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[Terminé]Une marée de sang.
Capitaine Theoden
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Capitaine Theoden
Le Wicked Wench s'éloignait maintenant des Marches d'Acier depuis plusieurs mois. Le voyage avait été paisible et relativement long malgré cette carte mystérieuse qu'avait dénichée Théoden dans ses effets personnels. Maintenant dans la Mer Intérieure, l'équipage tout particulier avait fait ses adieux au Canal de Kroxi un mois auparavant et affrontait ses deux dernières semaine en pleine mer.
La météo se dégageait enfin et l'équipage redécouvrit avec joie le soleil et toute la chaleur qu'il pouvait prodiguer après deux jours de tempête. Ce fut le moment que choisit Bolch, l'ancien Capitaine Hallebardier des Marches d'Acier pour aller s'offrir un bol d'air sur le pont du Wench.
Sous le chant des mouettes et entre les allées et venues des marins, le jeune homme marcha tranquillement jusqu'à atteindre la proue du vaisseau. C'était un bel endroit pour profiter des embruns et apprécier la danse des vagues contre le bois de la coque.
Les marins chantaient en rythme, pour encourager leur labeur et l'on en vit même quelques-uns danser en rythme au pied du grand mât !

Mais ce ne serait pas une journée banale.

Avec stupeur, Bolch vit l'eau tout autours du navire se noircir brusquement et devenir aussi opaque qu'une plaque de verre fumé.
Nul ne su ce qu'il se passait et les marins encore dans les haubans ou pendus aux vergues lancèrent des regards en tout sens avec la peur au ventre. Quelle était donc cette sorcellerie ?
Le hallebardier, lui, s'était empressé de remonter le navire jusqu'à trouver Théoden dans sa cabine avec Belaner dûement nommé Officier en raison de sa longue expérience et de ses talents particuliers.
Les deux amis échangèrent un regard, après que le soldat eût passé la porte. Mais avant que l'un d'eux ne décroche un mot, le Wicked Wench essuya un violent choc qui envoya à terre quelques breloques de la cabine du Capitaine. Les trois hommes présents échangèrent un regard et il fut alors su que l'heure était venue.
Les Abymes venaient les prendres. Et ce ne serait point un assaut de roches et de flots.

L'équipage se rua au son des cloches et des cors droit vers les coffres d'armes que les armuriers avait liberés. Chacun se saisit en vitesse de sabres, de haches et de piques sur les instructions des Officiers. Car il était clair que le seul espoir de ces marins était à présent de tenir à distance ces épaisses tentacules loin des mâts le temps que les pièces d'artillerie puisse faire leur travail. Et tel serait la charge de Bolch, en bon Hallebardier de profession.

Déjà, les vigies et les gardes armés de mousquets faisaient feu en salve depuis leurs nids de pie, la dunette et le centre du pont. Fort heureusement, le vent nettoyait chaque fois le navire des épais nuages de fumée provoqués par les mousquets.
L'on voyait passer entre les rangs les nouveaux Officiers Elfes qui eux aidaient du haut de leur expérience à rétablir l'ordre et les lignes de tir.
Du haut de la Dunette, le Capitaine voyait ses hommes s'organiser. Trois rangés d'hommes par bord s'étaient placés le long des bastingages pour protéger les mâts. Au centre se trouvait Bolch, désormais tout en armes, épaulé de Thanil et Eären qui comptaient parmi les lanciers Elfes Blancs les plus talentueux.

L'assaut ne se fit pas attendre. A peine les sabords ouverts et les pièces en place, les eaux noires de jaie crachèrent d'imposantes tentacules qui s'élevèrent dans les cieux avant de retomber sur le pont du Wench.
Les premiers coups furent les plus rudes. Car le Kraken, aveugle, ne voyait pas quelle défense l'attendait sur le pont. Et lorsque ses membres s'abattirent sur le vaillant équipage de Théoden, le monstre entier se crispa de douleurs. Beaucoup furent violemment écrasés et plus encore virent leurs lances se romprent. Car des hampes de bois ne pouvaient que mal résister devant tous ces muscles.
Lorsque le Kraken revint à la charge, ses assauts se firent moins direct. Car ses tentacules étaient tantôt haut dans les cieux, et tantôt plaqués contre la coque. Il serait difficile de repousser sur tous ces fronts tant de force.

Le monstre s'appliqua à se montrer le plus vif possible. Les hommes étaient souvent fauchés avant même d'avoir pu hurler. Bolch, habitué à ces situations de luttes en rang serrés ordonna que les premières lignes de part et d'autres du pont se chargent des tentacules qui rasaient le pont en tout sens.
Mais la pression ce fit de plus en plus terrible sur les marins qui, rapidement virent toutes leurs lances se briser malgré l'appuie des tireurs et tout leur talent.
Lentement, les braves hommes se mirent à reculer encore et encore. Certains trébuchèrent sur les corps brisés de leurs amis, d'autres voulurent abandonner et furent à leurs tours emportés.

Ce fut le moment que choisit Gibbs pour entrer en action. Depuis l'entrepont, le Second hurla son signal que reprirent tous les Quartiers-Maîtres du vaisseau. Alors s'embrasèrent simultanément Soixante-quatorze pièces de fonte dans un concert de flammes et de tonnerre assourdissant ! Le Wench essuya cette énorme force sans broncher. Les flancs du vaisseau crachèrent d'un coup d'un seul près d'un quart de tonne d'acier directement sur les membres exposés de la créature. Depuis la barre, Théoden vit une puis deux, puis trois et quatre tentacules se faire tailler brusquement en pièce et s'éparpiller autours du navire dans les flots qui mêlaient maintenant eau, encre et sang.

Il n'avait pas fait tirer à ses hommes de simples boulet. C'eût été trop aisé de manquer sa cible ! Ce fut à renfort de mitraille que ce Kraken se fit tailler en pièces.
Tel était son dessein.
Des profondeurs s'éleva une douloureuse complainte suraigue, alors  que des abysses la créature rappelait ses membres endolories. Mais  la longue plainte se mua rapidement en hurlement enragé et alors que tous semblaient avoir triomphés un choc plus violent encore se fit sentir ! Tous furent jetés à terre sans sommation et quelques tireurs placés dans les haubans ou les nids de pies vinrent rejoindre dix mètre plus bas leurs camarades écrasés.

Le sang couvrit tantôt le pont du Wicked Wench après une lutte de pourtant quelques minutes à peine. Des cales montèrent des rapports alarmants du Maître-Calfat qui rapportait d'importantes brèches dans la cuirasse du vaisseau.

"-Cette saloperie vient de tenter d'aspirer le Wench comme une huître !" hurla Gibbs en remontant de son poste.

"-Que l'on prévienne Belaner ! Il est temps d'en finir." répondit le Capitaine à son Second sans un instant de réflexion.

Le plus surprenant fut le silence. Personne ne s'attendait à tant de calme. La mer cessa de bouillonner, les canons de nouveau chargé se turent, les hommes s'observaient avec des mines apeurées. Pourtant personne ne bougea ! Les ordres étaient clairs, et la chaîne de commandement qui montait jusqu'à Théoden les firent respecter à la lettre.
Mais ce répis, aussi salvateur fut-il ne dura guère. Bientôt, le Wicked Wench fut baloté comme un tronc dans un torrent. Le Kraken jouait avec sa proie !

"-Que tout le monde se tienne prêt !" lança le Capitaine en s'aggrippant à la roue.

Théoden sentit le plat-bord s'affaiser brusquement, grinçant et craquant comme un forêt de pin sous une bourrasque trop forte. De surprise, il laissa une grimace passer la barrière de sa neutralité. Cette chose devait être énorme pour faire pencher ainsi son 74 canons ! Ni une ni deux, le Capitaine se raccrocha à la Roue de la Barre et lança ses ordres à tout l'équipage.

"-Que l'on ramène les cacatois et les perroquets ! Maître O'Malley, larguez les ancres de tribord. Que l'on prépare les pièces de bâbord."

Théoden craignait que cette énorme créature fasse chavirer son navire, aidé par le fort vent d'est et l'effet de surprise. Réduire la voilure lui apparût être la seule solution, le temps que son petit plan se mette en place. Bien vite, les amarres des deux ancres de tribord furent défaites et les deux pièces de fonte chutèrent brusquement dans les abîmes. L'on entendit le tintement frénétique des chaînes contre la coque, alors que celles-ci se déroulaient dans leur folle course aux abysses. Puis lorsqu'il n'y eut plus de mous, le navire essuya un brusque choc et tout l'équipage sur le pont se vit ébranlé. Il fut évident que le navire ne se renverserait pas, aidé comme il l'était par le plan de Théoden.

Mais la lutte n'était pas gagnée. Car des flots de nouveau bouillonnants surgissaient toujours de longues et terrifiantes tentacules verdâtres qui semblaient tenter de s'attaquer aux mâts du navire. Ce Kraken-ci semblait vouloir immobiliser le Wench pour de bon !

De son poste, le Capitaine vit ses hommes faiblir à mesure que la peur et le désespoir gagnait son bord. Alors, abandonnant la barre  à un Officier de Navigation il se rua sur un hauban et grimpa sur le bastingage pour se planter d'un bond devant la créature. A travers le chaos et les remous, Théoden cru distinguer deux yeux dans les abysses, comme deux perles noires de la taille de boulets de mortier. Alors, il se saisit promptement du sabre au fond de son fourreau et le tira de tout son long jusqu'à le porter à bout de bras au dessus de sa tête. Lorsque la lame rencontra les airs, l'on vit un tourbillon de flammes se former dans les airs en un sifflement strident et plonger brusquement vers l'acier flamboyant que Théoden brandissait dans les airs. Ainsi armé, il sembla que le Capitaine brandissait une gigantesque torche.
Car les tirs de mousquets et de canons eurent tôt fait de voiler le soleil. Et comme le vent retombait, il sembla que la nuit avait accueillie dans ses bras glacials le Wicked Wench et les rescapés de son équipage...
Lun 6 Juil 2015 - 20:32
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Capitaine Theoden
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Capitaine Theoden
Les mouettes s'étaient faites parfaitement silencieuses, témoins impuissants de l'horreur qui se déroulait sous leurs rondes lasses. L'on ne vit bientôt plus la couleur de l'eau, tant le sang avait coulé. C'était là, entre le grand bouillon écarlate et les nuées de fumée qu'avait lieue l'ultime lutte de l'équipage meurtrit du Wicked Wench face à ce qui apparassait être comme un spécimen particulièrement rancunier de Kraken.
L'on ne comptait déjà plus le nombre de cadavres sur le pont rompu du vaisseau de Théoden. Les planches s'étaient faites glissantes à cause du sang et il devenait de plus en plus difficile de s'y déplacer en raison des morceaux entiers de mâture qui venaient s'écraser sur les marins. Face à la panique se tenait heureusement Bolch qui, en bon Capitaine, avait finit par prendre les devant pour guider les hommes apeurés.
Ainsi donc, face aux massives tentacules du monstre, quelques dizaines de soldats de la garde faisaient de leur mieux pour protéger les mâts. Jusqu'à ce qu'une vive lumière, jaillissant de l'obscurité finisse par capter leurs regards.
Là, juché sur le bastingage se tenait Théoden. Son sabre levé jetait sur les témoins une vive et intense lueur. Nul ne su d'où provenaient ces flammes et encore moins ce que comptait faire le Capitaine mais il était certain que l'homme seul face à la bête inspirait une certaine crainte. Qui était le fous qui bondissait ainsi devant un monstre de cette taille ?
Tout captivé que fut le Kraken par son adversaire à l'arme de feu, il décida de se concentrer sur lui, au grand damn de Théoden.
Des eaux rejaillit un tentacule qui fondit promptement sur lui et faucha le hauban. Le Capitaine fut sauvé par ses réflexes qui l'avaient poussé à bondir en arrière. Hélas, le monstre avait les tentacules longues et l'homme encaissa un dur coup en pleines côtes.
Du pont, tout le monde vit avec horreur le marin planer dans les airs avant de se briser dûrement sur le mât de misaine. Il n'en fallut pas plus pour que Bolch quitte l'abris des rangs humains pour accourir vers son amis. Et le premier membre du monstre qui lui barra le passage se fit raccourcir d'un bon mètre tant la force du hallebardier avait crûe avec sa peur. Il réalisa vite que Théoden était heureusement sain et sauf et se relevait tant bien que mal. Sa chute avait été amortie par une botte de cordage !
Lorsque le monstre réalisa que son adversaire n'avait pas été tué, sa rage sembla s'accroître et il fallut de nouveau que les deux comparses esquivent un violent coup. Car les tentacules avait maintenant achevé de défoncer le bastingage du Wench au dessus de la dunette et il lui était désormais facile de plonger ses tentacules partout où les hommes espéraient se cacher.

La ligne de commandement rompue, les canons du navire s'étaient tues et le Kraken était désormais parfaitement libre de balayer toute forme de résistance des planches. Gibbs gisait blessé dans la cale et Belaner ne donnait toujours pas de signes de vies.
Bolch et Théoden se consultèrent donc du regard et entreprirent de se repartager les tâches. Tous deux virent à leur gauche un membre du monstre venir s'élever lentement pour venir les écraser. Ni une ni deux, ils bondirent tous deux en avant et passèrent la rembarde pour atterir sur le pont central. Bolch, dans son armure n'était hélas pas assez dégourdit pour ces situations et accueillit le sol contre son épaule avec dureté là où Théoden se permit une élégante roulade. Dans le chaos, peu trouvèrent en la réapparition du Capitaine assez de courage pour continuer la lutte et il fallut que ce dernier traverse les rangs de ses hommes pour les enhardir de nouveau.

Théoden arriva bien vite dans l'entrepont du Wicked Wench. Le désordre y était complet ! A travers des trous dans la coque, le Kraken passait ses tentacules et tuait à loisir tout homme à sa portée. Le Capitaine fut d'ailleurs très vite assaillit par un de ces monstrueux membres qui venait de crever le plancher. Avec de surprenants réflexes, le marin pu se jeter sur le côté pour esquiver l'assaut. Quand le Kraken tenta de le frapper à nouveau, il fut accueillit par un brusque et vif coup de sabre. La lame nimbée de flammes traversa sans résistance les chairs et la bête fut amputé de presque deux bons mètres. Devant l'exploit, les artilleurs reprirent lentement leurs postes sous les encouragements de Théoden qui allait et venait entre les batteries à bon train. Mais les ordres furent clair. Personne à tribord n'avait l'autorisation de décharger son canon sans un signe direct du Capitaine !

Sur le pont, les marins profitaient de la diversion de Théoden pour se reformer et s'armer de nouveau. Bolch s'était promptement relevé et avait reprit sa place, là où sa hallebarde aiderait à soutenir les défenses. Il fallut peu de temps avant que le Kraken revienne à l'assaut, avec encore plus de forces. Et la pression des tentacules s'écrasant sur les planches aurait pu faire céder le sol si un élément inattendu n'avait pas surgit !

Sortant de nulle part, une haute vague vint frapper directement le monstre et l'écraser contre la coque du Wench. Rugissant de colère et de surprise, la bête fut lentement arrachée par la force des eaux du bois et passa sous la quille de bâbord à tribord. C'était le moment clé ! Bolch comprenant vite, il ordonna à deux marins de rompre brusquement les amarres des ancres de tribord. Lorsque les hommes désignés obtempérèrent, les ancres coulèrent à pic et permirent au vaisseau de voir sa ligne de flottaison s'inverser complètement. Le pont se vit de nouveau horizontal puis se mit lentement à pencher sur tribord, jusqu'à pratiquement coller les bouches à feu des batteries inférieures à la surface de l'eau. C'était juste sous cette surface que roulait le Kraken, parfaitement désorienté ! Et ce fut le moment idéal qu'attendait Théoden pour ordonner aux artilleurs fermement cramponnés d'ouvrir le feu.

Sur le pont, tous les marins survivants s'étaient empressés de se coucher à terre et de s'accrocher à tout ce qui passait à portée.
Le cris de Théoden se fit entendre sur tout le navire mais fut immédiatement supplanté par le fracas assourdissant des trente-deux canons qui venaient de décharger leur charge de poudre directement sur le Kraken. Les eaux se soulevèrent d'un coup d'un seul, car il s'agissait là de véritables boulets de fontes et lorsque la créature réapparut sous les tourbillons d'écume mêlés de sangs, elle était véritablement morte et méconnaissable.

Théoden réapparut sur le pont sous les hourras de l'équipage meurtri mais victorieux. Contre le flanc tribord du navire gisait le cadavre de la gigantesque bête.
Ils avaient vaincu.
Le Capitaine accorda à son ami Bolch une brève étreinte et une accolade avant de s'adresser à ses hommes.

"-Je suis fier de vous les gars. Aujourd'hui, nous montrons aux dieux que le Wicked Wench ne plie pas devant leurs monstres infernaux ! Le rhum coulera à flot à notre arrivée au port et tous vous le dégusterez gratuitement !"

La déclaration fut accueillie par des hourras encore plus fort. Les Officiers Elfes, tous indemnes lui accordèrent un hochement de tête avant de se replier dans la cale où gisait inconscient Belaner, le mage bleu à qui tous devaient leur survie.

"-Matelots, harponnez-moi cette Betty ! On la ramène avec nous !"
Ajouta enfin Théoden. Le trophée leur serait grandement utile...

Après presque une demie-heure de lutte, le Kraken avait été vaincu. Sur les sept-cent trentes hommes d'équipage, le Capitaine dû déplorer plus de cent-cinquante hommes tués et au moins autant disparus en mer. Le Wicked Wench avait subit de graves avaries incluant des trous dans la coques, la perte d'une bonne partie du bastingage et deux sections de la cale presque inondés. Les stocks de poudre avaient heureusement été peu entamés grâce à la stratégie du Capitaine et la brièveté relative du combat.

Il fallut un bon mois avant que le navire n'ait en vue Karak-Tur. Ralenti par ses avaries, le Wench avait dû également compter sur le poids de la dépouille du Kraken traînée dans son sillage par d'épais cordages. Théoden usa de sa carte pour éviter les grandes tempêtes et ainsi, le voyage se termina.

Arrivé dans le port, tous les marins locaux dévisagèrent cet étrange navire. Il fallait dire qu'il était dans un état déplorable ! Mais plus encore à cause de la dépouille gigantesque dans son sillage. Le Wench fut en quelques jours reconnu parmi toute la marine d'Oro comme le vaisseau tueur de Kraken. Et il ne ferait aucun doute que cette réputation s'étendrait partout grâce au Commerce et au penchant parfois inconvenant des Hommes de mer pour les racontards.

Théoden avait immédiatement fait envoyer un messager au Seigneur d'Oro, Asarith. Son message était clair. Un Capitaine de renommé se trouvait présentement dans le port de Karak-Tur avec un présent et il demandait audience.
Le Capitaine espérait que cela suffirait pour appâter le Seigneur Elfe ! En attendant, il dirigeait les reconstructions du Wicked Wench dans le port. L'équipage n'avait reçu qu'une seule consigne au débarquement : Théoden ne recrutait aucun marin !
Les jours se mirent donc à passer, après le départ du messager. Des jours où nul ne put s'ennuyer ! Il y avait fort à faire pour préparer l'avenir...
Ven 10 Juil 2015 - 18:17
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Triss Miders
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Mélodie à la gloire de la déesse
Triss Miders
Le temps était beau dehors. Le ciel était bleu et avec assez peu de nuages. Triss était sur le pont à admirer le port où le navire allait amarrer. Sur celui ci, les hommes travaillaient pour stabiliser le navire au port. On pouvait entendre Everhell, le capitaine, crier aux hommes de s’activer.
Après de nombreuses manoeuvres, Phadransie sortit sur le pont avec une femme affaiblie et blessée qui en plus était attaché par une laisse que la capitaine folle tenait bien fermement. En même temps que cela se passait, Everhell criait aux hommes:
- Nous resterons seulement que deux jours sur ce port.
- Je vous interdis d’aller plus loin que le port excepté pour les mousses qui resteront sur le pont pour s’occuper du navire. Est ce clair pour vous?
Il n’eut pas besoin de réponses pour savoir que les ordres étaient compris et seraient appliqués. Les hommes retournaient ensuite à leurs taches respectives. Sauf Triss qui elle, avant, était hors de la troupe formés par les marins, s'avançait vers Everhell qui n’avait toujours pas bougé après son discours.
- Le moment est venu pour la navire d’arriver au port comme j’ai pu le voir.
- J'espère que le séjour à bord de mon Eradicate fut à votre aise damoiselle, car voici venu pour vous l'heure de fouler de nouveau la terre aux pieds. Vous voici en Oro, et je vous laisse donc débarquer à votre guise. L'interdiction de l'Elue de quitter le pont n'allant bien sur pas à l'encontre de votre personne.
Ensuite il la paya pour ses services sur le navire.
- Tout le plaisir était pour moi, même si il a eu quelques petits problèmes. J’espère qu’on pourra se revoir.

Tandis qu’elle parlait avec Everhell de quelques formalités pour se souhaiter un bon voyage pour le futur, Phadransie descendait du pont avec la femme attachée. Mais Triss n'abordait pas beaucoup d’importance à elle et donc ne vit pas ce qu’elle fit après. Plutôt, elle descendit dans sa cabine prendre ses affaires qu’elle avait bien rangé dans un sac, qu’elle portait sur son dos et gardait son luth en main en jouant quelques accords sans vraiment faire attention en se dirigeant vers le port, bien loin du bateau.
Sam 22 Aoû 2015 - 16:02
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Dargor
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Localisation : N'importe où, mais avec mon ordi.
Le Maitre de l'Intrigue
Dargor
Alejandro Fernandez était dans son carrosse, secoué par les cahots de la route le menant vers Karak-Tur. Pourquoi fallait-il que le roi l’ait choisi lui pour aller là-bas ? Il savait à quel point les habitants de l’ancienne Cité-Etat détestaient les oréens, et cela leur était bien rendu. Alors d’apprendre que l’un des plus hauts dignitaires de Garay se rendait là-bas, ce serait certainement pour eux l’occasion de tenter d’attaquer un peu l’image du roi Asarith Lune-Pâle.
Mais qu’y pouvait-il, lui, simple humain ? Comme la plupart des hauts fonctionnaires du royaume pour qui l’arrivée au pouvoir des elfes noirs avait été une surprise, il n’avait pu que s’incliner. Pour l’instant, tout le monde s’en sortait bien, car les nouveaux souverains s’étaient montrés plus que généreux avec leur peuple. Mais Alejandro était proche d’eux. Même s’ils étaient discrets, de temps à autre une réplique tombait qui l’inquiétait grandement pour l’avenir. Oro avait des projets d’expansion, cela était désormais clair. Et on ne s’étendait pas en baissant les impôts et en favorisant les arts. Certes, l’armée était toujours sans aucun doute la plus puissante au monde, mais pour combien de temps ? Asarith allait d’un jour à l’autre changer de politique. Mais maintenant, il avait le soutien du peuple.
Voilà pourquoi il n’aimait doublement pas cette visite à Karak-Tur. Car il allait en plus devoir récompenser un humain qui amenait un présent au roi. Il n’était pas très au fait des aventures des gens de mer, aussi n’avait-il pas connaissance du nom du capitaine, mais qu’un étranger lui amène un présent l’inquiétait au plus haut point. Enfin… A tout le moins Alejandro ne se plaignait pas de sa situation pour l’instant, elle était très confortable. C’était pour l’avenir qu’il avait des inquiétudes.

« Capitaine ? demanda-t-il en ouvrant la fenêtre du carosse.
-Monsieur ? répondit le capitaine Henrique Rossi, chef de son escorte, et capitaine en temps normal d’un régiment de gardes royaux légers.
-Dans combien de temps arrivons-nous ?
-Dans quelques heures monsieur, répondit le capitaine en levant les yeux au ciel, sans cacher qu’il mourrait d’envie de répondre à ce gros lard de visser ses fesses sur son fauteuil, prendre son mal en patience, et d’arrêter de poser cette question toutes les cinq minutes. »

---

Quand Alejandro vit l’objet du cadeau, il n’en menait pas large. Toutefois, il tâcha de se convaincre intérieurement qu’il devait faire de son mieux pour expliquer au capitaine qu’il ne fallait surtout pas qu’il mette ses talents au service d’Asarith Lune-Pâle.
Vu ses maigres talents de négociateurs, il valut sans doute bien mieux pour lui que Henrique Rossi le jette à terre avant même qu’il n’ait finit de saluer le capitaine. Lorsqu’il releva le regard, il vit en effet que la reine en personne, du moins sa doublure, puisque le jour brillait, s’avançait vers le groupe. Derrière elle, un deuxième carrosse, aux fenêtres cloitrées par des volets. Le message était clair. La véritable reine était là.

« A genoux devant la reine ! dit Henrique Rossi au capitaine, sur un ton à mi-chemin entre ordre et conseil.
-Pourquoi ne pas m’avoir dit dans votre lettre ce qu’il en était réellement, capitaine Théoden ? demanda celle qui se faisait passer pour la reine. Sans l’initiative heureuse du dirigeant de cette cité, jamais nous ne nous serions déplacés. Un royaume est bien trop important à gérer seul pour que nous puissions nous permettre de nous déplacer à chaque fois que quelqu’un souhaite nous rendre hommage, même si nous le souhaiterions. »
Mar 1 Sep 2015 - 21:21
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Capitaine Theoden
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Capitaine Theoden
Spoiler:


En deux semaines à quais, le Wicked Wench fut l'objet d'attention de toute une partie du port. Le vaisseau, bien grand pour ce port mobilisa plusieurs centaines d'artisans. Il y avait énormément de réparations importantes à faire.
Ainsi, pendant tout ce temps, la quasi totalité du bastingage fut démantelé, ainsi qu'une grande partie des vergues et des voiles. De même, le Bout-dehors et le Beau-pré furent remplacés, le premier ayant été brisé sur ses amarres par l'assaut du monstrueux Kraken.
L'équipage lui s'était dispersé dans toute la ville en quête de bonne boisson et de charmante compagnie. Beaucoup avaient évidemment périt dans l'affrontement.
Voilà pourquoi, sur ordre du Capitaine et en sa présence eut lieu lors de la première nuit à quais une veillée funèbre accompagnée de prières. Des dizaines de bougies furent lâchées aux larges par des chaloupes en mémoire des disparus et tous les survivants reçurent le double de leur paye habituelle. Conséquence malheureuse de la réduction drastique dans le nombre d'âme à bord.
Il ne resta donc à bord après seulement quelques jours que Gibbs, Bolch, les Membres de la Maistrance et les douze Elfes Blancs.
Le premier prit évidemment sur lui de faire les tours des tavernes pour recruter un nouvel équipage. Bolch, qui semblait avoir tenu à l'y accompagner se joignit au vieux Second.
Les Elfes quand à eux, sous les ordres conjoins de Belaner et de Théoden eurent pour ordre de fureter avec l'habilité qui leur était propre. Quelques-uns parmi les plus jeunes restèrent néanmoins à bord pour veiller sur le navire.

Lorsqu'enfin se présentèrent à quais plusieurs calèches, le Wench était encore en pleins travaux. Une bonne partie de la mâture était encore portée absente et le bastingage avait tout juste été remonté à neuf, et renforcé.
Relativement fier, Théoden s'avança donc sur le large ponton de pierre. Son tricorne vissé sur la tête, il observa avec attention cet étrange homme qui semblait l'accueillir. Etait-ce là Asarith Lune-Pâle ? Peu probable. Imperceptiblement, le Capitaine fronça les sourcils mais ne cilla guère plus.
Ses bottes foulèrent le peu de pavé le séparant de ses invités exceptionnels en quelques brefs instants. Lorsque ceux-ci finirent de claquer il se passa quelque chose de parfaitement stupéfiant.
La Reine elle-même avait fait le déplacement ?
Dans sa poitrine, le coeur de Théoden manqua un battement en l'apercevant et quelques instants lui firent regretter de voir une pareille jeune femme épouse du Seigneur d'Oro.

"-A genou devant la Reine !" s'était exclamé brusquement le Fonctionnaire Oréen.

Avec un demi sourire, devinant un semblant de crainte dans la voix de l'homme Théoden obtempéra et se décoiffa avant de plier le genoux devant la Reine à la chevelure de feu.


"-Pourquoi ne pas m’avoir dit dans votre lettre ce qu’il en était réellement, capitaine Théoden ? demanda celle qui se faisait passer pour la reine. Sans l’initiative heureuse du dirigeant de cette cité, jamais nous ne nous serions déplacés. Un royaume est bien trop important à gérer seul pour que nous puissions nous permettre de nous déplacer à chaque fois que quelqu’un souhaite nous rendre hommage, même si nous le souhaiterions. »

Théoden, inébranlable se risqua à relever la tête pour répondre avec une voix aussi posée qu'il lui était possible.

"-Je suis navré de me montrer si accaparants. Une nation comme la votre doit demander un investissement total de la part de son Roi et de sa Reine ! Je rends déjà grâce aux Dieux de me permettre de vous rencontrer, Majesté.

-Le plaisir est partagé. Qu'est-ce qui nous vaut l'honneur de ce présent ?"

Théoden put voir la Reine porter un instant son regard sur son "présent" qui était présentement en train de reposer dans le sillage du Wench, harcelé par une colonne entière de mouette hurlantes.
Le Capitaine se saisit de l'occasion pour se relever lentement et retrouver son port noble.
D'une voix posée, il put s'expliquer.


"-J'ai longtemps servit Kelvin et la Gardienne avec grande fidélité. Mais après une vie de service, je me suis rendu à l'évidence que la mollesse de leurs campagnes militaires me fatiguait. Je suis donc venu ici chercher le Commandement du Roi Asarith, à la tête de la flotte que l'on m'a décrie comme la plus puissante de ce monde. J'ose espérer que ce présent, hommage à ses conquêtes, vous assurera de ma bonne foi."

Comme il se taisait déjà, Théoden vit le Reine tourner de nouveau la tête vers lui, et sentit son regard épouser son visage. Quelle sensation grisante !
Evidemment, il prit soin de ne rien montrer de cette surprenante admiration.
Dizzalyr commenta simplement le cadeau cher payé de Théoden, avec un détachement quelque peu décevant.

"-J'avoue que le présent est impressionnant.

-Est-il donc accepté ?

-Il faudra que j'en discute avec mon époux. Un présent de cette taille ne saurait être décidé par un seul d'entre nous. Je ne pense toutefois pas m'avancer trop imprudemment en vous affirmant d'emblée qu'il le sera sans aucun doute.

-Peut-être puis-je moi-même venir défendre mon engagement devant votre époux, sa majesté le Roi ?

-Je pense qu'il souhaitera vous rencontrer de toute façon."

Théoden se permit un sourire, à demi-franc. D'un côté ça lui offrait une chance de voyager avec la Reine, si charmante. De l'autre, ça lui permettait de rejoindre rapidement la cour d'Asarith et enquêter.

"-Je vais donc me préparer à le rencontrer. Mais je crains que mon navire ne soit plus guère en état de recevoir un monarque comme sa Majesté votre époux."

Le Capitaine fit la moue, cherchant à s'assurer qu'il n'y aurait pas de quiproquo. Il devait aller rencontrer Asarith chez lui !

"-Vous pouvez également venir le rencontrer à la capitale, je n'y vois aucun inconvénient."

Il sourit, soulagé par la réponse de la Reine.

"-J'en serais honoré. Vous ne verrez donc point d'inconvénient à ce que mon Second m'accompagne ? Ce bon Gibbs est un vieillard fort grincheux et bien peu présentable mais il saura mieux que moi contenter votre cour des récits de nos aventures !

-Si vous le désirez."

A nouveau, le détachement de la Reine moucha légèrement Théoden qui espérait émouvoir d'avantage son interlocutrice. Mais qu'importait, se disait-il. Il avait après tout réussit à atteindre son premier objectif ! Mais il ne se doutait pas de l'imprévu qui se présenterait à lui...
Jeu 24 Sep 2015 - 23:01
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Noire
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C'est avec davantage d'impulsion que de circonspection que Phadransie La Noire descendit la passerelle liant le brigantin aux Trois Mâts au quai de Karak-Tur. Elle tirait à bout de laisse Céoda. Les Amazones étaient considérées comme des bêtes par passablement la totalité des peuples et gens de ce monde, et c'est comme telle que La Noire l'avait traité depuis sa capture. Phadransie se disait à elle même, souvent d'un ton grave, que les Amazones n'étaient pas des femmes plus stupides ou barbares que d'autres. Mais pour elle, tout le monde se ressemblait, et tout ici bas savait s'acheter. Et se vendre. Céoda boitait et claudiquait depuis que le crochet acéré de sa maîtresse et bourreau s'était enfoncé dans sa cheville. Ladite cheville fut brûlée par deux fois par la suite, sur peau vive qui plus était, grâce devait en être rendu à l'insensibilité que la pirate avait pour ses victimes. Son insensibilité et son plaisir évident à la cruauté gratuite. Céoda l'avait compris -dans son cœur et dans sa chair- à ses dépends.

L'objectif de Phadransie était simple, et s'illuminait avec régularité devant ses yeux mentaux comme une petite alarme lumineuse : Tuer Jack Lissander. Et elle était sur le point d'y parvenir. Notamment grâce à tout l'or que lui procurerait la bête qu'elle tirait sans ménagement derrière elle, qui lui permettrait ensuite d'acheter le service de mercenaires, et le soutien de prêtres tels que ceux de Virel, d'Atye, de Finil, d'Elye et bien sûr d'Ariel. Elle était prête à venger Brecianne Léocadas. Lissander ne pouvait pas gagner. Et sa soif de sang ne pouvait plus attendre. Plus d'une fois, elle avait dû user de violence envers elle afin de ne pas noyer son propre équipage, ou l'Amazone elle même, dans un fleuve de sang.

L'Amazone suffoquait beaucoup à cause de la laisse qui l’étouffait et la blessait. Phadransie y trouvait du plaisir mais sans y songer pleinement ; elle savait sa proie trop faible et épuisée pour lutter dignement contre les pressions qu'elle lui administrait. Jugeant cette technique de traction trop ennuyeuse lorsque son esprit s'emballa derechef à propos de Lissander, elle en adopta une autre. Un coup de coude placé dans l'abdomen de la femme sauvage la plia en deux, et, après avoir tout de même enroulé la laisse autour de son poignet droit, elle la saisit par sa chevelure qu'elle tira en arrière. Ainsi, leurs positions s'échangèrent : la bête ouvrait la marche, et la chasseresse la poussait en avant, l’œil sombre dans son dos. Phadransie La Noire commença à remonter le port d'Oro. Il fallait dire qu'il était très vaste et accueillait grand nombre de navires, marchands ou de toute autre classe. Il fallait certainement plus d'une heure de marche avant de l'avoir parcouru de long en large. Au loin devant elle, une colonne de mouette particulièrement dense piaillait comme à l'annonce d'un mauvais présage imminent. Cette vision sembla tirer La Noire de son état d'inassouvissement, où l’assujettissement de la Bête l'avait plongée depuis plusieurs minutes. Elle jugea utile de se rappeler à elle même pour qui elle ressentait l'envie de faire tout ça.


~


L'ombre projetée de son grand tricorne noir serti de plumes rouges assombrissait l'intensité de son regard. Un foulard rouge cerné ça et là de motifs géométriques blancs surmontait ses sourcils froncés sur la carte maritime qu'elle observait. Ses yeux verts argents, pas vilains du tout, étaient très souvent froncés ces derniers temps. Sur sa pommette gauche un tattouage qui évoquait -selon Phadransie- un crochet -signe évident que les deux femmes avaient, toujours selon La Noire, beaucoup à se dire-. Sa chevelure de jais cascadait sur ses épaules, un peu comme des putains de vagues dessinées par la Garce elle même, et terminaient leur parcours au niveau de sa poitrine. A chacune de ses deux mains, des bagues de valeur et un serre poignet de cuir au niveau de la droite. Malgré la nuit avancée et la pénombre des remparts sur lesquels elle se trouvait, on pouvait distinguer aisément sur sa peau claire les nombreux dessins à l'encre indélébile louvoyant sur ses doigts, le dos de ses mains ainsi que ses avants bras. L'un d'eux représentait un crâne au dessus d'un océan fendu en deux, surmonté d'une seule lettre. P. Nombre de ces tattouages étaient des textes. Son index tenait une plume avec laquelle elle marquait, d'une encre plus rouge que du sang, des croix sur une carte, posée au dessus de ses genoux. Elle était assise en tailleur à même le sol sur l'un des remparts de la ville.

-Je peux t'être utile à quoi que ce soit, Brecianne ?

L'Elue d'Ariel leva lentement ses yeux clairs afin de rencontrer le visage de sa Noire interlocutrice. La bise marine faisait voler ses cheveux sombres derrière sa nuque, sous son tricorne. Ce fut d'une voix ferme et posée qu'elle répondit :

-Tu as fais ta journée, Phadransie, demain l'aube viendra.

Peut être pas pour toi, songea Phadransie. Elle avait un rendez vous important ce soir, à la Taverne des Pièces de Huit. Néanmoins, elle se vit arracher cette réplique par le regard pénétrant de ca Capitaine, et tout ce qu'elle fut capable de faire alors était d'acquiescer du chef et de venir s'asseoir près d'elle. Phadransie avait si souvent parlé avec Brecianne dans le but de l'interroger insidieusement afin de vendre ces informations plus tard, que parfois il lui arrivait de se fourvoyer. Elle ignorait si elle parlait avec elle pour le plaisir ou par devoir. Après ce mini raisonnement qui s'imposa en elle : il faut absolument que nous passions cette dernière nuit ensemble, se dit Phadransie en faisant cas de son sombre rendez vous, et elle tenta :

-Les Elfes Noirs, les as-tu déjà combattu ?

Tandis que Brecianne Leocadas prenait un temps assez long à lui répondre, ne détachant pas le regard de sa carte, Phadransie ne sut interdire à ses pensées de revivre l'entraînement d'avant hier, à l'aube, avec la femme en face d'elle.

Un simple duel au sabre, encore. Un estoc de face, et Phadransie ne put riposter ou même esquiver. Elle avait craînt que son adversaire ne sache retenir son coup, mais comme toutes les fois précédentes, s'était trompée. Un simple estoc de face, et Phadransie ne trouvait plus rien à dire. Brecianne puit dire ce qu'elle voulait, attaquer tant qu'elle le voulait, Phadransie détestait la position d'infériorité. Et c'est celle que lui refilait Léocadas en ce moment même. Cette passe d'arme fut la plus cruelle pour Phadransie de toutes celles qu'elle eût éprouvé depuis le commencement du duel. Elle hurla et extériorisa sa rage, leva son sabre et renvoya de toute la force de son crochet la lame de Brecianne d'où elle lui était venue. Sa propre lame à elle se fraya un chemin entre celle de l'adversaire, maintenue au niveau de leurs poitrines respectives par son crochet. Cette atteinte si vive, peignait avec energie la rage de Phadransie et sa soif de l'emporter sur son adversaire. Au moins une fois, pensait-elle. Ce fut peine perdue. Brecianne Leocadas avait fait décrire un arc de cercle à sa lame, et emporté dans son élan le bras de Phadransie. Un coup de botte dans les côtes de la pirate au crochet la bouscula. L'intensité de ce coup ci indiqua néanmoins à Phadransie que Brecianne s'apprétait à la toucher dans le dos. Elle parvint de justesse à bloquer le coup, mais rageait de ne savoir toucher aussi bien que son adversaire.

-Calme ton orgueil, Phadransie ! lui cria Brecianne tout en enchaînant avec un énième coup latéral qui immobilisa l'espace de quelques secondes la lame sous la gorge de La Noire.

Phadransie, à laquelle l'arrogance l'emportait toujours sur l'attention, se le prit de plein fouet. Encore une fois, Brecianne avait su stopper la force de son coup, autrement La Noire se serait trouvée avec une lame au travers la gorge. Brecianne attaqua d'un autre côté, avec davantage de lenteur pour que Phadransie puisse l'arrêter, ce qu'elle ne manqua pas de faire. Elle vit que l'Elue lui offrait une ouverture délibérément, et Phadransie se servit de sa frustration comme d'un tunnel afin de s'y infiltrer pleinement. Elle lança une pluie d'estocs et d'arceaux alternant lame et crochet sur Brecianne, l'obligeant à reculer. L'ombre d'un sourire se dessina sur les lèvres de cette dernière lorsqu'elle dû céder du terrain et se battre pleinement l'espace d'un instant. Phadransie, face à elle, suait à grosses gouttes et bougeait aussi rapidement et violement qu'une tornade humaine. Il fallait avouer qu'elle avait un style de combat agressif et singulier, habile et souple, et qui collait parfaitement à sa maîtrise des Trois Coups, de surcroît. Le crochet vint tracer un sillage sanglant sur l'avant bras de Brecianne. Voyant cela, un sourire s'élargit sur le visage de Phadransie, et à la fois entièrement maîtresse de la situation, et plus du tout d'elle même, elle imposa à Brecianne le coup de grace, le tout dans un cri infernal sonnant comme un glas. Mais jamais la lame n'atteignit la chair. Brecianne Leocadas s'était abaissé, dos droit et face à l'attaque. La lame de Phadransie passa bien au dessus de son épaule quand l'Elue Divine profita de ce contretemps vainqueur pour se saisir du bras de son adversaire et la désarmer d'une simple pression. Phadransie bascula par dessus Brecianne, roulant, et elle se serait probablement rompue la colonne vertabrale sur le sol tandis que son sabre passait de sa main gauche à celle de Brecianne, si cette dernière n'avait pas modéré cette prise inattendue. Phadransie La Noire, désarmée, tomba à même le sol pierreux de Port-Argenterie, et ses genoux et ses paumes s'éraflèrent sur le sol tandis qu'elle fut sonnée quelques secondes durant. Ce que voyant, Brecianne prit le temps de se redresser lentement, les deux sabres fermement tenus. Phadransie, emplie de rage comme on aurait put emplir un vase d'eau, s'était déjà redressée, poing fermé et serré. Brecianne lui sourit et lança à terre les deux sabres. Nul mot, un seul regard, et l'ombre de ce sourire qui voulait tout dire pour Phadransie. Elle courut vers son adversaire, bien que désarmée. La pirate sentit l'air crépiter autour d'elle, bourdonner dans ses oreilles tandis que son sang martelait son crâne. Elle visualisa avec attention les points vitaux qu'elle cherchait à atteindre sous ses doigts. L'air l'enveloppa, elle le fendit et le prit de vitesse. Bien disposée à placer sur Brecianne son fameux Trois Coups, Phadransie ne toucha que le vide, par trois fois, tandis que tout allait si vite autour d'elle qu'une tornade n'aurait put la prendre de vitesse. Et après avoir tranché que du vide, elle sentit dans son dos, au dessus du sol, Léocadas qui contre-attaquait. Phadransie était de dos, et ses Trois Coups à elle étaient déjà amorcés. Comme en elle demeurait la même dextérité et souplesse que Phadransie La Noire, il ne lui fut pas difficile d'atteindre cette adversaire vulnérable. En moins de trois secondes, Phadransie se trouvait allongée derechef sur le sol. La main de Brecianne était refermée sur sa gorge et serrait. Une légère paralysie s'était attaquée au corps de Phadransie. Elle était vaincue par celle qui parvenait à contrer son Trois Coups et le lui réadministrer dans le dos. Comme toujours.

-Calme ton orgueil, répéta la Capitaine du Seigneur Émeraude, ou bien il causera un jour ta perte. Dans une marée de sang.

Le froissement de la carte maritime que Brecianne Léocadas venait de repousser sur le côté tira Phadransie de ses pensées.

-Les Noirs dis-tu ? Oui, je les ai déjà combattus.

Tant se vantent et se démènent, songeait Phadransie en souriant à son interlocutrice, mais aucun d'entre eux ne la vaut, elle. Elle n'osait se l'avouer, mais pour une fois prenait plus de plaisir à détailler visuellement la femme en face d'elle que prêter écho à ses dires. Le seul point noir sur ce tableau ci était ces mots, ''Elfes noirs'' qui s'insinuaient un passage au travers ses lèvres.

-Et toi ? Demanda Brecianne avec le timbre dans la voix de quelqu'un qui a déjà une idée de la réponse qu'il s'attend à recevoir.
-Nous avons mis un navire Elfe Noir en fuite un beau jour, dit simplement Phadransie.
-Nous. D'accord. Mais toi ? Tu en as affronté un déjà ?
-Non, répondit-elle simplement.
-Tu mens mal, lâcha Brecianne ne savant rien du haut-le-corps qui secoua La Noire à cette seconde là.

Phadransie jugea cette entreprise orale assez dévastatrice pour tenter d'aller plus loin. Elle avait des mots en elle, destinés à Brecianne, qui voulaient sortir. Ecoute Brecianne, devrait-elle lui dire, tu es en danger. Il y a un homme ici qui veut ta peau, un nécromancien vêtu de noir. Il est là, caché. Il attend. Il attend les renseignements que je dois lui fournir ce soir à la Taverne des Pièces de Huit.
Mais ce mots ne sortaient pas car parallèlement à côté d'eux en étaient inscrits d'autre, en lettres de feu : Gemme Légende.

-Du rhum ? Demanda Brecianne en souriant à sa compagne et levant une bouteille ambrée au dessus de son nez.

Phadransie se jeta dessus comme une noyée sur une bouffée d'air frais.

-Putain oui.
-Laisse moi en.

Cette bouteille ci, ce soir là, Phadransie La Noire, terreur des mers, la partagea bien volontiers.



~


La Nuée de mouettes avait un nom bien à elle : Wicked Wench. La Nuée était un Trois Mâts remarquable doublé d'un soixante quatorze canons. Et la Nuée impliquait invariablement la présence d'un homme que La Noire connaissait bien, pas très loin.

-On traîne pas ici la garce.

Phadransie ne fut jamais si pressée de s'éloigner du Wicked Wench avec plus d'impatience. Que foutait-il ici, ce fils de pute là ? D'une part, elle était curieuse de voir ce qu'il était advenu du Capitaine Théoden. De l'autre...De l'autre elle devait se casser d'ici sans tarder. De l'or en quantité n'attendait plus que sa personne, ainsi que les amarres de l'Eradicate qui ne tarderaient plus à être levées, dans l'attente de son retour à bord. La Bête gémit de douleur alors que Phadransie venait de la brusquer avec peu de tendresse, et elle lui décocha un coup de coude à l'arrière du crane pour lui apprendre à obtempérer. Les marins s'écartaient tous devant l'impitoyable Phadransie, qui de sa pression cinglait l'espoir, les rêves passés, les attentes que l'Amazone portait, ou avait porté en elle un jour.

Puis, devant elle, elle le distingua, droit comme un i. Il l'avait vu.

Et elle sut au fond de son cœur que rien, aucun journal de bord, aucune peinture, aucun récit, aucune fresque murale ne pourrait transmettre avec fidélité la force des événements à venir.

Phadransie s'arrêta net. C'est yeux dans les yeux qu'ils se reconnurent, et s'interpellèrent.

-Phadransie...Dis moi que je rêve.

Elle esquissa, spécialement pour lui, le plus large de ses sourires. L'excitation fut également la raison principale de ce rictus là. Depuis toujours, elle en était persuadée à présent, dès leur première rencontre derrière les geôles du Seigneur Émeraude où elle était détenue, elle avait rêver d'humilier cet homme. Elle aimait beaucoup Théoden. Mais elle était certaine que la vue de son sang saurait la satisfaire et lui plaire tout autant. Cette excitation grandissante en elle, elle le scruta et lui dit :

-Bonjour, Capitaine. Cela faisait longtemps.

Le visage de Théoden avait radicalement changé tandis qu'il s'avançait vers elle. Phadransie voyait un changement inquiétant s'opérer tandis qu'il faisait bondir son regard de la Bête à la Noire et de la Noire à la Bête.

-Ca n'est pas possible...
-Quoi donc ? demanda la pirate sur un air faussement perché.

Elle laissa tomber son œil sur la blonde chevelure qu'elle enserrait dans sa main.

-Ho. Sans doute causez-vous de ça ?

Elle écarta un brin l'Amazone. Tous la virent. Théoden aussi. Théoden aussi. La cérémonie de l'Aigle de Sang s'étant joué à bord du Wicked Wench dans les Marches d'Acier se rejouait en Phadransie. La vue de tant de sang, même mentale, l'excitait. Son sourire s'élargissait sans même qu'elle ne se force. Théoden avait déjà posé sa main sur la garde de son sabre, pendant dans son fourreau.

-Tu me fais ça, Phadransie ? Tu me fais ça à moi ! répéta-t-il la voix cassée, transfiguré.

Les promesses immenses qui faisaient tant sourire Phadransie semblèrent s'estomper quelques secondes. Son sourire chuta.

-Je suis pressée, Capitaine. Laissez moi passer.

Elle savait qu'il n'en ferait rien.

-Après tous les sacrifices que j'ai enduré pour toi, Phadransie, tu me fais ça ?! A moi ?!

Il avait dégainé, et tous virent les flammes s'élever autour de la lame du Capitaine. Un cercle de curieux s'était dressé autour des deux individus. Un Capitaine à l'épée de feu, et une pirate tirant à bout de laisse une Bête. Phadransie aurait pu crier elle aussi, et tenter de le repousser et le raisonner. Mais elle n'en voulut rien faire. Il était inutile d'espérer raisonner la rage personnifiée.

-Vous êtes jaloux ? demanda-t-elle en tirant d'un coup sec et évident sur la laisse, étranglant davantage l'Amazone qui toussa ; elle lui offrit le plus perfide et obscène de ses sourires. Dans ce cas je peux arranger ça !

Tout en disant cela, c'était avec encore plus de force qu'elle avait tiré sur la laisse, apportant le visage de sa prisonnière près du sien. Elle brandit son crochet et le laissa s'abattre le long du corps de la femme dénudée. Du sang coula. Puis elle lui expédia un coup de botte à l'arrière des genoux, l'obligeant ainsi à mordre la poussière. Phadransie toisa sa proie, laquelle se trouvait à présent sur le sol, affublée d'une plaie rouge vive, mais peu profonde, qui prenait origine de son épaule gauche, et descendait en une droite diagonale jusqu'à ses côtes. Il valait mieux à présent s'assurer que son trésor ne lui échappe pas, que de prendre ainsi un risque de se le voir s’évaporer, ou pire, dérobé par autrui. Théoden vit sur l'instant les bottes de Phadransie marteler les côtes de la captive au sol dans un tourbillon de poussière léger.

-Si j'étais à votre place, reprit La Noire,je ne ferai aucune peine pour cette chienne. Même abîmées vous savez, elles se revendent très bien.  

Phadransie La Noire tira son sabre. Son sourire provoquateur s'effaça. Dans sa tête et son cœur, le nom Théoden lié au mot ''sacrifice'' semblaient battre à l'unisson. Elle chassa ses deux mots, tout comme l'on chasse une amère pensée.

-Avec vous, je n'userai pas que d'une laisse.
Sam 26 Sep 2015 - 22:16
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Capitaine Theoden
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Depuis le Wench, les Elfes Blancs qui avaient déjà assisté à la cérémonie de l'Aigle de Sang comprirent vite ce qu'il allait se passer. Virels semblait avoir décidé de jouer un bien sale tour au Capitaine.

Déjà, le Port de Karak-Tur semblait s'être étrangement voilé. Le soleil jetait désormais sur les pavés des quais d'ardents rayons à la chaleur étouffante. Le vent soufflait par bourrasques brusques et incontrôlées, emportant avec eux voiles et pavillons qui claquaient contre leurs vergues Les cris des mouettes s'étaient fait perçant, déchirant jusqu'aux pensées même de Théoden.
Oui, c'était cela. Le Capitaine du Wicked Wench, avait posé le pieds dans une autre dimension. Un monde où les océans refoulaient l'odeur du sang et où l'éclat même de l'amour avait été étouffé.
Tout s'était figé autours de lui. Le gros fonctionnaire, à la voix insupportable s'était tût. Les marins ivres avaient été figé dans une stupeur morbide. La Reine elle-même semblait s'être effacée devant le spectacle d'horreur que Phadransie offrait.

Et à nouveau cette impression. La voix de la Pirate semblaient marteler dans le crâne de Théoden comme l'aurait fait un millier de tambours de guerres. Son coeur même semblait battre si fort qu'il tendait de plus en plus à briser ses côtes, et à s'enfuir.

Un pas.

Déjà, la splendeur de saphir du ciel avait été noyé dans un pourpre malade, à la noirceur saisissante. La voix de Phadransie était désormais la seule qui pouvait percer le vacarme qui embrumait l'esprit de Théoden. Les mouettes s'étaient figées dans les cieux, comme clouées sur des piédestaux d’airain. Leurs cris, comme tempêtes s'étaient mués en râles sordides.

Déjà, un second pas et le Capitaine eut dépassé la Reine, sans la moindre considération pour elle.

"-Tu me fais ça, Phadransie ? TU ME FAIS CA, A MOI ?!

La voix du Capitaine, jadis si pleine et assurée semblait maintenant désincarnée. L'on ne sentait plus que colère et chagrin au fond de sa gorge tendue.
Phadransie se tenait là, et le sol s'était fait fournaise. Le monde dansait autours de Théoden comme il ne l'avait jamais fait ! Ou peut-être bien que si, mais alors il refusait de s'en rappeler.
Cette fois là à Kelvin, il avait ressentie la même colère, la même rage.
Cette fois là dans la Baie de Jade, son coeur avait aussi martelé contre ses tempes avec force.

"Après tous les sacrifices que j'ai enduré pour toi, Phadransie, tu me fais ça ?! A MOI ?!"

A nouveau, Théoden ne se vit pas dégainer sa lame. Il ne sentit pas le poids familier de l'acier dans sa paume ni la chaleur vive des flammes qui en animèrent tantôt la courbure fine !
Mais sa colère était telle que la rune sur sa lame sembla gagner d'un coup en force et ce fut presque une bourrasque de flammes qui balaya le bras du Capitaine.
Mais peu lui importait de voir sa manche noircie ou brûlée.

Devant lui, Phadransie rouait de coup Céoda avec une violence inouïe et il sembla au Capitaine que lui même portait chaque coup tant il lui semblait que les craquements des os étaient proches de ses oreilles. Mais la voix de la pirate ne lui parvenait plus. Elle n'était plus rien pour lui, plus rien de digne de parole ou d'expression. Il se revoyait plein d'espoirs pour elles quelques mois auparavant, il se revoyait sacrifier son emprise sur le Seigneur Emeraude, il se revoyait tendre sa main à celle qui avait vendue Brecianne Léocadas. Quel idiot il avait été.

Théoden eût tôt fait de se débarrasser de son tricorne. Il était pesant, et il aurait besoin de toute la rapidité à sa disposition pour mouvoir son sabre si lourd. De même, son fourreau et l'épais harnais qui l'accompagnait se trouvèrent vite à même le pavé. Ils retenaient ses mouvements. Et ce combat promettait d'être éprouvant.

Bien vite, le pas rapide du Capitaine se mua en foulée lente. Il enjamba prestement la distance qui le séparait encore de Phadransie et ses deux yeux aciers semblaient vouloir transpercer sa peau.
Lorsqu'enfin il rouvrit la bouche, ce fut pour pousser un rugissement terrible, puissant qui alerta la foule autours d'eux et fendit leurs murmures.

Le premier coup fut porté par le Capitaine et eut pour effet surprenant d'étouffer les flammes de son sabre. De rage devant la duperie d'Astalil, Théoden dégaina dans un mouvement fluide sa main-gauche et porta un second coup ascendant qui fut paré dans l'instant par le crochet de Phadransie. Comme la foule s'était tue, l'on n'entendit bientôt plus que que les grincements plaintifs des lames qui s'entrechoquaient. Mais à mesure que les passes s'échangeaient, Phadransie reculait et Théoden renonçait à toute forme de stratégie. Devant la défense impénétrable de la Noire, il joignit ses deux armes dans une danse lente et lourde. Chaque coup porté forçait presque son adversaire à joindre ses deux bras pour soutenir son sabre.

Les étincelles jaillirent par gerbes entières, comme il ne s'agissait plus tant d'un duel que d'une tentative d'assassinat. Mais devant la rage pure de Théoden, Phadransie semblait garder une contenance surprenante et danser sur ses appuis sans grand mal !

Mais à mesure qu'elle reculait, Phadransie dû se rendre à l'évidence que le Capitaine ne fatiguerait pas tant qu'elle tiendrait debout, aussi fut-elle contrainte de se trouver une échappatoire.
Et justement, dans son élan meurtrier, Théoden négligea tout simplement sa défense.
Il leva donc à nouveau ses deux armes du même côté, en rugissant son ire et s'apprêta à frapper alors même que Phadransie stoppait subitement sa marche arrière. La Noire tira profit de cette ouverture pour se jeter en avant et frapper le Capitaine aux côte de son sabre !
Dépourvu de son harnais habituel pour se protéger, Théoden prit le coup de plein fouet et se trouva courbé en avant sous le coup de la douleur subite. Le souffle coupé, il n'eût pas le temps de voir venir le second coup de Phadransie qui cette fois visait ses yeux !
Dans un élan salvateur, il se redressa juste assez pour voir le crochet de la Noire s'enfoncer brusquement dans ses pommettes et arracher la moindre parcelle de peau sous la racine de son nez de part et d'autre de son visage.

De douleur autant que de haine, Théoden préféra se jeter sur le côté contre une poutrelle soutenant le préau d'une échoppe et ainsi éviter le troisième coup de Phadransie qui semblait avoir voulu l'achever d'un retour de sabre.
Mais Phadransie, tout à son allégresse ne remarqua pas que si son coup avait porté il avait aussi eut l'effet de permettre à Théoden de se ressaisir. Et ce qui s'était annoncé comme un combat perdu pour le Capitaine devint tout bonnement un défis intéressant !

La première chose que fit le marin, une fois ressaisit fut de lancer un sourire carnassier à la Noire, le visage barré par sa nouvelle balafre et les dents couvertes de sang frais.

"-N'espères plus une mort lente..."

Le Capitaine prit sa légère Main-gauche et la jeta plus loin dans un geste négligeant. L'arme, pourtant la seule affûtée à la disposition du marin se trouva aussitôt plongée dans la baie !
Phadransie déjà s'était remise en garde, prête à accueillir un Théoden décidé à employé toute l'habilité au sabre dont il fut jamais capable...
Dim 27 Sep 2015 - 17:54
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Phadransie l'amena jusqu'à elle, d'un fruste regard empli de provocation autant que de haine ; faisant passer le message ; je suis prête, disait-il, et il invitait la seconde et probablement dernière manche de cet échange mortel à débuter. Le Capitaine, le visage couvert de sang chaud, n'avait plus qu'une lame en main à présent, il paraissait évident qu'il avait renoncé à toute stratégie quelconque. Ce que l'un et l'autre désirait était très clair, et chose commune : tuer. Phadransie n'eut pas le temps de tergiverser davantage que le duel meurtrier reprit motivé par le cri glaçant et brûlant des deux adversaires !

Elle fut impressionée de l'adresse avec laquelle il l'assaillait, sans pour autant n'avoir rien perdu en force brute. Chacun de ses coups su conserver la dignité qui faisait cet épéeiste hors pair, il ne tapait plus comme une bête aveugle. Ses coups devaient assaillir, atteindre, abattre, démolir, anéantir. Phadransie eut la virtuosité de sa personne pour démettre chacun de ces verbes là, et parvenait à contenir ce torrent de coups qui avait pour dessein de la noyer. Son œil ne se détachait plus de la lame. Une erreur, une seule, et c'est la fin. Le premier qui se tromperait, le premier qui executerait le mondre faux pas, le payerait de son honneur, de son sang, de sa vie et de son âme.

Le Capitaine tenta de l'atteindre avec maestria porté sur un coup latéral. Phadransie sut user de son crochet à temps afin d'achever cette botte là. Elle exécuta un arc de cercle de son bras et s'en servit pour torpiller la défense adverse. Il frappa pour anéantir cette attaque, et y parvint. Dans une gerbe d'étincelles, les deux adversaires reculèrent chacun d'un pas, projetés par la puissance de cet échange. Il leur fallut moins d'une seconde de plus pour repartir à l'assaut.

Tous ceux étant présent ce jour ci conviendront à l'unanimité que les deux adversaires ne purent rien exiger de plus d'eux même. Nul paroles, car un duel comme celui ci ne laisse pas de place aux prolixités.

Phadransie chercha l'erreur que ferait Théoden, elle la traqua, à l’affût, tout en contenant le moindre de ses coups et le lui rendant au paroxysme de ses capacités. Sa lame à elle arrêta un énième coup latéral, et c'est une passe de face, prête à défigurer et frapper la figure du Capitaine qu'elle porta. Ce coup ci aussi fut arrêté. La Noire modifia sa position, rompue mais patiente, qu'elle avait su tenir sans faille jusqu'à maintenant et qu'elle avait cru d'abord être la meilleure. Théoden le vit, réagit, fusa. Il se rua sur cette mini ouverture, mais l'adresse de son adversaire étant grande, elle braqua cette offense meurtrière et sut repousser le Capitaine en arrière, avec plus de force dans les bras qu'elle n'en eut jamais.

Lui revint à l'assaut. Le duel reprit. Désormais mieux positionnée, elle surveilla mieux ses faits et sa défense, mais aucune fente dans celle de Théoden vint inviter sa lame à s'y glisser. Phadransie bombarde plus avant, brisant deux estocs camouflés et combinés ; elle fait tant qu'elle parvient à provoquer une énième gerbe d'étincelle, recule sous la surprise, repasse à l'attaque. Elle cerne les ruses de son adversaire, assailli, braque, cannone, condamne tout comme il convient à sa réputation et le nom qu'elle s'est forgée.

Puis elle la voit.

La faille dans le défilé de coups du Capitaine. L'ouverture de la victoire. Elle s'y engouffre sans plus réfléchir, la lame étincelante comme un petit soleil, en avant. La lame est la prolongation de son bras.

C'en est fini de Théoden, car Phadransie va pour lui arracher le coeur.
Dim 27 Sep 2015 - 19:26
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Capitaine Theoden
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Théoden esquisse un demi sourire, voyant Phadransie se ruer vers lui. La ruse fut aussi parfaite que l'adversaire présomptueuse.
Le Capitaine s'efface devant l'estoc de la Noire et lui laisse réaliser l'ampleur de son échec. Derrière lui, une épaisse poutrelle de bois allait accueillir la pointe de la lame meurtrière.

Une exclamation de surprise s'élève de la foule, dressant concurrence à la seule complainte imbécile des mouettes. Devant tous les marins rassemblés, sous le regard distrait des dieux ce duel d’anthologie venait peut être de trouver une fin !

Théoden avait été longuement éprouvé par ce combat. Le sang dans ses yeux le gênait, l'éclat des lames et le clapotis soudainement si assourdissant de l'eau contre les quais avaient prit le pas dans son esprit comme si tout ce combat avait réduit le Capitaine à la seule essence de son épée.
Contrairement à sa charge précédente, il avait été extrêmement conscient de son environnement, excessivement même.
Et il fallait bien ça pour vaincre une adversaire pareille.

Et voici Phadransie lancée dans la dernière botte décisive de ce combat songea Théoden.
Il se demanda si elle en avait également conscience. Un coup d'oeil à sa prunelle noire suffit à lui répondre, car tous deux vivaient la plus belle forme d'amour qui soit. Un duel si fusionnel était le rêve de tout épéiste !

Mais la lame de la Noire fend vite, et Théoden est prit d'une dernière sueur. Son esquive est trop lente et un instant il songe être prit à son propre jeux !

//TAC//

Les deux silhouettes se figent, chacun se demandant si le coup avait porté. Seul le cris de Phadransie demeure, se répercutant à l'infini contre les façades du port vers l'océan.
Puis la poussière retombe et le Capitaine sourit en voyant le bras de Phadransie immobilisé à quelques pouces de son visage.

Tous deux réalisent en même temps, et alors que Phadransie tire brusquement sur sa lame dans l'espoir de la déloger, Théoden joue d'un effort désespéré et joint ses deux mains sur le manche de son sabre. Une dernière fois, leurs deux regards se croisent puis il abat son arme contre celle de la pirate qui ne peut que se rompre sous la force subite !

L'on entend un sifflement strident, comme pour signaler la fin du combat. La main de Phadransie part brusquement en arrière, emportant la moitié brisée de son sabre. Théoden, courbé en avant profite de l'élan pour pousser brusquement sur ses jambes et frapper le poitrail de la Noire de son épaule. L'impulsion est parfaite, tout juste suffisante pour permettre au Capitaine de porter son dernier coup.
Mais sa lame n'est pas affûtée, maudite par Astalil aussi doit-il d'abord chercher à la transpercer au flanc droit. Dans un dernier hurlement, il laisse son acier s'enfoncer dans les chairs de Phadransie, avant de tirer sur toutes les forces de ses deux bras pour relever son arme. L'on entend soudainement un déchirement lugubre, que seule la voix de la Noire parvint à couvrir.
Théoden, comme l'aurait fait un brise-glace en pleine banquise se sert de la pointe de sa lame pour tracer une longue balafre en travers de la poitrine de la pirate désormais impuissante.
Lorsqu'enfin il buta contre son épaule, le Capitaine libéra sa lame, après un arc de cercle parfait et jette d'un dernier coup de botte à l'abdomen son adversaire au sol.

Le combat était terminé, mais leurs comptes n'étaient pas encore soldés.

Haletant, Théoden crache un mollard plein de sang sur le côté et s'approche de Phadransie qui demeure prostrée à terre. Il ne lui accorde plus un seul mot, plus une seul considération.
Seul restait la dette qu'elle devait lui payer.
Dim 27 Sep 2015 - 20:20
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Noire
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Le menu dénouement de cette geste la rendait toute d'orgueil, et puis voilà qu'elle sentit tout à coup le revers du fil de l'épée de Théoden. Son propre sabre se brisa, la lame vola dans les airs. Le sang avait prit une couleur foncée et la la lame scintillait de mille feux. Sous la violence du coup, les vêtements et le corsetage de Phadransie se rompirent. Les lacets cédèrent, le tissu s'arracha, les sangles cassèrent. Une douleur vive la dévora tandis que tout devenait rouge. Le combat semblait avoir enfin trouvé une issue.

Il n'eut au monde pire déchéance pour La Noire. Elle cria. Chuta. D'une façon ou d'une autre, elle semblait avoir echoué face au Capitaine Théoden. Heureusement pour elle, la lame du Capitaine était emoussée, et bien que le coup l'eut atteinte de plein fouet, le sillage sanglant n'était profond. Si il l'eut été, elle serait morte vite, tranchée en deux.
Il était debout, face à elle et s'apprêtait à s'avancer. C'était ce même regard, le plus funeste qui soit et lui était connu, et qui signifiait pour Phadransie la mort garantie. Lente, mais garantie. Sa main n'avait plus de sabre à saisir, et elle n'avait point pensé à emporter de tromblon. Elle cria le nom d'Everhell deux, puis trois fois, mais personne ne surgit à cet écho qui se répercuta dans tout Karak-Tur. Il l'avait abandonnée.

« N'approche pas fils de pute !

Elle n'était pas si démunie que cela. Tandis que le Capitaine Théoden la prenait en chasse, sa démarche étant celle d'un homme déterminé à tuer, elle se saisit de Lame D'Or la fidèle dont les lacets du fourreau, placé au niveau de son abdomen, s'étaient vus tranchés, faisant ainsi pendre l'étui de cuir au niveau de sa hanche. Voici donc que par ce contact si souvent expérimenté, la présence de cette dague ayant servi au Capitaine Korlanos, elle se vit regagner d'un nouveau souffle. Il était vain espérer se battre contre le Capitaine dans son état physique, du sang coulant déjà vigoureusement de l’attrayante plaie, mais Phadransie n'aimait pas que les histoires se finissent sans que ce soit elle qui en écrive l’épilogue. Elle recula afin d'agrandir la distance qui la séparait de son bourreau, et alors son œil se posa sur la bête, à terre depuis tout ce temps. Elle était tout prêt et Phadransie n'avait qu'à tendre le bras d'une certaine manière. Elle fit abstraction de la douleur croissante, tambourinant jusque dans son crâne et ses tempes. Si elle ne faisait rien de plus, elle mourrait. Elle n'en pouvait douter quand elle voyait tant et tant de sang sur et déjà sous elle. Il n'était désormais pas possible de mourir ici et maintenant, face au Capitaine Théoden qui plus était. Avec une vivacité surprenante pour une vaincue, Phadransie s'arc bouta davantage en arrière et sa main tira à elle l'Amazone par la chevelure. A demi prostrée au sol, l'Amazone allongée sur elle, la pirate avait placé son crochet sous la gorge de sa proie. L'éclat et la dorure de Lame d'Or dans sa main gauche se fondait au coeur l'épaisse chevelure dorée de la bête qu'elle maintenant de son mieux.

-Approche un peu trop près, et je la tue ! »

Leur regard se croisèrent de nouveau. Le sabre de Théoden fut levé de nouveau. Il haïssait tellement La Noire pour ses actes. Phadransie n'était pas crédule. Ni miséricordieuse. Que Théoden stoppe son pas ici et maintenant en vérité ne changerait plus grand chose à la situation dorénavant. Elle pouvait avoir une dernière victoire sur lui.

La pirate passa son crochet sous la gorge de la bête qui s'affaissa en arrière sans même laisser à son adversaire et ancien Capitaine une chance de la sauver. Le sang de l'Amazone vint couler et se mélanger à celui de Phadransie La Noire, tel deux fins ruisseaux jaillissant tous deux de leur lit respectif. Puis elle leva son bras, Lame D'or en bout, et l'abattit pile à l'endroit où un cœur encore battant se trouvait. Elle leva son bras gauche trois fois. Une première pour tuer. Une deuxième pour tuer si la première n'avait pas réussie. Et une troisième aussi pour tuer, dans le cas où les deux premières n'avaient pas réussies, ou bien pour le principe de porter un troisième coup. Lame D'Or se transmua en Lame Rouge.
L'Amazone avait tellement été éprouvée par ces semaines de captivité, de lutte incessante contre La Noire chasseresse, d'humiliation et de mauvais traitement, qu'immobilisée ainsi, La Noire allongée sous elle, elle n'avait réussi à lui échapper. Tout juste à se débattre.

Sous les yeux de jeunes et vieux ainsi que du Capitaine, l'Amazone fit accueil à la faux d'Elis dans un ultime gargouillis qui ne pouvait plus rien signifier, à part peut être un adieu déchirant et muet pour ceux ou celle qu'elle avait aimé sur cette terre.

Phadransie repoussa le corps et lécha son crochet. Elle avait eu voix au chapitre et y laissait désormais -et sans doute pour longtemps- sa marque. Il y avait désormais une autre couleur en plus du noir le plus profond pour l'illustrer. C'était le plus sanglant des rouge.
Dim 27 Sep 2015 - 21:24
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Capitaine Theoden
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Capitaine Theoden
Théoden eut tout juste le temps de pousser un hurlement déchirant, à quelques pas de là.
Tout sembla se passer si vite, et pourtant si lentement ! Ses pieds s'étaient fait si lourds dans sa course, sa démarche si pataude...

Déjà, le Capitaine revoyait sur le visage de Céoda l'expression de cette dernière Amazone qu'il avait vu mourir, pourtant si longtemps auparavant. C'était toujours la même expression, si tenace, si terrible qu'elle fendait le coeur des hommes en deux ! Ca avait été un échec impardonnable, et le marin sentait une fois de plus son âme s'alourdir d'une peine coupable toujours plus oppressante.

Céoda morte, Phadransie commit l'affront ultime de s'en délecter. C'eût été une ultime vision insupportable que Théoden ne supporta pas. Il jeta plus loin son sabre et tira de ses mains nues la lame brisée de la pirate de sa niche de bois pour y exercer une emprise si forte que les jointures de ses phalanges menacèrent de céder sous le tranchant de l'acier.

Ivre de rage, autant que de chagrin, le Capitaine se rua en avant, la lame levée comme un couteau destiné au coeur déjà crevé de Phadransie.

Mais tout déchirant que fut son hurlement sordide, il eût surtout l'effet d'attirer l'attention d'amis qui, fendant la foule, vinrent se saisir de Théoden à quelques pas seulement de son objectif.

Il fallut à Bolch et à Gibbs des efforts incommensurable pour espérer porter le marin en arrière, dans sa rage aveugle. Car quand les larmes se mêlent au sang, il est peu de choses qu'un homme puisse faire pour retenir qui a trop enduré et trop sacrifié.

D'une prise forte, exercé sous les deux bras du marins, les compères forcèrent leur ami à reculer et lâcher ce bout d'acier qui meurtrissait ses doigts autant que ses intentions. Gibbs hurlait, tentant de le faire revenir à la raison. Mais Bolch, qui tenaient dans le même temps sa Hallebarde ne put assurer plus que d'un seul bras son barrage à la folie de son ami.

Mais Théoden, ses yeux aciers rivés sur Phadransie n'entendait plus, ne ressentait plus. D'un coup de coude violent à la mâchoire de son frère, il libéra son bras gauche et pu ainsi se libérer de son Second. Les Elfes Blancs dans l'assemblé n'eurent point de temps pour se ruer sur leur Capitaine qui déjà profitait de l'étourdissement de Bolch pour dérober à pleine main sa solide Hallebarde et se ruait à nouveau vers Phadransie que la perte de sang avait plongé dans un état second.

Il sembla alors que plus rien ne contrôla Théoden qui leva haut son arme, comme pour la soumettre au regard même des dieux et l'abattit avec un élan mortel sur Phadransie.
Mais comme les larmes et le sang brouillaient sa vue, son coup dévia et s'abattit sur l'épaule de la Pirate. On entendit la lame de la terrifiante hallebarde, souillée de pourpre, buter contre le pavé et emporter avec elle le bras presque entier de la Noire !

Mais comme le Capitaine levait de nouveau son arme pour retenter sa chance, quatre de ses amis parmi les Elfes et ses proches vinrent se saisir de lui et le portèrent en retrait dans une cour isolée où l'on lui fit lâcher toute arme et toute emprise, et où il se livra tout entier à son chagrin contre l'épaule de Bolch.

La perte de cette nouvelle âme avait été un échec plus cuisant qu'aucun présent ne purent s'imaginer...
Dim 27 Sep 2015 - 22:15
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Dargor
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Quand le combat commença, Vierna recula sagement vers le carrosse noir comme la nuit qui se trouvait derrière. Elle n’était pas concernée par les affaires de ce mortel. En faisant bien attention à ne laisser qu’un rais de lumière minime entrer dans l’habitacle, elle ouvrait la porte et grimpa, se glissant dans la fine ouverture à peine assez large pour laisser passer son svelte corps. Une fois à l’intérieur, elle la referma bien vite. Elle attendit un peu. Elle était elfe noire, elle pouvait voir dans les ténèbres, mais il lui fallait quelques instants pour s’habituer à la totale obscurité qui régnait dans ce carrosse. Les rideaux épais et noirs, de même pour le bois qui le composaient, ne laissaient en effet entrer aucun des chaleureux rayons du soleil. Heureusement, elle n’y était pas seule. Elle ne pouvait pas entendre l’autre personne qui s’y trouvait, car cette dernière était totalement immobile et ne respirait pas. Des siècles de discrétion l’avaient rendue maitresse dans cet art, aussi Vierna n’eut-elle conscience que son interlocutrice était en train d’allumer une bougie que lorsque la flamme apparut.
C’était en effet une femme qui la tenait, mais cela, Vierna le savait déjà. Car elle savait tout de qui avait-elle devant elle. Ou à tout le moins tout ce qu’il y avait à savoir sur elle. La bougie éclairait son visage, orné par un sourire énigmatique. Cette phase maquillée était encadrée de longs cheveux roux. Somme toute, elle semblait une jumelle de Vierna. Quoi de plus normal, car cette dernière était sa doublure après tout. Il était inutile de lui dire ce qui se passait sur le quai. Car l’elfe qui lui faisait face, la reine Dizzalyr Lune-Pâle d’Oro, entendait tout. Elle savait chaque mot de la discussion qu’elle avait eu avec le capitaine humain, et elle savait qu’un combat avait lieu en ce moment même.

« Nous partons, dit-elle simplement. »

Elle fit un geste à Vierna, comme si elle réclamait qu’elle s’écarte pour lui laisser de l’air. Mais l’intéressée savait ce que signifiait ce geste. Une vie de dévotion lui avait appris à anticiper les désirs de ses maîtres, et à savoir ce qu’ils voulaient même sans avoir besoin de recevoir d’ordre. A nouveau, elle entrouvrit légèrement la porte, faisant attention à ne pas faire entrer de lumière dans le carrosse, puis se glissa dehors. Elle s’apprêtait à ordonner au cocher de repartir pour Garay quand l’humain qui avait été mandaté ici s’approcha.

« Excusez-moi, majesté, dit l’homme, Alejandro Fernandez de son nom, mais que dois-je faire une fois qu’ils en auront … fini ?
-S’il est incapable de se tenir, répondit Vierna, il ne nous est d’aucune utilité. Hum… S’il survit, faite-lui savoir que la reine le félicite pour le fait d’avoir triomphé d’un combat aussi compliqué que celui livré contre un kraken, et renouvelez l’acceptation joyeuse de son présent. Vous ajouterez que la reine étant hélas très occupée en ce moment, elle ne pouvait s’attarder plus longtemps, mais qu’elle souhaiterait toutefois savoir quand ce capitaine prévoit-il de se rendre avec principaux officiers à la cour de Garay, afin qu’elle puisse faire plus ample connaissance de sa personne dans des circonstances plus heureuses. »

Puis Vierna ordonna au cocher de fouetter ses chevaux, et rentra à nouveau dans le carrosse.

---

Tandis que le carrosse s’éloignait, avec les bruits du combat derrière lui, Alejandro Fernandez notait chaque mot de ce que lui avait dit la doublure de la reine. Il ne doutait en effet pas un seul instant que s’il se trompait ne serait-ce que d’une syllabe, cela remontrait à ses oreilles, et elle n’apprécierait certainement pas cette erreur. Il valait mieux surveiller ce qu’il disait, donc. Mais il avait un prétexte pour ne pas délivrer le message lui-même, donc il était déchargé de cette affaire. Un risque de finir dans leurs geôles en moins. Il soupira de soulagement. Derrière lui, Henrique Rossi observait le combat. Il lui mit la main sur l’épaule, et lui répéta les mots de la reine.

« Quand ils en auront terminé, dit-il en désignant les combattants, tu diras cela au capitaine Théoden de ma part. Je vous attendrais au palais de Karak-Tur, où nous logeons. Si jamais le capitaine te pose une question sur les disponibilités de la reine… Sache que malgré le miel de ses paroles, il s’agit d’une politicienne, et le message est en fait clair. Ce capitaine est convoqué sur le champ à Garay, lui et tous ses officiers. La reine espèce le voir arriver au plus vite. Voilà la traduction de ce message. Ne la lui délivre pas tout de suite, hein, s’il te plait, capitaine Rossi. Mieux ne vaut pas nous le mettre sur le dos. Il semble un peu … Imprévisible.
-Aye, répondit le capitaine Henrique Rossi, en haussant les épaules.
-M’avez-vous au moins écouté capitaine ? demanda Alejandro.
-Convoqué au palais, mais de façon subtile, la reine veut savoir quand est-ce qu’il arrive, j’ai compris le message, dit Henrique Rossi. »

Alejandro s’en alla en espérant qu’il avait réellement compris le message. Ce capitaine semblait se donner des airs de butor, mais après tout il n’était certainement pas capitaine au palais de Garay sans savoir obéir, et donc être un bon messager quand ce temps était venu. Enfin ça c’était la théorie, restait à espérer que la pratique le confirme.

---

Henrique Rossi, en tant que soldat de métier, n’avait bien sûr pas été concentré une seule seconde sur autre chose que le combat. C’était un homme simple et il savait surtout apprécier les bonnes choses quand elles venaient. Mais le lendemain, alors qu’il allait rencontrer à nouveau le capitaine, il se mordait les doigts en se remémorant son inattention d’hier. Il était vrai que lorsqu’on travaillait à Garay, il fallait surveiller ce genre d’attitudes. Mais le combat était si plaisant à regarder ! Et cet arriviste d’Alejandro Fernandez qui avait refusé de le voir. Bon. Ne pas paniquer, délivrer le message, et se tirer tout de suite. Au pire, le message en toutes lettres avait été confié à Alejandro, pas à lui, il était donc non coupable.
Accéder au capitaine Théoden ne fut pas une mince affaire. Ses lieutenants lui déconseillèrent de l’approcher en l’instant. Mais Henrique s’obstina. Même s’il allait sans doute en faire les frais, il fallait que le capitaine Théoden apprenne qu’on ne faisait pas attendre la reine.

"Salut à vous, capitaine, dit-il lorsqu'il fut enfin devant lui. Votre démonstration d'hier était plutôt belle, mais j'ai peur qu'elle n'ait pas convaincu la reine. Elle veut des sujets qui lui obéissent au doit et à l’œil, vous comprenez. Je vais être honnête avec vous, si j'étais à dans votre situation je mettrais toutes voiles dehors et je partirais d'ici vite fait, parce que sinon elle ne vous lâchera plus, croyez-moi. Mais bon il parait que vous souhaitez entrer à son service, alors voilà la première chose qu'elle exige de vous. Vous êtes convoqué. Vous et, j'insiste sur ce point, vos plus fidèles officiers, vous devez tout de suite aller à Garay, la capitale. Un conseil, faites vite, et que personne ne manque à l'appel. Que personne ne manque à l'appel parce qu'elle veut les voir et que s'il en manque un, croyez-moi elle le saura et vous aimerez pas qu'elle le sache. Quant à la vitesse, c'est sans doute votre première mise à l'épreuve. Elle est partie en carrosse, donc en voyageant à cheval, avec moi pour vous indiquer la route, nous pouvons y être avant elle, si vous et vos gars vous vous bougez le plus rapidement possible. Vous me trouverez prêt à partir avec dix chevaux à la porte de la ville dans une heure tout rond. C'est à prendre ou à laisser."
Jeu 8 Oct 2015 - 22:59
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Noire
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Le Capitaine Baldassare Everhell fendit la lumière du jour filtrant à travers le hublot de sa cabine -ou du moins ce qui était devenu sa cabine depuis que l’Élue Phadransie La Noire s'était appropriée la sienne-. Il avait le corps noyé de sueur et sa respiration était encore haletante. Il se redressa maladroitement sur son lit dont la moitié des draps blancs avaient glissé au sol. Il posa ses pieds sur le sol et tenta maladroitement de se tenir droit, attendant que le monde tourbillonnant autour de lui cesse de le faire et puisse se stabiliser. Il avait une amer envie de vomir, mais savait d'ores et déjà que celle ci lui passerait. Le Capitaine attrapa ses vêtements posés sur une chaise, près d'un grand bureau d'ébène, et entreprit de s'habiller. Sa tête le faisait toujours souffrir.

Encore cette vision.

Malgré toute la confiance qui débordait de Phadransie La Noire, la confiance et l’orgueil, il savait que ça se passerait mal. Mais la folle ne voulait rien entendre. Ce Jack Lissander la tuerait, il le savait, c'était un fait. Pourtant La Noire s'était montrée prudente en mettant les bouchées doubles, voire triple. Elle voulait engager avec elle des mercenaires, des marins et des prêtres. Nul doute que cette petite armée saurait venir à bout d'un nécromancien.

Mais cette vision affirmait avec plein de force le contraire. C'était le sang et la mort qui les attendait.

Baldassare Everhell boutonna sa veste et se rinça le visage afin de se remettre de ses émotions. Il n'arrivait pas à identifier cet homme là, celui qui repeindrait le paysage autour de lui en un rouge funeste, mais il pensait ne pas se tromper en désignant le nécromancien comme coupable. En fait, ses visions étaient toujours imprécises, elles lui montraient que ce qu'elles voulaient lui montrer, et général le qui, comment et pourquoi ne lui étaient pas révélés. Mais plus la date funeste approchait, plus il découvrait de nouveaux éléments, des précisions qui lui étaient dissimulées la semaine d'avant, ou le mois encore d'avant. Evidemment, et c'en était bien misérable, il ne savait pas exactement qui était cet homme, mais afin d'avancer, il avait choisi de porter ses soupçons sur tout le monde et n'importe qui, sans perdre de vue la ligne directrice de sa pensée qui désignait en plein cœur ce Lissander. Après tout, qu'est-ce qui ne lui certifiait pas que l'un des mercenaires que Phadransie La Noire embaucherait ne se retournerait pas contre elle durant ce voyage ? Qui pouvait bien savoir quel était le nombre exact d'ennemis que cette femme s'était faite au cours de sa vie ? Et si c'était cette Triss, la barde, qui paierait un audacieux afin de se venger de sa tourmenteuse ?

Baldassare Everhell avait essayé de prendre les devants. Ainsi, il avait fait suivre discrètement cette Triss Miders par deux de ces hommes. A l'heure actuelle, si ils la trouvaient en train de tergiverser avec quelqu'un de louche, ils avaient pour ordre de lui lover une balle en pleine tête ! Tant pis pour la poudre gaspillée et tant pis pour la borxon. Baldassare Everhell était un homme prudent. Il tenait son Eradicate prêt à lever l'ancre et fuir Oro immédiatement au cas où cela serait de première nécessité.

-Tu fous quoi connard ? Je ne compte pas m'éterniser ici, tu le sais bien !

Les coups furieux donnés sur la porte par Phadransie La Noire le chassa de ses pensées. Il savait qu'elle ouvrirait la porte d'elle même, aussi ne se donna-t-il pas la peine de marcher en direction de celle ci afin de l'inviter à entrer. Elle entra. Il était prêt et s'inclina avec quelques accents de noblesse devant elle. Ces derniers temps, il commençait à être las de cette comédie. Pourquoi avait-il fallu que le rôle dont il avait tant besoin tombe sur cette démente capricieuse ?

-Bien le bonjour madame. Puis-je vous être utile dès lors que vous toucherez terre ?

Elle tenait en laisse derrière elle la bête. L'Amazone. Elle lui lança un regard hautain.

-Bouge toi, dit-elle simplement. J'ai horreur d'attendre.

Elle tourna les talons et se dirigea vers le pont. Baldassare Everhell soupira et se ceintura avant d'accrocher sur son flanc fourreau et sabre, puis de la rejoindre.

-Sale gamine.

Everhell prit plaisir à sentir sur son visage l'air frais.

-Nous resterons seulement que deux jours sur ce port. Je vous interdis d’aller plus loin que le port, excepté pour les mousses qui resteront sur le pont pour s’occuper du navire. Est ce clair ?

Il se tourna vers Phadransie La Noire, "l’Élue". Cette dernière se dirigeait déjà vers la passerelle et mit botte à terre, Céoda sur ses talons.

-Ne désirez vous pas que je vous accompagne, madame ?
-Reste ici, ordonna-t-elle simplement. Je serai très vite de retour.
-Vos ordres...

Il la vit s'éloigner sans une once de ménagement pour la bête derrière elle.

-me commandent, termina-t-il un brin fatigué.

Un homme s'approcha de lui, en fixant Phadransie La Noire dans le dos déjà au loin.

-L’Élue d'Ariel va vendre la bête ? Demanda-t-il au Capitaine.
-L'Élue d'Ariel va vendre la bête, oui. Nous ferons mouillage à Karak-Tur très peu de temps. Je veux que tu restes à bord du Navire.

Baldassare Everhell se dirigea vers la passerelle à son tour, s'assurant que son tromblon était bien à sa place à l'intérieur de sa veste. L'homme le regarda avec de grands yeux.

-Vous allez avec elle Capitaine ?
-Tiens l'Eradicate sur le départ, c'est très important.

Le marin observa l'homme en noir s'éloigner sur les quais d'un pas pressé.

-A vos ordres monsieur...



~


Baldassare Everhell avait tout vu de ce combat magistral qui s'était déroulé sur les quais. Il en avait redouté et apprécié chaque phase, chaque échange, chaque coup, comme s'ils lui eurent été destinés. Et au fur à mesure que le duel avait duré, que les marchands, marins, prêtres, passants de Karak-Tur s'étaient amassés autour des deux antagonistes, il avait comprit.

Il s'était fourvoyé tout du long. L'homme qui provoquerait une marée de sang n'était pas ce Jack Lissander, et le sol qui en serait tâché n'était pas celui des Îles de Jade.

L'Homme leva haut son épée. Il était la rage personnifiée, la furie dans toute son ampleur, le tranchant de la justice, la force brute et obscure. Il abattait sa lame étincelante sur La Noire, tenant encore dans sa main gauche la garde de son sabre brisé. Elle cria de douleur et tous purent l'entendre. Baldassare Everhell vit l'Homme enfoncer avec toute la force de ses bras, sans une once de pitié, la pointe de son sabre sous les côtes de la vaincue, puis il décrivit un formidable arc de cercle, tout en forçant, son pied d'appui positionné sur le sol avec force. Il tenait une posture saillante qui l'empêchait de fléchir suite à l'impact. La chair tout comme les vêtements et le cuir de Phadransie La Noire volèrent en éclat. C'était en quelque sorte le bouquet final de ce spectacle d'horreur pour le Capitaine de l'Eradicate.  
Il devait fuit, il le savait, avant que l'Homme ne le repère aussi et le tue, tout comme il allait le faire avec cette gamine. Mais le spectacle ne semblait pas terminé, et Baldassare Everhell semblait collé au sol.

Il vit la hallebarde se lever face au ciel, il entendit le cri de rage, il entendit le déchirement sec du bras séparé du reste du corps. Du sang gicla, il en reçu sur le visage. Sur le sol, une flaque grandissante commençait déjà à ramper avec épouvante vers le quai et l'eau du port. Une marée de sang. Cet homme.

Baldassare Everhell avait entendu Phadransie l’appeler à l'aide avant ce terrible instant, mais il présageât qu'elle ne l'avait point vu. Aussi ne s'était-il pas avancé à son aide. Il n'était ni suicidaire, ni fou. Tout comme la fin de Phadransie La Noire que personne ne regretterait, le plan qu'il avait pris des mois à échafauder minutieusement tombait à l'eau. Alors que le Capitaine Théoden -c'était son nom, il venait tout juste de l'entendre et se jura de le retenir- était emmené loin de ce charnier par d'autres hommes, des prêtres se jetèrent sur la morte. Ou la mourante, visiblement.

Baldassare Everhell eut envie de vomir. Non pas que l'odeur et la vue du sang le répugnait, loin de là. Mais il voyait dans sa tête se rejouer en boucle cette scène, encore et encore, et à plus forte ampleur, toutes ses visions refoulées semblaient jaillir d'un coup, en écho à cette scène. Ça tournait plus que tout autour de lui. Il tomba à quatre pattes au sol, en se saisissant le crane à pleine main, tentant de calmer cette fièvre insoutenable.

Titubant, il prit ses jambes à son cou et courrut jusqu'à son précieux trois mâts tandis que la garde royale et la marée chaussée se saisissait d'une Phadransie plus morte que vivante et l'emmenait, sans doute en cellule.

L"Élue Divine" de Baldassare Everhell se réveillerait d'ici quelques heures, privée de ses deux mains et de son bras, et serait au mieux penduE pour ses crimes, au pire laissée là ou elle serait afin qu'elle y crève lentement.

-Larguez les amarres, on quitte Karak-Tour, immédiatement !! Ne perdez pas une seconde, abandonnez ceux qui sont à terre !

Le Capitaine de l'Eradicate courut se réfugier dans sa cabine et s’écroula sur sa couchette en hurlant sa rage, sa frustration et sa douleur.

Maintenant que Phadransie La Noire était morte, maintenant que la nouvelle Élue d'Ariel et figure fédératrice de la piraterie n'était plus, comment pourrait-il convaincre le Tribunal de la Confrérie -où ce qu'il en restait à ce jour- de se réunir afin de lutter contre le Dévastateur ?

Ses visions sur ce point là étaient très claires, et ce depuis plusieurs Tours. Le Dévastateur marcherait sur le continent et sur les mers, il apporterait dans son sillage la douleur, les ténèbres, et la mort.

Il détruira quiconque se mettra en travers de sa route, et pour lui les pirates ne sont que de la vermine gênante qu'il éradiquera lors de son ascension. La mention d'une Élue Divine était le seul espoir pour le Capitaine Baldassare Everhell d'amener les quelques pirates restants et éparpillées de par les mers à s'unifier afin de repousser le Dévastateur et préserver leur existence et leur liberté.

Doucement, l'Eradicate s'éloigna du port de Karak-Tour.


Baldassare Everhell sombra dans un sommeil léthargique et convulsif, mais il se jura de ne jamais oublier ce nom. Théoden.
Ven 23 Oct 2015 - 16:28
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Capitaine Theoden
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"-Alors Théoden, que fait-on ?"

Le Capitaine de Wicked Wench peinait encore à songer, après son duel de la veille. Quelque peu perdu il peinait à répondre à cette si simple question de son Second, Gibbs même un quart d'heure après le départ de l'Officier Oréen.

Il avait beau y faire, impossible de le chasser.

Ce regard.

Théoden s'adossa au mât d'artimon qui traversait du sol au plafond sa cabine. Il secoua vivement sa tête couverte de bandages pour essayer de chasser cette Amazone de sa tête et lança un regard pénible à son Second.

"Nous...nous devrions y aller n'est-ce-pas ?"

Sa voix s'était faite hésitante depuis la veille, lorsque ses cris avaient cessés. Etait-elle si hésitante, ou était ce juste qu'elle s'éteignait ? Difficile à dire.

La nuit avait été longue pour Théoden qui avait été recousu et bandé par l'un des Elfes Blancs de son équipage. Bien sûr, il avait été impossible de dormir à cause de la douleur. Quand bien même les incantations et les cataplasmes Elfes étaient conçus pour épargner le plus possible de souffrances.

Au moins les bandages dissimulaient ses cernes...

"Théoden ? Théoden ?"

Une main forte ramena le Capitaine en arrière, comme celui-ci semblait lentement chuter en avant. C'était Belaner, le plus âgé des Elfes Blancs. Avec Gibbs, ils s'efforçaient de ramener le plus possible de Théoden, comme il semblait s'éteindre doucement.

"Théoden, où donc es-tu passé ?" fit Gibbs en essayant de le secouer légèrement.

Il y avait quelque chose dans l'oeil du Capitaine qui ne brillait plus. Ou alors était-ce que toute cette violence avait finit par avoir raison de sa combativité ? Peut-être que Théoden avait atteint là sa limite ? Ou était-ce son sabre, qui avait puisé au plus profond de son âme pour pouvoir plonger jusque dans les chairs de Phadransie ?

"Il est loin, Gibbs laisses lui un peu de temps." répondit Belaner en cherchant un tonique dans ses affaires. "Combien de temps nous faut-il pour atteindre la porte de la cité ?"

"Un quart d'heure, je dirais..."

Gibbs regarda par le hublot de la cabine, pressé. Rater ce rendez-vous serait synonyme d'un échec dans leur mission.

Encore un quart d'heure passa sans la moindre réaction de Théoden. Que faire ? Il avait besoin de ses Officiers ici, pour garder le Wench et préparer leur fuite... et comment réfléchir avec autant de fracas dans la tête ? Il lui sembla que le rire de Phadransie animait chaque couloir de son esprit, chaque pièce de son Palais Mental. Il devait le chasser, ou risquer de tomber dans la folie.

Mais comme rien ne se passait, tous crurent qu'il avait abandonné. Dehors, le pont du Wench était silencieux. Qu'ils étaient nombreux les marins rassemblés là, en attente d'un signe. Du mousse au Quartier-Maître, des gens s'étaient assemblés près de la porte des quartiers du Capitaine à la recherche de l'homme qui avait un jour levé son sabre face à un Avaleur de Vaisseaux, un Kraken plus gros qu'aucun marin n'en vit depuis la Chute des Anciens !

Mais rien.

Puis il arriva quelque chose de tout à fait stupéfiant. Un homme fendit la foule avec assurance et fit irruption dans la chambre de Théoden, chassant sans une once d'hésitation Gibbs et Belaner.
Comme une tornade, Bolch s'empressa de tirer les rideaux qui noyaient la salle dans l'ombre. Il ramassa en hâte les effets de son ami et s'en approcha avec l'air le plus déterminé que l'on vit jamais sur un visage.

Pour Théoden, il sembla que le claquement de ses talons couvrit le fracas du combat dans son esprit. Quelle salvation ! Et cette lumière, quelle bénédiction ! Le Capitaine plissa un instant les yeux, surprit par l'agression des rayons du soleil matinal. Il ne trouva que le visage de son ami pour apaiser la douleur embrasant ses yeux.

Ils se tenaient là, seuls, ils se regardaient. Un moment, Théoden songea à s'effondrer encore comme la veille. Mais les yeux azurés de son ami le maintinrent.

Un long silence envahit l'endroit, tout juste habité par cet échange de regard muets. Muets mais profond, fort. Rarement Théoden et Bolch n'eurent de conversation plus émouvante !
Car il n'y avait plus guère besoin de mots entre eux. Plus depuis des années.

Finalement, le hallebardier prit une grande inspiration et se saisit du col de Théoden pour tirer son visage bandé vers le sien. Là, d'une voix grave de sens il lui souffla la seule phrase que le Capitaine avait besoin d'entendre.

"T'as bien agit, vieux frère."

Après quoi, Bolch fit se redresser Théoden, et lui plaqua sur le torse ses affaires, sans ménagement.

C'était assez, juste le nécessaire.

Les mots de son frère résonnèrent dans l'esprit du marin et firent se taire les rires moqueurs de la Noire. A nouveau, ce fut le silence. Mais un court instant, car la machine était de nouveau en marche. Du morne Capitaine naquit de nouveau un homme vif !

~°~

La porte de la Cabine du Capitaine s'ouvrit à la volée, quelques instants après l'entrée de Bolch.
La première botte qui foula le plancher du pont fut celle de Théoden, lui même à nouveau.
Droit, coiffé de son chapeau et accompagné de sa lame il jeta un regard silencieux à tous les marins présents sur le pont, dans les haubans et sur le quais.

Il y eu comme un instant de grâce, et personne n'osa même respirer, les yeux braqués sur la silhouette de nacre qui se tenait là, baigné par la lumière du soleil.

Puis la voix de Théoden retentit enfin, à nouveau pleine et portante :

"-Remuez-vous donc, tas de cafards et de limaces ! La Grande Reine n'offre rien aux fainéants !"

Un hourra retentit dans le port, forçant même les mouettes au silence puis le Capitaine s'élança d'un pas vif vers le quais.

"-Maître Gibbs !"

"-Oui Capitaine ?" sursauta le vieux marin, surprit par un tel élan.

"-Dix coups de fouets à qui n'aura pas fait sa part à mon retour ! Que le Wicked Wench se tienne sur le départ, car nous reprenons les affaires, et le diable seul nous tient lieu de concurrent.

-AYE AYE CAPITAINE !"

Théoden dispensa quelques accolades aux hommes les plus abattus et fit signe à la Garcette, son Maître Gabier de le suivre.

"-La Garcette ?

-Oui Cap'tain ?

-Comment se porte la voilure de mon bâtiment ?

-A merveille Cap'tain, comme vous le vouliez !

-Très bien, alors tu me suis."

Déglutissant sa surprise et sa crainte, le chétif marin obtempéra et emboîta le pas leste du Capitaine qui n'eût qu'à jeter un oeil par dessus son épaule pour s'assurer que Bolch était toujours avec lui.

Aucun besoin de parler.

Tous les trois, ils fendirent la ville en un quart d'heure et prirent même l'Officier Oréen par surprise alors qu'il allait repartir. Ils bondirent en selle, rapidement et partirent sans attendre vers la Capitale du Pays, Garey.

Il n'y eut aucun retard dans leur trajet, et chaque instant de réflexion compta alors. Car Théoden devait préparer sa défense et son jeu face à la cours.
Il ne venait qu'avec un dixième de sa chaîne de commandement, et affronter les foudres de la Reine serait chose ardue.

Mais après tout, n'était-il pas

Le Capitaine Théoden, Commandant du Wicked Wench, Favori d'Ariel, Vainqueur des Îles de Jade, Héro de la Gardienne, Ami des Elfes Blancs, Pourfendeur de Kraken et Briseur de Métal ?
Ven 30 Oct 2015 - 0:47
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Dargor
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Lorsque Henrique Rossi vit enfin apparaitre le capitaine, il eut besoin d’un instant de réflexion pour comprendre qu’il n’y avait personne d’autre que les deux hommes qui l’accompagnaient avec lui. Soit, ce capitaine avait donc choisi de jouer avec le feu. Henrique renonça à le raisonner. D’une part parce qu’étant lui-même capitaine d’une garde, il savait à quel point tout capitaine pouvait être borné quand il a pris sa décision, d’autre part parce qu’il n’avait pas envie de défier cet homme qui devait de toute évidence avoir un problème ou bien une idée en tête pour aller servir cette reine et pas une autre, et qui était capable de triompher de monstres tels qu’un kraken ou cette femme qu’il avait vaincue il y avait quelques jours de cela. Peu importait. Ils auraient des chevaux pour porter les vivres, c’était tout ce qui comptait.
Les chevaux avaient été difficiles à trouver en une heure, aucun maréchal ferrant n’étant prêt à se séparer de neuf de ses meilleures bêtes aussi rapidement sans négocier, mais il lui avait suffi de prouver qu’il était capitaine au palais royal d’Oro pour qu’on les lui donne, un peu de mauvaise grâce, car les gens de Karak-Tur n’aimaient pas la couronne d’Oro. Mais devant cette occasion en or de vendre des chevaux pour cinq fois leur prix réel, l’un d’entre eux avait bien entendu cédé.

« La couronne vous dédommagera. »

Et l’affaire était réglée. Si bien qu’il avait eu dans les faits plus de temps que ce qu’il aurait imaginé pour acheter des vivres. Il ne comptait pas dessus pour se nourrir et dormir à la belle étoile, espérant croiser assez d’auberges sur leur route pour ne pas se poser cette question, mais on n’était jamais trop prudent. Et faisant partie d’un régiment de cavalerie, il savait à quel point un cheval qui se blessait pouvait ralentir un convoi. Sauf le siens, bien entendu. Il flatta le flanc de son hongre noir. Celui-là ne le décevrait pas, même s’il commençait à se faire assez vieux.
Et par chance, apparemment, les trois marins savaient monter à cheval. Ça, c’était bon. Rien ne permettait pour l’instant d’affirmer qu’ils supporteraient plusieurs jours en selle, mais à tout le moins il n’y en aurait aucun pour les ralentir en faisant des idioties avec les rênes. C’était tant mieux, parce que vu qu’ils n’étaient que trois, il n’y avait aucun doute que s’ils arrivaient à Garay après la reine, ce serait mauvais pour eux. C’était du moins ce que pensait Henrique. Avec les Lune-Pâle, il était très difficile de prévoir ce qui allait se passer. Et même quand tout se passait selon le plan, ils arrivaient toujours à en sortir vainqueurs, Henrique ne savait jamais comment. Une sorte de malédiction ? Ou bien alors plus probablement que ces deux-là étaient des malins. Mais il n’avait pas à juger ses souverains, tant que le peuple était heureux sous leur règne. Il se surprit toutefois à se demander combien de temps durerait cette situation. Puis chassa ses pensées, et fit signe aux trois étrangers de se mettre en selle.

Et le voyage commença.

---

Durant les premiers jours de voyage, il parla, histoire de faire la conversation, aux étrangers du royaume d’Oro et de pourquoi il l’aimait. A la demande de l’un d’eux, un certain Bolch, il raconta les circonstances dans lesquelles le roi Asarith était arrivé au pouvoir.

« Un coup d’état, dit-il calmement. En fait tout le problème était que le roi Asarith avait aidé le roi Pedro, précédent, à s’emparer des Cités-Etats. Mais il était plus populaire parmi les hauts dignitaires, parce qu’il en avait corrompu pas mal. C’était un poignard d’argent à l’époque vous savez. Il parait qu’il a renoncé à son culte, mais moi je pense que les serviteurs de Simialle ne peuvent pas renoncer si facilement, si vous voulez mon avis. Enfin on n’est pas nombreux à penser ça en Oro. Toujours est-il qu’il a renoncé à ce culte, et lorsque Pedro est mort dans des circonstances encore un peu obscures dans la prise de Karak-Tur, il a écarté sa sœur du pouvoir parce qu’elle était mariée à un hasdrubien et que personne ici ne voulait d’un chevalier prétentieux sur le trône. Ça a fait des histoires, mais il a calmé ses opposants en leur faisant des faveurs. Baisse des impôts, il a donné à manger aux miséreux… Bref il s’est fait un ami du peuple, et les hauts dignitaires qui s’opposaient à lui se sont dits qu’ils pouvaient difficilement lutter contre ça. Surtout qu’eux aussi étaient payés pour se taire. Ceux qui ont refusé de le servir malgré cela, pour leur part, sont morts, ou bien alors réfugiés en Hasdruba, près de Fael d’Alvestryn, la reine légitime d’Oro. Mais si vous voulez mon avis l’espérance de vie de cette pauvre fille est assez limitée. Dès que le roi Asarith la considèrera comme une menace, elle risque de tomber mystérieusement malade. Faut bien comprendre une chose, c’est que les ennemis du roi Asarith finissent par le servir ou mourir. Je n’ai encore jamais vu l’inverse se produire. Tout ça pue si vous voulez mon avis. Les hauts dignitaires et chefs de l’armée, pour ce que j’en sais, disent qu’ils peuvent garder le contrôle sur lui, mais moi je vais vous dire, aux premiers signes de débordements du roi, je prends mes bagages les plus légers possibles, je prends ma femme, et je cours me cacher loin d’Oro, même si j’aime bien ce royaume. »

La fin de son discours avait à peine finit de franchir sa bouche qu’il réalisa les bêtises qu’il avait dit. Si ces fous voulaient vraiment servir le roi, alors il était bien parti pour être dénoncé à peine arrivé au palais. Il allait sans aucun doute devoir faire ses bagages tout de suite après être arrivé. Restait à convaincre Fiora de partir, mais vu l’urgence de la situation, il se convainquit qu’il allait la faire venir avec lui de force si nécessaire. Avec elle ça pouvait s’avérer indispensable.
Puis il pensa à une chose. La reine voulait soumettre ce capitaine et tous ses officiers. Il ne connaissait rien à la navigation, mais sur un gros navire comme celui-là, il devait forcément y avoir plus de trois officiers. Ne serait-ce que pour avoir une équipe qui travaillait pendant que l’autre se reposait. Il se promit d’aborder la chose avec le capitaine. De capitaine à capitaine, rien qu’eux. Et c’est ce qu’il fit à la première occasion, alors qu’ils étaient à peu près à mi-chemin. Il avait pris en charge l’entretien des chevaux portant les vivres, mais avait donné pour instructions aux marins d’eux-mêmes s’occuper de ceux qu’ils montaient. Voilà pourquoi il fut aisé de se retrouver seul avec le capitaine, un soir. Un mot lui disant qu’il souhaitait lui parler d’homme à homme glissé discrètement afin que les deux autres ne puissent pas l’entendre, et l’affaire serait réglée.
De fait, ce soir-là, à la taverne, Bolch et la Garcette allèrent dormir les premiers, les deux capitaines restant.

« Bon alors dis-moi, dit Henrique sans prendre le moindre gant. Je suis peut-être pas le plus malin des hommes, mais je suis loin d’être un idiot. Si tu veux vraiment servir la reine, pourquoi tu la défies en prenant pas la moitié de ce que ton navire doit réellement compter d’officiers ? Et ne me sers pas des salades sur l’entretien du navire, je suis sûr qu’il y a l’amirauté pour ça, ou un truc du genre prévu sur le port. »
Sam 7 Nov 2015 - 11:44
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Capitaine Theoden
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Jusqu'à présent, le voyage semblait s'être passé sans le moindre problème. Bolch et la Garcette derrière lui, Théoden avait pu suivre le Capitaine Rossi sans crainte. Garay ne semblait plus très loin, et la nuit tombait juste au moment où ils arrivaient tous dans une petite auberge.

L'Oréen s'était bien débrouillé pour les guider, apparemment.

Bolch et la Garcette montés se reposer, Henrique aborda Théoden comme à son habitude.

C'est à dire sans une seule once de politesse, ce qui commençait à faire grincer des dents le marin plus que sérieusement. Mais passons. Il n'était pas l'heure de tuer quelqu'un. Et ce Capitaine Rossi lui était toujours utile. Néanmoins, il trouva l'étrange résolution de lui faire payer un jour cette grossièreté terrible !

A l'écart, seuls dans la grande salle de la taverne, Théoden alluma donc une lanterne pour son guide et lui et s'assied calmement en ôtant son tricorne.
Henrique ne perdit pas un instant, naturellement et ne se perdit pas non plus en formules officielles. C'était donc qu'il s'agissait de murmures sous capes, d'une discussion qu'un Capitaine dévoué à sa couronne n'aurait pas dû avoir avec une future recrue...

« Bon alors dis-moi, dit Henrique sans prendre le moindre gant. Je suis peut-être pas le plus malin des hommes, mais je suis loin d’être un idiot. Si tu veux vraiment servir la reine, pourquoi tu la défies en prenant pas la moitié de ce que ton navire doit réellement compter d’officiers ? Et ne me sers pas des salades sur l’entretien du navire, je suis sûr qu’il y a l’amirauté pour ça, ou un truc du genre prévu sur le port. »

Théoden soupira en l'entendant, se pinçant la racine du nez pour contenir sa lassitude. Il devait absolument rester calme.

"- Dites-moi Capitaine Rossi, avez-vous déjà affronté un Kraken ?

-Non, jamais.

-Je peux donc déduire que vous n'avez aucune idée du genre de dégâts qu'un monstre pareil peut faire sur le gréement ou la charpente d'un vaisseau. Je me trompe ?

-Rien d'irréparable, si ton navire peut ensuite flotter jusqu'au port.

-Imaginez maintenant que le vaisseau en question soit de facture Kelvinienne et qu'aucun plan ne puisse parvenir aux charpentiers de Karak-Tur. Comment fait-on alors pour procéder aux réparations nécessaires ?

-On laisse des instructions ?

Des instructions, et des Maîtres pour s'assurer que les plans soient bien compris. Voilà pourquoi les deux tiers de la Maistrance de mon bord sont restés au Port."

Théoden sourit finement, à la lumière de la lanterne. Il semblait que son raisonnement avait été aisé à suivre pour Henrique. Peut-être que sa curiosité satisfaite, ce désagréable type lui lâcherait les bottes et partirait.
Mais Rossi ne l'entendait pas de cette oreille...

"-J'espère pour toi que la reine gobera ça. Elle réfléchit bizarrement des fois."

Il semblait que la Reine craindrait que ces Officiers comploteraient depuis le port. Théoden se pencha donc calmement vers Henrique, tâchant de justifier son jeu pour éviter d'être découvert et lui souffla avec une pointe d'amusement :

"-Disons-le, ces Maîtres sont des génies dans leur domaine. Mais ils sont bien trop simples pour fomenter quoi que ce soit.

-C'est pas moi qu'il faudra convaincre de ça, j'y connais rien donc je veux bien vous croire. C'est la reine.

-Je ne crois pas sa Majesté experte en navigation, malgré tout le respect que je lui dois. Pourquoi devrais-je m'inquiéter ?

-Elle n'aime pas qu'on conteste ses ordres.

-Je ne suis il me semble pas encore à son service. Ses ordres, je ne me dois de les respecter que par courtoisie jusqu'alors. D'autant que si mon vaisseau est mal réparé, je ne pourrais la servir convenablement.

-'Pas à moi qu'il faut expliquer ça.

-Alors pourquoi me poser ces questions, si vous ne vous intéressez même pas à mes réponses ?

-Parce que je vous conseille de vous tirer tant qu'il en est temps."

Théoden fut amusé en l'entendant. Naturellement, il n'en montra rien et joua même l'homme surprit en l'entendant. Evidemment qu'il se serait déjà tiré sans sa mission ! Mais une idée lui vint. Il pourrait tirer quelques informations de ce Henrique...

"-Pourquoi cela ?" fit donc le marin.

"-Je la sens pas, c'est tout. C'est une elfe. On peut pas faire confiance à ces gens-là. Ils montrent trop patte blanche, elle et son mari. Mais en attendant, ils entourent Oro d'ennemis. Un jour, ils vont montrer leur vrai visage. Et moi je ne serai pas là ce jour-là.

"-N'êtes vous pas Capitaine voué à leur couronne ?

-J'ai prêté fidélité à un humain. Et il est mort, et je suis pas sûr qu'ils ne l'aient pas assassiné."

Henrique révéla ainsi une certaine défiance vis à vis des souverains de son pays. Une faille plus qu'exploitable pour Théoden, qui s'apprêtait à user pour la première fois de sa vie d'un stratagème des plus odieux. Malene avait intérêt à être reconnaissante ! Il allait vendre ses principes pour sauver la Princesse.

"-Serait-ce un brin de racisme que j'entends là ?

-Oui.

-Je n'ai pourtant pas entendu quoi que ce soit de curieux au sujet du Roi et de la Reine..."

Théoden avait soufflés ces derniers mots avec une candeur et une innocence terrible, ce qui sembla évidemment fonctionner. Ce Capitaine Rossi n'avait pas le même QI que la plupart des Capitaine du Nord du Continent !

"-Oh, il faut dire que seuls ceux qui vivent au palais voient de près ce qu'il s'y passe. Et on a coutume de se taire, habituellement.

-Hmmm... je ne sais quoi penser de vous, Capitaine.

-Ce que vous voulez. Moi je disparais dès qu'on arrive à la capitale. Maintenant que j'ai parlé, soit ils me font disparaître, soit je disparais. Et je ne peux pas laisser ma Fiora seule."

Le regard de Théoden se durcit devant la résolution d'Henrique. Il était temps de passer aux choses sérieuses. Il lâcha donc avec sévérité :

"-Vous ne disparaîtrez pas, non.

-Oh que si.

- Un soldat comme vous qui disparaît ainsi ? La Reine se demanderait pourquoi. Comprenez avec mon engagement, je me devrais de lui expliquer le comment du pourquoi...

-Vous lui direz la vérité. Je lui ai prêté des intentions mauvaises. C'est suffisant pour qu'elle convienne que j'ai juste eu peur. Mais entre nous, partez aussi tant qu'il en est temps.

-La vérité incluse également certaines... allusions à certains meurtres...

-De quoi parles-tu ?

-Qu'assassinat il y ait vraiment eu ou pas, un Capitaine ayant prêté ses vœux à la Couronne ne devrait pas colporter de telles rumeurs ne pensez vous pas ?

-C'est bien pour ça que je disparais.

-Il serait dommage que vous n'en ayez pas le temps avant que cela se sache, n'est ce pas ?

-J'en aurais le temps. Je connais mieux la capitale que vous. Cessez de me menacer.

-Je ne vous menace pas. Je vous fais comprendre que nous avons des intérêts communs.

-Mon seul intérêt est de sauver Fiora et de partir le plus vite possible. Vous, vous voulez rejoindre la reine. Je vois pas en quoi ça converge.

-Et si atteindre la couronne n'était qu'une étape ?

-Je n'en sais rien, mais en tout cas ça me regarde pas.

-Maintenant, si.

-Oh que non ! Je n'ai qu'une seule chose en tête, c'est sauver ma femme, et mettre le plus de distance possible entre cet endroit et nous.

-Si vous voulez éviter de vous retrouver avec une armée de gardes sur le dos avant même d'avoir posé un pied en dehors du palais, je vous conseille plutôt de faire ce que je vous dis.

-Et moi je vous conseille d'arrêter de me menacer. Qui est un capitaine de la garde du palais ?"

Théoden jura intérieurement, soupirant. Il devrait aller plus loin encore dans le vice et abandonner un autre de ses principes. Il se pencha un peu plus vers Henrique, l'air menaçant et lui lâcha.

"- Et qui vous dit que je suis venu seul, hm ? M'arrêter moi d'empêcherait pas qu'un malheur arrive à votre épouse..."

Henrique se leva promptement, et tira son épée devant Théoden. Ce dernier ne bougea pas, les mains jointes sur la table.

"-Ne menace plus jamais ma Fiora..."

Théoden continua sans une once de crainte dans le regard. Après ce duel face à Phadransie, il n'avait aucun doute que cet Henrique ne tiendrait pas face à lui.

"-Et tenter de me tuer maintenant ne fera rien de plus... comprenez que je suis un homme pressé par le devoir, et même si ces méthodes me répugnent il n'y a aucune place pour l'appréciation personnelle dans ce plan.

-Retire ta menace. Personne ne touche à Fiora sans en subir les conséquences. Elle est ma femme. Tu peux comprendre ça ?"

Théoden haussa les épaules, saluant tout de même la dévotion exemplaire d'Henrique pour son épouse. Il l'enviait un peu, quelque part.

"-Offres-toi les moyens de vivre pour la protéger, et ranges-ça petit Capitaine."

Comme pour appuyer ses propos face à Henrique, le marin se leva également et posa la main sur le pommeau de son sabre. Puis fit quelques pas sur le côté sans lâcher l'Oréen du regard et poursuivit d'une voix plus sombre.

-Je ne retirerais rien. Par contre tu dois savoir que si ton aide me ferait gagner du temps, elle n'est pas un seul instant indispensable à ma mission. Et je me fiche pas mal du sort d'une seule pauvre femme dans ce monde, alors je te conseille de bien réfléchir à la réponse que tu vas faire au marché que je te propose."

Un silence lourd se fit dans la grande pièce, plongée dans le noir. Rossi sembla user de son peu de cervelle pour considérer le chantage de Théoden qui attendait calmement en face. Après un long moment, Henrique releva la face vers le marin.

"-Et que veux-tu exactement ?

-Asarith détient quelqu'un que je dois sauver. Une Princesse, dans une prison qui m'est inconnue. Je veux savoir où elle se trouve, qui la garde... le maximum de choses.

-Je peux rien pour toi.

- Qui se vantait être Capitaine de la Garde du Palais, à l'instant ?

-Je suis un capitaine de la garde du palais. Et même pas un influent.

-Eh bien je te conseille de le devenir, sur ce coup là. Autrement tu ne me sers à rien." piqua Théoden, agacé par Henrique.

"-Tu peux pas tout simplement me laisser m'en aller ? Tu seras plus influent que moi dès ton arrivée.

-Oui, mais je ne peux pas prendre le temps de me faire les contacts que tu as déjà."

Henrique se figea un instant, ce que Théoden trouva étrange. Il semblait réfléchir à quelque chose, comme le montrait son regard soudainement un peu vague et son air soucieux.

"-Je vais voir ce que je peux faire. Mais tu ne touches pas un cheveux de Fiora." finit par lâcher Rossi.

Le marin resta dur face à lui, flairant l'entourloupe et lâcha avec un demi sourire.

"-Penses-tu vraiment que ce soit si aisé de me doubler ?"

Henrique sembla se moucher, en rengainant son arme. Il était apparemment à court de ruses ce que Théoden accueillit avec un certain soulagement. L'Oréen rassembla ses affaires et fila droit vers la porte en lâchant avec rancoeur.

"-Je vais voir ce que je peux faire, mais uniquement parce que tu es un fou prêt à se salir les mains avec le sang d'une femme. Pas parce que j'ai le moindre respect pour toi, ni pour ta princesse, ni pour ceux qui t'accompagnent."

Théoden reçut la pique en silence, retournant s'asseoir. Evidemment, il avait la satisfaction d'avoir châtié un type grossier et irrespectueux. Mais il payait cher la poursuite de sa mission et devrait désormais s'assurer de son succès ou de sa mort. Il était hors de question de vivre avec un échec et de tels sacrifices inutiles !

Finalement, le reste de la nuit se passa dans un calme relatif et au matin le petit groupe repartit en silence. Garay n'étant plus très loin, il suffit d'une paire de journées supplémentaires à cheval avant que tous ne pénètrent dans la Capitale. Tous y mirent pieds à terre, dans la cour du Grand Palais d'Asarith et purent même s'offrir une paire d'heures d'attente calmes avant l'arrivée du carrosse de Dizzalyr.
Bien entendu, Henrique était plus que renfermé après sa confrontation avec Théoden. Mais muselé par les menaces du Capitaine, il parvint tout de même à maintenir un semblant de normalité lorsqu'ils se présentèrent tous devant la Reine.

Tout était en place.
Dim 22 Nov 2015 - 18:31
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Dargor
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Dyzzalir observa les marins devant elle. Trois seulement. Il serait intéressant de rappeler au capitaine les ordres qu’elle lui avait donnés. Elle n’y manqua d’ailleurs pas.

« J’avais cru, dit-elle sans saluer les hommes inclinés devant elle, j’avais cru que mes instructions concernant la venue de l’intégralité de votre état-major étaient claires, capitaine. »

Elle marqua une pause, se levant de son trône, pour faire les cent pas sur la petite zone en haut des marches qui y menaient, et qui lui permettaient de dominer ses interlocuteurs. Fût-ce de la sagesse de sa part ou l’avait-on prévenu ? Toujours était-il que le capitaine ne répondit pas à cela.

« Des appartements seront mis à votre disposition, dans l’aile des visiteurs du palais, dit-elle finalement. J’aimerais pouvoir vous y trouver lorsque le temps de vous parler sera venu. Vous serez informé de ce dernier lorsqu’il arrivera. Il vous appartiendra de vous tenir prêt à recevoir une reine ou à être reçus par elle. Les gardes du palais vous y conduiront. Disposez, à présent, et en silence. »

Deux gardes humains vinrent chercher les trois hommes, pour les mener aux appartements qui leur étaient donnés. Lesdits appartements avaient été choisis un elfe noir au service de la reine pour eux, même s’il ne participerait pas à ce garde. Une seule porte y menait, et il y avait des barreaux aux fenêtres. Finement ouvragés, ils faisaient plus office de décorations que de barreaux de geôle. Mais l’idée y était néanmoins. Et les deux gardes humains avaient pour instruction de ne pas les laisser sortir. Elle leur avait clairement fait savoir que sa fille s’occuperait de leur cas s’ils venaient à faillir à leur tâche.


Henrique Rossi avait dès que possible faussé compagnie au trio, les laissant seuls dans les emmerdes dans lesquelles ils s’étaient plongés. En pestant contre eux et contre leur folie, il rentra chez eux. La villa qu’il occupait avec Fiora, bien qu’humble comparée aux voisines, se trouvait dans les quartiers riches de la ville, au centre d’un petit jardin mal entretenu, car ils n’avaient pas de quoi payer un jardinier. Et elle était surtout vide. Il n’y prêta pas attention. Fiora était régulièrement absorbée par son travail, il ne s’attendait pas à la trouver ici. Et dans une certaine mesure, c’était peut-être tant mieux. Il préférait faire les bagages avant de devoir lui expliquer qu’ils allaient partir. La connaissant, si elle apprenait qu’elle devait partir et les sacs de voyages étaient déjà dressés, elle négocierait moins. Il lui arrivait de temps à autre de se résigner ainsi à certains changements.
Mais il ne fallait pas non plus se faire d’illusions. Son travail était à Garay. Il lui faudrait bataille dur pour la convaincre d’abandonner derrière elle son atelier. Il fallait lui trouver des compensations, quelque chose qui lui permettrait d’oublier le travail qu’elle faisait ici, en lui donnant d’autres thèmes de travaux. Voilà pourquoi il partir dans le petit établi qu’elle avait installé sur leur terrasse, et s’empara de tous les pinceaux qu’il put y trouver. Il prendrait des couleurs une autre fois, il ne fallait pas non plus s’alourdir, et elle trouverait sans nul doute de quoi se fournir sur le chemin. Voilà pourquoi sa deuxième cible fut l’argent. Partout dans la maison, il se mit à ouvrir tous les tiroirs, toutes les portes, à la recherche de la moindre pièce. Tout devait disparaitre, ils devaient avoir de quoi voyager, car il comptait bien aller le plus loin possible.
Il se soucia ensuite de leurs vêtements. Il soupira en voyant ceux de Fiora. Elle n’avait jamais porté que des robes peu pratiques pour chevaucher, aussi n’y avait-il rien d’autre que ces tissus encombrants et lourds à transporter. Mais il ne voulait pas non plus faire passer sa femme pour une miséreuse, aussi en prit-il autant qu’il pourrait en transporter, quitte à ne pas en prendre assez pour lui-même. Ses tenues de cavalier tiendraient bien le choc du voyage, contrairement aux robes de Fiora. Il trouva, au cours de ses recherches, la robe blanche qu’elle avait porté durant leur mariage. Il la serra contre lui, puis la reposa. Celle-ci était bien trop encombrante, il devait se résoudre à l’abandonner derrière eux.

C’est à cet instant qu’il entendit un bruit dans le jardin. Sortant son épée, il alla inspecter ce dernier. Il semblait ne rien y avoir. Il prit prudemment le temps d’en faire le tour, n’hésitant pas à demander à quelqu’un de sortir de l’ombre. Il prit peur. Les agents du roi étaient réputés pour leur discrétion. Se pouvait-il que ce maudit capitaine l’ait dénoncé ? Il perdit plusieurs minutes à l’extérieur, mais ne trouva finalement rien. Toujours méfiant, il rentra à l’intérieur. Pas de traces d’une quelconque fouille. Il se retint de soupirer de soulagement. Il n’avait plus le temps.
Maintenant qu’il était persuadé d’être espionné, il devait partir. Il embarqua ses sacs sans les terminer, ne prenant donc que de l’argent, les pinceaux et les robes de sa femme, puis alla sceller les deux chevaux qui lui appartenaient dans l’écurie. Il hésita à laisser le cheval qu’il avait utilisé pour voyager. Ce dernier était fatigué par son aller-retour vers Karak-Tur. Mais d’un autre côté, il aimait chacune de ses quatre bêtes. Il ne put se résoudre à le laisser derrière. Cela lui briserait bien trop le cœur. Il observa ses quatre chevaux. Flo, une jument grise à la peau parsemées de taches blanches, était courageuse, bien que n’étant pas la plus endurante du groupe. Bill était le nom du cheval qu’il avait emmené à Karak-Tur. Il s’agissait d’un vieil étalon à la peau châtaigne. Un peu fatigué par sa longue vie de service, mais toujours volontaire. Il porterait sans rechigner Fiora sur son dos. Pâquerette était une jument noire aux pattes blanches. Elle était très maligne et très rapide, et lui servait donc souvent de cheval d’entrainement. Mais son cheval de bataille, Pluie d’Etoiles, était son favori. Sa peau était noire et parsemée de taches grises et blanches en grand nombre. Ce fier étalon était puissant, adroit et rapide. Et il l’avait dressé lui-même. Tous reçurent leur paquetage de voyage, puis c’est en chevauchant Pluie d’Etoile, et en menant les autres par la bride, qu’il quitta prudemment sa villa, lui souhaitant adieu en silence. Restait à savoir comment quitter la ville avec cet attirail sans se faire remarquer. Mais un problème à la fois. Pour l’heure, il souhaitait aller trouver Fiora.

---

Fiora Rossi était dans son atelier, travaillant sur un tableau. Ledit atelier se trouvait contre un mur de la cité, dans une sorte de grand hangar. Il contenait une mezzanine, sur lequel elle avait coutume de travailler, pendant que ses œuvres étaient exposées en bas. Elle ignorait combien de temps cela faisait-il qu’elle n’était pas rentrée chez elle cette fois. Henrique était peut-être revenu ? Elle n’en savait rien. Ce n’était pas grave, il savait qu’elle passait parfois plusieurs jours ici. Et de toute façon, il y avait plus important à ses yeux. Elle entendit un bruit derrière elle. Elle se retourna, se détournant un instant de son tableau. Un inconnu l’observait. Elle se retourna vers son tableau. Peu importait, elle devait d’abord terminer ça. Il lui parlerait, s’il avait envie de lui faire savoir quelque chose. C’est à cet instant qu’elle sentit une main se poser sur son épaule, et qu’on lui plaquait un mouchoir puant sur le visage.
Sortant instantanément de son état de transe, elle voulut se débattre un peu, mais n’en eut pas la force, et rapidement, s’endormit, sans comprendre ce qui lui donnait tant sommeil.
Mar 24 Nov 2015 - 22:29
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Capitaine Theoden
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Théoden eut tôt fait de faire la grimace, une fois livré à ses appartements. Avec lui, Bolch et la Garcette s'étaient trouvés désarçonnés par la sécheresse de la Reine. Mais qu'importait, la mission continuait.
C'était une suite sommes toute des plus confortable, c'est ce que du moins nota le Quartier-Maître en sifflant un coup, admiratif. Il était sans doute trop simple pour capter que les barreaux aux fenêtres et les gardes devant la porte serait un obstacle sérieux à leurs futures opérations.

Ou alors était-il habitué à avoir un Capitaine aux idées toujours miraculeuses pour les pires situations ?

Pour l'heure, il faudrait attendre. Théoden encouragea Bolch et la Garcette à profiter des lits de la suite pour récupérer du voyage pendant qu'il se chargerait de trouver un moyen de s'évader de cette prison de nacre.

Evidemment, il aurait été sage que tous se reposent une nuit, mais le Capitaine ne voulait pas laisser à Henrique le temps de se sauver avec leurs informations. Et puis il y avait quelque chose en lui, une sorte de folie qui le rendait sur-productif quand la fatigue le noyait totalement !
Bon évidemment, la dernière fois qu'il avait agit sous le coup d'un pareil accablement, la Gardienne avait été à demi pulvérisée... MAIS QU'IMPORTAIT ?

Ainsi donc, la nuit succéda au jour le plus naturellement du monde. Le soleil s'était vite éteint à l'Ouest, derrière les remparts de la Cité pour laisser à sa compagne la lune tout le ciel pour briller.
Mais point de lune, ce soir là. Car il sembla que dans les cieux, Silir l'emporta sur Mystin et recouvrit de son voile d'encre la moindre étoile.

"-Parfait..." se murmura Théoden, accoudé à une fenêtre, à peine éclairé par une lampe à huile.

Dans son esprit germait lentement une idée folle. Une idée totalement dingue, à vrai dire. Un plan d'évasion si absurde qu'il ne pouvait que fonctionner ! C'était en tout cas la certitude du Capitaine, qui maintenant allait et venait dans tout l'appartement en appuyant fortement des pieds sur chaque planche.

Après quelques heures de ce manège incessant, le Capitaine finit par pousser un eurêka magistral, au fond de sa tête et se précipita auprès de ses compagnons pour les réveiller. Après quelques instants de grommellement, le sérieux regagna vite le trio qui put alors se coordonner pour une évasion des plus mémorables.

~°~

"-La Garcette..." grommela Théoden, après de longues minutes de négociations.

"-Mais... Capitaine ! Vous ne pouvez pas me demander de me séparer de ça !"

Le marin recula devant la main tendue de son Capitaine, bredouillant son mécontentement.

"-Tu la retrouveras vite, ne t'en fais pas !"

La Garcette soupira et abdiqua, tirant de sous sa veste un véritable bout de navire, long de bien des coudés et apparemment bien usé. Théoden sourit avec satisfaction, en récupérant la corde.

"-Je te remercie, mon brave." il lui tapota l'épaule et se remit au travail.

~°~

Au beau milieu de la nuit, alors que l'obscurité s'était faite complète un bruit sourd et terriblement soudain se fit soudainement entendre, dans le palais royal de Garay. Bien évidemment, ce bruit sembla provenir des appartements de Théoden et de sa troupe ! Aussi, les gardes postés devant la porte s'empressèrent d'entrer, alertés.

"-MAIS, QU'EST-CE QUI SE PASSE ICI ?!" s'écria l'un, épée à la main.

La surprise des deux Oréens fut à son comble lorsque devant eux se présenta un Bolch étalé sur le sol en pantalon et chemise de nuit. Il avait visiblement essayé de se lever pour un en-cas de minuit mais se serait en chemin prit les pieds dans un tapis à cause de la noirceur !

"-Oh, messieurs, je suis désolé pour tout ce fatras..." bredouilla Bolch, tout gêné en se relevant.

Les soldats, comprenant vite la situation rengainèrent immédiatement et vinrent l'aider à se rétablir sur ses deux jambes. L'alerte passant vite, ils retournèrent à leur poste.

"-Je t'offre encore un peu de ce vin de pêche, Eduardo ?

-Tu sais bien que je ne résiste jamais !"

~°~

Dans la pièce d'à côté, Théoden et la Garcette s'étaient figés, retenant leur souffle. Entre leurs mains, des épées. A leurs pieds, le cadre délogé des barreaux de la fenêtre, tombé sur une pile de coussins pour éviter le bruit. Les deux chutes avaient été parfaitement synchronisées sur le plan de Théoden et avait permit ainsi de dégager sans éveiller les soupçons l'attention des gardes un passage vers l'extérieur !

"-Bien, dépêchons la Garcette." fit le Capitaine, tandis que Bolch les rejoignait en fermant la porte.

Tous trois rassemblèrent les lourds rideaux, les draps et édredons des lits, ainsi qu'une malle entière pleine et les nouèrent ensemble en un énorme paquet. Puis, la Garcette se glissa dehors, étant le plus agile et lança une extrémité de son bout au dessus de sa tête tout en se maintenant au mur par une main. Après tout juste un essai -sans doute bénit par Virel- la corde vint se passer par dessus une statue, comme une gargouille soutenant la toiture en en dépassant juste assez pour être utilisé comme axe d'une poulie géante.

Puis la Garcette céda sa place à Théoden, qui s'était fait le plus léger possible. Une fois la corde en place, il se positionna au bord de la fenêtre, large et se murmura une brève prière. Son coeur battait la chamade ! Une chute ne serait pas mortelle, mais les ferait à coup sûr repérer.

En dessous, les énormes jardins du palais, plongés dans le noir. Au dessus, le toit.
Théoden se cramponna fermement à un bout de la corde et fit signe à la Garcette et Bolch de pousser le poids par dessus le bord de la fenêtre.
Immédiatement, la corde fut violemment tendue et emporta dans les airs Théoden qui prit bien soin de ne pas la lâcher !
Les quelques mètres le séparant du toit furent rapidement passés et le Capitaine se trouva vite sur les tuiles, y atterrissant de son mieux.

"-Pfiou..." murmura-t-il, en regardant en bas. Bien sûr, le poids ne s'était pas écrasé dans un grand fracas, amortis par le grand nombre de coussins et de couvertures. Tout se passait bien, apparemment. Il y avait peu de gardes de ce côté ci du palais. Ou alors ils dormaient ou se soûlaient.

Théoden glissa hors de ses poches un petit miroir et un briquet. Puis, s'orientant plein Ouest grâce aux étoiles, il leva son petit miroir et alluma par séquences rythmées son briquet devant. Communiquant ainsi en morse, il savait pouvoir être vu par six paires d'yeux Elfes amis par delà les murs du palais.
Son message était clair : Il fallait vite passer à l'étape supérieure.

~°~

"-Je le vois !

-Où ça, Eärion ?

-A l'est, sur le toit.

-Bon, voilà notre signal."

En réponse à ses appels, Théoden vit s'allumer simultanément quatre petites lucioles de lumière quelque part dans la ville. Vite allumées, les lumières s'éteignirent vite.

Les quatre Elfes se séparèrent conformément à leur plan, et s'enfoncèrent dans les entrailles de la cité. Fondant vers le quartier riche, ils virent Henrique achever de préparer ses bagages.

"-Quatre montures ? Il compte déjà fuir ?"

Belaner fut répondu par un cinquième de ses frère Elfe, Istovir qui sortit de l'ombre.
Il s'était chargé de traquer le Capitaine Rossi à travers la cité, avec Cyric. Comme ils étaient avec Belaner les deux plus expérimentés, ils s'étaient introduis dans la maison d'Henrique afin de localiser son épouse. La note d'une facture pour un atelier contre le mur de la ville leur avait répondu bien vite, même si ils avaient presque été repérés. Sans doute à cause du temps passé sans opérations. Ca les avait sans doute ramollis un tant soit peu, un instant !

Toujours était-il que le petit groupe savait où aller désormais, drapés de noirs. Ils fondirent rapidement sur l'atelier et capturèrent sans la moindre effusion de sang la dénommée Fiora Rossi.
Ils emportèrent son corps, après lui avoir coupée une mèche de cheveux et avoir déposé une note, figurant les mots :

"Nous vous regardons."

~°~

Théoden était redescendu au mieux, aidé par ses compagnons qui tiraient sur le bout pour remonter leur poids. Après de longues minutes d'efforts, tout le monde fut retourné en place, et au levé du soleil toute la chambre avait retrouvé son aspect d'origine !

Ils étaient prêt à attaquer une nouvelle journée en opération, prenant lentement de l'assurance.
Mer 25 Nov 2015 - 22:39
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Dargor
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Lorsque Henrique arriva dans l’atelier de son épouse, il nota que les bougies étaient éteintes. Il pesta silencieusement. Se pouvait-il qu’elle l’ait quitté et qu’il l’ait manquée en descendant ici ? Ce n’était vraiment pas le moment. Attachant ses chevaux à la poignée de la porte, il entra doucement. Il avait pris soin, avant de partir, d’entourer d’épais tissu leurs sabots, souhaitant amortir le bruit qu’ils faisaient. Restait à espérer que non seulement ça ait marché, mais qu’en plus ils ne henniraient pas.
Il ne trouva pas Fiora dans l’atelier. Qu’à cela ne tienne, il irait donc la chercher chez eux. Il remonta avec ses chevaux. Ce fut son premier aller-retour. Mais dans leur villa, pas plus de Fiora que dans l’atelier de cette dernière. Alors, il commença à un peu s’angoisser. Laissant cette fois les chevaux dans leur écurie, il redescendit à pied, et épée à la ceinture au cas où, vers l’atelier de son épouse. Elle n’avait jamais dû livrer la moindre œuvre de nuit. Et il aurait forcément dû la croiser à un moment. L’atelier était toujours vide. Il examina plus attentivement cette fois, se demandant s’il n’avait pas pu la manquer, dormant allongée à même le sol dans un coin, comme c’était parfois le cas, mais elle n’était nulle part. Son bureau était plein de papiers, sans doute ses commandes en cours. Il remonta une dernière fois. Elle n’était toujours pas rentrée chez lui. Cette fois, il commença à paniquer, et retourna tout le secrétaire qu’elle occupait. Toutes les commandes mentionnées ici avaient déjà été livrées. Il se força à réfléchir. Si elle avait voulu aller modifier des détails, alors il pourrait trouver l’adresse du client chez lequel elle devait être depuis de nombreuses heures à son atelier. Il y retourna, décidé à fouiller son bureau cette fois.
C’est ainsi qu’il trouva la mèche de cheveux, et le message.

« Nous vous regardons. »

Tremblant, il posa mèche et message sur le bureau devant lui, et y mit ses deux mains à plat, prenant le temps d’une grande inspiration. Ne pas paniquer. Surtout ne pas paniquer. Quelqu’un avait sa femme. Sa Fiora avait été enlevée, et il n’avait aucun moyen de savoir si elle était en vie, et si oui dans quel état était-elle. Il se força à lutter contre la paniquer et la colère qui montaient en lui. Qui pouvait avoir enlevé Fiora ? Pouvait-elle être encore vivante ?
A la deuxième question, il espéra que la réponse était oui. Après tout, on lui avait juste laissé une mèche. Et il ne voyait pas de sang dans l’atelier. Peut-être était-ce une simple menace ? Peut-être était-elle encore en vie ? Cet espoir se mit à grandir en lui. Oui, la tuer n’aurait eu aucun sens. Mais peut-être n’était-ce qu’une punition pour quelque chose qu’il avait mal fait. Peut-être était-elle déjà morte, et que ce message l’avertissait que ce serait lui la prochaine fois. Il essaya de se convaincre que si tel était le cas, il aurait vu au moins une partie de son cadavre. Mais le doute subsista, et pendant de longues minutes, il n’osa pas relever les yeux de la table, de peur de voir son cadavre apparaitre subitement dans un coin de la pièce. Quand il parvint enfin à trouver le courage nécessaire, nul cadavre n’apparut, à son plus grand soulagement. Elle était certainement encore en vie. Ou bien alors il verrait son cadavre à un autre moment, selon que son mystérieux ravisseur ait ou non des plans pour elle. Par les dieux, si elle était en vie, dans quel état se trouvait-elle ? Peut-être la récupèrerait-il vivante mais effroyablement mutilée, ou bien alors détruire intérieurement par d’atroces violences subies.

Il ramassa la mèche de cheveux, et prit soin de ne pas les laisser s’éparpiller. C’était peut-être la dernière fois qu’il la toucherait, même si elle n’était pas là. C’est avec des larmes sur les joues qu’il remonta, lentement cette fois, chez lui. Une fois de retour dans sa villa, il alla directement à la cave, et remonta trois bouteilles de vin d’Oro. Il aimait le goût du vin, sans être ivrogne pour autant. Mais il avait entendu dire que l’alcool aidait dans ce genre de situations. Posant la mèche devant lui, sur la table, il se résolut à voir si cela lui ferait effectivement du bien de boire plus que de raison. Il commença à boire, directement au goulot. Qui pouvait avoir enlevé Fiora bon sang ?
Il y avait deux réponses possibles, comprit-il en y réfléchissant. Ou bien les agents du roi, ou bien le capitaine Théoden et ses comparses. Peut-être les deux, pour ce qu’il en savait. Le capitaine Théoden pouvait avoir mis à exécution sa maudite menace de toucher à Fiora s’il ne se renseignait pas sur la prison. Ou bien alors la couronne pouvait avoir été au fait de ses intentions de trahir, ou bien alors il pouvait l’avoir dénoncé à la couronne pour bien se faire voir et lui-même aller plus aisément délivrer sa maudite princesse. Rien ne lui paraissait impossible.
Et puis il y avait ce mot. Il était observé. Par qui ? Pourquoi ? A mesure que le niveau du vin descendait, les réponses se faisaient de plus en plus nombreuses, et de moins en moins claires dans sa tête. Théoden voulait qu’il espionne le roi pour délivrer une princesse. La couronne et ses serviteurs pouvaient peut-être vouloir qu’il reste en vie à Garay. Peut-être que c’était ses soldats du régiment, qui ne voulaient pas changer de capitaine ? Peut-être un artiste jaloux de sa Fiora ? A mesure que le temps passait, à mesure qu’il buvait, même les théories les plus absurdes lui paraissaient probables.
Finalement, il se leva en titubant. Il parvint, au bout d’un long moment d’efforts, à serrer la mèche de cheveux dans un ruban, afin de ne pas la laisser se disperser. Il ignorait totalement quelle quantité de vin il avait bu, mais assez pour que tout tangue autour de lui. Il dut se mettre à quatre pattes pour monter l’escalier sans tomber. Cela ne l’empêcha pas de cracher une fois de la bile amère. Il arriva finalement dans sa chambre, mais recula aussitôt, manquant de chuter dans l’escalier. Sur le lit, la robe de mariée de Fiora, telle qu’il l’avait laissée tout à l’heure. Elle semblait l’attendre, comme pour l’accuser. Inconsciemment, il imagina Fiora morte dans cette robe, le regard accusateur braqué sur lui. C’était forcément de sa faute. Refusant de supporter plus longtemps cette image, il redescendit l’escalier, toujours à quatre pattes. Il agrippa, en bas, l’une des bouteilles, et alla se réfugier dans l’écurie.
Flo, Bill, Pâquerette, Pluie d’Etoiles. Eux, ils étaient encore tous les quatre là. Il s’installa au milieu, entre les quatre box, vidant la bouteille, et se laissa sombrer dans un sommeil profond.

---

Tesla Eilun, à pied, son bâton de voyage à la main, contemplait les murs de Garay qui se dressaient devant elle. Le soleil se levait timidement, et la porte de la cité n’était pas encore ouverte. Elle avait voyagé toute la nuit à marche forcée, pour rattraper son retard, car ses visions lui avaient révélé la veille que le capitaine Théoden était très probablement déjà arrivé. La voilà donc qui était en retard, ce n’était pas bon. Aussitôt qu’elle était sortie de sa transe, elle avait donc quitté sa chambre, payé l’aubergiste pour le diner, et négligeant la fatigue, s’était remise en marche, d’un pas le plus rapide possible. Ce qui faisait qu’elle sortait d’une journée et une nuit de marche continue. Sans compter la nuit à la belle étoile qu’elle avait dû passer la dernière fois. Elle n’était pas très en forme, et n’avait donc pas vraiment la patience d’attendre que les gardes de la capitale ouvrent cette maudite porte. Il le lui fallait pourtant.
De fait, elle s’était presque endormie debout quand les portes s’ouvrirent enfin. Elle rentra en même temps que des commerçants qui étaient arrivés précisément pour l’ouverture des portes. Elle savait parfaitement où devait-elle aller, à présent. Le palais royal. Elle s’arrêta pour manger un peu dans une auberge. Elle allait déjà devoir jouer son numéro alors qu’elle était fatiguée, mieux valait-il au moins ne pas le faire le ventre vide. Puis elle se dirigea vers le palais.

Y entrer ne fut pas chose facile ! La garde royale était loin d’être la plus efficace du monde, et certainement pas aussi douée que les soldats des Marches dans leur domaine, supposait-elle, mais dire « Non » quand on demandait à entrer, ça ils savaient le faire aussi bien que quiconque. D’autant plus que n’ayant pas pu prendre le temps de faire annoncer sa venue, il était difficile de leur faire admettre que oui, elle était bien Tesla Eilun la prophétesse, que non, elle n’était pas une quelconque catin qui essayait un nouveau numéro pour attirer leur attention. On finit d’ailleurs par la prendre au sérieux quand elle gela une main un peu trop baladeuse. Elle avait au moins prouvé qu’elle était une sorcière des glaces. C’était toujours ça de pris.
La fâcheuse conséquence fut qu’elle dut éviter de se faire tuer sur place, les gardes étant passés d’une humeur hilare et méprisante à un état méfiant et agressif. Elle comprenait. A leurs yeux, elle avait agressé, sans doute sans aucune raison, l’un des leurs. Qu’il lui ait mis la main aux fesses ne changerait pas grand-chose, elle le savait. L’altercation dura plusieurs minutes. Eux la menaçant de leurs armes, elle évitant de se faire embrocher, jusqu’à ce qu’un officier vienne les trouver. Un certain Bayaz. Il la fit mettre aux arrêts pour agression injustifiée d’un garde. Et vu qu’elle était magicienne, elle aurait droit aux geôles du palais. Elle soupira. C’était une façon comme une autre d’entrer, après tout.

Une fois dans ces dernières, son premier réflexe fut de vérifier que la princesse n’était pas dans une cellule proche. Un fol espoir, bien entendu, mais qui ne tentait rien n’a rien. Personne ne répondit, pas même le geôlier. Ce dernier vint la nourrir vers la fin de la journée, estima-t-elle. Elle lui tint le même discours qu’aux gardes. Elle était Tesla Eilun, prophétesse élue de Finil, et haute dignitaire des Marches d’Acier. Elle était particulièrement déçue de l’accueil qui lui était réservée, et exigeait de parler aux souverains pour recevoir leurs excuses au nom de la garde. Le geôlier fit mine de ne pas comprendre. Elle lui donna une bourse bien pesante, dans un soupir. Au temps pour son argent ! Il serait à tout le moins bien dépensé.

Comme par enchantement, on la fit sortir, et on lui fit savoir que la reine l’attendait dans un de ses multiples cabinets personnels, pour s’excuse au nom de la garde.

---

« Je vais m’occuper de déterminer si cette femme est vraiment ce qu’elle prétend, maugréa Dizzalyr de mauvaise grâce. Vierna ! »

La doublure de la reine approcha à la mention de son nom. Les deux femmes étaient seules avec Arphénise Quedame, la vampire adoptée par Asarith, qui brillait par son absence. Le souverain avait vraisemblablement autre chose à faire que de gouverner, semblait-il, et Dizzalyr devait faire avec les instructions qui lui étaient laissées.

« Vierna, dit Dizzalyr, je crois que nous avons déjà assez fait patienter ce capitaine humain. Convoque-le en mon nom. Qu’il rencontre sa reine. Convoque-le lui, et non les deux serviteurs qui l’accompagnent, ces deux-là n’ont aucune importance. Qu’ils restent cloîtrés dans leurs quartiers. Quand tu verras le capitaine, tu lui feras tout d’abord part de ta satisfaction de le voir ici. Tu lui demanderas en outre s’il confirme son souhait de nous servir, et pourquoi le fait-il. S’il répond qu’il ne souhaitait en fait pas vraiment prêter allégeance totale à Oro, alors fais-le exécuter, et assure-toi que sa tête soit renvoyée à son navire, que tous sachent ce qui arrive à ceux qui se moquent de nous.
-Oui majesté, dit Vierna.
-Mère, puis-je hasarder une remarque ? demanda Arphénise.
-Parle, ma … fille.
-Mon père le roi n’a-t-il pas laissé pour instructions de maintenir notre couverture de nobles d’esprit ?
-Ton père le roi n’avait qu’à être là, maugréa Dizzalyr. J’en ai assez que l’on se moque de nous, il est temps de sévir un peu. De toute façon, ce n’est qu’une question de jours avant qu’Asarith lui-même ne se lasse de ce jeu. Il ne nous en voudra pas pour une exception à la règle. Vierna, donc. S’il confirme son souhait de nous servir, fais-lui savoir que tu attends de lui de la discipline et de l’obéissance. Cette démonstration d’escrime sur le port était de trop, tu le lui feras savoir, peu importe le prétexte qu’il invoque. Et tu lui feras savoir que tu es fortement déçue qu’il n’ait pas amené comme ses instructions le précisaient tout son état-major. Tu lui donneras l’ordre explicite de les faire venir ici, tous. Ne cherche même pas à faire semblant d'écouter ses arguments, ce serait une perte de temps.
-Oui, majesté, dit Vierna. »

Alors, le trio se sépara. Les deux elfes noires allant à leurs rendez-vous respectifs, et la vampire humaine entra dans un placard, pour ne plus en sortir. Car derrière son fond, il y avait une ouverture vers les oubliettes du palais. Son « père » lui avait donné une instruction à laquelle elle comptait pour sa part obéir, et c’était s’assurer que la prisonnière particulière qu’ils avaient fait se rappelle tous les jours de l’endroit où elle était. Elle se lécha les lèvres. Le goût de son sang y était resté toute la journée. Elle avait entendu dire que le sang des elfes était particulièrement savoureux. En tout cas, pour celle-ci, ce n’était pas une légende.
Jeu 26 Nov 2015 - 21:08
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Capitaine Theoden
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Théoden s'était préparé minutieusement à cette entrevue, qu'il savait primordiale. Aussi avait-il prit le soin de se raser, retrouver une coiffure digne d'une cour Royale.
Bien entendu, se disait-il, aucun de ces efforts ne serait remarqué ! Mais au moins espérait-il ne pas subir de sanction pour un quelconque manque de soin. Aussi, tout vêtu d'une tenue trouvée dans ses quartiers le Capitaine se présenta devant la porte du cabinet jusqu'auquel on l'avait escorté.
Sabre à la ceinture, gants blancs aux mains et redingote réajustée, il attendit qu'un valet ouvre la double porte de bois et l'annonce auprès de sa nouvelle suzeraine.
Il fallut bien quelques longues minutes, pendant lesquelles Théoden répéta dans sa tête son numéro de bon et fidèle serviteur. Mais quelque chose le gênait.

"Cette tenue est moins confortable que dans mes souvenirs..." songea-t-il en rajustant pour la troisième fois son veston. "Et ces souliers... à croire qu'ils veulent ma mort."

Hélas cette fois, il n'était plus temps de faire demi-tour pour se changer. Car au moment où il allait esquisser un pas sur le côté pour s'engager à nouveau dans le couloir vers ses appartements, la double porte s'ouvrit de nouveau sur le valet qui le pressa d'entrer.

"-Je vous ais annoncé Capitaine, comme l'exige l'usage." commença-t-il en s'assurant de la bonne tenue du marin.

"-Je sais Bernardo, merci. Je connais les usages à la cour mais c'est juste que...

-Que, Capitaine ?"

Théoden jeta un regard plein de douleur au vieux majordome, toujours paisible.

"-Ces souliers sont atroces !

-A la mode de la cour du Roi, Capitaine."

Le Majordome acheva d'épousseter les épaules de Théoden, et de tirer sur les pans de sa redingote pour la faire tomber avec justesse sur l'arrière de ses genoux.

"-Vous voici présentable pour sa Majesté, je vais vous faire entrer."

Théoden inspira profondément de nouveau, avançant jusqu'à la seconde porte qui menait au Cabinet de Dizzalyr. Après un regard échangés, Bernardo posa ses deux mains sur les poignées de la double porte et les ouvrit avec prestance avant de s'écarter.

Le Capitaine s'avança ainsi, droit jusqu'au bureau et se stoppa à une distance respectable pour s'incliner.

"-Vous m'avez fait mander, Majesté."

A sa grande surprise, la Reine -ou plutôt sa doublure- ne répondit pas. Penchée sur une lettre, elle semblait absorbée par sa rédaction. Théoden resta donc là, fixe et se contenta d'observer autours de lui un moment. Dans son dos, Bernardo se retirait en refermant lentement la porte à double battants.

C'était un cabinet somptueux, il fallait bien le reconnaître. Les murs en eux mêmes étaient déjà une merveille de maçonnerie. Aucune jointure entre les pierres qui le composaient n'étaient visible. Par dessus avaient été tendues des tentures pourpres représentant sans doute des scènes de chasse à cour. Décoration en vogue en Oro, d'après les souvenirs du Capitaine.
Le mobilier était lui de bois sombre, sculpté avec talent par des ébénistes remarquables. Il y avait deux grandes fenêtres à ogives, dans le dos de la Reine qui inondaient l'endroit d'une lumière douce et ambrée. Une lumière qui semblait faire danser les lattes fines du parquets et embrasaient la chevelure d'un pourpre éclatant de la Reine.

"Ravissant, tout simplement ravissant..." se prit à songer Théoden qui avait reporté machinalement son attention sur Vierna. Il lui sembla que comme avec sa rencontre avec la Princesse Nynaeve, le temps se suspendit un instant. On avait après tout rarement l'occasion de poser son regard sur une présence si belle ! Une véritable Ode à la beauté du monde. Il y avait quelque chose de fascinant dans le contraste qui se faisait entre la peau de nacre de la doublure de la Reine, et sa chevelure ardente, resplendissante ! Théoden regretta vite de ne pas avoir vue la chance d'arriver avec l'hiver. Quel spectacle cela aurait fait, lorsque le froid aurait jeté de ses mains soyeuses une douce rougeur sur les pommettes généreuses de son visage ?

Si il n'avait pas été en mission, nul doute que Théoden se serait permit ne serait-ce qu'un soupire de contemplation.

Mais quelques minutes plus tard, le temps pour le Capitaine de se faire au doux parfum de l'endroit, un détail lui sauta aux yeux. Penchée sur sa lettre, Vierna semblait effectivement écrire quelque chose. Mais debout devant son bureau, Théoden remarqua vite que cette lettre ci n'avait que peu de sens. Une chose que l'on remarque aisément, lorsque l'on a été élevé dans une école aussi rigoureuse que l'Académie Navale de Kelvin où toutes informations sont bonnes à glaner lorsque les professeurs notent leurs rapports d'évaluations.

Théoden avait apprit à repérer les gens qui se foutaient de sa gueule et faisaient semblant d'écrire. En temps normal, bien entendu, le Capitaine se serait permit une remarque et aurait soufflé à la Reine qu'une attente pareille était inconvenante et l'empêchait de poursuivre son travail.
Mais il était en mission, et il n'était point temps de risquer de froisser une monarque.
Néanmoins, préférant éviter de passer pour un autre Capitaine fade et soumit, il entreprit de se pencher légèrement en avant, comme pour n'être entendu que d'elle et déclara avec une certaine tranquilité :

"-Pas besoin d'une fausse lettre pour vous donner de la contenance, votre Grâce. Je suis déjà bien assez impressionné comme cela."

La Reine sembla réagir à ces quelques mots mieux qu'il ne l'imagina. Elle ôta calmement une petite paire de lunettes à la forme étrange et répondit avec calme.

"-Ce n'était pas une fausse capitaine, mais je comprends votre impatience. Après tout, c'est moi qui vous ai convoqué."

Théoden eut un demi sourire, cachant son amusement avec difficulté. Evidemment qu'elle ne l'admettrait pas !

"-Je ne suis pas un homme pressé, Majesté. Je m'en voudrais d'interrompre l'administration de votre pays. Et puis un cabinet d'un tel confort est un cadre des plus agréable pour attendre une entrevue."

Vierna, ou plutôt "Dizzalyr" étouffa un léger rire, ce qui ravit quelque peu Théoden en plus de le conforter dans son rôle.

"-Heureuse d'apprendre que vous trouvez le palais confortable, capitaine. Vos appartements vous conviennent-ils ?

-Je n'en ai jamais connu d'aussi confortables, Majesté.

-Bien. Vous l'avez évoqué, je suis débordée, je dois donc écourter, à mon grand regret, cette conversation, et en venir aux faits. Vous avez dit vouloir me servir, au port de Karak-Tur."

Théoden hocha alors la tête avec vigueur, déterminé.

"-Ce serait un honneur.

-Serez-vous prêt à répéter ce serment devant la totalité de la cour ?

-Cela me semble être une occasion parfaite de réaffirmer mon admiration envers ce pays et mon désir de le servir !*

Vierna vint joindre ses deux mains sur sa table, après avoir déposée sa plume sur le côté. Les vrais questions semblaient arriver.

"-Puis-je vous demander pourquoi Oro ?"

Théoden prit une grande inspiration, affichant un air rêveur -pas nécessairement faux à certains égards- et sourit.

"-Cela ne vous aura sans doute pas échappé, mon vaisseau porte les marques des chantiers de Kelvin. C'est que j'ai longtemps servit Medron mais malgré la grandeur de sa flotte, je l'ai trouvé terne, sans saveur. Aucun éclat de grandeur ! En tant que Capitaine, j'ai vue la seconde plus belle flotte du Continent dépérir au port. Vous savez, c'est un crève-coeur pour certains marins ! Je vous épargnerais les détails futiles d'une longue histoire, Majesté. Mais j'ai le sentiment d'avoir retrouvé dans votre Nation l'idéal que j'avais toujours voulu servir. La promesse de servir de grands Seigneurs, bons et forts. Et où que j'ai pu aller, tous m'ont confirmé ce que les murmurent se disent dans le Nord à votre propos."

La Reine sembla quelque peu touchée par la verve du Capitaine, qui se prenait réellement à regretter ses belles années à Kelvin. Ou peut-être était-ce Kelvin tout court ?

"-Il est rare de croiser une telle dévotion de part le monde, capitaine. C'est un plaisir. Mais vous devez savoir que nous apprécions, de la part de nos sujets, la discipline et l'obéissance lorsqu'ils prêtent ou souhaitent prêter serment."

Théoden comprit alors quel sujet fâcheux allait aborder Dizzalyr et s'inclina sur l'instant, sans même lui laisser le temps de finir sa phrase. Il prenait les devants, encore, pour s'assurer un succès complet.

"-Je sais ce qui vous fait dire cela, Majesté. Avant que nous en venions à cela, je tiens absolument à ce que vous excusiez mon comportement... des plus inconvenant sur le port. Sachez également que j'ai d'ores-et-déjà confié à mon quartier-maître la rédaction d'une lettre de rappel à tous mes officiers, conformément aux instructions que vous aviez laissé à votre départ. J'ose espérer que vous apprécierez ce geste, et saurez excuser l'infini soin que je porte à la restauration de mon outil de travail..."

Vierna eut un grand sourire en l'entendant -ce qui était déjà une récompense en soi pour Théoden, amoureux de la beauté- et se leva doucement de sa chaise.

"-Et intelligent avec ça ! Je vous remercie de votre compréhension capitaine. Ce sera tout. Vous pouvez regagner vos appartements, mais n'y êtes plus confiné. Vous pouvez désormais aller vous promener en ville, et vos deux hommes."

Théoden se redresse, affichant un air comblé et la remercie en hâte, tandis que Vierna se rasseyait.

"-Je me retire à présent, et vous laisse à vos affaires d'état. Majesté.

-Nous nous reverrons bientôt, soyez en sûr.

-Pour mon plus grand plaisir, c'est certain."

Mais ces derniers mots tombèrent dans le vents, engloutis par le crépitement de la cheminé contre le mur à gauche du Capitaine et le grattement de la plume contre le papier. Vierna était retournée à sa fausse lettre.

Théoden se retourna donc, et fut libéré du cabinet par Bernardo, comme pour son entrée.
Dehors, il soupira un bon coup, remercia le majordome et fila en vitesse. Il pouvait enfin sortir de ce palais de malheur !

~°~

A quelques pâtés de maison de là dans la maison de la famille Rossi, à la nuit tombée il se trouva qu'Henrique eut une visite surprenante.
Prit à se morfondre dans l'écurie, il semblait s'être livré à l'ivresse sans la moindre once de réflexion. Bien évidemment, Théoden qui avait commandité l'enlèvement de Fiora exigeait de ses elfes un retrait complet vis-à-vis du Capitaine Oréen. Mais ni Belaner ni aucun des autres Elfes ne semblait prêt à respecter cet ordre.

Aussi, lorsque le soleil se fut éteint à l'ouest, une silhouette Elfique se présenta devant Henrique, tout en cape. Belaner, déterminé vint trouver l'Oréen couché sur sa paille.

"-Allons bon..." soupira-t-il.

Henrique sembla tenter de se lever, comme pour se défendre. De toute évidence, il avait bien trop bu pour supporter le simple poids d'une épée. Belaner s'approcha donc encore, et balaya du bout du pieds la bouteille que tenait mollement l'Oréen.

"-H...Hey ! V...Voulou...Voulou vous...bouteille..." bredouilla Henrique en roulant sur le ventre pour essayer de rattraper son breuvage.

Mais Belaner ne l'entendait pas de cette oreille. Il s'agenouilla et saisit l'Oréen au col pour le redresser et l'adosser à une poutre de l'étable.

"-Maintenant écoutez-moi bien, Henrique." commença-t-il "Vous vous trouvez maintenant à un tournant de votre vie. Je vous ai vu à l'étage, avec la robe de votre épouse. Vous devez savoir que peu importe vos actions, jamais plus vous ne foulerez Ryscior comme vous le faisiez avant. Le destin vous a mit dans une position fâcheuse, vous et votre épouse. Mais peu importe dans quelle ténèbres s'enfonce votre route, elle ne s'arrête pas."

Henrique sembla vouloir bouger, pour se lever ou se défendre, mais Belaner raffermit son emprise sur lui, son visage à quelques doigts de celui du Capitaine. Comme nimbé de lumière, l'elfe vint apposer sa paume sur le front de l'homme. Il sembla alors qu'un peu de magie se fit dans cette étable. Un sort, ou peut-être un souffle de cette douceur qui règne sur Teikoku. Mais l'effet, lent tirerait à tous coup Henrique de son ivresse et le livrerais à un sommeil salvateur le temps d'une nuit.

"-Dès ton réveil, tu trouveras la force de sauver celle que tu aimes. Et si la question t'obsède encore, sache que je suis celui celui qui détient ton aimée. Obtiens-nous vite des informations et je vous offrirais une entre vue, tu as ma promesse."

Sans plus attendre de réponse d'Henrique, Belaner le rallongea dans la paille et repartit. Le sort eut tôt fait de faire son office et l'Oréen sombra dans le sommeil sans avoir même le temps de se poser plus de questions.

Sam 28 Nov 2015 - 0:23
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Dargor
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Tesla sortit de son entrevue. La reine lui avait en substance demandé de prouver son identité. Cela n’avait pas été difficile pour la magicienne des glaces, d’autant plus que son interlocutrice savait parfaitement à qui elle avait affaire, cela état une évidence. Cette entrevue avait plutôt pour but de connaître la raison de sa venue. Avait-elle réussi à la convaincre ? Tesla l’ignorait. Son histoire de sentir que quelque chose se préparait en ces lieux et de vouloir y assister lui semblait crédible dans la mesure où c’est ce qu’elle disait presque toujours quand on lui demandait la raison de sa présence. Il semblait que la reine avait été informée. Et puis, il se passait toujours des choses dans les palais royaux, même si Tesla ne doutait pas que la reine ait plus de plans que ce que la vie politique ne laissait penser.
Elle remarqua le capitaine Théoden qui marchait dans un couloir devant lui, apparemment pressé et contrarié, à en juger par sa démarche décidée, les bras croisés dans le dos. Elle se mit à le suivre, s’adaptant à son rythme, mais restant bien derrière lui. Cette promenade l’emmena vers les jardins du palais, dans un coin reculé. Il s’y retourna, avec l’air de l’attendre. Elle lui sourit.

« Capitaine.
-Dame Tesla, répondit-il, bienvenue sur le champ de bataille. »

Il semblait donc être d’humeur à tout le moins déterminée. Ou peut-être était-il vexé d’un évènement fâcheux qui lui serait arrivé ? Toujours est-il que ses mots étaient violents.

« Je n’appellerai pas cela ainsi, dit-elle, mais si vous le souhaitez.
-Ce lieu est pourtant bien hostile. L’on m’a soufflé qu’une « personne importante » arrivait en ville. Je suis bien heureux de vous retrouver. »

A ces mots, Tesla se mit à regarder autour d’eux. Le capitaine avait l’air de savoir l’endroit peu écouté, mais elle était une élue divine après tout. Il était tout à fait possible qu’on l’ait faite suivre. Elle ne remarqua personne, mais tout de même, resta sur ses gardes. Aussi, c’est en lui prenant le bras et en faisant mine de l’emmener vers l’extérieur du palais pour une promenade qu’elle continua la conversation.

« Je suis moi-même heureuse de vous retrouver, dit-elle. Je m’excuse pour mon retard.
-Pas de soucis, répondit le capitaine en baissant le ton, afin que les gens qui commençaient à apparaitre à cause de leur retour dans des lieux plus peuplés ne puissent trouver ses mots intelligibles. Mes petits oiseaux dans la ville et moi-même avons commencé à repérer le terrain en attendant. »

Tesla fit signe qu’elle avait compris. Cela, elle en était déjà au courant. Sa prédiction de la veille, bien que l’ayant laissée épuisée, avait montré quel genre d’oiseaux avait-il avec lui.

« J’ai eu hier une vision me confirmant cela. Je devine votre question, elle ne disait rien de plus que votre arrivée, à vous et vos oiseaux. Certains sont en train de préparer le départ à Karak-Tur, tout en surveillant le navire, tandis que les autres sont dans les alentours avec vous, à s’assurer que le capitaine Henrique Rossi vous fasse montre de son amitié. Me trompe-je ? »

Théoden fit signe qu’elle avait impeccablement raison. Tesla sourit. Au moins un point sur lequel cette vision s’était montrée précise.

« Il a intérêt à bien agir, dit-elle, car je crains que mes pouvoirs ne soient limités ici.
-Au contraire, dit le capitaine. Vue la distance entre Garay et Karak-Tur… Eh bien je crains que le roi et ses chasseurs de tête ne nous aient rattrapés bien avant le port. Il faudrait trouver quelque chose pour les retarder… »

Tesla avait depuis bien longtemps pris en compte cet aspect-là des choses. Dès le séjour dans les Marches, elle en avait parlé avec le capitaine. Elle savait quel sacrifice elle s’apprêtait à accomplir. Il restait une voie dans laquelle elle parviendrait à s’en sortir, mais les chances de la voir se réaliser étaient bien faibles.

« Je verrai ce que je peux faire, dit-elle finalement. En attendant, si je peux rencontrer votre homme, je crois avoir appris quelque chose qui pourrait l’intéresser dans son travail. »

Elle s’assura que personne n’était à portée d’oreille. Leur promenade les avait emmenés dans les quartiers riches de la ville. Les petits murets autour d’eux encadraient les jardins de grandes villas, mais étaient trop petits pour cacher qui que ce soit. Ici, on ne se protégeait apparemment pas très bien des voleurs. Ou bien alors Théoden et elle-même avaient franchi un barrage de gardes sans qu’elle s’en rende compte.

« D’où sortiez-vous, d’ailleurs, demanda Théoden, quand nous nous sommes croisés ? »

Elle avait prévu de lui parler d’autre chose, mais cela pouvait toujours attendre quelques minutes.

« D’une entrevue avec la reine, dit-elle.
-Cocasse, répondit-il en souriant. Moi aussi. Il doit donc y avoir deux reines. Méfions-nous de ces ruses, l’une peut veiller dans l’ombre, même si nous avons l’autre en vue. »

Tesla sourit. L’information valait le coup d’être relevée. Etait-ce une erreur délibérée de la part de la reine et de sa doublure d’avoir procédé aussi ouvertement ? Peut-être.

« Intéressant, dit-elle. Mais il y a plus important. Quand on en vient à la partie du palais qui nous intéresse, mes visions deviennent troubles. Il faut assumer qu’il s’agit d’une certaine force noire, mais j’ai la sensation qu’il y a autre chose. Quelque chose… De divin ?
-Quelle divinité aurait donc intérêt à nous voir échouer ? demanda Théoden. »

Simialle ? eut envie de répondre Tesla. Après tout, le roi d’Oro était son élu. Ou peut-être Silir, la divinité tutrice des elfes noirs. Peut-être était-ce Azma, qui haïssait les elfes blancs et avait rendu Asarith fou, d’après la légende. Peut-être Nimen la folle, pour des raisons connues d’elle seule. Peut-être aucune d’entre elles, peut-être toutes à la foi.

« Que suis-je supposée en savoir ? répondit-elle, n’ayant pas envie de donner une non-réponse gênée. Je ne connais pas les desseins des dieux.
-Se pourrait-il que Virel nous ait tourné le dos ? demanda Théoden. »

Tesla réfléchit à la question. Cette hypothèse lui semblait peu probable. D’après ce que lui avait dit Dina Spanzio, il était en dehors de la nature de Virel de prendre un parti.

« Cela ne lui correspondrait pas d’intervenir aussi directement, dit-elle. Elle est par nature neutre dans tous les conflits. Ne nous soucions pas de comment contrer ce pouvoir. Car si un dieu veut nous voir échouer, alors nous ne pourrons rien y faire. Mais pour autant que nous le sachions, il ne fait jamais que brouiller mes visions. Pour l’instant du moins.
-Une idée d’action alors ? demanda le capitaine en hochant la tête. »

Leur promenade commença à les ramener vers le palais, et des rues plus peuplées, aussi recommencèrent-ils à baisser doucement la voix.

« Il faudrait faire savoir à votre homme où doit-il chercher précisément, dit-elle. Comme je vous l’ai dit, mes informations sont vagues, et c’est donc à lui de les rendre utilisables.
-Je vais vous arranger une entrevue, dit le capitaine. »

Elle n’en souhaitait pas moins.

« Je vous en remercie. Me permettrez-vous d’aller me reposer en attendant ?
-Connaissez-vous l’air du « Corsaire le Grand Coureur » Dame Tesla ? demanda le capitaine sans répondre. »

Elle ne releva pas son absence de réponse. La chanson qu’il avait cité devait être une quelconque chanson de marin.

« Non.
-Sous la pleine lune à venir, dit-il après lui avait chanté l’air du refrain, dans les ruelles, cet air vous servira de laisser passer. Tâchez de le retenir. »

Sur ces mots, il lui lâcha le bras et s’éloigna d’elle.

---

Fiora Rossi se réveilla dans un lieu qui lui était inconnu. Pendant un temps qu’elle ne sut estimer, elle vit trouble. Sa tête tourna et le monde tangua, alors même qu’elle se savait appuyée contre un coussin, allongé sur une paillasse pas très confortable, mais néanmoins une paillasse. Elle essaya de se lever, mais elle fut prise de vertiges aussitôt, et dut rester assiste, attendant que la pièce se stabilise. Ladite pièce était semblait-il une petite cave. Les murs étaient faits de pierre et un peu humides. Elle n’était pas attachée, et on lui avait laissée la robe qu’elle portait à l’atelier. Seuls ses souliers lui avaient été retirés. Quelque pas plus loin, un homme en uniforme attendait en écrivant à une table.

« Qui… Qui.. Qu… Qui êt… Etes-vous ? demanda-t-elle.
-Pour vous je serais Heisenberg, dit l’homme, qui portait un masque, en levant la tête de son écriture. Je suis celui qui vous a fait enlever, je tiens à m’en excuser. »

Fiora fut surprise que son ravisseur s’excuse de son geste. Quel genre d’homme était-ce là ? Mais cette surprise céda bien vite le pas à la peur. Cet homme l’avait faite enlever, malgré ses manières sympathiques. Et il utilisait un faux nom.

« Pour… Pou… Pourquoi ?
-Votre mari doit me rendre un service, dit-il. Et je m’assure qu’il le fera. »

Pour le coup, Fiora trouva cela bête. On l’avait arrachée à son atelier. Elle ne pouvait plus y aller. Et maintenant, il mêlait Henrique à cela ? Quelle genre d’affaire pouvaient avoir ces deux-là ? Elle chassa l’hypothèse d’un Henrique menant une double vie sans même y penser. Il ne ferait pas ça.

« C… C’es… C’est bê… bê… bête, dit-elle. Il… Il l’au… Il l’aurait… Il l’aurait… Il l’aurait… Il l’aurait fait.
-Pas ce que je lui demande. Je n’ai pas le temps pour la discussion. Vous resterez ici, gardée jusqu’à ce que ce soit finit. Aucune crainte, on ne vous touchera pas. »

Rester ici ? Cloitrée dans cette pièce ? A ne rien faire ! Aucun pinceau ! Elle était inquiète depuis le début, mais là, elle paniqua. Ne pas voir Henrique, elle pouvait le faire, elle l’avait déjà fait quand il devait quitter la ville. Mais elle avait toujours eu ses pinceaux ! Toujours eu de quoi s’occuper ! Toujours !

« Qu… Qu… Quoi ? Pas… Pas… Pas question !
-Ce n’était pas une question, répondit l’homme. »

Ça avait tout intérêt à en être une, songea Fiora. Elle ne pouvait pas rester ainsi. Il ne pouvait pas lui faire cela. Avait-il conscience du mal qu’il lui faisait ? Et tout ça pour qu’Henrique rende quel service au juste ?

« Et … Pour… Et que… Que… Que voulez-… Que vou… Que voulez-vous… Que voulez-vous qu… Que voulez-vous qu’il… Qu’il… Qu’il fasse ?
-Il vous racontera quand il rentrera. »

Fiora était désespérée. Des larmes coulaient sur ses joues. Son travail ! Telle une enfant à qui on avait pris son jouet préféré, elle paniquait. La colère viendrait plus tard.

« Et … Et … Et je … Je devr… Je devrai… Je devrais res… Rester.. Ici… Ici sans… Sans… Sans rien… Sans rien faire ? »

Elle avait encore beaucoup de choses à dire, mais l’homme n’eut visiblement pas la patience de l’écouter jusqu’au bout, et l’interrompit en se rendant vers la porte.

« Parfaitement, dit-il. Bonsoir »

Elle se leva du lit et se dirigea d’un pas mal assuré vers lui, dans le but de le poursuivre, de lui demander d’au moins lui faire parvenir son matériel de peinture, mais il l’attrapa et la rallongea d’une poigne ferme.

« Les calmants font toujours leur effet, dit-il. N’allez pas vous blesser. »

Puis il sortit.
Aussitôt, Fiora se releva et marcha aussi vite que possible vers la porte, qu’elle se mit à tambouriner, appelant quiconque pouvait l’entendre. Cela n’avait aucun effets, mais elle continua son manège, hurlant jusqu’à s’en casser la voix, et continuant à essayer d’hurler après cela. Elle frappait de toutes ses forces. Elle avait mal aux mains, mais ne s’en souciait pas. Au bout d’un moment, elle constata l’échec total de cette stratégie.
Alors, elle entreprit d’essayer de casser un pied de table. On ne la séparerait pas de ses pinceaux. On ne la séparerait pas de son atelier. Quelle genre de vie était-ce là ? Quel genre de monstre était cet homme ? Que comptait-il faire de lui ? Comptait-il réellement la rendre à Henrique ? Elle n’avait aucune réponse valable. Si cela se trouvait, contrairement à ce qu’il avait dit, on l’avait touchée durant son inconscience avant de la rhabiller. Après tout, elle avait été enlevée ! Elle acheva de casser le pied de table, et joignant le geste à la parole, hurla avec son habituel bégaiement qu’elle se trancherait les veines si on ne lui laissait pas parler à qui que ce soit. Constatant que personne ne répondait, elle ajouta, en désespoir de cause, qu’on aurait à expliquer à Henrique les raisons de sa mort.
Sa tentative de suicide ne fut pas réellement couronnée de succès. Elle avait surestimé le pouvoir du bois, et ne réussit qu’à se griffer tout l’avant-bras et à se planter de nombreuses échardes dans ce dernier. Mais elle essaya néanmoins, jusqu’à ce que revienne l’homme, avec une toile et des pinceaux dans les bras. Elle eut l’impression de renaître, et se jeta littéralement dessus, dans le but de les lui arracher des mains.
Il l’en empêcha en sortant des bandages, dans le but de soigner ses bras. Ne pouvait-il pas comprendre qu’il y avait plus important ? Elle imaginait déjà ce qu’elle allait faire. La douleur dans ses bras n’était pas si grave, elle était certaine que tout irait pour le mieux. Oui, il y avait ce pinceau… Mais il ne voulut rien entendre et l’assit sur le lit, la tenant fermement.

« Soignez-vous et mangez, dit-il, ou je vous retire votre matériel. »

Elle tenta de lui faire comprendre, à nouveau, qu’elle n’avait pas mal. Et puis elle n’avait pas faim non plus. Ou plutôt, elle avait faim, mais ça pouvait attendre. Ses pinceaux, eux, ne pouvaient pas l’attendre. Ça n’était pas le temps de l’attente pour eux. Mais il ne voulut toujours rien entendre, et en soupirant, reprit tout le matériel et se dirigea vers la sortie.
Il ne comptait pas faire ça ? Ça n’était pas vrai ? Il n’allait pas le faire ? Elle l’arrêta. Et ce ne fut que quand elle accepta qu’il lui soigne les bras qu’il reposa le matériel de peinture. Il lui banda les avant-bras et la libéra. Aussitôt, comme une bête qu’on aurait retenue, elle se précipita sur son matériel, et les saisit. Au loin, elle crut entendre l’homme lui dire que si elle ne mangeait pas correctement, elle serait punie. Elle évacua sa remarque en lui promettant de manger à sa faim, mais elle oublia cette promesse à l’instant même où elle sortit de sa bouche.
Il y avait plus important, pour l’heure.


Sur la base des informations que lui avait données Tesla Eilun, Henrique passa trois jours à essayer de se renseigner sur d’éventuelles personnes retenues contre leur gré dans l’enceinte du palais, et non de la simple geôle. Il ne parvint qu’à obtenir des informations évasives, mais finit par apprendre quelque chose, grâce à un serviteur. Il disait que parmi ceux qui avaient à aller servir la famille royale directement dans ses appartements, ce n’était un secret pour personne que des passages dissimulés dans les murs ou dans les meubles contenaient des pièces cachées. Ça ne datait pas d’hier.
Henrique tenta le coup de demander directement si on pouvait y retenir quelqu’un. On lui répondit qu’il paraissait qu’il y a un siècle de cela, le roi qui avait fait construire ce palais avait utilisé ces pièces secrètes comme des prisons pour ses opposants politiques les plus directs. Ces derniers, ainsi, disparaissaient sans que personne ne soit au courant. Mais ça n’était qu’une rumeur de couloir.

Une rumeur qu’il se hâta d’aller transmettre au capitaine Théoden, dans les appartements dont celui-ci disposait au palais. Hurlant presque à son visage, il lui posa cette simple question.

« Et maintenant, où est-elle ? »
Mer 2 Déc 2015 - 23:35
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Capitaine Theoden
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Théoden esquivait plus qu'il ne parait les coups furieux du garde face à lui. Dans les passages étroits du palais, la lourde hallebarde du soldat peinait à se frayer un chemin avec efficacité jusqu'au Capitaine. Heurtant les murs, renversant des statues, l'arme avait pourtant l'avantage d'empêcher Théoden de monter à l'assaut. Avec une hampe si longue, il était évident qu'il serait repoussé avant même que son sabre n'ai pu porter. Alors il reculait, encore et encore, en attendant que la fatigue ne gagne l'Oréen déjà en sueur sous l'effort.
Très vite, les deux combattants eurent rejoins une cour intérieure. Il y avait au centre de cette petite place pavé paisible une fontaine à l'eau glaciale, et quelques arbres fins.  
C'était une occasion parfaite d'en finir !
Le garde se tordait en tous sens pour offrir un maximum d'allonge à sa lourde lame qui, déjà, fendait les airs avec plus de lenteur. Un coup après l'autre, il perdait en précision. Lorsque une chance s'offrit à lui, Théoden vint à rouler en arrière sur le pavé.
Arrivant sous les branches basses d'un arbre, il vit le soldat accuser la surprise de son esquive en se jetant en avant, l'arme lancée à bout de bras loin au dessus de sa tête. Il y eut un rugissement, plus sonore que le voulu le Capitaine, puis le coup tomba. Et comme prévu, la lame de la longue hallebarde se prit dans les branchages noueux de l'arbre.

Coincé, l'Oréen jura et abandonna là son arme. Mais il était trop tard, car déjà Théoden avait bondit en avant sous sa garde et le frappait en plein abdomen.
Mais la lame courbe de son sabre, même enflammée et acérée, n'était pas faite pour l'estoc. Et le garde avait pour lui une épaisse cuirasse d'acier. Le coup du marin vint glisser contre son flanc, et riper sous le bras de l'Oréen qui s'effaça sur le côté pour s'éviter une fâcheuse brûlure ou l'amputation de son membre.

A son tour, Théoden se vit en difficulté. Mais désarmé, son adversaire ne put que se saisir de lui à la gorge et lui expédier un direct en pleine tempe. Sonné, le marin accusa le choc en frappant à l'aveugle, plus bas. Là, il parvint à entailler l'homme plus profondément à la cuisse et de ce fait, à se libérer.
Les deux adversaires reculèrent, face à face. Dans le froid ils haletaient tous deux avec bruit, jetant d'épaisses volutes de fumée dans les airs. Théoden essuya son nez brisé d'un revers de manche tandis que le garde en face se servait d'un pan de sa tunique déchiré pour se bricoler un bandage.

L'on entendit des cris, depuis l'intérieur du palais. D'autres hommes avaient entendu le fracas du combat et accouraient déjà pour voir ce qu'il se passait. Par une porte derrière Théoden, quatre autres hallebardiers sortirent. D'après leur tenue, il était évident qu'ils étaient tout aussi capable que celui que le Capitaine affrontait déjà.

Ca s'annonçait mal pour Théoden qui abandonna sur place son lourd manteau pour s'offrir plus de légèreté. L'Oréen devant lui porta sa main à son fourreau pour se saisir de son épée en clamant à ses comparses que la vie du traître lui appartenait.
Mais sa main ne parvint pas à emporter son arme hors de son fourreau. Elle semblée coincée !
Théoden sourit, reprennant sa garde.

"-Le froid, il gèle parfois une épée dans son fourreau."

La révélation fut accueillit avec surprise par le garde qui baissa un instant les yeux sur son arme figée et ne put du coup rien faire pour s'éviter l'estoc surprise de Théoden en plein gorge. Le sabre se fraya cette fois là un chemin avec aisance à travers le gambison et la côte du garde qui n'eût sans doute même pas le temps de regretter d'avoir abandonné le port du gorgerin.
Il tomba à genoux, gargouillant avec difficulté et leva vers Théoden des yeux pleins de surprise. Le Capitaine, comme pour lui interdir ce dernier regard l'envoya à plat dos sur le sol en le poussant de sa botte.

Sa lame libérée, le Capitaine se retourna et se vit menacé d'un quatuor de hallebardes acérées. Loin de perdre son calme, il prit le partit de reculer de quelques pas lents, face aux soldats du palais qui venaient d'assister à la mort de leur Capitaine.
L'un d'eux jeta un vif coup d'estoc à Théoden, profitant de l'allonge de son arme pour ne pas quitter les flancs de ses camarades.
Théoden dévia de son mieux le coup et tenta de frapper de son sabre sur un des hommes sur les flancs, en se jetant sur le côté.
Mais son sabre fut rabattu contre le pavé par l'un des hallebardiers. Le Capitaine roula sur le flanc, et se releva en vitesse, jurant sa frustration. Acculé dos à un mur, Théoden abaissa son arme comme pour inviter l'un des hommes à le frapper.

Heureusement, il y en eut un pour mordre à l’hameçon. Le Capitaine vit une lame se lever et s'abattre sur lui. Il glissa sur le côté, le tranchant de l'arme mordant avec un crissement sinistre la pierre du mur. Mais quand elle buta contre le sol, la hallebarde exposa son propriétaire qui, courbé, trouva d'autant plus de difficulté à la relever que Théoden avait posé son pieds sur la hampe et s'en servait désormais comme appuit pour sa contre attaque. De sa main gauche, le Capitaine se saisit du mousquet à la ceinture du soldat face à lui, profitant du fait qu'il était courbé en avant et vint abattre dans le même geste l'homme à sa gauche.
Enfin, il ne sut pas si l'homme périt sur le coup, en tout cas il s'effondra en arrière, ce qui permit à Théoden de placer sa botte favorite. D'une impulsion sur son pied d'appuie, il vint bondir au dessus du soldat courbé devant lui et roula contre son dos.
Là, se trouvant sur les arrières des soldats restant, il vint frapper sa victime d'une taille ample sous les cuisses. Ainsi, l'homme ne put que s'effondrer en arrière, ses jambes ne pouvant plus le porter.
Il se passa alors quelque chose de tout à fait surprenant. La bague d'argent au doigt de Théoden s'embrasa, saisie d'un éclat blanc vif.

Et soudainement, comme par magie, il sembla au Capitaine que son sabre ne pesait plus rien. Alors, avant même que sa victime se soit effondrée, il avait pu redresser sa lame et, tout en s'effaçant face à la chute du garde, frapper en un éclair de temps son homme en plein visage ! La lame cette fois, au lieu d'être déviée, enfonça le casque du hallebardier et le mordit entre les yeux et la bouche en transperçant son crâne de part en part tant et si bien que l'on vit la pointe du sabre heurter le pavé avant même que l'Oréen se soit effondré !
De stupeur, les hommes restant reculèrent un instant avant de remonter à l'assaut. Mais cette fois, Théoden se redressa et ne recula pas d'un pouce. Les coups de hallebarde s'abattirent sur lui, vifs et violent, mais il parat, dévia et esquiva tour à tour sans montrer le moindre signe de faible. Finalement, sentant l'urgence de la situation, le Capitaine se tordit sur sa droite, laissant un coup glisser loin au dessus de son épaule gauche. De son sabre, il repoussa la hampe de l'arme loin de lui et vint frapper le garde à sa jambe avant d'un coup de tibia violent. L'homme fut précipité en avant à genoux et n'eût pas le temps de réagir que déjà son visage rencontrait le pommeau du mousquet que Théoden maniait de son autre main.

A son tour aplatit sur le dos, le troisième garde ne put guère s'éviter un second coup en pleine face. Le crâne écrasé sous la botte du Capitaine, le soldat ne bougea plus et sombra dans un coma dont il ne se réveillerait sans doute jamais.

Mais Théoden n'eût pas le luxe de respirer car déjà le dernier hallebardier se fendait d'un violent balayage horizontal. Le marin ne put que monter sa garde, soutenant son sabre de ses deux mains pour encaisser le mieux possible.
Mais le coup fut si violent que Théoden fut de nouveau rejeté contre le mur. Il se brisa peut être une côte sur le coup, nul ne le su. Même lui n'eut pas tellement le luxe de vérifier. Face contre terre, il avait lâché mousquet et sabre. Se sentant victorieux, l'Oréen lâcha sa hallebarde et dégaina lentement son épée qui elle ne lui opposa aucune résistance.

"-Je vais te crever, traître !"

Mais le temps de prononcer ces mots, Théoden avait pu reprendre ses esprits et bondir sur le lourd garde pour le plaquer au sol. La surprise suffit au marin pour l'emporter car déjà, il se mettait à cheval sur son adversaire et commençait à matraquer son visage avec son mousquet fraîchement récupéré dans la neige. Au début, l'Oréen sembla chercher à se défendre. Mais à mesure que les os de son crâne craquaient sous les coups furieux du Capitaine, son corps se faisait de plus en plus dur à commander. Finalement, ses bras retombèrent et tout son corps fut prit de spasme. Théoden comprit qu'il était mort quand, en levant une nouvelle fois son mousquet, il vit sa crosse complète rester prise dans la bouillie sanglante et difforme qu'était devenu le visage de l'Oréen.
Le temps de se relever et de récupérer son sabre, Théoden vit arriver devant lui la silhouette familière d'un Elfe Blanc.

"-Capitaine, est-ce que tout va bien ?" demanda-t-il en abaissant sa capuche.

L'intéressé essuya son visage de sa manche et s'avança de son mieux en détaillant le visage de celui qui apparaissait être Belaner. Il comprit alors vite qu'il avait été le seul à avoir été repéré. Apparemment tous les autres groupes avaient réussit à s'infiltrer sans alerter qui que ce soit.

"-Comment cela se présente-t-il pour les autres, Belaner ?" demanda Théoden en achevant de bander sommairement sa poitrine qui le faisait atrocement souffrir.

L'Elfe lui fit le récit de comment ses cinq autres compagnons, en deux groupes avaient réussit à entrer par les autres entrées. Bien entendu, ils commençaient déjà à fouiller l'aile Royale du pavillon, en quête d'un quelconque passage dérobé menant à la cache de Nynaeve. Comme la quête s'annonçait longue, il semblait bien heureux finalement que Théoden se soit fait repérer. Car les gardes venaient maintenant dans leur direction.

"-Mon ami, il semble que nous allions devoir affronter toute la garde de ce foutu palais à nous deux !" rit le Capitaine.

Mais Belaner ne semblait pas l'entendre de cette oreille. Il fit plutôt rengainer Théoden et l'entraîna par une porte à demi ouverte dans un coin sombre depuis lequel ils purent observer la cour où le combat s'était déroulé. Bien sûr, le jeune homme fut frustré, prit par l'allégresse du combat. Mais l'elfe fit taire ses protestations d'un signe en lui indiquant que du monde approchait.
Surgirent alors pas moins d'une quinzaine de soldats vêtus bien étrangement. Tous investirent la cour où les corps chauds des gardes commençaient déjà à répandre d'épaisses volutes de sang pourpre sur les pavés. L'un d'eux, somme toute leur chef examina la scène avec circonspection puis décida d'entraîner son groupe plus avant dans une autre direction.
Théoden consulta son compagnon du regard avec un sourire fin et tous deux quittèrent leur abris après un moment.  Il semblait que cette diversion leur offrirait tout juste assez de temps pour trouver la princesse et déguerpir.

Belaner suivit le Capitaine, lorsque tous deux s'engoufrèrent dans l'aile royale du palais. Là, ils eurent tôt fait de retrouver deux autres Elfes Blanc qui sortaient d'une chambre. Tous les quatre se regardèrent un instant puis se séparèrent et commencèrent à fouiller les pièces une par une. Théoden se saisit de l'occasion pour tirer de ses frusques son compas et le consulter. Mais hélas, dans ce lieu où une étrange magie opérait, l'aiguille ne parvint pas à se fixer et le Capitaine se trouva bredouille.
Rapidement, on commença à entendre des cris étouffés à tous les étages de l'aile. C'étaient là les plus hauts fonctionnaires de l'état qui étaient un à un passés par le fil de l'épée.

Après une dizaine de minutes de recherche intense, Théoden mit le pied dans ce qui ressemblait à des appartements Royaux. Là, et ce malgré le fait que toutes les fenêtres étaient closes, le marin vit avec une certaine stupeur les flammes de son sabre danser dans une direction particulière, comme soufflées par un courant d'air. Avec un mince sourire sur le visage, le Capitaine comprit la ruse et chercha à remonter le souffle. Il lui fallut de longs instants d'une concentration terrible pour mettre le nez sur une fente infime dans un mur.

Logée derrière une bibliothèque, l'ouverture indiquait qu'un passage se trouvait derrière le meuble. Alors, Théoden siffla un coup pour prévenir ses compagnons dans les chambres voisines et rengaina son sabre afin de pouvoir tirer sur chaque livre, petit paquet par petit paquet. Finalement, le claquement significatif d'une serrure se fit entendre et la bibliothèque se délogea de son mur. Le temps d'ouvrir l'accès, Belaner avait déjà accouru avec d'autres pour couvrir les arrières du marin qui avait dégainé de nouveau.

Arme en avant, Théoden se glissa dans un souterrain humide et silencieux. Ses pas, le plus feutrés possibles trouvèrent un semblant d'escalier quelque peu grossier. Quel silence de mort régnait là... Il était difficile de voir à plus loin que quelques pas aussi, il fallut au Capitaine beaucoup de prudence pour s'éviter une éventuelle attaque surprise.
Il parcouru ainsi quelques mètres dans un noir quasi complet, agitant avec lenteur son sabre enflammé devant lui pour s'éclairer.

Finalement, l'on entendit le râle faible d'un souffle dans un coin. Qu'était-ce donc là ? Une bête ? Un prisonnier ? La princesse ? Théoden fronça les sourcils et s'avança encore, une main plaquée contre le mur derrière lui pour s'orienter. A force de tatonner, il parvint à mettre la main sur un porte-torche et l'alluma sans attendre.

Il fallut un moment pour que les flammes de la toche dissipe les ténèbres autours d'eux. Avec une certaine nervosité, Théoden attendit à quelques pas de l'endroit où il semblait entendre le souffle de la chose retenu dans ces geôles. D'un rapide coup d'oeil sur ses talons, le Capitaine ne vit personne. Les Elfes Blancs étaient peut être partis se charger d'une menace ou couvraient simplement l'entrée.
Il s'occuperait de cette question une autre fois. Déjà, une masse difforme derrière des barreaux se détailla. Théoden finit par écarquiller les yeux, stupéfait et parfaitement horrifié.
Elle était là...

"-Princesse ?!"
Mar 22 Déc 2015 - 22:07
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Dargor
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Henrique Rossi jetait fréquemment des regards angoissés derrière lui, vérifiant qu’ils n’étaient pas suivis. Le capitaine Théoden lui avait garanti qu’il n’avait rien à craindre, mais tout de même, les recherches qu’il avait pu mener pour lui faisaient craindre une trahison. N’importe qui dans ce palais aurait pu vendre le fait qu’il avait fouiné auprès des souverains. Et dans ce cas, il aurait à craindre les assassins d’Asarith. Devant lui, Fiora chevauchait sans rien dire. Il se perdait dans la contemplation de sa chevelure blonde quand il n’était pas occupé à se faire du souci pour leur embarquement, pour savoir s’ils avaient été suivis ou non…
Ils avaient fui Oro après la fin de sa « mission ». Le capitaine Théoden s’était avéré être un homme de parole, et il avait aussitôt pu retrouver Fiora qui se portait très bien. Elle avait été heureuse de le retrouver, et il avait eu du mal à la lâcher pendant les premières minutes, savourant le contact d’une peau qu’il avait cru à jamais perdue, et la douceur de cheveux soyeux qu’il avait cru ne jamais revoir. Mais surtout, le son de la voix de sa femme l’avait plongé dans un état de bien-être qu’il avait savouré comme jamais. Il avait par la suite, alors qu’il préparait une nouvelle fois leur fuite, et cette fois en suivant les instructions de Fiora qui avait décidément son idée sur ce qu’il fallait absolument prendre et laisser, révélé la nature de la mission qu’il avait reçue à sa femme. Celle-ci avait aussitôt exigé que l’on retourne voir le capitaine Théoden.
Le trouver fut chose facile, c’était le convaincre d’accepter qui ne fut pas facile. Fiora, ayant appris qu’il avait secouru une princesse, souhaitait peindre le portrait de cette dernière. Henrique réalisait depuis le début le caractère absurde de la requête de son épouse, mais il n’avait pas le cœur à lui refuser ce caprice, pas le cœur de s’opposer à elle alors qu’il venait de la retrouver. Il était déjà bien content d’avoir réussi à la convaincre d’abandonner son atelier derrière elle. L’argument des assassins avaient semblé la faire céder. Le capitaine Théoden lui avait bien sûr fait le reproche de la révélation trop facile qu’il avait commise de la nature de sa mission, ce à quoi Henrique avait rétorqué que quand on aime une femme, ce n’était pas le genre de choses qu’on pouvait lui cacher. Le capitaine avait semblé considérer la demande de Fiora quelques instants, puis avait choisi d’accepter.

« Ne serait-ce que pour vous permettre de fuir plus aisément les assassins à notre bord, avait-il précisé. »

Il n’avait pas été question de la peinture. Henrique avait accepté, de mauvaise grâce cette fois, la demande de ce Bolch qui avait réclamé des chevaux pour fuir. Voilà pourquoi seuls Pluie d’Etoiles et Bill avaient quitté Garay. Pluie d’Etoiles portant Henrique, et Bill portant Fiora et leurs différents bagages, principalement des vêtements de rechange et du matériel de peinture pour ladite épouse, Henrique n’ayant emporté que le strict minimum pour lui-même. Pâquerette et Flo restaient à Garay, attendant que le capitaine Théoden et ses alliés en aient usage.

« Tu … Tu … Per… Perso… Personn… Personne ne… Ne nous… Ne nous suit ? demanda Fiora, le voyant ainsi retourné.
-Personne, non. Reste à espérer qu’aucun message ne soit arrivé avant nous à Karak-Tur. Et qu’aucun assassin ne nous attende dans ses rues. Et que le second du capitaine Théoden ne nous accuse pas d’avoir fabriqué un faux quand il lira la lettre par laquelle le capitaine nous autorise à grimper à bord.
-Tu … Tu … Tu cr… Tu crois… Tu crois que … Que… Que la princesse … Que la princesse … Que la princesse a… A… A… Acceptera ? demanda-t-elle ensuite. »

Il avait deviné sa question avant qu’elle ne finisse de bégayer, mais n’avait pas souhaité l’interrompre. La voix de Fiora était magnifique, n’en déplaise à tout le reste du monde, et il prenait plaisir à l’entendre parler. Il n’interrompait jamais sa femme. Jamais. Et il savait être le seul au monde à faire cela.

« Elle acceptera sans nul doute, dit-il. Qui refuserait une offre si généreuse ? »

En fait, il n’en avait aucune idée. Mais il avait appris, lors de sa vie conjugale, et plusieurs soldats mariés lui avaient fait la même réflexion, que lorsqu’on avait une épouse et que qui que ce soit faisait mine de la critique, il fallait toujours prendre sa défense, même si sur le fond on était d’accord avec la critique formulée.

---

Dizzalyr était désarmée quand les premiers bruits de combats se firent entendre dans les couloirs. Elle discutait, une longue discussion, pénible et ennuyeuse à son avis, avec les dignitaires humains qui lui expliquaient que les problèmes religieux allaient croissant dans le nord de la région d’Oro, où la frontière avec le royaume des orcs posait de très sérieux problèmes de troubles guerriers. La conséquent, outre le gouffre économique que constituait à leur avis le fait d’entretenir des troupes régulières là-bas, troupes jugées assez inefficaces par la population pour que des milices privées commencent à circuler à racketter les villageois et les villes peu défendues, sans compter leur inefficacité à elles aussi, les gens abandonnaient de plus en plus Filyon et Elye pour se tourner vers Prarag.

« Vous devez comprendre que cela pose de très sérieux problèmes, expliquait le haut dignitaire. Tant que la couronne ne se penchera pas sur la question de renforcer la région afin de s’assurer que les villageois ne voient plus de violence… »

C’est à cet instant que la clameur dans les couloirs alentours se fit plus forte. Dizzalyr l’avait déjà vaguement entendue, mais elle n’avait pas réalisé qu’il s’agissait d’autre chose que d’une dispute. Cette fois, sa longue expérience guerrière ne la trahit pas. Il ne pouvait s’agir de rien d’autre qu’un combat. Aussi profondément dans le palais ! Elle ne prit pas même la peine de s’excuser auprès des ministres qui étaient présents au conseil, et sortit en trombe de la salle. A cet endroit du palais, toutes les fenêtres avaient été murées afin qu’aucun rayon de soleil ne puisse venir brûler sa peau délicate. Aussi, c’est dans un jeu d’ombres et de lumières projetées par les torches qu’elle put voir un groupe en train de massacrer ses hauts fonctionnaires. Derrière elle, alors qu’elle s’avançait vers eux, des cris de peur retentirent. Il s’agissait des autres salles, d’où sortaient des gens rendus curieux par la clameur. Elle se retourna vers eux, un rictus déformant son visage.

« Quittez cette aile du palais, dit-elle. Prenez la sortie dérobée. Je me charge de finir le travail de ces tueurs si je trouve la moindre personne encore ici quand j’en aurai terminé. »

Elle n’eut pas besoin de le répéter deux fois. Tout le monde au palais savait que la reine tenait ses promesses quand il s’agissait de blesser ou de tuer des personnes. Elle s’avança vers le groupe. Ils étaient quatre. Quatre et ils avaient réussi à pénétrer le palais ? Il ne faisait à son avis aucun doute qu’ils avaient bénéficiés de complice. Elle saisit une torche sur un mur. Pas nécessairement faite pour le combat, mais une arme restait une arme. Elle sourit. La vampire qu’elle était devrait aisément gagner ce combat. Elle fit craquer les articulations de ses mains, avançant d’un pas décidé. Le couloir était large, cela leur permettrait d’attaquer à plusieurs de front et de l’encercler. Tant mieux. Elle n’avait pas que ça à faire que de livrer plusieurs duels successifs.
Le combat s’engagea ainsi. Trois d’entre eux maniaient des lames, et le troisième une hallebarde. Ce dernier était trop lent pour la frapper, aussi choisit-elle de l’ignorer pour l’instant. Les trois autres, en revanche, étaient incroyablement rapides. C’est lorsqu’elle fit plus attention à qui ils étaient qu’elle comprit. Des elfes. Le quatrième devait être un humain, ce qui expliquait sa lenteur. Elle avait beau être une vampire, et donc plus rapide que les elfes normaux, et plus forte, ces trois là savaient ce qu’ils faisaient. Ce combat serait bien plus dur que prévu, s’il fallait lui demander son opinion. Elle pensait cependant qu’elle le gagnerait malgré tout. Ce serait juste … Long ?
Ce fut Arphénise qui interrompit le cours des choses. Dizzalyr n’approuvait pas cette intervention, mais l’enfant était une bonne nécromancienne, et dans l’absolu, elle avait fait le bon choix en décidant de se mêler de cette affaire. Les elfes étaient des guerriers, et non des mages. Ils étaient entrainés à résister à la magie, comme tous les guerriers elfiques, mais que pouvaient-ils faire face à une magicienne qui les prenait par surprise, avec son millénaire d’expérience ? L’un d’eux s’effondra ainsi, mettant une pause dans le combat. Son visage ne portait pourtant la trace d’aucune blessure, voilà qui était donc étrange. En se tournant, tous purent voir Arphénise, qui achevait le geste d’un baiser envoyé de la main. L’un des elfes bondit pour s’élancer vers elle, mais à peine avait-il fait un pas que le corps de son ami se releva pour le frapper. Le zombie était bien sûr trop lent pour faire du mal, mais il avait le mérite d’exister assez pour fournir une protection suffisante. Suffisamment de temps pour la magicienne pour frapper une nouvelle fois. L’elfe, cette fois préparé, put résister à son attaque mentale, mais la concentration que cela exigea de lui le força à adopter le rythme du mort-vivant qu’il combattait.
Dizzalyr le considéra comme hors de combat et se tourna vers ses propres adversaires. Ils n’étaient désormais plus que deux. Des proies faciles à ses yeux. Cinq millénaires de vie et sa nature vampirique lui fournirent l’ascendant dans ce combat. C’est avec les crocs qu’elle arracha littéralement la pomme d’Adam de l’elfe qui lui faisait face, avec un dédain total pour la lame qu’il parvint à enfoncer dans son épaule. La bouche ainsi ensanglantée, elle se tourna vers l’humain. Un brun, bel homme selon les critères de sa race. Sur son visage se lisait la résolution d’un homme qui savait ce qu’il l’attendait. Il était cependant doué, pour les critères de sa race. Elle eut besoin d’utiliser une feinte pour passer sa garde. Et plus de sang macula la robe de la reine et sa gorge.
Derrière elle, elle entendit l’elfe glapir de plaisir et de douleur à la fois. Elle sourit. Les caresses de Laniph. La nécromancienne qu’avait trouvé Asarith connaissait bien ses classiques. Laniph était une sorcière elfe noire durant la guerre de la déchirure, connue pour ses jeux malsains. Un nécromancien particulièrement doué pouvait aisément la faire revenir momentanément, pour qu’elle s’occupe du nouvel amant choisi pour elle. Pendant ce temps, elle entreprit d’achever l’humain en lui arrachant littéralement la tête des épaules. Il fallut forcer un peu, mais elle en eut finalement la force. Et le sang qui gicla acheva d’inonder son visage et ses vêtements.
Cela ne sentait-il pas le brûlé d’ailleurs ? Elle se tourna. Bien sûr. Elle avait, durant le combat, laissé tomber la torche, qui s’était fait un honneur de mettre le feu au tapis, feu qui se propageait déjà. Mais il fallait tout d’abord régler le souci de l’agression.

« Qui… commença Arphénise.
-Qui veux-tu que ce soit ? répondit Dizzalyr d’un ton énervé. Asarith a fait prisonnier la princesse des elfes blancs, et des elfes viennent nous tuer ici ?
-Elle doit déjà être libérée, en ce cas, non ? demanda la jeune vampire.
-Sans doute. Mais il y a plus important ! Daecith ! »

Maudissant les elfes, elle se précipita vers l’escalier qui menait à l’étage inférieur, les appartements royaux. Son fils adoptif s’y trouvait, avec ses bonniches.  Il n’était pas en lui-même précieux à ses yeux, mais il l’était aux yeux d’Asarith. Et cela était plus important que tout. Derrière elle, Arphénise lui emboita le pas, plus lentement, sachant très bien qu’elle arriverait de toute façon à temps.

---

Nynaeve avait très rapidement cessé de compter les jours dans lesquels elle avait été enfermée dans cette cellule humide et sans lumière. Il y avait eu une embuscade quand ils avaient pénétré les terres d’Oro. Son oncle n’avait pas perdu son temps, il avait soigneusement préparé son arrivée. Le brave Korien n’avait pas eu l’ombre d’une chance, un carreau d’arbalète dans sa poitrine ayant donné le signal de l’assaut. Les humains qui l’accompagnaient n’avait pas opposé de résistance digne de ce nom, et elle-même avait eu l’humiliation d’être vaincue en quelques passes d’armes par une épéiste elfe noire aux cheveux blancs. Cette dernière avait triché. Elle avait eu le premier sang. Rien de grave normalement, une simple entaille au bras. Mais sa lame était empoisonnée. La broche d’or aurait dû la protéger de cela. Elle aurait dû. Elle ne l’avait pas fait, car la guerrière la lui avait arrachée peu avant. Et elle avait sombré dans un sommeil dont elle ne s’était réveillée que maintenant. La broche d’or, ses armes, son armure, tout avait disparu.
Et il y avait son oncle. Il était fréquemment passé la voir. Lui résister aurait été inutile. Elle lui avait donc cédé, à tous ses désirs, à toutes les humiliations qu’il lui avait fait subir. Elle avait cédé tout, sauf sa fierté. Toujours, elle l’avait regardé dans les yeux. Alors, il avait adopté une autre stratégie. Il lui avait parlé. Il lui avait décrit le continent. Une place sombre, corrompue par le mal de tous bords. Les elfes sylvains ? Ils étaient plus proches de lui que de sa mère. Elle avait au début rejeté ses observations, mais il avait su trouver les failles dans son raisonnement. Peu à peu, il lui avait dépeint un monde noir, et elle était tombée dans son piège.
La princesse elfe blanche pensait désormais le continent corrompu. Alors, sachant qu’elle prendrait sa parole au sérieux, Asarith lui avait décrit ce qu’il ferait quand il trouverait sa mère. Il avait été capable, par un jeu d’essai et de devinettes, de lui faire dire à quoi ressemblait la vallée des elfes blancs. Et tout ce qu’elle venait à dire, il lui décrivait en détail la façon dont il le détruirait, réservant toute ses capacités d’imagination pour la mort lente de sa mère. Et il la remerciait à chaque fois en partant. Car il lui ferait dire comment trouver sa mère. Et Nynaeve s’était elle-même convaincue qu’elle cèderait un jour.
Il s’était ensuite attardé, avant son départ, à détruire le lien qui l’unissait à Malene. Il commença à lui décrire sa mère, comment elle était enfant. Il lui dépeignit une enfant gâtée, capricieuse, qui voulait tout pour elle. Nynaeve avait su que cela était faux, pendant un temps. Mais par de subtiles discussions, par un jeu de questions, de réponses, il avait su lui faire dire ce qu’elle reprochait à sa mère. Et il avait joué avec ces reproches, les amplifiant, pour lui décrire une femme horrible. Il n’avait pas réussi à briser le lien qui unissait la princesse à la reine des elfes blancs, mais il avait planté les germes du doute dans l’esprit de la jeune femme. Et il s’en était allé, fier de cette œuvre, la laissant cultiver elle-même ces germes.
Pouvait-elle lui faire confiance ? Sa mère était-elle la femme bonne et sage qu’elle avait toujours vue ? Nynaeve n’en savait désormais plus rien. L’élu de Simialle avait dû être investi par l’esprit de sa déesse en ces jours, en était-elle venue à penser, car tout ce qu’il avait dit, elle le croyait désormais. Et elle en venait à s’interroger. Sa conception du bien et du mal, sa sérénité quant au fait d’être dans le bon camp, tout cela était désormais confus. Elle n’était plus sûre de rien.

La vampire vint ensuite à plusieurs reprises la visiter. Chaque fois, elle but son sang. Nynaeve ne s’en souciait jamais. La souffrance que cela lui faisait ressentir n’était rien comparée au trouble qui encombrait son esprit. Alors, lorsque le capitaine Théoden lui demanda si cela était bien elle, ce fut sans joie qu’elle se leva et s’avança. Prenant soin de ne regarder que son visage et non son corps nu, le capitaine ouvrit la porte de sa cellule et lui passa une cape sur les épaules. Elle le suivit d’un pas lent, regardant le sol devant elle, sans dire un mot. La liberté. Enfin. Elle l’avait souhaitée, après tout, non ? Mais d’un autre côté, était-elle vraiment libre dorénavant ? Son bourreau n’avait-il pas raison ? Elle ne fit pas part de ces pensées à Théoden. Elle aurait pu lui dire pour Daecith, et lui permettre de tuer le fils d’Asarith. Elle aurait pu lui parler de la Broche d’Or. Mais rien de tout cela ne franchit ses lèvres. Et si elle livrait ces artefacts à une force qui dissimulait sa nature ? Asarith, à tout le moins, avait le mérite de revendiquer son côté destructeur. Mais sa mère n’avait jamais aimé que la beauté. Asarith prétendait détruire cette beauté et cette poésie. Il l’avait battue et violée après tout. Mais il n’avait pas un seul instant caché sa nature. Se pouvait-il que sa mère soit secrètement pire encore ? Lorsqu’elle fut entourée d’elfes blancs, au sortir d’un couloir, elle ne parla pas plus. Ils respectèrent son silence. Et tous commencèrent à s’éloigner des appartements royaux, alertés par le calme qui régnait à l’étage, d’après ce que la princesse comprenait. C’est alors qu’elle arriva.

---

La tête de l’humain dans une main, l’épée d’un elfe mort dans l’autre, la maculée de sang des pieds à la tête, Dizzalyr contempla l’étendue du désastre. Cinq gardes elfes noirs morts, et surtout, la princesse qu’on emmenait.

« Capitaine, dit-elle en ricanant, votre intrusion ici sera la cause de votre ruine… »

Tous, qui étaient partis pour quitter le palais, se tournèrent vers elle.

---

Au bas du palais, Tesla Eilun contemplait l’incendie qui avait démarré et qui désormais se propageait. De nombreux gardes, entendant parler de combats et de bruits de combats, courraient vers l’aile royale du palais. Elle se posta devant cette dernière, et faisant appel à toutes ses forces, fit appel à un blizzard glacé. Dans ce dernier, et dans la confusion, les hommes d’Oro seraient à tout le moins retardés. Restait à espérer que le capitaine se presse. Elle ne tiendrait pas indéfiniment la porte contre une armée. Il connaissait l’existence des portes dérobées, elle en était sûre. Mais mieux valait éviter qu’elles ne soient surveillées elle aussi.

« Capitaine, faites vite, murmura-t-elle. »

Eut-elle eu le temps de consulter les fils du destin qu’elle n’aurait peut-être pas osé le faire.
Mar 29 Déc 2015 - 0:01
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Capitaine Theoden
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La journée passe, les blancs perdent peu des leurs. Mais chacun est un ami ou un parent cher. Le sang de Théoden ne fait qu'un tour, gonflant immédiatement ses veines. La rage et l'effondrement poussèrent son coeur jusqu'au bout de ses lèvres et des flots de larmes sur les pentes raides de ses jours. Un hurlement sordide passa ses lèvres, alors qu'il se saisissait de son sabre. Et devant la tête arrachée de son frère, le Capitaine rompit les rangs,  fous de chagrin, ivre de sang.
Il fallut deux Elfes pour le retenir en arrière, loin de la sinistre silhouette de Dizzalyr qui contemplait son oeuvre avec le ricanement fous des monstres sanguinaires de ce temps.
Belaner le premier, tous partent dans l'autre sens. Il était fous d'espérer passer au travers de la Reine d'Oro même à quatre. Il leur fallait une nouvelle sortie.
Autours d'eux, il semblait que les flammes commençaient à rogner les murs du couloirs. A travers les volutes ardentes Théoden aperçoit encore longtemps l'ombre de Dizzalyr et le visage figé de Bolch au bout de son bras. Très vite, le plafond commença à se morceler et tomber par pans entiers sur les fugitifs qui eurent tôt fait de s'enrouler sous leurs capes.
Les cris du Capitaine devant la perte de son frère sont plus effrayant pour les elfes que le bruit assourdissant des cors, hors du palais.
C'est au détours d'un couloir que Belaner aperçut enfin la grande porte du palais. Autours de lui qui avait prit les rennes, c'était maintenant tout l'édifice qui s'effondrait. Mais les portes, pourtant grandes ouvertes sur l'extérieur leur furent malheureusement impossible à traverser. Car l'espace d'un instant, la silhouette d'une Tesla exténuée s'effondra sur le parvis et la tornade de vent glacé qui jusqu'alors obstruait tout accès à la cour extérieure s'éteignit avec elle.
Avec horreur, Belaner retint alors en arrière son groupe et les entraîna à travers le grand hall dans l'aile opposée du palais afin d'échapper à ce qui s'apparentait être une déferlante de gardes humains et Elfes Noirs. Ce fut Théoden, dernier des siens, qui vit le plafond entier de la grande salle venir s'effondrer avec fracas sur les hommes en dessous et retenir Dizzalyr loin d'eux.
Le souffle du naufrage fut tel que le couloir tout entier dans lequel Belaner avait entraîné la princesse et ses trois sauveurs fut balayé par un nuage épais de gravas et de fumée.
Rejeté contre une commode, le Capitaine égara son tricorne et tomba à la renverse. Sonné un instant, il ne se releva pourtant que plus conscient de son naufrage et déterminé à mener tout le reste de l'Empire d'Oro à sa ruine. D'un revers de manche, il chassa ses dernières larmes et vint ramasser son sabre pour rattraper son groupe qui s'engouffrait déjà dans une pièce après l'effondrement d'un pan du plafond en travers du couloir.
Pressant le pas, Théoden courut aussi vite que ses jambes le purent. Il s'efforça d'éviter les chutes de gravas au dessus de sa tête. Mais hélas, le temps de rejoindre le salon qu'avait traversé Belaner, le Capitaine se trouva nez à nez avec un véritable mur de flammes.
Théoden revint donc sur ses pas, lentement et regarda autours de lui avec horreur. Il semblait que les flammes ne s'arrêteraient jamais de croître, de grandir, et de se nourrir de ces murs. Cerclé par ce grand monstre infernal, l'homme préféra se livrer à un fol espoir. Il prit son élan et courut droit vers le fond du couloir à demi effondré qu'un rideau de feu obstruait.
Le temps d'opposer la manche de son blanc manteau à la morsure de ces spectres infernaux, Théoden se trouva propulsé contre la cloison d'un couloir perpendiculaire qu'une patrouille arpentait.
Tout à leur surprise de voir surgir ainsi un être nimbé de flammes, les gardes du palais qu'un Elfe Noir guidait se trouvèrent désarmé. Les volutes de son manteau épais manteau traînant des flammèches par dizaine, Théoden engagea promptement le combat avec ce qui lui apparaissait être la plus belle occasion de venger son frère. Et nul hallebarde, nul bouclier, nul armure ne put cette fois retenir ses coups de sabre acharnés.
Dans un couloir droit sans issue aucune, le Capitaine découpa un à un chaque humain qui se présenta à lui sans la moindre considération pour sa défense personnelle. Par bottes successives, il vint à arracher le bras d'un soldat, empaler un second sur sa hallebarde, et frapper si fort un autre de sa garde que sa mâchoire, en s'affaissant cribla sa propre cervelle de fragments d'os. Ainsi, après une dizaine de brefs duels, Théoden se trouva nez à nez avec un authentique Elfe Noir qui, malgré son assurance ne trouva pas le temps de porter le moindre assaut sous le nez du marin.
Plus que jamais, la bague au doigt du Capitaine s'embrasa de lumière et ses coups furent si violents, si vifs, qu'Elfe Noir ou non il fut impossible pour lui de riposter ou reprendre du terrain.
Théoden poussa encore, encore et encore sur la défense pourtant solide de son adversaire tant et si bien qu'ils se trouvèrent en une poignée d'instants au bout de leur couloir.
Pour seule échappatoire, l'Elfe trouva un escalier sur sa gauche dans lequel il se jeta. Le dernier coup enragé de Théoden vint mourir à travers une cloison, et le Capitaine hurla sa rage en se jetant sur les talons de son adversaire. Il était hors de question de laisser cet Elfe là vivre alors même que son frère avait lui périt !
Mais l'étage du dessus était déjà devenu une véritable ruine. Entre les plus épaisses poutres, des trous béants s'ouvraient sur le rez-de-chaussée, souvenir de l'effondrement complet du grand hall. A sa gauche, Théoden vit toute la façade du bâtiment s'effondrer sur la place sur laquelle les gardes commençaient à se masser pour essayer d'entrer ou de retenir les fuyards éventuels.
Le Capitaine eut à peine le temps de voir Tesla être emmenée, inconsciente que l'ombre de son ennemi se jeta sur lui avec une rapidité féroce. Théoden répondit à l'injure de cet assaut avec toute la cruauté que l'instant lui prêtait. Ainsi, sans même se douter que tout le monde observait le combat de l'étage, le marin se redressa juste assez pour voir filer à un doigt de son visage le profil agile d'une lame aux reflets de jais. Il se saisit alors de l'opportunité pour jeter à l'Elfe un violent coup de tranche derrière les jarrets et ainsi le vouer à une chute inexorable sur ses genoux. Théoden n'attendit pas plus et offrit à son tour à la foule en bas une violente décapitation d'un coup si fort derrière la nuque que son sabre emporta avec lui des éclats du gorgerin de l'Elfe, pourtant solide. Le corps ainsi dénué de tête fut projeté sur le parvis du palais par un pieds du Capitaine qui ne se fit pas prier pour reprendre son chemin d'un pas rapide. Non sans avoir craché sur les soldats en contrebas qui, déjà, déchargeaient leurs arbalètes sur lui.
Tout en courant, Théoden se défit de son manteau calciné, ne songeant pas encore aux regrets qu'il éprouverait plus tard à l'idée de se débarrasser de son uniforme.

Il fallut quelques difficiles minutes de course à travers les ruines embrasées du palais pour que Théoden puisse trouver un moyen d'en sortir. Il avait suffit d'une fenêtre à l'étage donnant sur un épais buisson et le Capitaine se trouva dehors. Loin des flammes et du fracas de l'effondrement, il réalisa que des combats avaient lieu non loin. Sans doute ses compagnons avaient-ils des ennuis ?
Mais le temps de se relever, il vit arriver en trombe Belaner qui portait la princesse.
Un regard échangé leur évita à l'un comme à l'autre le malheur d'un coup porté trop vite.
La fumée de l'incendie rendait tout autours du palais la vision de plus en plus difficile. Ainsi, à la faveur du chaos qui régnait les trois compagnons se faufilèrent le plus possible loin du palais.
C'est en courant, alors que Théoden se chargeait de la princesse pour libérer les mains de Belaner qu'il apprit la disparition d'Eärion et de Tùrgon. Un juron plus tard, les survivants retrouvèrent la Garcette près des portes de la ville.

Sous le couvert d'une étable plongée dans le noir, Théoden vint trouver son Maître Voilier pour lui confier ses derniers ordres ainsi qu'une missive pour Gibbs. Ce fut là que la séparation fut décidée. D'après l'état de la princesse, il apparaissait comme évident que tous les quatre n'arriveraient pas à Karak-Tur avant les agents de la couronne. Ainsi fut-il décidé que Belaner et la Garcette iraient tous deux à cheval jusqu'au port pour commander la fuite du Wicked Wench et couvrir le départ discret de Théoden et de la princesse à pieds.
Tous échangèrent de brefs aurevoirs et les deux cavaliers se dépêchèrent de filer. Lorsque les galops des chevaux furent loin, Théoden se tourna vers la princesse.

"-Tenez, enfilez ces vêtements princesse." fit-il en lui sortant une tenue de voyage d'une sacoche abandonnée là par la Garcette.

Lui même se défit de tout ce qui ne semblait pas nécessaire. Noeuds, mousquets déchargés, gilet. Il troqua la totalité de sa tenue contre des habits plus simple et se mit une cape comme celle que portait Nynaeve. Les cheveux détachés, la tête sous une capuche et son sabre rengainé il l'entraîna ensuite droit vers le nord en longeant les murs, dans le noir. Ce serait un long voyage jusque dans les Marches...

~°~

Ce fut une très courte semaine qui se passa, depuis l'évasion du palais. Au soir de leur départ, Belaner et la Garcette virent exploser derrière eux les restes enflammés du Palais, signe que la cuisine et les stocks d'alcool avaient été touchés par les flammes. Au troisième jour, la Garcette fut mortellement blessé par une troupe de chasseurs mandatés par la couronne. Bien heureusement, le marin eut le temps de transmettre à l'Elfe les instructions et les papiers du Capitaine avant de succomber à la nuit venue. Ainsi, Belaner atteignit seul le vaisseau avant même  le premier messager d'Asarith. Là, à Karak-Tur, les gens vivaient encore dans la paisibilité relative d'une ville occupée.
Dans le doute, Belaner évita les grandes artères de la cité, et abandonna sa monture au premier palefrenier aux portes de la ville. Evidemment, le temps qui avait passé avait permit au Wench de subir toutes les réparations nécessaires. Belaner trouva donc le vaisseau intégralement réparé et paré au départ comme l'avait exigé Théoden en partant. Les marins étaient tous à l'oeuvre, parés au départ. Gibbs, depuis le pont, semblait achever certains préparatifs. Aussi, lorsque Belaner se présenta avec des crevasses sous les yeux et des tâches de sang sur les vêtements le Second ne sembla guère surprit.
L'heure était venue pour eux de mettre les voiles et de s'enfuir.
Le temps de donner quelques ordres, Gibbs ouvrit et lu la missive du Capitaine Théoden avec un air grave. L'ordre de carguer les voiles fut donné l'instant suivant et toutes les amarres furent tranchées à la hache. Dans l'instant, tous les servants furent envoyés à leurs pièces et les canons furent amenés aux sabords dans le même geste !
Le Wench se détacha lentement des quais de Karak-Tur et tira aussitôt une première bordée assourdissante sur les deux vaisseaux contre ses bords. Dans le calme du port, les dizaines de détonations vinrent déchirer l'air et les deux navires qui encaissèrent les deux bordées projetèrent en tous sens des gerbes entières d'aiguillon de bois.
L'alerte fut ainsi vite donnée dans le port et les gardes commencèrent à affluer vers les docks. Mais beaucoup furent étrangement retenus par les assauts soudains de citoyens armés.

Le Wicked Wench, déjà, se frayait un chemin entre les carcasses de vaisseaux Oréens. Faisant tirer tours à tours ses trois ponts d'artillerie, le vaisseau de Théoden offrait à tout le port un spectacle de destruction. Les quelques navires des gardes côtes qui eurent le temps de réagir furent fauchés sur leurs docks en une poignée d'instants ! Gibbs, ayant cédé la barre au Maître Navigateur du bord était descendu coordonner les tirs des batteries.
Tous les artilleurs allaient et venaient à leurs postes avec une vitesse toujours plus soutenue. Il fallait recharger toujours en cadence de sorte que le temps que les deux autres batterie aient rechargé puis tirées, chaque canon soit opérationnel.
Bien entendu, il n'était pas question de tir de précision ! Gibbs, relayant les ordres de Théoden faisait feu même quand aucun vaisseau ne se présentait devant les batteries du Wench.
Rapidement, le vaisseau arriva aux portes du port et ses batteries fauchèrent tour à tours arsenaux et tourelles, stocks et garnisons.

Finalement, lorsque le Wench fut passé, il ne restait en Karak-Tur que des amas de carcasse en plein naufrages et des bâtiments fumant et crépitant. Mais il était plus que certain que dans les mois à venir, tous aussi bien à terre que sur mer seraient poursuivis sans relâche...
Mar 29 Déc 2015 - 22:58
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Dargor
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Le Maitre de l'Intrigue
Dargor
Asarith considérait les ruines calcinées du palais. Son palais. Derrière lui, des membres de sa cour. La lune était haute dans le ciel. Dizzalyr était donc de sortie. Arphénise juste derrière elle. Non loin, les autres elfes noirs qui avaient pu être présents. Et plus loin encore, les hauts fonctionnaires et ministres humains.

« Ce n’est pas grave, finit-il pas déclarer en se retournant. Nous en bâtirons un autre. Celui-ci était laid, de toute façon. Nous ferons venir des maçons du monde entier s’il le faut, et chaque pierre devra être parfaite. »

Il considéra la foule qui était désormais devant lui.

« Dispersez-vous, ordonna-t-il finalement. »

Ils ne se le firent pas dire deux fois. Rapidement, ne restèrent ici qu’Asarith, sa fille adoptive, et les elfes noirs qui étaient présents.

« Bien, dit Asarith en désignant le palais. Ceci, ne le cachons pas, est un désastre. Tout notre palais incendié, de nombreux ministres tués, je peux vivre avec. La mort de treize elfes noirs dans les combats qui ont eu lieu est bien plus problématique, à mon avis, mais il y a pire encore. Le soulèvement à Karak-Tur, durant l’évasion de ce capitaine humain. Il semblerait que la population ait pris cette attaque comme un signe de faiblesse de notre part. Heureusement pour nous, Aliboronz semble ne pas suivre cette voie. Satus Borien, le seigneur humain de Karak-Tur, m’a fait savoir qu’il a pu fuir et y trouver refuge. Je le maintiens en vie pour l’instant, même si après son échec il n’a plus aucune importance à mes yeux.
« J’accorderai volontiers de l’importance aux troubles à la frontière du royaume des orcs, si je n’avais pas un exemple à faire. Faites savoir à tous les généraux humains que nous allons partir dès que possible mater cette révolte populaire. Je compte bien laver dans le sang l’imprudence des gens de Karak-Tur. »

Il s’éloigna sur ces mots, ayant besoin de ne réfléchir à la suite qu’avec ses plus proches conseillers. Rapidement, tous furent réunis dans la salle de l’auberge luxueuse qui hébergeait, avec plusieurs établissements semblables, les membres du palais qui se retrouvaient sans toit. Dans la salle commune se trouvaient donc Asarith lui-même, Dizzalyr, Vierna, Arphénise et Glaïrh, revenue de la frontière orc dès qu’elle avait appris, en bonne générale qui savait que les choses allaient changer.
Un long silence s’installa, durant lequel Asarith considéra le petit groupe qui se tenait devant lui. Puis finalement, il le rompit.

« Redites-moi ce qu’il s’est passé dans ses moindres détails. »

Ce fut raconté longuement par Dizzalyr en personne. Comment le capitaine Théoden était entré, avec la complicité de Tesla Eilun. Les elfes blancs, et le rôle qu’ils avaient joué. L’attaque, et l’incendie du palais.

« Daecith ? demanda Asarith.
-Sain et sauf, confirma Dizzalyr, en grimaçant, ne cachant pas qu’elle l’avait un peu sauvé à contrecœur.
-Les fonctionnaires humains ?
-Il faudra sans doute en remplacer un grand nombre, dit Vierna, je me suis chargé de mener cette enquête. Heureusement, tous les ministres eux-mêmes étaient avec la reine au moment de l’attaque, ils ont eu le temps de fuir.
-Les elfes blancs ?
-Nous pensons que l’un d’eux a pu fuir, dit Glaïrh. Le capitaine et la princesse n’ont cependant pas été vus avec lui à Karak-Tur, quand il a rejoint le navire. Nos éclaireurs sillonnent la campagne. En espérant les retrouver.
-Tesla Eilun ?
-Elle a été blessée durant les combats, sourit Arphénise Quedame à pleine dents. Elle est dans nos geôles en ce moment même. Et elle regrettera tout ce qui va lui arriver par la suite.
-Je m’en assurerai, dit Asarith. Bien. Tout cela nous amène à relativiser les choses. Glaïrh, tu rappelleras tes éclaireurs. Un retour de Nynaeve auprès de ma sœur pourrait finalement tourner à notre avantage. La situation n’est pas si catastrophique que cela, au final, toute considération faite.
-Pas si catastrophique ? demanda Dizzalyr. Je ne te comprends pas mon amour. Cet humain t’a insulté devant le monde entier en mettant le feu à ton palais…
-En mon absence, répondit Asarith. J’étais en pleine diplomatie dans les Cités-Etats. Et un traumatisme en fera vite oublier un autre, d’où l’utilité supplémentaire d’aller mater la révolte à Karak-Tur. Cela déclenchera une guerre avec les Cités-Etats, bien plus tôt que prévu. Mais nous sommes prêts à la faire quoi qu’il en soit. J’ai des questions plus importantes. »

Il se pencha sur la table, et les regarda tous dans les yeux.

« Avez-vous retrouvé la Broche d’Or et Perce-Cœur dans les ruines du palais ?
-Non, admit Dizzalyr.
-Et pourquoi avez-vous oublié de les sauver de l’incendie ? »

Personne ne répondit, car toutes les femmes présentes à cette table savaient qu’il était inutile de répondre à Asarith quand il parlait sur ce ton.

« Le feu mortel ne saurait affecter des artefacts de nature divine, dit-il. Nous reprendrons cette conversation lorsque vous me les aurez amenés. Et gare à vous s’ils les ont volés durant leur évasion, car je vous promets l’enfer si cela devait arriver. A chacun d’entre vous. »

---

Heureusement pour eux, il fallut une semaine de recherche dans les décombres de l’aile royale pour retrouver Perce-Cœur. La Broche d’Or, qui avait été rangée dans un compartiment secret voisin, fut retrouvée peu après. C’est avec elles, posés sur la même table, qu’Asarith reprit la conversation.

« Nous pensons de manière certaine, disait Glaïrh, que le capitaine Théoden a pu recevoir l’assistance du traître Henrique Rossi.
-Mettez sa tête ainsi que celle de sa femme à prix, répondit Asarith. Faites délivrer un mandat d’arrêt contre le capitaine Théoden, et envoyez une lettre aux souverains du monde exigeant son extradition s’il devait trouver le refuge chez eux. Mettons-y au moins les formes, même s’il nous faut passer à autre chose. »

Il considéra Perce-Cœur, sa lame parfaite. L’épée et la broche forgés par Dwilin et enchantés par Mystin en personne lui appartenaient désormais. Deux des trois plus puissants artefacts au monde.

« Il ne te manque que Brise-Crânes, dit Dizzalyr en les contemplant.
-Oui, je sais où est le marteau. Il est entre les mains des nains. Je le leur prendrai peut-être, un jour. Qu’ils en profitent en attendant. Je n’en aurai pas tant l’usage que de ces deux-là. Cette épée qui m’appartenait depuis toujours, et cette broche qui jusqu’à il y a peu appartenait à ma sœur… La situation est loin d’être si catastrophique que cela.
-Nous avons tout de même manqué une occasion en or d’utiliser la fille de Malene contre elle, grommela Vierna, vexée.
-Que tu crois, ma chère, répondit Asarith. Le doute est désormais dans l’âme de ma nièce. Je n’ai pas pu poursuivre le travail plus loin, ce qui est regrettable, mais je trouverai un moyen d’entrer en contact avec elle pour le terminer. Il se pourrait que nous ayons désormais une alliée au sein même du palais de Malene… Une alliée très précieuse.
-Je lance l’armée entière à sa recherche, dit Glaïrh sans l’ombre d’une hésitation.
-Justement non ! répondit Asarith. Laissez-la rejoindre sa mère. Qu’elle sabote tout de l’intérieur, volontairement ou non, cela nous sera tout à fait utile. Je terminerai son apprentissage en temps utile. Pour l’heure, nous concentrerons nos efforts sur Karak-Tur et les Cités-Etats. Arphénise, tu t’es montrée plus que digne d’être appelée ma fille, la princesse héritière du royaume d’Oro. Tu le dirigeras d’une main de fer en mon nom et mon absence, car je compte bien prendre la tête de l’armée, cette fois. Dizzalyr, mon amour, j’aimerais te confier un rôle plus valorisant, mais en cette période troublée, nous pourrions être frappés dans le dos, et Arphénise n’a pas ton expérience de commandement d’armées. Tu dirigeras les troupes au nord. Défends le royaume, ne franchis la frontière que sur mon ordre explicite. Vierna, tu iras avec elle. Glaïrh, avec moi ma tendre et chère générale. Arphénise, je compte sur toi. Tu as un millénaire de vie, utilise-le sagement. Maïe et Nonïe, mes chères sœurs jumelles amantes, sont deux elfes noires expertes dans l’assassinat et les poisons. Elles veilleront à ce que tu n’aies pas à te soucier de ce genre de choses, et que tu puisses te consacrer exclusivement à la politique. Disposez. Nous prendrons les mesures pour officialiser tout cela demain. »

Asarith se retrouva rapidement seul, et sortit un instant de l’auberge. Il considéra les ruines du palais. Elles auraient des conséquences sur l’opinion que la population avait de lui, cela était vrai, mais il comptait effacer ce souvenir avec d’autres plus marquants encore.

« Prenons ce feu de paille comme ce qu’il est, songea-t-il. Un malheureux contretemps. »

Il avait une campagne militaire d’ampleur sans précédent à préparer, après tout.
Mer 30 Déc 2015 - 0:44
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