoya sa main chercher sa bourse, dans la poche intérieure de sa chemise. Rien. Elle devait sûrement être dans son pantalon. Il tâta ses poches. Rien non plus...
Où avait-il bien pu la mettre ?! Le gérant commençait à perdre patience. Peut être qu'elle était restée dans la chambre. Pourtant il ne l'avait pas vu lorsqu'il avait ramassé ses vêtements.
-Bon alors petit, mon argent, c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?
-Euh, je le retrouve plus.
-Comment ça tu le retrouves plus ? Tu te fous de ma gueule !
-Non, non, je vous assure, on a sûrement dû me la voler hier soir, je...
PHADRANSIE ! Oui ! Ouiiiii ! C'était elle qui lui avait demandé sa bourse, et lui lui avait donné comme un con. Merde. C'était la dernière fois qu'il faisait un concours de beuverie avec elle !
-Ecoutez, je me souviens que je l'ai avancée à une amie hier soir. Une certaine Phadransie. Est-ce qu'elle a prit une chambre ici pour la nuit ?
-Elle est bien allée dans une chambre mais elle en est ressortie et je l'ai vu quitter l'auberge dans la nuit !
OUI ! Ca lui revenait à présent, Andelzzer lui avait demandé de monter dans sa chambre...et elle avait ensuite quitter l'auberge seule...étrange.
-Alors ça vient ! La grosse voix sortir Sacha de ses pensées.
-Ecoutez, je vais aller la chercher, elle doit sûrement être au bateau. Je récupère mon argent et je viens vous régler la chambre.
-Et QUI me dis que t'es pas en train de me rouler ! Non, la chambre tu la payes mainteant !
-MAIS je viens de vous dire que...
-Il n'y a pas de mais, tu la payes maintenant ou sinon tu la payeras d'une autre façon. Il sortit un hachoir de boucher de derrière son comptoir. De ta main, la sentence des voleurs.
Sacha s'apprêtait à détaler de derrière en courant quand il sentit deux mains se poser sur ses épaules. Puis il vit un homme le dépasser. C'était le Knife. Il s'approcha du comptoir et y glissa deux pièces d'argent.
-Excusez moi du retard ; je paye pour le petit.
L'aubergiste regarda tour à tour les deux jeunes gens, la mine renfrognée, puis il reposa son hachoir et récupéra les deux pièces. Le Knife saisit Sacha par l'épaule et l'entraîna vers la sortie avant de tourner une dernière fois la tête vers l'aubergiste.
-Et gardez la monnaie.
Vu l'expression sur la tête du gérant, il lui avait enlevé les mots de la bouche.
Il ouvrit la porte et une lumière aveuglante les assaillit. Ils sortirent tous deux sur le pas de la porte. Il faisait une chaleur étouffante.
-Ben alors petit, faut pas laisser traîner son argent comme ça. T'as eu de la chance que j'ai découché moi aussi, dit-il en se roulant un peu de tabac.
-C'est cette foutue Phadransie qui l'a ! Faut que je la retrouve.
-J'espère pour toi qu'elle est au bateau, parce qu'on aura pas le temps de la chercher ou ils vont partir sans nous, dit-il en allumant sa cigarette à la faible flamme d'une des deux lanternes qui encadraient l'entrée de l'auberge, qui s'éteignit lorsque le tabac s'embrasa.
-Allez ! dit-il en poussant Sacha devant lui.
Ils se frayèrent un chemin parmi la foule en descendant vers le port. La réverbération du soleil contre les murs de chaux blanc obligea Sacha à plisser les yeux.
Après quelques minutes, le Knife se pencha vers son oreille.
-Au fait, je dis chapeau...
-Pourquoi ?
-Tu sais très bien pourquoi. La bombe que tu as ramené dans ton lit. Je l'ai pas lâchée de toute la soirée. Mais c'est toi qu'elle à choisi. Tu as dû passer une bonne nuit, dit-il en rigolant, la fumée de sa cigarette sortant en petites bouffées au fil de ses hocquements.
Sacha acquiesça avec un sourire jaune.
-Si tu savais.
Alcool, plus jamais !
Lun 27 Juil 2015 - 18:52
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Noire
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« Si vous m'en donnez ce prix là, répondit une voix suave et limpide comme de l'eau douce, c'est que vous n'avez aucune idée de la somme que me rapporterait la vente du Capitaine Falcon.

Phadransie avait prévu de se heurter à un mur, ça n'allait évidemment pas être simple. Bien sûr que Piccolo refuserait sa première offre, c'était inévitable. Mais elle avait sous la paume de la main suffisamment d'or pour lui racheter au moins la moitié de ses esclaves, elle en était sure. Du moins...quasiment sure.

-Amenez moi l'esclave concerné, reprit Piccolo en criant son ordre à travers le rideau à franges.
-Il y a des pièces d'or à l'intérieur de la bourse, ajouta Phadransie d'une voix aussi dure et tranchante que le diamant. Vous l'avez acheté au..Capitaine du Grand Val même pas la moitié. Vous devez me le céder !

Phadransie sentait qu'elle s'emportait. Son sang bouillonait dans ses veines et cognait dans sa tête depuis plusieurs minutes maintenant. Depuis qu'elle était entrée dans ce putain de boudoir en fait.

-Je puis le revendre dix voire vingt fois son prix d'achat, rétorqua calmement Piccolo tout en caressant distraitement la joue d'une des deux femmes à ses genoux. Votre offre ne m'interresse pas.

Mon offre ne l'intéresse pas ? Dans ce cas pourquoi avoir demandé à ce qu'on amène le Capitaine ?

-Ecoute, insista Phadransie la voix tremblante d'impatience, il me faut cet homme. J'ai besoin d'apprendre la technique secrète des 3 coups. Pour me venger..De quelqu'un.

Elle espérait l'attendrir. Quoi d'autre ? Elle était incapable d'augmenter la valeur de son offre.

-C'est important...poursuivit-elle en regardant le sol, la voix cassée.

Piccolo tourna vers elle lentement son regard. Un regard qui ne se voulait pas dur, au contraire. Il était presque compatissant. Le Capitaine Flacon fut amené, escorté par les deux mercenaires de Piccolo, armés jusqu'aux dents. Il portait des chaînes aux chevilles et d'autre aux poignets.

-De qui veux-tu te venger petite ? Lui demanda t-il en passant à son tour au tutoiement.

Phadransie ne répondit pas.

-Dans ce cas j'ai bien peur que le Capitaine Falcon ne puisse t'appartenir.
-Alors loue le moi ! tenta Phadransie, presque devenue suppliante. Le temps qu'il m'apprenne les 3 coups. Puis je te le rendrai, c'est promis !

Piccolo eut un rictus.

-Et combien de temps cela durera ? Un mois ? Dix mois ? Un Tour ?

Phadransie revint à la charge. Elle serra les poings fermement et toute la détermination du monde jaillissait de sa voix.

-Alors je t'offrirai le Grand Val et tout son équipage contre ton esclave  ! A l'exception de..de son Capitaine et du Second.

Piccolo parut soudainement plus intéressé. Il se frotta le menton tout en se donnant le temps d'analyser cette offre. Phadransie profita de ce répit pour charger, encore.

-Toute seule je ne peux pas me rendre maîtresse du Grand Val, mais une fois qu'Andelzzer sera mort, et Tomas Reddar aussi, alors il ne sera pas difficile pour Falcon de devenir le nouveau Capitaine. Le Grand Val comporte plus de cinq cent âmes ! Toutes seront pour toi !
-Je suis navré, dit Piccolo après un temps, mais je ne peux pas avoir confiance en la parole d'une pirate.
-Et en celle d'un cheikh Sultan ?

C'était le Capitaine Falcon qui venait de prendre la parole, posément.

-Un cheikh ? S'etonna faussement Piccolo.
-Je n'étais pas à la tête d'une galère sultane de pacotille monsieur, mon nom est Falcon Hamard Qeshdarr, mon père Hamard Qeshdarr était l'un des plus proches conseillers du Sultan de la ville portuaire de Khamsin. Je fus moi même un ami proche de son fils, Azim El Shrata que j'eusse considéré comme le grand frère bienveillant que je n'ai jamais eu. Je ne mens pas, vous le savez bien. Je n'ai toujours eu qu'une parole.
-Et quelle est cette parole ?
-Ma liberté, monsieur, en échange du Grand Val, comme l'a avancé la jeune Phadransie.

Piccolo sembla peser de nouveau le pour et le contre de cette offre, se grattant la barbe avec contention. Puis il lâcha en regardant dans les yeux tour à tout celui qui était son esclave puis Phadransie :

-Le Grand Val, et tout son équipage, sans aucune exception. Ses cinq cent âmes au complet.

Le portrait de Sacha vint s'inscrire devant les yeux de Phadransie.

-Il n'y en aura pas, lâcha-t-elle d'une voix si froide qu'elle la fit frissonner elle même. Pas Sacha, par pitié. Tous sauf Sacha.

Au fond de sa tête, elle entendait nettement quelqu'un murmurer avec toute la haine que pouvait contenir le monde entier le nom d'Andelzzer, sans répit et à intervalles réguliers.

-Dites moi à combien estimez vous mon âme, demanda le Capitaine Sultan en esquissant un sourire. Si vous me répondez cinq cent autres plus le prix d'un navire, je me sentirai flatté.

Ce fut au tour de Piccolo de sourire et se détendre. Phadransie ne savait pas quoi dire de plus. A sa droite, Le Capitaine Falcon Qeshdarr s'avança. Il se saisit de l'une des dagues que le mercenaire l'escortant portait, et s'entailla l'avant bras sur toute sa longueur, en une droite fine et sanglante. Puis il traça ensuite un second trait perpendiculaire à la première entaille. Une sorte de croix couvrait à présent son avant bras. Phadransie remarqua qu'il en avait déjà une sur le bras gauche.

-Je jure sur mon nom et mon visage, mon honneur et celui de ma famille, mon sang et ma foi, sous le regard de mes pères et celui de Vamor, qu'une fois à la proue du Grand Val, je vous remettrai le navire en guise de paiement pour ma liberté. Le Grand Val et tous ses membres d'équipages, du dernier mousse au fils du Second.

Piccolo accueillit avec satisfaction cet échange. Il se saisit de la bourse que Phadransie avait jetée sur le sol.

-La parole d'un cheikh sultan, contrairement à celle d'un pirate, est vénérable et non souillée.


~


« Je t'avais bien dis que je gagnerai ma liberté, sourit le Capitaine Falcon à Phadransie sur le quai de Puerto Blanco.

Il faisait encore nuit, dans quelques minutes l'aube commencerait tout juste à poindre. Phadransie se sentait tellement sale, mais tellement soulagée d'etre parvenue à régler cette transaction. Andelzzer allait mourir. Elle allait le crever, ça n'était qu'une question de temps.

-Bon, on a pas beaucoup de temps, cracha Phadransie en direction de Falcon. Le Grand Val appareille à l'aube, je dois savoir comment tu fais ton 3 coups avant qu'il ne lève l'ancre.
-Ho ho ho ! Calme toi un coup, veux-tu bien ? Déjà nous devons nous poser un instant. La précipitation peut être une très mauvaise alliée, Phadransie.
-Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans ''le Val appareille à l'au...
-Jamais tu ne maîtriseras l'Arc de 3 en une heure. C'est tout bonnement impossible, même pour un maître en art martiaux. Or, et arrête moi si je me trompe, tu ne sembles pas experte en la matière. Non, dans l'immédiat ce que nous devons faire, c'est gagner du temps. Qui est le Capitaine du Grand Val ? Je n'ai eu l'occasion de voir que son Second, un certain Reddar, lors de ma captivité.

Phadransie eut l'impression que c'était la voix d'une autre personne qui jaillit de ses lèvres et répondit au sultan tant elle était gavée de haine et de noirceur.

-Andelzzer. Il s'appelle Andelzzer.
-Je ne le connais pas, c'est une bonne nouvelle Phadransie. Cela veut dire qu'il n'est pas si réputé que ça, sinon ce nom me parlerait. En revanche, le nom de Falcon Qeshdarr a pas mal d'impact à Puerto Blanco, je suis déjà venu mouiller deux fois ici et j'ai des connaissances.
-Et qu'est-ce que ça peut me foutre ? S'impatienta Phadransie, sentant la fatigue physique et l'épuisement mental la gagner.
-Cela veut dire qu'en me débrouillant bien, je pourrai détourner les provisions censées être portées dans les cales du Grand Val. Puerto Blanco est une île isolée du grand continent, les tractations commerciales prennent du temps à se faire, et des provision pour un voyage de plusieurs mois, et pour plus de cinq cent marins, ça représente une grande quantité de denrées. Il faudra du temps aux commissionnaires de l'île et de l'Archipel pour réunir tout ça une seconde fois. Ainsi, le départ du Grand Val devrait être retardé de plusieurs semaines. Du moins si son Capitaine n'est pas un homme stupide.

Phadransie était ébahie par la vitesse avec laquelle le Capitaine sultan avait mis en place cette stratégie. Gagner du temps, c'était bien sûr la meilleure solution pour apprendre la maîtrise des 3 coups.

-Tu saurais faire ça ? Je veux dire, détourner les caisses de provisions qui doivent être acheminées jusqu'au Val dès demain ?
-Je pense que j'en suis capable, oui. Les tractations ça me connait. De ton côté je te conseille de te reposer et de m'attendre. Connais-tu la plage des Étocs ? Elle se trouve à l'autre extrémité de l'île, c'est un endroit assez petit inaccessible par voie maritime. Et difficilement atteignable par l'intérieure de l'île, à cause de ses falaises abruptes et ses rochers tranchants. Nous y serons tranquille. Je viendrai te retrouver là bas, demain au crépuscule. Tâche d'y être, Phadransie, si tu veux que ton entraînement puisse commencer.

Phadransie était trop épuisée pour trouver une quelconque faille dans ce plan. Elle ne désirait plus qu'une seule chose à présent que sa promesse de tuer Andelzzer avait été entendue et rendu possible : dormir. Elle serait volontiers retournée à l'auberge pour attendre Sacha à son réveil et l'emmener avec elle sur la plage des Étocs, mais il lui aurait forcément demander pourquoi. Pourquoi le départ du Val serait retardé ? Pourquoi elle s'entraînait à apprendre la technique des 3 coups ? Pourquoi elle avait besoin de se venger ? Et ça elle n'avait pas envie de le lui dire. Falcon Qeshdarr posa tendrement une main sur son épaule.

-Ca va aller, Phadr. Tu m'as aidé à regagner ma liberté, alors je vais t'aider en retour. Va, et repose toi à présent.

La seconde qui suivit il disparut sur les quais tel un fantôme. Phadransie marcha droit devant elle, sans chercher à comprendre où ses pieds la menaient. Elle trouva des caisses de bois vides, semblant avoir été déchargées dans la journée et abandonnée sur le port. Elle grimpa dans l'une d'elle et s'endormit comme une masse, d'un songe noir et sans rêve. Le nom d'Andelzzer fut prononcé cent cinquante huit fois durant son sommeil.


~



Près de deux semaines étaient passées depuis cette nuit là. La plage des Étocs formait un croissant longeant l'océan d'une part, et bordée d'autre part par sa falaise de roches blanches, telle une couronne d'épines tant elles pouvaient demeurer aiguisées et verticales. Ainsi, il était plus que rare que des visiteurs s'y avanturent. Le sable était fin et on ne s'y embourbait pas. Et un peu plus loin, il était possible de poursuivre l'entraînement sur les rochers plus ou moins plats si l'on recherchait davantage de stabilité dans les mouvements. La monotonie marine qu'était le son des vagues se brisant sur la plag avait été brisée récemment par la présence de la jeune pirate Phadransie et son instituteur, le Capitaine sultan Falcon Qeshdarr.

« Lève toi Phadransie ! Je n'ai même pas frappé fort ! Ne reste pas allongée ainsi par Ariel !

Falcon souleva du bout du pied son élève qui ne semblait plus disposée à quoi que ce soit.

-Cet Arc de 3 tu veux l'apprendre oui ou merde ?

Phadransie repoussa son pied d'un coup de main et tenta de se remettre debout. Ses jambes tremblaient, le soleil était assomant, l'air quasiment absent. Il n'y avait pas de vent, un ciel plus bleu que bleu. Cela faisait près de deux heures aujourd'hui qu'elle étati debout, là, à tenter de toucher et percer. Parfois elle croyait y arriver. Après avoir enchaîné au moins dix manches de 3 coups sur Falcon, sa vitesse croissante, elle le sentait. Elle savait qu'elle était plus très loin. Elle tapait encore et encore, et pouvait presque voir autour d'elle tout se ralentir. Elle savait où taper, quel muscle renfroigner. Elle y croyait aussi dur que la roche, mais ne sentait rien se contracter sous ses doigts. Elle avait pourtant fait des progrès titanesques, et demeurait une élève surmotivée. Bien qu'au début le Capitaine Falcon avait été déçu de sa nature un peu maigrichonne et la force de ces coups quasi nulle, il avait su prendre en main les points forts de la constitution de la jeune femme. Phadransie était souple, élancée. Surement plus agile que lui ne le serait jamais. Elle pouvait aussi être très rapide. Il avait orienté l'entraînement de façon à tirer un maximum de potentiel de sa jeune élève. Quant à la force brute, il la forçait à s'entrainer tous les jours à développer sa masse musculaire, notament lors de duels à l'épée, devant le coucher de soleil et jusqu'à ce que la lune soit haute dans le ciel. Phadransie avait appris à réduire son temps de sommeil. De neuf heures en moyenne, elle était descendue à huit, puis à sept, puis à six et enfin cinq et demi. Mais même en un mois d'échéance, parfois le sultan se mettait à douter quant à la réussite de sa mission, à savoir apprendre à Phadransie son 3 coups. En temps normal, cette technique demandait des mois d'entraînement pour un homme pré initié, et au moins un Tour complet à un novice. Mais la rage de vaincre tout obstacle se dressant sur sa route avait permis à la jeune femme d'aller à l'encontre de cette théorie.

-Phadr, je sais que c'est dur mais si tu continues de tomber comme une mouche à la moindre estafilade, ton adversaire aura vite raison de toi, surtout si il s'agit d'un vétéran.

Elle s'était élancée sur lui en hurlant sa rage. Ses jambes tremlaient et en temps normal elles n'auraient pas dû réussir à la porter aussi loin en aussi peu de temps. Phadransie tenta de placer un premier coup encore. Falcon protégeait les endroit qu'elle visait de ses bras. Il était bien plus rapide qu'elle. Mais la rage de Phadransie ne semblait pas avoir de limité. Elle tourna sur elle même et enchaîna un deuxième coup. Elle visait la poitrine. Falcon se protégea. Phadransie sentit la paume de sa main sous ses doigts. Un troisième coup. Idem. Elle tourna alors encore plus vite. Un. Raté. Deux. Raté. Trois. Raté. Il n'avait même pas besoin d'esquiver. Phadransie hurlait de frustration et de rage. Puis elle s'ecroula, à bout de force. Les vagues rempaient jusqu'à pouvoir lécher son visage.

-Si tu ne contrôles pas tes émotions Phadr, tu n'apprendras jamais rien. Les 3 coups, ça demande de la précision, de la dextérité, et surtout de la maîtrise de soi. Il ne s'agit pas de foncer et de taper, est-ce que tu comprends ça ?

Elle l'envoya se faire fouttre. Falcon Qeshdarr sourit.

-Un jour tu tomberas sur un adversaire visiblement plus expérimenté que toi. Quelqu'un qui saura maîtriser ses coups, les retenir quand il faut et tout lâcher le moment venu. Je ne donne pas cher de ta peau lorsque tu te battras contre cet expert en art martiaux. »



~


Trois semaines d'entraînement. Un orage salvateur avait éclaté sur les Étocs de Puerto Blanco. Le sable s'était métamorphosé en une sorte de boue qui collait les pieds, et aggripait les chevilles. Mais le Capitaine Falcon avait décidé que l'entraînement se maintiendrait. Plus légère, Phadransie avait l'avantage de ne pas s'enfoncer dans le sable comme un poteau en terre. Elle se jeta sur le côté afin d'esquiver le bras vertigineux qui fusait vers elle. Le Capitaine Falcon n'était peut être pas à sa vitesse maximale, mais il tentait néanmoins de rispoter et répondre à ses 3 coups à elle par ses 3 coups à lui. C'était un signe de progression de sa part. Il y avait quelques jours encore, il les contrait simplement. A présent, Phadransie tapait trop rapidement pour qu'il devine à l'avance où ses doigts toucherait, et il devait soit se jeter en arrière ou sur les côtés pour esquiver, soit s'aligner sur la quasi même longueur d'onde et taper à son tour. Falcon la touchait neuf fois sur dix. Mais une fois sur dix, c'était elle qui faisait mouche. Et sur ce quota de un sur dix, il n'y avait aucun de ses coups comportant 3 touches parfaites. L'une d'elle -voire deux- faisait toujours défaut. Mais Phadransie ne perdait pas espoir. Elle arrivait déjà à toucher son adversaire, et avait pu sentir plus d'une fois sous ses doigts les muscles se renfrogner et se bloquer.

La semaine qui suivit, elle atteignait une vitesse inégalée, parvenant presque à rattraper celle de son maître, et touchait les bons muscles instantanément à chaque fois qu'elle tapait. Du moins quand Qeshdarr ne ripostait pas avec la même technique.

Elle se sentait prête à pouvoir allonger n'importe qui, même si Falcon Qeshdarr lui avait clairement dit qu'elle ne maîtrisait pas la technique à la perfection.

« A combien alors ?
-Je dirai cinquante pour cent.

Phadransie ne comprenait rien au chiffre.

-Disons la moitié, reprit le Capitaine sultan.
-Ca devrait suffir à mettre mon adversaire au sol. Et à l'envoyer en enfer. »



~



« Ca y est. J'y suis. »

Phadransie détacha enfin ses yeux de la figure de proue du Grand Val. Le Grand Val. La Grande Mort. Navire de Ténèbres. Elfe Noir. Noire.
Elle allait lui montrer. Andelzzer.
La passerelle était déployée, le Val allait lever l'ancre et quitter Grande Lagoon. Il y avait pas mal de monde sur le quai, notament les membres d'équipages qui regagnaient le pont et les quelques nouvelles recrues. Phadransie n'en avait que faire. Falcon Qeshdarr s'était engagé comme gabier il y avait à peine quelques heures. Il était déjà à bord. Ca n'était qu'une question de minutes avant qu'on fasse le lien avec elle, et que tous apprennent que c'était elle qui lui avait rendu sa liberté. Sur les deux galions dorés de Piccolo, un seul était toujours à quai. Phadransie expira un grand bol d'air frais, puis gravit la passerelle. Andelzzer était à bord, dans sa cabine. Elle ressentait sa présence sans avoir besoin de le voir. Elle sentait son odeur sans avoir besoin de se trouver près de lui. Elle était emplie de haine pour lui. Elle le respirait, comme un limier respire sa proie. Elle rabattit davantage le capuchon noir afin qu'on ne remarque pas tout de suite son visage. Elle ignorait comment Barberousse et Cul Bite Us et les autres réagiraient en la voyant après un mois d'absence, et tenait à faire quelque chose avant que quoi que ce soit de facheux ne lui arrive. Ses pieds foulèrent le pont du noir vaisseau. Elle offrit au soleil deux yeux noirs emplis d'une vague gargentuesque chargée d'aigreur. L'adrénaline cognait dans son crâne. Il fallait qu'elle se calme. Elle repensa aux paroles de Qeshdarr. Ne sois pas impulsive. Contrôle toi, Phadr'.
Elle cracha par dessus le bastingage cette aigreur qui semblait lui être remontée jusque dans la bouche, et s'enfonça sous le faux pont. Il était là, et, par chance, il n'y avait personne près de lui. Ce qu'elle allait faire serait dur pour elle comme pour lui, mais il le fallait. Elle devait absolument le tenir eloigné de cette histoire. Si Sacha apprenait ce qu'elle voulait faire, alors il tenterait de l'en empêcher, et il se mettrait en danger lui même. Sois froide et dure avec lui, sois méchante. Putain, elle avait qu'une envie, sauter dans ses bras.

« Hé Sacha ?...

Il se retourna d'un coup. Tiens, il faisait plus adulte que dans ses souvenirs. C'était possible de se tromper autant sur le souvenir qu'on a de quelqu'un en l'espace d'un mois seulement ?

-Putain Phadr !

Elle ne le laissa pas continuer. Il était en colère, ça se voyait. Forcément, elle avait disparu durant plus d'un mois.

-Sacha, reprit-elle de sa voix la plus lugubre, je retourne à Port-Argenterie au plus vite.

Il resta béhat un instant. C'était le but de sa réplique. Elle savait que le dernier lieu du monde dans lequel Sacha avait envie de se rendre était Port-Argenterie.

-Je ne te demande pas ton avis. J'ai une dernière chose à faire à bord du Val, puis je m'en irai. Ne cherche pas à me suivre, je n'ai pas envie que tu m'accompagnes et de toutes façons tu n'en as pas envie. Et puis tu me ferais chier si on retournait là bas ensemble.

Oui c'est ça. Sois dure et directe. Phadransie se força à reprendre. Mais Sacha hurlait, il lui gueulait des trucs pas très sympa à la gueule, et du coup elle doutait fortement qu'il ait entendu ce qu'elle lui disait.

-J'suis une adulte maintenant, je navigue sur les Grand'Eaux, on est plus des gamins, il faut bien qu'on se lâche la main toi et moi un jour où l'autre. Donc j'ai décidé de prendre mon indépendance et de retourner à Port-Argenterie voilà. Et putain, arrête de m'insulter !

Elle se forçait à ne pas ecouter ce qu'il lui disait.

-Si c'est comme ça enculé, fais ta chienne de vie à bord du Grand Val, je fais la mienne ! Arrête de me casser les couilles !

Elle s'eloignait définitivement cette fois. Pardon, Sacha. J'essaye de te protéger. Ce que je dois faire est trop dangereux pour que tu y sois mêlé cette fois. Elle se rendit dans les dortoirs et cogna de toutes ses forces contre la coque et le bois du Navire, jusqu'à avoir la peau des doigts à vif. Derrière elle, Barberousse (ou Hanselm Reddar) rappliquait, piqué par le vacarme qu'elle venait de produire. Phadransie s'en fichait. Elle venait de briser le cœur de son meilleur ami. Qu'il vienne. Elle avait assez de haine dans son cœur pour tout le monde à bord de toute façon.



~


Le calfat de bord, Daniel Lahzrën scrutait d'un œil fixe le capuchon noir s'éloigner. La dénommée Phadransie venait de planter là son pote, Sacha, après presque un mois d'absence. Tout le monde à bord savait que lui l'avait cherché de partout à Puerto Blanco, durant ces dernières semaines. Il s'était terriblement inquiété, avait questionné tous les jours chaque passants sur les docks, les quais, les places et les rues de l'île. Il avait même tenté d'atteindre la falaise qui se trouvait au bout du bout de Puerto Blanco, voir si il était faisable de l'escalader. Daniel était venu avec lui, les autres amis de Sacha lui avaient tourné le dos. Eux préféraient profiter du temps qui leur était confié à terre pour boire, s'amuser et baiser. Pas pour retourner toute l'île à la recherche de Phadransie. Alors, en gentil Calfat, Daniel Lahzrën avait proposé de l'accompagner là bas. Même si Sacha ne voulait rien laisser paraître, il avait clairement senti que le jeune était dévasté par l'absence de son amie. Et Daniel était d'accord. Savoir qu'une personne à laquelle on tenait venait de mourir, c'est dur et affligeant. Mais ne rien savoir, c'est encore pire. Ils avaient jugés ensuite la falaise trop abrupte pour être escaladée, et de toute façon, de nuit et sans matériel, c'était trop dangereux. Et puis, Daniel ne pensait pas que quoi que ce soit puisse se trouver derrière. Il avait posé une main amicale sur l'épaule du jeune Sacha, et avait fait demi tour ensemble.
Après sa dispute avec son amie, Sacha resta planté là, comme un con quelques minutes. Sans doute était-il sous le choc. Daniel prit soin de ne pas se faire voir du jeune homme. Il recula dans l'ombre, et s'en alla. « Qeshdarr est à bord, lui avait dit Tomas Reddar, surveille le. Et surtout surveille la, elle. Elle va tenter d'assassiner le Capitaine. »

Daniel Lahzrën quitta le faux pont et s'eloigna.



~



« Sacha ?

C'est avec une certaine douceur que Calfat s'approcha du jeune mousse. Le Grand Val avait pris la mer depuis plusieurs heures, la journée s'était bien déroulée, et sans encombres. Tous étaient à présent dans la cuisine, réunis pour l'heure du dîner. Phadransie était dans un coin, avec Falcon Qeshdarr. Sacha mangeait avec un groupe d'amis, comme par hasard à l'aute extremité. Il semblait ailleurs lorsque Daniel l'avait interpellé.

-Je peux te parler en privé, Sacha ?

Le jeune garçon se leva et le suivit. Ils s'éloignèrent un peu.

-Ca va ?

Sacha se força à sourire.

-Ouais. Tu veux quoi ?
-Ecoute je..Je sais que tu ne m'as pas vu, mais j'étais là lorsque ton amie est venue te voir tout à l'heure, sous le pont.
Sacha paressait pantois par cette nouvelle. Calfat enchaîna.

-Ne sois pas trop dure avec elle, Sacha. Elle a ses raisons d'agir.

Cette fois, Sacha s'emporta.

-Mais quelles raisons putain ?! Elle est au courant cette conne que j'ai traversé toute l'île en long en large et en travers pour la retrouver ?
-Je pense qu'elle le sait.

Avant que Sacha puisse crier autre chose, Calfat posa une main sur son épaule et l'interrompit.

-Sacha, ton amie est en danger. En grand danger. Il n'y a que toi qui puisse faire quelque chose pour l'aider.
-Qu'elle aille se faire voir, j'en ai plus rien à fou...
-Elle est montée à bord pour tuer le Capitaine Andelzzer.

Cette déclaration eut l'effet d'une bombe sur Sacha.

-Tu as parfaitement entendu. Ce n'est pas un hasard si Phadransie et le Capitaine Falcon Qeshdarr réaparaissent en même temps. Elle lui a rendu sa liberté, et l'a racheté à Piccolo. En échange, lui lui a enseigné sa technique des 3 points clés. Et elle compte l'utiliser sur le Capitaine Andelzzer, pour le tuer. Ce soir même. C'est pour ça qu'elle t'a parlé comme elle l'a fait, pour te tenir eloigné le temps qu'elle fasse ce qu'elle a à faire. Comprends-tu ?
-Mais pourquoi...
-Tuerait-elle notre Capitaine ? Sacha, tout ceci est compliqué. Je ne sais pas si tu es prêt à l'entendre
-Calfat, si tu sais quelque chose, dis le moi, le supplia le jeune homme.
-Phadransie s'est faite violer le soir même où le Grand Val a accosté dans le port de Puerto Blanco. Le Capitaine l'a demandé dans sa chambre et ensuite il a...

Calfat ne termina pas sa phrase volontairmeent. Un silence. Sacha était sous le choc. Des dizaines d'émotions semblaient envahir son être. Daniel poursuivit, d'une voix emplit de compassion.

-Je sais tout ça car le Second du Capitaine Andelzzer, Tomas Reddar me l'a dit. Sacha, je suis désolé pour ton amie. Mais tout s'enchaîne, l'heure est grave. Phadransie a emmené Qeshdarr dans le but de se venger. Elle espère naïvement se rendre dans la cabine du Capitaine et utiliser les 3 points clés sur lui.
-Mais...mais...
-Oui. Cela te semble impensable, et tu as bien raison Sacha, car tu es un gars intelligent. Mais ton amie semble bien plus naïve que toi, et je te garantis qu'elle va le faire. Regarde là, tu remarqura qu'elle ne porte aucune arme, ni pistolet, ni épée au côté.
-Je dois l'en empêcher ! cria Sacha.
-Tu connais Phadransie. Tu crois qu'elle te laissera la persuader ? Elle préferera utiliser la technique secrète sur toi plutôt que renoncer à se venger ! Tu as bien vu ce matin, jusqu'où elle est prête à aller pour te tenir eloigné.
-Je dois pourtant essayer !
-Sacha, réfléchis bien. Moi aussi je n'ai pas envie qu'elle se jette dans la gueule du loup aussi stupidement, elle est si jeune. Mais toi aussi, cependant cela ne doit pas t'empêcher de réfléchir avant d'agir. Et tu sais aussi bien que moi qu'aller la voir et la « raisonner » ne donnera rien de concluant. Tu connais Phadransie mieux que moi, cette gamine on ne la raisonne pas.

Sacha baissa le regard. Il semblait dévasté.
-Que puis-je faire alors...

Daniel sortit de sa chemise un tromblon, armé d'une balle. Une seule.

-Pour la protéger, tu peux tuer Andelzzer toi même.

Voyant le regard perçant et stupéfait que Sacha lui lança, le calfat se justifia, d'une voix aussi claire et sure que de l'eau de source jaillissant d'un rocher.

-Si le Capitaine Andelzzer meurt de la main de Phadransie, Sacha, tout les soupçons se porteront directement sur elle. Tomas Reddar la fera pendre, ou la tuera d'une balle en pleine tête. Dans les deux cas, qu'elle reussisse à le tuer ou qu'elle echoue, ton amie se condamne elle même. Mais si tu le tues toi, maintenant, alors qu'elle et Falcon Qeshdarr sont toujours à table, ici, alors personne ne pourra accuser Phadransie de ce meurtre. Pour ma part, je te couvrirai, je dirai que tu es venu me voir pour m'aider à reboucher une rainure dans la coque, si jamais le Second me questionne. Et vu que j'ai un peu d'influence auprès de lui -j'en veux pour preuve le fait qu'il m'ait confié ce que le Capitaine Andelzzer avait fait subir à Phadransie- il me croira sans soucis.

Daniel Lahzrën posa le tromblon dans la main tremblante de Sacha.

-Je ne peux pas, et ne veux pas décider pour toi mon ami. Mais dans un cas, Phadransie mourra. Dans l'autre, elle peut vivre. Grace à toi.

Il tourna le dos à Sacha.

-Il va de soi que cette discussion n'a pas eu lieu. Agis selon ton cœur, Sacha. Je te souhaite bonne chance...
Mar 28 Juil 2015 - 18:39
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Abad El Shrata du Khamsin
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Sacha tient le tromblon dans la paume de sa main, face au ciel. Il fixe un instant les aspérités de l'arme, les fines excavations sur sa crosse d'argent qui forment un panache de feuilles de vigne. Son fusil en bois exotique, dont la patine révèle les nœuds plus foncés et qui brille à la lumière du soleil. Une arme magnifique. Pourquoi ce besoin de rendre les armes belles ?
Comme pour cacher leur véritable but. Tuer.
Est-ce qu'il a bien entendu ce que le Calfat lui demandait de faire? Assassiner Andelzzer ?!
Il repense à la nuit de beuverie un mois plutôt. Alors ce soir là, Phadransie s'est faite...violée -le mot lui arrache un haut-le-coeur- pendant que lui gisait sur le sol de l'auberge, du vomis aux commissures de ses lèvres. Il apporte sa main à son front, luttant pour ne pas y apporter son autre main et se tirer une balle.
Alors Phadransie est allée voir Piccolo pour lui racheter Falcon. Mais avec quel arg...
L'argent de sa bourse bien sûr, qu'elle lui a demandé le soir même après s'être faite... Sacha détourne la tête. Il ne peut s'empêcher de penser à cette scène sans que lui file la gerbe. Elle est donc allée voir Piccolo afin qu'il lui livre Falcon pour qu'il lui apprenne sa mortelle technique des trois coups, celle là même qui avait terrassé Phadransie plusieurs semaines.
Mais au marché des esclaves, Sacha a vu quel genre d'homme est ce Piccolo. Le genre fier et rancunier, et surtout avide d'or. Il a dû lui proposer un marché c'est obligé, il n'a pas pu lui lâcher Falcon aussi facilement.
Et Falcon qui s'en vient rejoindre les rangs du Grand Val...alors qu'il aurait pu disparaître dans un bateau marchand en direction des Sultanats.
En cet instant, Sacha aurait mit sa main à couper que Falcon était là pour reprendre le navire sous le compte de Piccolo après que Phadransie ait tué Andelzzer.
''Mais quelle conne!!'' hurle-t-il. Plusieurs pirates se retournent surpris, puis ils reprennent leurs occupations.
Ne comprend-elle pas que c'était elle le dindon de la farce ? Piccolo a profité de sa faiblesse pour en faire ce qu'il voulait. Le lascar n'était pas dupe, loin de là ! Une fois Andelzzer mort et l'équipage en vadrouille, il reprendra le navire et tous ses occupants. Il réduira peut être même Phadransie en esclavage. Il en était capable. Piccolo est ce genre d'homme qui n'est parti de rien, le genre de ceux qui sont nés dans la rue, crevant la faim. Mais aussi le genre rusé, qui s'en sont tirés grâce à leur intelligence. Le genre de ceux qui sont prets à tout pour montrer les marches de l'ascension sociale. Piccolo lui, est en haut de l'échelle : Il fait parti de ceux qui ont vendu leur âme à Simialle. C'est comme si Phadransie s'était passée les chaînes aux pieds elle même...
Mais pourquoi pense-t-il à ça ? De toutes façons elle n'arrivera jamais à tuer Andelzzer, un putain d'elfe sept cent fois plus vieux qu'elle. A quoi bon passer un mois à apprendre cette foutue technique. Phadransie a toujours eu le sens du spectacle, il la reconnait bien là. Le goût du spectacle, et le goût du risque.
A Port-Argenterie, elle ne pouvait s'empêcher de voler discrètement, il fallait toujours qu'elle interpelle le marchand au dernier moment, pour lui montrer qu'elle l'avait eu, qu'elle était plus intelligente que lui. De nombreuses fois ça leur avait valu des poursuites endiablées avec les gardes. Ils ne s'étaient jamais fais attraper, heureusement pour leur tête.
Sacha ne put s'empêcher de sourire.
Par contre, qu'est-ce qui permettait à n'importe qui d'atteindre le niveau du meilleur des guerriers : un flingue. Et il s'avère que Sacha en tient un au creux de sa main.
De l'autre côté du pont, en contrebas, Sacha voit Phadransie emmitouflée dans sa cape noire, sortir des dortoirs. Elle se dirige vers la cabine du Capitaine. Elle va passer à l'action.
Sacha jette un coup d’œil sur sa gauche, vers la porte de la cabine. Il est plus proche qu'elle.
C'était maintenant ou jamais.
''Phadransie tu veux jouer au plus con ? Tu as toujours perdu à ce jeu, c'est pas aujourd'hui que tu vas gagner ! Dire que j'ai failli te croire lorsque tu m'as craché ton rejet en pleine gueule !''
Il s'élance à grands pas vers la cabine. Il sent son cœur battre dans sa poitrine ''boum boum boum boum''. Le ciel a perdu son bleu azuré, et de gros nuages noirs se sont à présent formés au dessus de sa tête. L'air est lourd, comme avant un orage de chaleur.
Il y a peu de chances qu'il survive, il le sait.
Andelzzer est un elfe noir. Il a survécu à plus de batailles que Sacha ne peut s'imaginer. Ce n'est pas pour rien qu'il a 688 tours. Qu'est-ce qu'est un foutu tromblon face à un elfe noir vieux de 688 tours ?
Mais quand bien même les dieux soient de son côté et qu'il arrive à le tuer, alors ce sera Phadransie qui lui tordrait le cou pour lui avoir fait capoter sa vengeance, et elle aura entièrement raison. Mais qu'importe, elle, elle sera sauve.
Il est à présent à la moitié du port. ''boum boum''. Il sent son coeur qui s'affole dans sa poitrine.
Il repense aussi au Calfat, la façon dont il est apparu sortant de nulle part, indiquant qu'il l'avait espionné. La façon dont il lui a expliqué le problème, la façon dont il a mit l'arme dans sa main. ''Agis selon ton cœur Sacha'' Sacha pouffa de rire. Il s'était pris pour qui ce connard, un putain de chevalier ? Il sait très bien qu'il est dans le coup lui aussi. De toutes façons il n'a jamais eu confiance en lui. Ca ne l'aurait même pas étonné que le tromblon qu'il lui a donné ne soit pas chargé, ou qu'il soit enraillé. Mais Sacha n'a même pas l'envie de vérifier. Au moins si il meurt, Phadransie en tirera une leçon : réfléchir avant d'agir. Même si il n'est pas en position de donner quelconque conseil.
Ca y est. Il est arrivé au niveau de la cabine. Il ne reste plus que les escaliers à monter. Il jette un coup d’œil vers Phadransie en contrebas, elle l'a vu elle aussi. Ils se dévisagent une seconde puis Sacha articule un mot sur ses lèvres : ''désolé''. Phadransie reste stoïque un instant, immobile, paralysée. Puis elle s'agite : elle a comprit ce qu'il compte faire. Mais la horde de pirates charriant les caisses de provisions l'empêchent d'avancer. Elle a beau filer de grands coups de coudes en hurlant, elle penne à se frayer un chemin. Elle est toujours aussi frêle. Et elle veut tuer un elfe noir...
Sacha détourne son attention vers la porte de la cabine plus haut. Il inspire un grand coup de cet air lourd et humide qui embourbe ses poumons. Il se met à pleuvoir. Il gravit les marches quatre à quatre.
''boum boum''
Le temps qu'il arrive en haut de l'escalier, les quelques gouttes de pluie se sont transformées en adverse.
''boum boum''
Son cœur s'emballe. Encore trois marches.
''boum boum''
La porte est devant lui. Sa main tourne sur la poignée.
''boum boum''
La porte s'ouvre à la volée, au moment même où un éclair zebre le ciel derrière lui. Il est trempé. Ses longs cheveux noirs collent contre son front.
''boum boum''
Devant lui se tient Andelzzer, un instant plus tôt le bras appuyé contre le mur, le bruit de la porte qui s'est ouverte l'a poussé à faire volte face. Ses yeux de glaces scintillent dans la pénombre de la cabine.
''boum boum''
Sacha fait un pas en avant. Il tend son bras droit, au bout duquel sa main tient fermement le tromblon.
Malgré son cœur qui saute dans sa poitrine, il ne tremble pas, et malgré le fusil pointé sur lui, Andelzzer reste de marbre.
''boum boum''
Il sait ce qui lui reste à faire.
''Crève''

BOUM !
Jeu 30 Juil 2015 - 2:08
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Noire
« Sacha !! »

Il savait. Phadransie ignorait pourquoi, mais il savait. Comment... ?

Le Capitaine Falcon Qeshdarr sur ses talons, elle se précipite en avant. Pitié, faites qu'il ne tourne par cette poignée de porte avant que j'arrive à sa hauteur !

« Sacha, arrête !! »

Il s'immobilise quelques secondes. Semble puiser au demeurant de tout son être le courage necessaire pour aller au bout de son geste. Putain, ne fais pas ça Sacha !

Ca y est.

Sacha a ouvert la porte de la cabine du Capitaine Elfe Noir Andelzzer. Determiné à le tuer à la place de Phadransie.

« Sacha !!! »

Elle court derrière lui, est sur le point de gravir les escaliers pour le rattraper. Une silhouette semblant jaillir de nulle part la se dresse devant elle, stoïque. Phadransie la reconnaitrait entre mille hommes. Le vieux. Tomas Reddar.

A ses côtés, le Capitaine Falcon a serré les poings. Il porte un sabre à la ceinture. Tomas Reddar dégaine. Deux épées magnifiques, une dans chaque mains. Il savait ce qu'allaient faire Phadransie et Falcon.

« Mais si il était là depuis le début à veiller sur la Cabine d'Andelzzer...alors pourquoi n'a-t-il pas empêché Sacha d'entrer ? »

Phadransie tremble de tous ses membres. Elle qui rêvait de cet instant depuis des semaines, chaque heure lui ayant semblée plus longue encore à passer que la précédente. Elle sent que la maîtrise des événements est totalement en train de lui couler entre les doigts, comme de l'eau que l'on tenterait naïvement de saisir entre le pouce et l'index.

« Je m'occupe du Second, lui crie Falcon Qeshdarr en dégainant son arme à son tour, charge toi de son Capitaine ! »

Alors que les deux adversaires envoient leurs trois lames s'entrechoquer dans un crissement sonore faisant sursauter toute la carcasse boisée du Grand Val, Phadransie s'élance. Elle dépasse Tomas Reddar et sa barbe rousse. Elle dépasse Tomas Reddar, le chien d'Andelzzer. Elle atteind à son tour la porte de la Cabine d'Andelzzer. Elle entre.



~



Le Capitaine Andelzzer attend que la porte de sa Cabine s'ouvre. Il voit la poignée s'abaisser lentement. Il sait qui il recevra en ce soir sans lune. Un jeune garçon pénètre alors dans son espace privé. Il lève le bras, pointe sur lui un pistolet. Andelzzer n'esquisse pas de sourire lorsqu'il lâche d'une voix inhumaine et glaciale :

« Je t'attendais, Sacha. »



~



Le coup est parti. Du haut de la dunette, et même du pont du Val, Daniel Lahzrën en aurait mis sa main à couper, l'impact du coup de feu s'est fait sentir, et entendre. Prompt et élancé, le calfat de bord  s'élance, prêt à gravir à son tour les escaliers. Il ne peut s'empêcher de ralentir à la hauteur de Tomas Reddar, le regard fixé sur Phadransie et Falcon.Puis ses yeux se posent sur Tomas Reddar avec circonscription  :

« Daniel, ne te préoccupe pas de moi. L'important c'est le Capitaine.Va. Et fais ce que tu as à faire.»



~


Phadransie entend la porte claquer derrière elle. Son cœur, et le sang tel un tambour battant l'intérieur de son crâne menacent de la rendre folle. Elle n'est plus maîtresse de son corps. Ses jambes tremblent. Elle meurt de chaud. Tout semble tanguer autour d'elle, les contours de la pièce se floutent instantanément. Seul un élément est net et précis devant ses yeux. Andelzzer. Il est au fond de sa cabine. Debout près de son lit aux draps noirs. Vêtu de son long manteau de cuir noir. Ce cuir là. Le même qu'avait senti Phadransie lorsqu'il s'était couché sur elle. Elle était tellement emplie de haine et de rage pour cet Elfe, qu'elle ne vit pas tout de suite Sacha. Il était à quelques mètres d'elle, à mi chemin entre Andelzzer et la porte. Et Calfat, derrière lui, menaçait de lui trancher la gorge de sa lame rouillée qu'il tenait dans la main.


~


Sacha avait vu et sentit le coup partir. C'était la première fois qu'il tirait sur quelqu'un dans le but de lui ôter son bien le plus précieux : sa vie. C'était même la première fois qu'il tirait avec un tromblon en fait. Et Andelzzer n'était pas mort. Une arme chargée à blanc ? Impossible, car le Capitaine tenait entre son majeur et son index la balle de plomb qui avait eu pour objectif de lui exploser le crane. Comment avait-il fait ? Comment avait-il pu être aussi rapide ? De la magie ? Sacha ne voyait que ça, et la lueur diffuse semblant se dispercer lentement autour de ces doigts pouvait bien confirmer cette hypothèse. Etait-ce possible qu'il ait à faire à un mage ? Ou pire, un mage noir ? Il devait vite penser à un second plan, un moyen alternatif. Il tira encore mais le tromblon n'avait été chargé qu'une seule fois. A cet instant il entendit le son distinctif d'une porte qui se claque, et des bras puissants l'etreignèrent. Une lame pleine de rouille pointa sa gorge. Au moindre mouvement supplémentaire, sa peau se percerait d'elle même sur cette pointe, et il mourrait dans une flaque de sang noir. Et puis de toutes manières, il était bien trop immobilisé pour tenter de se débattre ou quoi que ce soit d'autre. Une main maintenait sa tête plaquée sous le visage de son ravisseur, près de son cou, et l'autre tenait fermement l'arme.

« Tout doux Sacha. Ca ne sera plus long à présent...mon ami. »

C'était Calfat. Sacha hurla de rage en reconnaissant sa voix.

Phadransie venait d'entrer comme une tornade dans la chambre. Dehors, l'orage vrombait et tonnait. Sacha était dans un tel état qu'il aurat été bien incapable de dire si il se noyait dans sa propre sueur, ou mourrait de froid. Le regard de Phadransie croisa celui du Calfat. Puis le sien. Puis le sien.

« Ne fais plus aucun mouvement Phadransie, dit Calfat tout en accentuant sa pression sur Sacha, si tu veux que ton ami vive ! »

Sa technique semblait avoir marchée. Phadransie était immobile, elle semblait même hésiter à respirer trop fort, comme si la vie de Sacha dépendait dès à présent de l'intensité du silence régnant dans la pièce.

« Lâche le ! » Hurla Phadransie en direction de Calfat.

Pauvre Phadransie. C'est peine perdu.

La voix d'Andelzzer s'imposa alors d'elle même, posée, glaciale, sure.

« Renonce, Phadransie. »

Elle serrait les poings de rage. Si elle avait eu ce pouvoir, des éclairs et des tonnerres auraient jalli de ses yeux pour aller foudroyer et brûler vif l'Elfe Noir. De ces deux personnages, nous aurions été en droit de nous demander lequel des deux contenait le plus d'animosité. Lequel était véritablement le plus Noir.

« Phadransie, renonce à cette démence. Plie le genoux.»

Elle ne l'avait pas lâché du regard. Pour ajouter davantage de véridicité à cette scène dramatique qui se jouait, Calfat vint presser davantage la lame contre la nuque blanchâtre de Sacha.

« Je ne plaisante pas, Phadransie. Ecoute le Capitaine, accepte son autorité si tu tiens à la vie de ton ami.
-Calfat ! -sa voix était chargée de toute la damnation de Ryscior- Pourquoi fais-tu ça ? Qui es-tu réellement ?

Ce fut Andelzzer qui répondit à la place du concerné.

-C'est un chien. L'animal de Reddar. Il lui est soumis et lui obéit au doigt et à l'oeil, comme une bête de guerre.
-C'est impossible...,se lamenta Phadransie.
-Tomas est mon Second, mon allié principal. J'ai choisi de l'exposer au su et à la vue de tous sur ce navire. Contrairement à Daniel qui sert les intêrets de Reddar -donc les miens- dans le secret.

Un sourire provocateur s'était dessiné sur la bouche du jeune homme tenant en otage Sacha. Andelzzer reprit, d'une voix encore plus forte, plus dure :

-Je t'ordonne de renoncer à toi même Phadransie ! C'est un ordre !
-Non !!
-Tant pis pour toi, tu l'auras sur la conscience, reprit Calfat en immoblisant un peu plus le visage de Sacha.
-Non !!! cria Phadransie deux fois plus fort dans un élan physique de désespoir.

-Pas Sacha...Pas lui.

Elle leva vers lui deux beaux yeux noirs, emplis d'une détresse infinie. Ses yeux semblaient supplier son ami de l'aider à trouver une solution qui ne lui coûterait pas la vie. Ses yeux semblaient hurler emmene moi loin d'ici Sacha. Loin de ce cauchemar.

-Sacha... »

On dirait qu'elle cherche à me dire quelque chose, songea Sacha. Leurs deux regards se croisèrent, se mélêrent. Sacha, ou ta vengeance. Sacha ou toi même. Sacha ou Andelzzer.

-Phadr...
-Sacha...

La porte vola en éclat derrière Phadransie qui dû se jeter au sol afin d'esquiver le vol des aiguilles de bois. Le Capitaine Falcon avait jailli de cette ouverture, les muscles gonflés et gorgés de sang. En revanche, celui qui s'inscrivait sur son corps et son visage n'était pas le sien. Il tenait dans chaque main les deux épées de Tomas Reddar. Vaincu et mort. Mort. Le Capitaine Falcon était à bout de souffle. Lorsqu'il le vit, Calfat changea radicalement d'expression. Son sourire venait de tomber.

-Mon Maître est...
-...mort, termina Falcon en le fusillant de ces deux yeux vers.

Andelzzer n'avait pas bronché, comme si le Capitaine Falcon lui annonçait simplement que le soleil se lèverait demain. Phadransie tremblait comme une feuille ballotée au vent. Tomas Reddar était mort. C'était déjà une petite victoire en soi...non ? Elle savait très bien que non. Sa victoire à elle serait la mort d'Andelzzer, ou ne serait pas.

« Retiens ton Capitaine, Phadransie !! tonna Calfat en reculant d'un pas avec Sacha. A genoux tous les deux ou je bute le gosse ! Et je ne plaisante pas !!



~



« Accepte moi comme ton Capitaine et Maître, ou bien mourrez tous sans attendre !

Andelzzer s'adressait à Phadransie à présent. Il avait crié ses propos. Elle hurla deux fois plus fort, en le mitraillant du regard.

-Jamais !! Jamais je ne te servirai ! Jamais je ne plierai devant toi ! Jamais je ne cèderai quoi que ce soit à un Elfe Noir ! Les pirates n'ont pas de maîtres ! Ils sont libres ! Et c'est en tant que pirate que je suis venue te faire crever ce soir !

-Tu y perds tout, Phadransie.

Un regard. Il passe d'Andelzzer à Calfat. Un geste. Fatidique. Dans un gargouillis de sang encore chaud, les jambes de Sacha se dérobent soudainement sous lui. Il heurte le sol comme une masse déjà morte, avec une certaine lenteur qui impose un étrange détachement aux spectateur de cet acte tragique.

Phadransie hurle et se jete en avant.

Ses bras se referment autour du corps de son ami. Elle en a oublié l'Elfe Noir.

Sa gorge est ouverte en deux, sa tête tombe lourdement en arrière, le poids brisant sa nuque.

Le corps de Sacha est sans vie. Phadransie y est aggripée comme si la sienne ne dépendait dorénavant plus que de ça.

Elle ne le lâchera plus jamais.

Et pleure sans retenue la mort de Sacha.



~



Le Capitaine Falcon Qeshdarr s'élance sans perdre une seule seconde. Avant même que le corps du jeune homme cogne contre le bois du navire, le sultan est sur Andelzzer, épées brandies en avant, prêtes à trancher. Le Capitaine Andelzzer est plus rapide. Il parvient à esquiver ces deux gigantesques arcades de lames qui avaient pour objectif de séparer la tête du reste de son corps. Il pose la main sur les fourreaux. La seconde qui suit, ce sont trois épées magnifiques, aux lames noircies, qui font office de barrage aux assautes de Falcon Qeshdarr.

-Pauvre fou ! J'ai quinze vies comme la tienne d'expérience ! Que comptes-tu pouvoir faire ?

Une épée vole dans les airs. La lame appartenait à Tomas Reddar. Les mouvements d'Andelzzer lorsqu'il manie le sabre sont irréels. Il porte son épée la plus lourde à la main droite, et se sert de sa gauche en plus d'une parfaite ambidextrie pour faire tournoyer les deux autres en même temps. Il se déplace vite, aussi vif qu'une ombre et aucune fois Falcon parvint à réussir une percée.

-Je ne suis pas assez stupide pour combattre un Elfe Noir selon ses propres règles !

Falcon Qeshdarr s'élança sans retenu du bureau sur lequel il venait de grimper. Il contracte tous ces muscles, lève ses deux bras derrière son crâne. Ses muscles sont tendus et durs.

-Vous, les Elfes, êtes peut être naturellement plus rapides et agiles que n'importe quel humain, mais en terme de force brute, je pense avoir l'avantage !

Ce sont tous les muscles de son corps qui s'investissent dans ce coup. L'épée de Reddar serrée entre ses deux mains se taille un sentier au milieu de ce mur de lames qu'est devenu Andelzzer. Le coup est si fort qu'il recule sous le choc, évitant par la même occasion de se prendre l'abattage de force de plein fouet. Sa main gauche encaisse le coup. Les deux lames qu'il tenait finissent par planer dans sa propre cabine avant de s'écraser au sol. Falcon Qeshdarr ne s'arrête pas là. Il tourne sur lui même aussi vite qu'il le peut. Au lieu d'un trois coups, c'est des coups de sabres et des estocs frontals qu'il assène à son adversaire.

-Et l'Arc de Trois me confère une vitesse que même les elfes n'ont pas ! C'est l'offense précise qui ne souffre de faire aucune distinction entre humain, elfe, nain ou que ne sais-je d'autre !

Le bruit sourd de la dernière lame de Falcon s'écrasant au sol vient ponctuer cette phrase.

-Tu parles trop, l'humain.

Falcon Qeshdarr ne se laisse pas perturber.

-L'Arc de Trois vous remettra à votre véritable place, Capitaine Andelzzer !
-Seul un fou tenterait d'attaquer à mains nues un elfe encore armé d'un sabre !
-La folie m'apportera la victoire dans ce cas !

Falcon Qeshdarr s'élança. Ce fut très exactement à cet instant ci que la plus belle lame de Calfat venant tout juste d'être dégainée abattit une voûte sanglante sur l'arrière de ces genoux. Touché de derrière, n'ayant ni vu ni entendu cet adversaire contre lequel il ne pensait pas devoir se battre, Falcon chuta en avant. La lame noire d'Andelzzer le dépouilla de sa main droite et sa main gauche avec une aisance perfide et déconcertante.

Vaincu, le Capitaine Falcon Qeshdarr, maître incontesté de l'Arc de Trois, eut tout le temps du monde pour apprécier sa défaite. Une défaite qui prenait une couleur rouge vive, grandissante en flaque sous lui.  



~



« SachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSachaSacha...

-Ca suffit. Sépare les Daniel. Jette ce corps aux poissons, dit Andelzzer en souillant le visage déjà blafard de Sacha d'un coup de botte.
-NOOOOOOOOOOOOOOONNNNNNNNNNN !!!

Phadransie s'aggripa de toutes ces forces au corps sans vie de celui qui venait de donner sa vie pour elle. C'était un véritable cauchemar.

Elle n'arrivait même plus à penser.

Tout
S'embrouillait.

Tout
Sombrait.


Sacha était mort.

-Noooon !!! Lâche le !!Lâche le !!Lâche le !!Lâche le !!Lâche le !!

Un coup de botte du Calfat, en plein visage, l'obligea malgré elle à lâcher Sacha. La violence de l'impact avait manqué de peu de lui briser la nuque. Elle tomba au sol.

Elle ne se souvenait même plus où elle était.

Calfat hissa sur ses épaules le corps de l'adolescent comme s'il ne pesait rien. Sa veste argenté fut bientôt recouverte de sang.

Phadransie s'accrocha à ses jambes de toutes ses forces. Jamais elle ne lâcherait prise. Jamais elle laisserait ce connard emmener tout ce qui lui restait, et lui resterait à tout jamais de celui qui avait partagé tant de choses avec elle. De celui qui s'était sacrifié pour elle.

Andelzzer l’écarta en la tirant par les cheveux. Phadransie se débattit.

Elle s'était promis de ne plus jamais pleurer de sa vie lors de sa dernière confrontation avec cet Elfe Noir.


Elle s'était parjurée de manière bien pitoyable ce soir.


Andelzzer la souleva et la saisit à la gorge. Elle criait encore le nom de Sacha alors que Calfat l'emmenait avec lui, prêt à le balancer par dessus le bastingage. Il quitta la cabine d'Andelzzer et bientôt ils furent trop loin pour que Phadransie puisse les voir.


S
A
C
H
A
!
!

Elle cracha au visage d'Andelzzer. Il grimaça mais ne parut pas énervé. Sans crier gare il la cogna sur le mur, puis sur le sol. Elle lutterait jusqu'au bout contre les Elfes Noirs et le Calfat.

« Tu vas devenir ma nouvelle Seconde Phadransie. Je vais te dresser !
-Non ! Va crever ! Non ! Non ! Non ! Non ! Non ! Non ! Je te déteste ! Toi et toute ta race !
- En présence d'autres humains tu m’appelleras Capitaine. Mais lorsque nous serons seuls tous les deux, ça sera Maître.

Il venait de bloquer ses bras avec lesquels elle le cognait tant qu'elle le pouvait, sans relâche. Elle était au sol, lui sur elle. De nouveau.

-Est-ce clair, Phadransie ?

Elle le regarda dans les yeux. Elle était largement capable de soutenir l'intensité de son regard à présent. Ce Bleu acier, si froid, si mortel, si pale ne l'effrayait même plus. En échange elle lui opposait la pire des couleurs, la sienne. Le Noir de la haine, des ténèbres, de la vengeance, de la tourmente et de la douleur. Le Noir d'une promesse Mort.

Andelzzer agrippa sa chevelure d'une main et de l'autre se saisit d'un tison ardent. Ce dernier s'enflamma au contact de la main qui agrippa. Un feu impressionnant de violence. Phadransie était immobilisée.

-Je vais t'apprendre le respect ! Si tu n'es pas capable de regarder ton Maître avec un minimum de retenue alors...

Il abattit le tison sur son visage d'un geste maîtrisé et ferme. La cible était son œil droit.

-tu ne regarderas plus rien d'autre !!

Ses bras étaient bloqués par les genoux de l'Elfe Noir, et sa main puissante lui immobilisait le visage. Elle hurla de douleur à en défier le tonnerre grondant. Son cri était glacial, en écho au regard du Capitaine Andelzzer, impassible. Une odeur de chair brûlée envahit la cabine, elle tentait d'échapper à ce feu ardent mais ne le pouvait pas. Son oeil prit feu, s'embrasa et embrasa son être entier de douleur. L'agonie lui fit perdre toute notion du temps et de l'espace.

-Maître, dit le Calfat en se posant droit comme un i derrière lui. Concernant le corps du garçon. C'est fait.
-Je te fais Second du Grand Val, Daniel Lahzrën, le temps que celle ci apprenne à m'être agréable. Débarrasse toi également du corps de Reddar.
-Et concernant le Capitaine des 3 coups, Maître ? C'est qu'il n'est pas mort.
-Tant mieux, je pense qu'il fera un très bon exemple pour l'équipage de ce Grand Val. Qu'ils voient ce qui arrive à ceux qui se mutinent à bord ! Brûle ses mains, et attache son corps au mât. Qu'il y pourrisse.
-A vos ordre, mon Maître.

Daniel Lahzrën tourna les talons. Mais Phadransie ne le voyait plus. Elle n'avait cessé de hurler.

Le Capitaine Andelzzer éteignit le tison et le jeta au loin avant de redresser Phadransie de force. Un écran noir et rouge se dressait face à elle. Et la douleur irradiait dans son crâne !

-Ton dressage va commencer. »
Jeu 30 Juil 2015 - 5:08
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Les songes enténébrés au sein desquels la plongeait son corps n'avaient qu'une seule couleur. Le noir. Phadransie se sentait couler au sein de ce mur d'inanité, de douleur et de haine. Elle n'aurait su dire laquelle de ces caractéristiques la torturait le plus, mais était pertinemment consciente que les trois s'auto alimentaient, et la dévoraient petit à petit avec autant d'ardeur. Andelzzer prenait un réel intérêt à creuser en elle au fur et à mesure que les heures se déroulaient, un vide béant. Il la privait de ses émotions, de ses sentiments, d'elle même. Il ne désirait d'elle qu'une seule chose, sa dévotion sans limites, et vomissait le reste. Il avait raison et avait dit quelque chose de totalement vrai lorsqu'il l'avait violé la dernière fois. L'Elfe Noir avait implanté sa marque jusqu'à l'intérieur d'elle même. Elle sentait au fond de son ventre cette boule distordue, battante, d'un noir d'encre grandir heure après heure, faire d'elle ce qu'elle n'était pas. Elle se serait volontiers éventrée elle même pour en sortir cette empreinte noire et la détruire. Est-ce qu'elle délirait ? Ou est-ce que cette magie elfique dégoûtante était bel et bien lové au fond de ses entrailles ? Par moment elle savait qu'Andelzzer n'avait rien laissé de tel dans son ventre lorsqu'il l'avait violé. Par moment elle semblait tellement sure d'elle qu'elle en aurait mis son deuxième œil à brûler. Son œil la faisait horriblement souffrir, des maux de tête épouvantables la torturaient en plus du reste. Elle n'y voyait presque plus rien. C'était définitif. Ce noir était omniprésent en elle.

Les songes enténébrés au sein desquels la plongeait son corps n'avaient qu'une seule couleur. Le noir. Depuis la mort de Sacha et le commencement de son « dressage » comme l'avait appellé le Capitaine Andelzzer, Phadransie subissait les conséquences d'un épuisement physique et mental total, se matérialisant en de rapides phases de sommeil de quelques minutes, voire quelques heures. Bien trop fatiguée pour penser, parler ou même bouger, elle laissait cette vague de ténèbres, aussi noire que l'Elfe en lui même, l'envahir et l'envelopper de ses griffes protectrices et meurtrières. Elle coulait au sein de ce mur d'inanité, de douleur et de haine, l'oeil fermé, sans plus réussir à ne serait-ce penser ou rêver. Et lorsqu'elle ouvrait l'oeil, à chaque fois il était là.

Elle avait passé les jours suivants -combien de jours exactement, elle ne saurait le dire- dans la cabine du Capitaine du Grand Val, recroquevillée sur le sol lorsqu'il lui permettait enfin de s'y poser. Quand son œil s'ouvrait, elle le voyait la regarder. Lui était soit sur sa chaise de chêne lissé, le dos tourné à son bureau et face à elle, soit debout au beau milieu de sa cabine, les bras le long du corps, ses prunelles brûlant et torturant Phadransie à ses pieds. Le hublot était calfeutré, ainsi il faisait toujours nuit dans la cabine d'Andelzzer.

Phadransie n'était ni attachée, ni blessée, si ce n'était dans son cœur et son mental.

«Tu ne peux rien contre moi, lui avait-il dit. Ton ami est mort par ta faute, car tu as tenté de t'élever contre mon autorité. Je vais faire de toi ma Seconde Phadransie. Lorsque nous serons en présence d'autres, je serai ton Capitaine, autrement tu m'appelleras Maître. »

La mort de Sacha et la chute tragique de son corps au travers les bouches abyssales l'avait minée également. A quoi bon lutter ? Sacha était mort en héros pour lui sauver la vie. Sacha était son seul ami, la seule personne en ce monde qui l'aimait bien. Qui l'avait aimé tout simplement, peut être, qui sait. Sacha avait donné sa vie pour elle. Pire que cela, il avait donné sa vie pour avoir une chance de sauver la sienne. Quand elle y pensait, son cœur se déchirait en elle et elle pleurait toutes les larmes de son corps. Mais les dés avaient été tirés et jetés, et elle avait perdu cette partie. Calfat s'était débarrassé du corps sans vie de Sacha avec autant d'émotions que s'il eut été celui d'une vermine immonde pourrissant dans les égouts de la Minable. Et tout ça c'est de ta faute Phadransie, car tu as voulu t'opposer à un Elfe Noir, lui avait dit Andelzzer.
Phadransie n'arrivait plus à pleurer maintenant. Andelzzer était entré trop profondément en elle pour cela. Cette boule malveillante dans son ventre paraissait gommer tout ce qu'elle ressentait avec autant de facilité que s'il eut s'agit de mots tracés du bout du doigt dans le sable d'une plage lors de marée basse. La marée, petit à petit, emportait tout ce qu'elle pouvait pour au final ne rien laisser. Sauf que sur sa plage à elle, la mer était Noire.

Phadransie venait de se réveiller. Combien de temps avait-elle comaté cette fois ? Une heure. Peut être deux ou trois, mais sans doute pas plus. A vue de nez, elle aurait dit que trois jours et trois nuits étaient passés depuis l'accident tragique. Depuis qu'Andelzzer avait définitivement eut le dessus. Elle avait l'impression d'être un vase tout fissuré, empli au tiers de haine et de rage, au tiers de désespoir et de tristesse, et au tiers restant de vide. Andelzzer la fixait. Ses muscles la faisait souffrir. Dans sa main droite elle tenait, entre ses doigts noueux et crispés, la garde d'un sabre d'abordage. Il traînait là, dans la cabine d'Andelzzer, et s'en était servi pour tenter de le tuer. Plusieurs fois. Au lieu de la stopper net dans son élan -elle était de toute façon pas en état physique de tuer qui que ce soit- Andelzzer lui avait ordonné d'aller jusqu'au bout de son geste. Pas dans le but de la narguer, mais de la dominer. Elle lui avait obéit. Il avait donc réussit et atteint son objectif. Jusqu'à ce que Phadransie, à bout de force, tombe à même le sol et s'y recroqueville, une première fois. Puis à son réveil, comme à chaque fois...

« Lève toi.

Elle était épuisée, ses muscles semblaient lui peser cent fois leur poids.

-Lève toi.

Le sabre était dans sa main. Allez Phadransie. Pour Sacha. Pour ta liberté. Pour te venger. Pour Sacha...

Elle poussa un hurlement de rage et se jeta sur lui, sabre en main. Son corps était secoué de tics et de spasmes, ses doigts se contractaient et se décontractaient sans aucune raison. Sa machoire claquait, il lui arrivait de baver, mais c'était du sang qui coulait de ses lèvres. Pourquoi du sang ? Sans doute car elle en avait le goût en bouche depuis plusieurs jours.
Le Capitaine Andelzzer n'eut aucune difficulté à esquiver le coup de sabre déplorable. De toutes façons Phadransie luttait ainsi depuis des jours et des jours, presque sans aucune accalmie, elle était à la limite de son être.
Elle fit un volte face et attaqua de nouveau. Encore une fois, il esquiva. Sa bouche touchait presque son oreille à elle lorsqu'il lui susurra :

-Fais mieux.

Elle tomba à moitié sur lui, trop épuisée. Il ne la rattrapa pas. Elle enchaîna encore quelques mouvements du bras, puis s’écroula à ses pieds. Ses bottes trônaient à droite et à gauche de son visage. Sa main droite n'avait pas lâchée la garde du sabre.

-Arrête toi ici Phadransie.

Il appuya le dessous de sa botte contre sa main, mais elle ne lâcherait le sabre pour rien au monde. Du moins, elle ne l'aurait lâché pour rien au monde il y avait quelques jours de cela. Elle était tombée si bas. Sans mot dire, elle laissa tomber au sol l'épée. Une éternité s'ecoula. Andelzzer l'avilissait du regard. Elle ne croisait plus le sien. Pas après y avoir perdu son œil droit. A chaque fois elle baissait le regard.


~


-Sais-tu lire une carte marine, Phadransie ?

Le Capitaine Andelzzer était simplement assis à son bureau, il semblait étudier tout un lot de cartes jaunies par l'âge.

-Non.
-Je t’apprendrai à le faire. Une Seconde rentable doit savoir ça.

Elle ne lui répondait pas, toujours prostrée au sol.

-Il est peut être temps que tu t'empares du poste qui te revient maintenant, non ?

Encore un silence fit office de réponse.

-Tu es comme un fauve que je tiens en laisse, reprit-il d'une voix glaciale, si je te lâche tu feras un vrai carnage. Et un fauve a besoin d'être lâché.»

Il s'était tourné vers elle, très sereinement.

-Laisse s'exprimer toute cette haine en toi avant qu'elle ne te consume. Tue Daniel. Et fais toi reconnaître en tant que Seconde du Grand Val.

Il ajouta « c'est un ordre de ton Maître. »

Phadransie avisa la garde du sabre. Elle tremblait de rage et de fatigue. Mais Andelzzer était intouchable, elle ne pouvait tristement rien contre lui. Calfat ? Ce fils de pute allait crever. Lui, elle pouvait le tuer. Elle se redressa, tanguant. Elle se serait égorgée elle même pour ne serait-ce oser imaginer obéir à un ordre d'Andelzzer, mais elle n'était plus elle même. Et pour une fois, cet ordre ci ne lui déplaisait pas entièrement. Elle l'écouta et laissa sa soif de sang prendre le dessus. Sa haine, sa rage, sa rancœur. Elle se sentait capable d'embraser le navire de flammes noires tout droit sorties de son âme.

Phadransie, sans un mot, quitta la cabine du Capitaine Andelzzer. Elle n'était plus la même que celle qui y était entrée, d'innombrables jours plus tôt.

Dehors il faisait nuit. Le ciel était étoilé, le vent levé tambourinant en tourbillons cinglants dans les airs. Sentir ce vent du grand large lui écorcher le visage et fouetter sa peau ne lui déplut pas. Les marins à bord du navire s'écartèrent en la voyant passer sur le pont. Elle savait que la version officielle des derniers événements, donnée par le Capitaine en personne et apportée à l'équipage par le Second Daniel Lahzrën faisait de Sacha et du Capitaine Falcon Qeshdarr les mutins du Val et assassins du père de Barberousse, Tomas Reddar le Vieux Second. Quant à elle, elle était officiellement celle qui avait soutenu le Capitaine Andelzzer en mettant à mort Sacha, lui tranchant la gorge d'un coup de couteau.
Elle sentit glisser sur sa peau les regards curieux et apeurés de certains. Avait-elle tant que ça l'air d'une démente ? Il faut dire qu'elle était couverte de sang, sa démarché était singulière pour le moins, et ses cheveux dans le vent venant cacher son orbite souillée par le feu devaient lui donner l'air d'un démon tout droit sorti des enfers. Elle aurait mis sa main à couper que Cul Bite Us, Barberousse et même le Knife avaient peur d'elle. Andelzzer avait raison sur ce point là aussi. Hanselm Reddar et les autres n'étaient rien de plus que des microbes, des importuns. Elle les aurait massacrés avec plaisir. Elle aurait repeint à mains nues la coque du Val en rouge sang. Mais ça n'était pas son objectif. Elle descendit le Gaillard d'arrière, et foula le pont principal. Elle emprunta la trappe menant au Faux-Pont, un étage en dessous. Elle flairait Calfat, tout comme un limier renifle une proie. Il n'était pas sur le pont avec les autres. Sans doute dans sa cabine. Elle songea à remonter vers les cabines placées vers la poupe du navire quand elle le repéra. Il était dans la cahute dos à elle, penché sur une des nombreuses caisses que transportait le navire. Phadransie serrait les poings de rage, Calfat ne l'avait pas entendu approcher. Elle allait lui planter son sabre entre les côtes.

« Calfat.

Il se retourna en une fraction de secondes. Phadransie n'avait pas bougé. Il semblait surpris de la trouver ici. La main posée sur la garde de son sabre, il la toisa du regard.

-Le Capitaine a finit ton dressage ? Ou il t’envoie me chercher ?
-Il m’envoie, mais pas pour te chercher. Pour te tuer, répondit la jeune femme d'une voix à glacer les sangs.

Calfat dégaina. Phadransie était prête. Elle avait assez de rage et de détermination en cet instant pour tenir debout et être certaine de l'issue de ce duel.

L'entrechoquement des deux lames fit trembler le faux pont entier du Grand Val. Visiblement, Daniel Lahzrën tenait à sa misérable vie. Il se battait très bien pour un simple Calfat, trop bien même, cela faisait des années qu'il devait bien cacher son jeu à bord du navire, en compagnie de Reddar son maître, celui qui le tenait en laisse.
Phadransie sentit un estoc particulièrement bien placé lui effleurer l'aine, mais elle refusa toute esquive et accepta la douleur. De toute façon, ça n'aurait pas pu lui faire mal. Elle profita de ce coup pour le toucher à l'épaule. Le Calfat cria de rage et surenchérit, coup sur coup.
Son combat était violent et direct, il ne laissait pas le temps à son adversaire d'attaquer, la rapidité et la sommation des coups étaient sa signature. Les deux lame s'entrechoquèrent avec la plus grande violence plusieurs fois, car si Calfat vivait de succession d'attaques violentes, celles de Phadransie l'étaient deux fois plus. Elle hurlait sa rage à son visage, et la rage guidait son bras. Peu importe les risques, elle attaquerait.
Il la toucha une seconde fois, effleura sa nuque. Phadransie n'en eut cure. Elle le retoucha à l'épaule. Cette fois ci, le coup le gênerait grandement pour conserver ce même rythme d'attaque. Venant de le comprendre, Calfat balança au visage de Phadransie un lot d'insulte, et tourna sur lui même en enchaînant des coups encore plus vifs. Il était pressé d'en finir, car désormais le temps ne jouerait plus pour lui. Déjà, sa veste grise gouttait de sang rouge.
Phadransie se contenta de parer et esquiver. Si elle même avait assisté à ce combat là, il y avait une semaine, elle ne se serait pas reconnue en l'épéiste de talent qui faisait tête au nouveau Second de bord. C'est comme si elle était invulnérable, sa haine la protégeant de la mort. Comme si une sorte d'ivresse protectrice et meurtrière coulait dans ses veines et martelait son crane, faisant interagir ses bras et bloquer toutes attaques. Alors elle repéra l'ouverture qu'il lui laissa une fraction de seconde.
L'épée de Phadransie lui vola des mains, haut au dessus de sa tête, elle cogna contre l'un des quatre murs de la cahute. Elle vit filer dans les prunelles de Daniel le cri de victoire alors qu'il s'apprétait à l'achever. Un cri lancé bien trop vite...

Phadransie se décala sur le côté. Il était temps d'utiliser l'Arc de Falcon. Les 3 Coups du Capitaine Qeshdarr avaient mis fin aux jours misérables de Tomas Reddar. Les 3 coups de Phadransie enverraient à terre  son successeur, Daniel Lahzrën. Sa vitesse s’accéléra ostensiblement. Les éléments louvoyaient autour d'elle. Elle le sentait.

Une.
Hanche.

Deux.
Poitrail.

Trois.
Flanc.

Trois secondes.

La contraction des nerfs.

Daniel Lahzrën était un homme déjà mort. Ce dernier laissa à sa lame le soin de fendre les airs pour pourfendre en deux Phadransie. La pirate bondit en arrière suffisamment rapidement afin de voir les mèches de cheveux devant son visage se trouver tranchées nettes.

-Le Capitaine ne veut pas d'un Second faible ! Cria ce dernier à Phadransie.

La jeune femme vit l’incompréhension voiler le regard de son adversaire. Une dernière inspiration, une ratée qui plus était. Son corps fut pris d'une paralysie soudaine. Son épée tomba à ses pieds en un bruit sourd. Ses jambes le lâchèrent, il tomba tête en avant. Phadransie entendit distinctement le bruit de ses dents se briser sur le sol à la fin de la chute.

-Le Capitaine ne veut pas d'un Second faible, répéta Phadransie, le mal dans la voix.

Instinctivement elle leva la tête. Au dessus d'elle, en haut de la trappe menant à la cahute, en haut des escaliers de bois, Andelzzer la scrutait de ses yeux déments. Il avait tout vu et avait même quitté sa cabine pour l'occasion. Les deux êtres mêlèrent leur regard, sans défi, animosité ou quelconque sentiment. Puis Andelzzer recula de quelques pas et disparut du champs de vue de Phadransie. Mais elle le savait toujours là, à l'attendre. Elle savait avec une précision déconcertante où  il était même sans le voir. Elle était capable de le reconnaître à l'odeur même les yeux bandés. Elle entendait sa voix même lorsqu'il ne parlait pas.

Son attention se reporta sur sa proie, toujours en vie. Les 3 coups de Falcon Qeshdarr, la plus merveilleuse des armes à n'en pas douter. Phadransie expédia un coup de pied en plein visage du Second déchu. Elle entendit les os de son nez craquer. Alors elle se défoula. Elle lui explosa les lèvres, lui brisa les os, elle tapa jusqu'à avoir mal à la jambe et ne plus sentir son pied, mais s'en foutait. Elle voulait lui faire cracher ses dents, lui faire payer ses actes. Et ça n'est que le début...
Phadransie grimpa sur l'une des caisses de la cahute, et y déroula une épaisse corde qui servait au maintien des pièces de bois. Elle savait faire un bon nœud, et savait même très bien les faire. Elle leva son œil afin de vérifier qu'Andelzzer ne la surveillait pas. Puis elle enroula le nœud coulant autour de la nuque de Calfat. Elle doutait fortement qu'il l'entendait et la voyait, mais il respirait toujours, bien que son souffle soit difficilement perceptible. Ça voulait dire que son cœur battait toujours. Contrairement à celui de Sacha.

-Je vais t'envoyer le rejoindre, mais ça sera beaucoup plus long pour toi que ça l'a été pour lui...

Phadransie traîna l'homme jusqu'au hublot qu'elle ouvrit en grand. Elle joignit l'autre extrémité de la corde à une épaisse caisse, assez solide pour supporter au moins trois hommes comme Daniel Lahzrën, qui n'était en soi pas très gros, loin de là.

-Je te souhaite de brûler en enfer !!

Phadransie le fit basculer dans le vide. La nuit était heureusement étoilée, elle n'allait pas perdre une miette de ce spectacle égrillard. Le son rauque de la corde qui se tend. Les vagues cognant contre la coque, tentant d’avaler Calfat par les pieds. Tout ce que tu mérites. Elle tremblait, mais plus de rage à présent. D'excitation.

Phadransie récupéra son sabre entre les dents, puis, s'accrochant à la corde, passa également au travers le hublot. Pour faire ce qu'elle espérait faire à présent, elle n'avait que peu de temps.

Elle dû se cramponner solidement au cordage afin de ne pas être balayé à cause du vent, mais le poids du pendu en soi stabilisait déjà le processus de descente. Sous elle, elle entendait, sentait et voyait les forces marines se déployer. Les vagues étaient ambitieuses et elle fut rapidement trempée. Elle sentait le visage de Calfat sous ses pieds, et ne descendit pas plus bas. Elle fit passer le sabre de sa bouche à sa main gauche et entreprit de trancher la corde. L'opération fut bien plus ardue qu'elle y paraissait au premier coup d’œil. Se maintenir en équilibre sur une corde tout en en tranchant une partie ne fut pas chose aisée. Pourvu qu'Andelzzer ne vienne pas...Pourvu qu'Andelzzer ne vienne pas...
Le son du corps fendant les vagues meurtrières la prévint que son objectif fut enfin atteint, au bout de plusieurs minutes. Phadransie était noyée d'eau de mer. Elle fit passer de nouveau la lame entre ses dents et les serra, puis agrippa derechef à la corde qu'elle descendit au maximum. Tout d'abord elle cria de rage en ne voyant pas ce qu'elle cherchait. Pourtant, la corde semblait faire la taille plus que suffisante. Phadransie laissa son œil explorer la coque exterieure, puis se calma et remonta de quelques centimètres. Elle trouva enfin le hublot qu'elle cherchait et pour lequel elle faisait tout ça. Le hublot menant aux cales était à porté de ses jambes et de ses bras. Le plus dur restait à faire. L'adrénaline battant dans ses veines, Phadransie tenta de l'ouvrir mais n'y parvint pas. De plus, l'inconfort de la position ne jouait pas en son avantage. Elle remonta encore de quelques centimètres et arma sa jambe. Un formidable coup de pied, suivit de plusieurs autres firent voler le verre en éclat. Les copeaux pointus la défiaient, mais Phadransie avait son choix de fait. Elle redescendit de quelques centimètres, et dès que la corde fut suffisamment stable pour qu'elle puisse agripper le hublot de ses mains, elle le fit. Elle envoya son sabre au travers ce dernier, puis, faisant abstraction de la douleur du verre brisé s'enfonçant dans ses paumes, hissa son buste et sa taille. Ses vêtements la préservèrent en partie des rasoirs de verre improvisés, mais ses mains ainsi que ses avant bras se virent parsemés de sillages de sang. Elle ressentait également une forte douleur dans son pied en ayant défoncé ledit hublot, et devinait que quelques copeaux de verre -elle ne savait pas comment- s'étaient glissés à l'intérieur de sa botte, sous son talon. Elle n'avait pas de temps à perdre pour les enlever, qu'ils aillent se faire foutre !
Elle roula boula à l'intérieur de l'endroit d'où donnait le hublot, les cales. Elle avait si peu de temps ! Elle dépassa les cellules vides de prisonniers, traversa les cales pour en rejoindre l'autre extrémité. C'était sous la poupe du Grand Val, au maximum à l'abri de l'humidité que se trouvait sa soute la plus inintéressante ! Et en passant par les cales, elle était sure de ne pas devoir passer devant le Capitaine Andelzzer. Elle retint des cris de souffrance tout le temps que dura sa course, et lutta contre la fatigue et le malaise. Puis elle atteint cette pièce tant espérée. La soute au poudre !

Phadransie se débarrassa de sa chemise qui lui collait à la peau et gouttait abondement, risquant de rendre inutilisable la poudre du canon qu'elle souhaitait charger. Avec toutes les réserves en stock, elle allait offrir au Grand Val le plus beau des spectacles. Les trois canons de respectivement quatre, six et neuf livres semblaient sommeiller dans leur coin. Ces trois là de petits calibres avaient été stocké dans la soute, faute de place sous le pont du navire. Phadransie avait eu l'occasion d'en discuter avec le Knife lorsqu'il la formait dans les haubans, c'est grace à lui qu'elle savait où trouver ces armes.
Elle ne perdit pas plus de temps et chargea une gargousse de poudre avant d'orienter le canon à sa guise en usant de toute sa force, puis se munie de son sabre et exécuta un volte face. Le sang tambourinait dans son crane, priant pour que l'Elfe Noir se soit temporairement désintéressée d'elle. Elle se rendit jusque dans la soute la plus proche, de toute évidence celle du maître canonnier et du sous lieutenant canonnier. La porte claqua net lorsqu'elle l'ouvrit à la volée, sabre en main. Le maître canonnier était un gros homme chauve, oreilles percées et paupières tombantes, il aurait pu égorger un bœuf à mains nues si l'envie le lui prenait, paraissait-il. Phadransie s'en foutait royalement, pour l'heure c'est elle qui était armée, et lui désemparé, encore à demi dans son sommeil. Elle lui trancha la gorge et le laissa se noyer dans son sang sur sa propre couchette. Elle fit de même avec le sous maître, un barbu aux dents cariées, mais ce dernier s’éjecta de sa couchette en roulant boulant. Heureusement pour Phadransie, leur cabine était minuscule, elle lança le sabre dans le dos de l'homme qui ne fit pas deux pas. Elle fouilla leur poche à la recherche de ce qu'elle cherchait, puis se saisit d'un briquet en silex faute mieux.

Moins d'une minute plus tard, la mèche du canon de neuf livres dans la réserve de poudre crépitait.

La chance semblait accompagner Phadransie, car personne ne lui était tombée dessus. Elle avait trouvé un tromblon chargé dans l'intérieur du gilet du maître canonnier, et comptait bien s'en servir contre tous ceux ou celles qui se mettraient en travers de son chemin. Le temps lui était véritablement compté !

Le premier à la repérer fut le lieutenant de quart, qui faisait sa ronde habituelle. Lorsque la balle l'atteignit, Phadransie sut que très vite tout l'équipage serait aux abois sur l'instant ! Elle entendit le son cinglant d'un fouet à plusieurs mètres. Cul Bite Us. Suivit sans doute du Knife et de Barberousse. Qu'ils vienne !

L'instant d'après et comptant trois balles de moins dans son tromblon, elle vola presque jusqu'aux chaloupes, à demi nue comme un ver écumant le pont, et en fit mouiller une en un éclair.


~


Tout ça lui paraissait anormal. Dès l'instant où le Capitaine Elfe Noir Andelzzer eut rejoint sa cabine, laissant sa nouvelle Seconde libérer sa rage et sa folie sur le cadavre sans aucun doute mutilé de celui qui se faisait passer pour l'assistant du calfat de bord, le Capitaine regretta de s'être retiré, pour ainsi dire, des affaires du Grand Val. Il entendit un bruit clair et lointain à la fois, comme du verre brisé. Phadransie ne lui était pas encore soumise, il le savait. Et il venait de la laisser seule. Était-elle si dangereuse que ça ? Que pouvait-elle bien tenter de dangereux pour son navire, seule dans la cahute, avec un cadavre encore chaud ? Surtout avec les marins qui faisaient leurs quarts, Cul Bite Us, le Knife et Barberousse sur le pont. Il resta stoïque, assis à son bureau. Cette Phadransie pourrait devenir quelqu'un d’intéressant pour lui, elle ne réagissait pas comme Tomas avait réagit, à l'époque, mais cette même violence, cette même folie les animait. Il avait regardé les tréfonds de son âme, et la couleur qu'il y avait observé était le noir. Phadransie rêvait de le tuer, mais ça n'était qu'une humaine insignifiante. D'ici encore trois jours, et sans s'embêter à user de violence physique sur elle, la prénommée Phadransie serait sa chose.
Un coup de feu le tira de sa réflexion. Il se leva en un éclair, aussi fougueux et rapide qu'un fauve, fendant la voûte nocturne de sa démarche encore plus noire, si d'ordinaire cela était faisable. Il rejoignit le pont sur l'instant, son manteau de cuir volant derrière lui.

Au sol, gisaient un marin ainsi qu'un Quartier Maître, celui qu'on surnommait Cubitus. Le Capitaine Andelzzer repéra le fils de Tomas, Hanselm, également à terre, mais paraissant déjà plus vivant.

-Ar...Arrêtez la, Capitaine..Phadransie...parvient-il à souffler.

Qu'avait-elle f.. ? Le Capitaine se pencha immédiatement par dessus le bastingage et chercha du regard ce que son instinct lui murmurait qu'il trouverait sur la mer déchaînée...et qu'il trouva . Une chaloupe avait été mise à la mer, et Phadransie ramait comme si le roi et la reine démons en personne avaient été lancés à ses trousses. Si elle fuyait le navire ainsi, et la connaissant, c'était pour une seule raison.

-Noon !! Branle bas de combat ! Abandonnez tous le Val !! Bougez vous !!

Les gobelins ainsi que les officiers de quarts étaient en train de monter sur le pont, le temps qu'ils comprennent ce qu'il se passait (et ce que le Capitaine en personne faisait sur le pont de son navire) ce dernier avait bondi près des chaloupes qu'il tentait de mettre à la mer. Mais les cordes du système de glissement avaient été tranchées nettes.

-Phadransie !!

Elle était déjà loin, trop pour l'entendre, en particulier avec ce vent et ces vagues déchaînés. La seconde qui suivit une explosion et combustion, brillante de mille feux, retourna les eaux et les cieux. Le navire fit feu de tous bois, les voiles jadis gonflées et serrant le vent se consumèrent, aucune des âmes à bord ne fut épargnée. Du Grand Val il ne resta que les souvenirs.



[Terminé][FLASHBACK][PV Phadransie] Une jeunesse en mer Origin10



~


Comme ce voyager, en des mers inconnues,
J’erre et vais disparaître au sein des flots hurlants ;
Le gouffre est à mes pieds, sur ma tête les nues
S’amoncellent, la foudre aux flancs.

Les ondes et les cieux autour de leur victime
Luttent d’acharnement, de bruit, d’obscurité ;
En proie à ces conflits, mon vaisseau sur l’abîme
Court sans boussole et démâté.



Phadransie se rappellait d'une littanie que bueuglait un vieux pirate sénile lorsqu'elle déambulait encore à Port-Argenterie. Comment se nommait ce vieux hareng encore ? Sert ? Sess ? Seth ! Jack Seth, ou le Vieux comme tout le monde l'appelait dans sa Port Argenterie natale. Jamais Phadransie n'avait pu imaginer, étant gosse, que les conneries qui franchissaient les lèvres décrépites du Vieux auraient pu être censées.

Phadransie ouvrit de nouveau l'oeil après plusieurs heures de sommeil, les mains aggripées sur les rebords de la chaloupe. Le cauchemar, le combat était terminé. Elle en sortait vainqueuse. Elle avait cependant beaucoup perdu en cours de route. Son honneur. Sa virginité. Son œil. Son innocence. Sacha. Son premier voyage en mer s'était avéré plus éprouvant que prévu.
Lasse de pensées et de reflexion, Phadransie se recroquevilla en boule à l'intérieur de la chaloupe. De l'eau s'était glissée à l'intérieur, gelant son corps quasi nu et déjà trempé. Il était inutile de se voiler la face plus longtemps dorénavant. « Tu vas mourir... » Morte pour crever une chiasse d'Elfe Noire. Quelle ironie. Phadransie ne voulait pas mourir. Pas maintenant. Elle avait tant et tant de choses à découvrir, tant de navires à couler et piller, tant de rhum à boire et de chants marins à écouter. Mourir à 15 Tours, ça n'est pas juste ! Mais elle était gelée, perdue au beau milieu de l'océan, et sans eau ni nourriture. Elle ne croiserait aucun navire ici, c'était certain. Elle entreprit d'adresser à la Garce une prière pour sa vie, mais ne voyait pas trop ce que pouvait faire cette dernière pour elle. Elle devrait se débrouiller, en particulier lorsque la Garce n'est pas connue pour sa piété et sa compassion. « Ariel, aide moi... »
Elle n'avait jamais prié Ariel, mais il paraissait que c'était important avant de prendre la mer. Elle savait que tout marin, tout Capitaine de navire avant de prendre le large, priait la Déesse et demandait à l'une de ses prêtresse si elle souhaitait faire partie du voyage. Généralement, lesdites prêtresses refusaient. En fait, cette demande tenait plus de la tradition qu'autre chose. Phadransie souffla de soulagement en remarquant qu'il n'y avait pas de prêtresse de la Déesse des Grand'Eaux à bord du Grand Val, autrement elle l'aurait mise à mort également, même sans avoir levé un sabre au dessus de sa tête. Et il paraissait que la Grande Garce des profondeurs n'aimait pas qu'on tue ses prêtresses.

« Tu vois, je n'ai tué personne de ton culte Ariel, aide moi s'il te plait. »

La tête lui tournait et son corps entier la brûlait, mais le gel et le froid lui devenaient insupportables. Le soleil levant n'était ni ambitieux ni pressé de se lever. Phadransie souhaita bientôt que son calvaire se termine, d'une façon ou bien d'une autre, le froid faisant claquer ses dents et la mettant à l'agonie. Au moment où réalité et sommeil comateux commencèrent à se fondre ensemble, où l'espoir ne lui paraissait rien de plus qu'un mot au timbre irréeel, elle entendit, puis aperçut une horde d'oiseaux fendant les cieux. Et au loin semblait se dessiner timidement une terre. Trop épuisée pour ramer jusque là, Phadransie dû attendre presque deux heures que son embarcation s'échoue sur les récifs, près de la plage. Elle parvint avec difficulté à se hisser hors de la chaloupe, et rampa jusqu'au rocher le plus proche. Le soleil lui faisant comme une couverture, elle s'y endormit avec l'étrange impression de vivre un rêve éveillé.


~


Un gémissement franchit ses lèvres. La marée était montante et l'eau semblait légèrement agitée. Phadransie tenta d'analysr la distance la séparant de la plage de sable clair, la jugea acceptable et s'y rendit, boitant. L'île sur laquelle elle venait d'échouer était minuscule, jamais Phadransie n'aurait parié sur l'existence d'une telle bande de terre perdue au beau milieu de l'océan. Elle tomba epuisée, douloureuse, tête première dans le sable. Tout d'abord il lui fallait trouver en urgence si elle ne souhaitait pas mourir. Allez, Phadr. Allez, tu vaux mieux que ça. Le corps endolori, frigorifié, elle se redressa doucement et s'assit en tailleur. Dieux merci, le soleil était haut dans le ciel, et entreprenait de la réchauffer avec une certaine douceur.
Elle força pour dégager son pied gauche de sa botte, fit pareil avec le droit. Effectviement, des copeaux de verre provenant du hublot brisé étaient entrés dans ses chaussures, la blessant. Plusieurs petits sillages de sang se dessinaient sur et sous ses pieds, et le sel les avait rendu douloureux. Elle laissa ses bottes sécher à côté d'elle puis se redressa et observa rapidement l'île. Elle était petite, certes, mais suffisement grande à vue d'oeil pour contenir une mini jungle et quelques excroissances rocheuses. Et de l'eau, espérait Phadransie. Vétue simplement de son pantalon en toile et de sa ceinture, elle s'enfonça dans cette forêt minuscule.
Il lui fallait très exactement presque deux journées entières de marche afin de faire le tour de l'île en suivant la périphérie et longeant les plages. Si elle passait par l'intérieur, ce trajet se raccourciçait. Phadransie ne croisa pas âme qui vive, autre que des insectes ou des oiseaux. Il est vrai que des oiseaux colorés, plutôt de grande taille, semblaient s'être nichés au sommet des plus grand et des plus touffus des arbres de la petite jungle.

-Si il y a des nids, si il y a des oiseaux, c'est qu'il y a de l'eau.

Cette nouvelle ajouta du courage à Phadransie, et elle poursuivit sa route à la recherche de la source, qu'elle trouva après plusieurs heures d'errance. Ho, c'était une toute petite source, même pas un lac, plus une grande flaque, une cavité rocheuse ombragée qui recueillait l'eau de pluie lorsque d'ordinaire il devait pleuvoir. Mais cette source sauva la vie de Phadransie.
De plus, les arbres étaient fruitiers et l'eau poissonneuse.

-Ma vie va être un calvaire, mais au moins je vivrai.

L'île était humainement déserte, petite, perdue au milieu du plus grand océan de Ryscior et non répertoriée sur les cartes. Si la Déesse avait entendu sa prière tout à l'heure, c'est qu'elle avait un sens de l'humour particulier.

Phadransie savait qu'elle allait devoir compter uniquement sur elle même. Elle devait tout d'abord reprendre des forces, et pour cela manger était la meilleure des solutions. Les produits de la mer ne manquaient pas, faute de harpon pour chasser le poisson, il y avait des tonnes de petits crabes grouillant sur les plages. Les fruits étaient -pour la plupart- faciles d'accès et ne nécessitaient pas de grimper au sommet d'un tronc éraflé de vingt mètres de haut. Et puis il y avait la viande. Les œufs, les coquillages et les insectes.

Phadransie se ravitailla et bu à satiété puis entreprit de retourner sur sa plage d'arrivée, elle ferait le tour complet et explorerai l'île en profondeur une autre fois. Son objectif était de trouver un endroit où dormir, puis de savoir faire du feu. La deuxième priorité serait plus difficile à atteindre que la première, mais elle avait entendu à bord du Grand Val un vieux marin se vanter de cet exploit, prétendait-il, alors qu'on l'avait laissé pour mort avec un tromblon chargé d'une balle sur une île semblable à celle ci, il y avait des années. De plus, elle avait tout son temps, le climat étant en cette période de l'année particulièrement chaud. Les nuits en général étaient suffisamment clémente afin qu'elle puisse dormir nue.

La journée et la nuit passa. Phadransie mit environ trois jours à s'habituer à sa nouvelle vie de naufragée. Tous les jours, elle passait des heures sur la plage, du haut d'un rocher, scrutant l'horizon. Mais jamais rien ne se détachait du ciel bleu.

Au bout du second jour, elle tenta d'allumer un feu à mains nues, avant de trouver échoué sur la plage le briquet qu'elle avait dérobé à bord du Val quelques jours auparavant. Ce dernier avait dû la suivre jusque dans la chaloupe. Elle put ainsi enflammer tout ce qu'elle désirait.

Au bout du dixième, ses pieds s'étaient tant endurcis à force de marcher sans bottes qu'elle était capable de faire le tour de l'île en deux jours.

Au bout du douzième, elle grimpait jusqu'au sommet des troncs de plusieurs mètres de hauteur afin d'y cueillir d'autres variétés de fruits.

Ce fut à la suite de trois semaines environ, que Phadransie commença à considérer cette île comme la sienne et même à s'y sentir bien, parfois. Elle avait reprit l'entraînement concernant ses Trois Coups, seule. Elle ne se laissait pas une journée de répit, et tenait réellement à améliorer et maîtriser cette technique. Le travail psychique comme physique l'y aidèrent grandement.


Au bout d'un mois de naufrage, Phadransie repéra un navire aux voiles noires pointer sur l'horizon. Au paroxysme de sa chance, ce dernier avait l'intention de jeter l'ancre sur l'île. Ce furent des zombies qui mirent pied à terre.


~


Phadransie, du haut de ses 15 Tours passés, pour la énième fois depuis des jours, scrutait l'océan qui se déployait devant elle. Elle était pieds nus, l'eau lui arrivait jusqu'aux cuisses. Et elle regardait, scrutait, encore et encore, cette étendue d'eau qui la narguait depuis des semaines. Après le naufrage du Grand Val, en paiement de son viol à son bord par le Capitaine du Navire Pirate. Phadransie n'avait laissé aucun survivants. Elle n'en avait cure, de toute façon, cela faisait des semaines entières qu'elle avait rabroué cette scène au fond de sa mémoire. Elle espérait pouvoir prendre un nouveau départ. Encore pour cela fallait il qu'un Vaisseau daigne poindre le bout de son nez. Elle était perdue sur une île, perdue, au coeur d'un océan aussi perdu. Un confetti jeté à l'eau. Mais là, Phadransie ne pensait pas rêver. Au loin, sur cette tapisserie de ciel noir se dessinait la silhouette élancée d'un Navire noir. Un Navire Pirate donc. Elle ne savait si elle devait s'en réjouir pleinement ou appréhender le sort que les putes des mers lui réserveraient lorsqu'ils mettraient la main sur elle. Un pirate, toujours, reste un Pirate. Et Phadransie avait appris à s'en méfier, en particulier lorsqu'on était une jeune femme de bientôt 16 Tours.
Elle avait donc pris la précaution de se mettre à retrait, dans la végétation. Les Pirates mettaient une chaloupe à la mer. Ils contaient donc accoster. Sans doute pour se ravitailler en nourriture ou on bois. A moins qu'ils soient sur la piste d'un Trésor. Pour peu, l'oeil de Phadransie qui lui restait virait au doré. 
Elle retint sa respiration lorsqu'elle vit s'approcher les Pirates. Quelque chose n'allait pas. Ils n'avaient rien d'humains. Pharansie n'avait jamais rien vu de tel. La Pirate retint sa respiration, ne pouvant s'empêcher de fixer de son oeil le groupe de zombies, à la peau gâtée et à la démarche presque mécanique. Ils étaient environ une dizaine, et avancèrent au coeur de la végétation qui recouvrait l'île. Phadransie les avait suivi, les voyant abattre les arbres afin de récupérer sur leurs épaules croûteuses le bois noir. Cet equipage de marins était sans aucun doute le plus effrayant et singulier qu'il était donné de voir. Un bruit la trahit ce jour là. Le craquement d'une brindille. Il n'y avait plus de place pour la fuite. Tous les zombies s'étaient jetés sur la jeune femme en grognant et marmonnant des paroles mâchées incompréhensibles. Phadransie n'avait ni sabre, ni poignard, ni pistolet sur elle. Déjà, deux grandes mains froides s'étaient refermées sur ses cheveux. D'un coup de pied formidable, elle avait réussi à se libérer. C'était maintenant ou jamais. Elle allait devoir utiliser et placer sa technique des 3 coups. La Pirate se saisit d'une branche solide qu'elle percuta sur l'épaule de l'un de ses opposants. Elle le frappa ensuite avec le pied en pleine poitrine. Il recula, mais déjà trois autres monstres se jetaient sur elle. Phadransie n'hésita plus. Elle accéléra la cadence, semblant faire un avec l'air. Tout allait se jouer maintenant. Elle vit presque les mouvements de ses adversaires, déjà plus ou moins lents, ralentir davantage. Elle se servit de sa main gauche pour toucher un nerf sensible, au niveau du cou du mort-vivant le plus proche. Bien sur, cela ne fit rien. Phadransie enchaîna avec deux autres touches puis elle recula. Sa cible cria quelque chose puis s'immobilisa debout, avant de s'écrouler, raide, la tête dans les feuilles. Phadransie l'écrasa de son talon et se retourna pour repousser les autres. Elle lutterait jusqu'à son dernier souffle, s'il le fallait. Phadransie cria quand un autre colosse répugnant posa ses mains sur sa poitrine, la faisant percuter le tronc d'un arbre. Immobilisée et coincée, elle réussit néanmoins le miracle de se dégager grâce à un formidable coup de pied en plein ventre et fuir ses bourreaux avec une roulade. De nouveau debout, le souffle court, elle se servit encore et encore de sa branche pour repousser les assaillants, mais elle n'eut aucune chance une fois leurs sabres dégainés. Phadransie repéra le plus dangereux, celui qui semblait le plus rapide. Elle courut vers lui et passa entre ses jambes. Elle leva encore la jambe et alterna coups de poings gauches et droits. 3 coups, encore. Poitrine, Hanche et Côté. Le zombie eut le temps de faire 4 pas avant de s'écrouler, lui aussi face contre terre. A bout de souffle, Phadransie ne vit pas le coup de poing qui lui fit cracher du sang. Les zombies s'acharnèrent, elle sentit des tas de mains l'agripper, la frapper et des coups de jambes percuter ses côtes. La fatigue terrassante dû à son utilisation de son coup spécial deux fois d'affiler acheva de faire ce que ses adversaires avaient commencés. Elle fut traînée sur une chaloupe, et remorquée sur le Navire Noir qui semblait lui faire de l'oeil au loin. Petit à petit, la Pirate sentit ses intestins en feu se décontracter, et son corps se raffermir. Mais cela ne changeait rien au fait qu'elle était prisonnière.

Le Capitaine était un homme moins effrayant qu'elle ne l'aurait cru. Il avait un visage qui semblait taillé dans de la pierre, très grave, dur, et antipathique. Mais il n'était pas fait de chair décomposées et de lambeaux de peau. Les zombies la jetèrent à ses pieds. Devant un homme à l'aspect si guerrier, au visage tellement impérieux, Phadransie, à 15 Tours, à demi nue, n'avait vraiment pas grand'espoir de ce sortir de ce piège dans lequel elle s'était elle même jetée. Il était debout, près de la barre, et tenait entre ses mains un coffre de bois, visiblement vieux. D'une voix posée, il dit en la scrutant de ses yeux alarmants : 

-Et bien et bien. J'envoie mes hommes chercher du bois pour réparer mon Navire sur un confetti perdu en plein océan, et ils me ramènent une Dame.

-Une naufragère. Phadransie pour vous desservir, avait elle répondu d'une voix froide et tranchante.

-Phadransie, pour vous je serai, comme pour tous, Capitaine Lissander.





FIN
Ven 4 Sep 2015 - 1:39
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