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[Ouvert] And Justice for all
Le Pygargue
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Fils de Kafkon Samuel
Le Pygargue
Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins,
Le canevas banal de nos piteux destins,
C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie.

Baudelaire








Capitaine Frederique De Klemmens:


Premier Secrétaire du Ministre de la Marine : Lord Madère d'Angualmar :



Le Pygargue coupa la parole à Horace De Klemmens en l'embrassant. Ca n'était pas la première fois qu'il vivait une telle scène. Elle se répétait. Cette première tentative se soldant par un échec -Klemmens venait de le repousser avec violence, comme s'il fut en feu, l'air situé entre l'hébétement et l'énervement- il insista. Ce fut au milieu de la fièvre la plus brûlante et les faveurs les plus larges que l'action se poursuivit. Bien vite, le Lieutenant se retrouve le torse à demi nu, livré sur le lit de son Capitaine sans en comprendre ni l'origine ni la raison. Et ses yeux, rouges, toujours plus rouges, rivés sur sa personne, le déstabilisent avec tant de facilité ! Pardonnant à la furieuse maladie qui s'empare de tout le corps de sa victime, le Pygargue se fait plus entreprenant dans ses gestes, plus profonds et plus experts. Ses caresses sont des flammes tandis qu'il entreprend de se dévêtir lui-même. Mais avant même que se termine ce ballet provocant et interdit, l'on tire une lame d'une manche, et tout se termine dans le sang.

Le Pygargue s'éveilla en sursaut. Le corps glacé et flambant à la fois, pris d'une sorte de fièvre froide qui le faisait transpirer. Ce rêve, ça n'était pas la première fois qu'il le faisait depuis le trépas de son Lieutenant. Il n'était que plus troublant quand on savait que ça n'était pas véritablement un rêve. L'adultère. Le deshonneur. C'est la vertu la moins pure et la plus basse, songea Le Pygargue en se lavant le visage dans le bassin d'eau claire mis à sa disposition près de son lit à bord du Palais d'Agathe, aux mains du commandant De Klemmens.
Il prit le temps de se calmer, reprendre une respiration normale, faire cesser ses tremblements, occire les fantômes dansants devant ses yeux et dans sa tête et étouffer l'érection qui l'avait pris durant son sommeil. Depuis sa possession, il ne maîtrisait plus du tout son corps, et cela en devenait, plus que gênant, une persécution. Sitôt qu'ils avaient mis à la voile, avec le Prince de Palmyre et l'Eradicate dans leur sillage, sitôt qu'il fut tenu loin des bonnes mains de la prêtresse de Prébois, il avait reperdu le contrôle qu'il avait gagné sur son corps les jours suivant l'exorcisme. Il régressait, et c'était pire que tout. Le Pygargue chercha dans ses poches le flacon de poudre qui ne le quittait jamais en temps normal, avant de se souvenir qu'on le lui avait confisqué. La nuit était bien avancée. Luttant contre le sommeil, le Capitaine Pygargue s'assit face au petit bureau occupant l'espace de sa cabine, il alluma un candélabre; se saisit d'un écritoire, d'une plume, de papier et d'un encrier. Le Capitaine avait laissé tout cela à sa disposition volontairement, au cas où lui viendrait l'envie d'écrire. Jusqu'à présent, Le Pygargue n'en avait rien fait.

Son sourcil droit, arqué plus haut que le gauche lui donnait un air critique lorsqu'il écrivait. En des termes fort bien choisis et très noble, il rédigea une missive officielle. Son testament.

Il indiqua simplement que si jamais il devait mourir dans les jours ou les lunes à venir, il souhaitait de tout cœur rétablir la paix entre les Deux Maisons, et espérait que le don de l'épée runique, forgée par Maître Dren Hortys, diplômé auprès de Dwilin, allant aux De Klemmens apaiserait cette ire.

Une fois la missive signée de sa main, il sut qu'il venait de se mettre sa propre famille à dos. Il n'y avait pas meilleurs danseurs -à comprendre escrimeurs- en la cité de Palmyre que les De Everhell. Il était évident que si lame d'une telle qualité devait revenir à qui que ce fut, ce devait être cette maison. Il poursuivit son héritage, déposant sur papiers ce qui feraient ses dernières volontés. A vrai dire, il n'avait point grand chose. La seconde épée forgée par Maître Hortys reviendrait à sa maison, ainsi que tout ce que la justice ne saisirait point de ses biens. Le testament fut rédigée rapidement et selon les règles et les dogmes impériaux.

Il fit demande, le lendemain au matin, de nouveaux vêtements, ce que le Capitaine lui accorda. Mieux, il vint les lui porter en personne. On ôta à ses poignets la chaîne qui les entravait, le temps qu'il se change. Le Pygargue exprima au fils de Horace sa toute-reconnaissance pour avoir choisis des accoutrements à la mode de la Topaze, et du bleu représentatif de la Maison De Everhell. Il prit également le temps de se raser, se brosser et se coiffer. Le Capitaine passa un peu de son temps en sa compagnie. Le Pygargue évoqua surtout le cas de son équipage, il parla des dettes qu'il avait contracté à Alkhalla, auprès du Calife Aled El Oussam, qui le tenait en ami et en héros et lui avait fourni cet équipage d'hommes de l'Ouest, ces Emulzes. Ils espéraient rentrer chez eux couverts de richesses et d'or, à rapporter en Emulz et en Alkhalla. Le Capitaine évoqua également le cas malheureux des infortunés, les enfants perdus, fruits des pirates de passage qui, n'ayant rien trouver de mieux à faire une fois leur retrait des affaires d'Ariel pris, avaient germé dans le ventre de prostituées de Prébois. A eux aussi il avait promis une vie meilleure. Tous ces hommes ne savaient rien de ses erreurs passées. Il demanda l'immunité pour eux, qu'on ne les incarcérât point dès leur arrivée dans l'Empire d'Ambre. Le Capitaine De Klemmens jura au Pygargue faire tout ce qui demeurerait en son pouvoir afin de s'y tenir. Le Pygargue fit également moult suppliques afin que son geôlier lui rende le flacon de poudre qu'on lui avait substitué.

« - On vous ferait de bien vaines paroles en nommant ceci autrement que médicament, expliqua-t-il à Klemmens.
- Rien à vos deux bords, ni dans vos papiers ni sur votre personne, n'indique que vous êtes souffrant Capitaine, avait répondu Frédérique De Klemmens.

Cependant, il avait consenti à lui rendre sa drogue, en précisant bien que c'est ainsi qu'on nommait ces choses-là.

Plusieurs semaines après, le Palais d'Agathe jetait les ancres dans la cité Topaze de Palmyre, à l'extrême Sud-Ouest de l'Empire d'Ambre.




[Ouvert] And Justice for all Approa10

La cité Topaze de Palmyre, Empire d'Ambre



Ce que l'on ressent après avoir quitté sa patrie plus de dix Tours, presque onze, et en la retrouvant est indescriptible. Le Capitaine Frédérique De Klemmens l'escortait, entouré de deux Prêtres d'Ohiel, ainsi que plusieurs guisarmiers et deux hallebardiers. Suis-je si dangereux que cela ?
Le Pygargue se pâma presque devant la blancheur des hautes tours de la Topaze, ces pierres taillées, polies, si caractéristiques de la cité. Le port toujours animé, éclairé par cet immense carré de ciel d'azur donnant sur la mer indigo, pourpre et argentée au centre. Un rideau d'écume satinée embrassait les pieds du port avec passion, embrassait la vie de la Palmyre. Les temples de la Topaze de Palmyre, majestueux, plus beaux qu'en aucune autre cité qu'avait vu Le Pygargue, paraissait rayonner, bercés par les rayons du soleil haut au-dessus les nues. Le rêve éveillé du Pygargue venait de prendre -reprendre!- forme, l'atmosphère avait des baisers dans l'air, et son âme à lui était à l'image d'un paysage, désireux de saisir ces baisers-là. Lorsqu'il fermait les yeux, il pouvait sentir un coeur dans la brise, et entendre en son propre cœur les voix de la cité. Les dieux en fussent témoin, il ne pouvait y avoir dans tout Ryscior de meilleur endroit où vivre sa vie que cette cité de l'Empire d'Ambre ! Le Pygargue se surprit à songer à son frère en un tel instant. Bervers avait toujours haï la Topaze. Dès son plus jeune âge, il avait désiré la fuir. Et lui, son jeune frère, Pygargue, avait choisi de la quitter, à contrecœur, pour rétablir l'honneur de sa maison. L'honneur était tout.

Il fut néanmoins surpris de ne point reconnaître certains bâtiments. Une académie de magie -de loin- paraissait avoir vu le jour, à deux pas du temple de Finil. Plusieurs statues polies, dont une à l'effigie d'Ariel et une d'Ohiel, avaient également germées sur le port. Plus deux, trois autres bâtiments. Un palais de justice, une établissement scolaire, un temple d'Atÿe. La cité paraissait également s'être agrandie. Le Pygargue fut frustré de ne point savoir identifier quelques parts de nation, mais en dix Tours d'absence, il jugea cela normal. Quoique bien triste pour sa personne.

Sur le port, empli d'activité et de caravelles à quai, tous demeuraient sur le qui-vive. Aussitôt que le Capitaine Klemmens fut à terre, on se saisit de son prisonnier qu'il ramenait à bon port. Le Pygargue n'opposa aucune résistance. De toutes façons, il demeurait déjà enchaîné. Il fut étonné du nombre d'officiers et de paladins que déploya le Premier Secrétaire D'Angualmar, ainsi qu'un homme qu'il identifia comme un Amiral et délégué du Ministre en personne, probablement, présents tous deux. Le temps était d'une tension électrique. Le Pygargue vit les hommes du Ministre, commandés par l'Amiral, investir sans attendre l'Eradicate et le Prince de Palmyre. On fit sortir des cabines du Palais d'Agathe les Ramiens, les enfants perdus et les matelots qui composaient l'équipage du Pygargue. Le Capitaine Klemmens fit grand cas de leur exemplarité à son bord, ainsi que de leur situation délicate, eux qui ignoraient tout des crimes reprochés à leur Capitaine. Le Premier Secrétaire, Madère d'Angualmar, s'approcha du Pygargue, ses petits yeux de rats le fixant. Mains dans le dos, il tourna autour du prisonnier, lentement, tout en sifflant entre ses dents serrées :

- Onze Tours que vous êtes partis, Capitaine Everhell. Et voilà déjà plus de dix Tours, que le Prince de Palmyre aurait dû nous revenir.

Le Pygargue lui fit la tête haute, choisissant de ne point répondre à cet homme qu'il ne parvenait point à apprécier. Madère reprit :

- Au moins nous aviez-vous rapporté le fameux Eradicate, emporté par votre frère, un traître que je côtoya, il y a plus de vingt Tours. Frère que vous avez fait crucifier à bord du Prince, m'a-t-on dit. Au fait, qu'est-il advenu de votre équipage ? Vous étiez parti avec -il se mit à consulter une liste extirpée d'une poche intérieure de son pourpoint- trois Lieutenants, virtuoses escrimeurs d'apparat, messires De Klemmens, De Pax et De Kelston. Deux Officiers, ainsi que deux Paladins. Six matelots, archers de professions. Dix hommes envoyés aux balistes. Puis seize défenseurs du bâtiments, marins et guisarmiers je vois. Ainsi qu'un Officier Ministériel attaché à votre cause, Maître Eugène Matter.
- Tous ces hommes me furent arrachés, Maître D'Angualmar.
- Tiens, tiens.
- Assassinés de la façon la plus rude j'escompte, lorsque je mouillais sur les Grand'Eaux de l'Ouest, par un pirate à la tête d'une flotte d'exception. Il n'en a laissé aucun, hormis Maître Klemmens et moi-même.
- Une bien curieuse coïncidence, Capitaine. Et Maître Klemmens ?
- Décédé lui aussi, Maître. Il y a plus de deux Lunes en terres de Prébois. Assassiné également, cependant oyez que les circonstances de son trépas demeurent exceptionnelles et je refuse d'aller plus avant de manière orale sans garantie.
- Fort bien, je le respecte, Capitaine ! Reconnaissez donc qu'il ne reste que vous ! Une bien bien curieuse coïncidence j'en pense.
- Je puis vous déléguer le nom du pirate qui a attaqué mon bâtiment ces Eaux de l'Ouest. Cependant il ne demeurera point accommodant pour nos hommes de retrouver sa piste. Il s'en fut pour une grande Odyssée, par-delà le Nouveau Monde.
- Comme c'est pratique ! ricana le Premier Secrétaire. Allez, emmenez-le !

Le Pygargue fut au moins satisfait d'échapper au rictus amère du Secrétaire. L'Amiral paraissait, lui, davantage malléable. Madère ordonna également la mise aux arrêts des enfants perdus, ainsi que des marins du Pygargue.

- Qui sont-ils ? demanda-t-il en frottant son menton.
- Mon équipage, Maître.
- Des enfants ? On dirait de la canaille Capitaine, ce que j'en pense !
- Mes aspirants !
- Emmenez-les tous ! »

Le Capitaine Frédérique De Klemmens vint couvrir la défense de ces-hommes là, rapportant à l'Amiral les volontés du Capitaine Everhell, qui s'était rendu sans faire de difficultés, ajouta-t-il. Durant plusieurs minutes, ils débattirent avec Madère D'Angualmar. Ce fut de toutes façons l'Amiral qui eut le dernier mot. La plaidoirie de Klemmens écoutée, il leva la main en signe de conclusion, et ordonna que l'on arrête tous les hommes sans exception ayant servis à bord du Prince de Palmyre. Le Capitaine Klemmens fut forcé de transférer les effets personnels de son prisonniers aux mains de l'Amiral, et Le Pygargue fut mis en cellule dans la prison de la Topaze. L'affaire embrasa la cité comme un rideau d'huile. L'arrestation du cadet de la Maison De Everhell, accusé de désertion, de meurtre et de fornication, demeurait sur toutes les bouches.

Le Pygargue dut demeurer trois jours à la Topaze, avant qu'on ne le transfert jusqu'à la capitale pour son procès. Durant ces trois jours, il n'eut aucune visite. Ni de Klemmens, ni de son père, ni de sa femme. Ni de sa nièce.
Dim 7 Aoû 2016 - 20:21
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Dren Hortys
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Dren Hortys
Dren remercia une dernière fois Ariel avant de s'affaler contre le mur d'un bâtiment. Par les dieux que ce voyage fut pénible pour lui.
Une fois son matériel déchargé, le valet qui avait prit le soin de se renseigner sur la situation du prisonnier prit congé non sans vouloir prendre à ses frais le voyage de Dren vers la cité de Jade.
C'est à ce moment qu'un chevalier fit irruption sur le port.
Se présentant comme Léon de Sainte-Croix. Il remercia le valet en l'informant que ce témoin était désormais sous la protection de l'ordre de Sainte-Croix.
Le jeune chevalier plissa les yeux en croyant observer un déglutissement du valet trahissant une quelconque contrariété.
« - Je puis vous assurez messire que le premier secrétaire peut largement pallier au transfert de ce témoin dans cette sordide affaire jusqu'à la cap... »
Léon ayant prit le temps de descendre de sa monture coupa le valet.
« -J'ose croire que vous n'êtes pas en train d'insinuer que l'ordre dont je fais partie, n'est pas capable d'assurer la sécurité d'un témoin messieu. »
Le temps de s'exprimer Léon se retrouva très près du valet posant ses mains à la ceinture. Plus précisément l'une sur la garde son épée et l'autre sur le manche de son fouet.

« -Loin de moi cette idée messire bafouilla le valet. Le premier secrétaire, Lord Angualmar pense que pour des raisons de simplicité et de praticité évidentes maître Hortys témoin dans ce procès, pourrait faire le voyage avec nous. »
En regardant autour de lui Léon vit les gens observer la discussion des deux hommes avant de reprendre sur un ton beaucoup moins menaçant.
« -Voilà pourquoi il n'a pas fait transférer directement le prisonnier. C'est tout a son honneur d'épargner les impôts des citoyens de l'empire en groupant les convois. Bien dans ce cas je me joindrais à vous pour ce voyage.
-Comme il vous plaira messire. » Dit le valet en repartant non sans faire une rapide révérence.
« -Je m'en vais de ce pas en informer Lord Angualmar. »
Léon attendit que le valet fut suffisamment loin pour ajouter un :
« -Je n'en doute pas. » Sur un ton absent de toute courtoisie. Puis il se tourna vers Dren en s'excusant pour cet accueil peu commun.
« -Je ne te ferais pas l'affront de te demander si ton voyage à été agréable mon ami. » Dren l'en remercia et lorsqu'il questionna Léon sur ce qu' il venait de se passer. Le chevalier lui demanda d'être patient. Ce n'est que le soir lors du dîner que Léon et Dren furent rejoint par un prêtre d'Ohiel que Léon présenta comme étant frère Alband.
Un homme de près de cinquante tours qui avant toutes choses prit le soin de recueillir le témoignage de Dren. Ce dernier ne manquant pas de signaler que Frédérique De Klemmens possédait également son témoignage quo-signé par la prêtresse d'Ariel qui l'avait assisté lors de l'exorcisme pratiqué le soir-là sur le désormais prisonnier capitaine de Everhell.
Pliant et cachetant le parchemin avec soin. Frère Alband le mit de côté avant de joindre les mains et prit une profonde inspiration avant de regarder Dren.
« -Bien. Ceci étant fait maître Hortys. Sachez que le procès dans lequel vous allez témoigner va très certainement vous dépassez. Pourtant votre témoignage est précieux car il peut, toutes proportions gardées lui éviter éventuellement la peine capitale. 
 -Et qu'oubliez-vous de me dire ? »

Demanda Dren en regardant l'un après l'autre Léon et le frère Alband.
Léon prit la parole à son tour.

« -L' Empire a des accords commerciaux avec le sultanat de Ram. Ce dénommé Pygargue c'est, à en croire un calife de ce même sultanat, fortement endetté auprès de ce dernier. Certains pensent que cet aristocrate serait plus apte à rembourser cette dette avec la tête sur les épaules que dans un panier. Ce procès risque d'être long. »

Dren se rejeta en arrière s'appuyant contre le dos de sa chaise.

« -Je comptais rester quelques temps dans la cité impériale. Il faut que j’approfondisse quelques peu l'usage de la magie cléricale, après si l'empire ou l'ordre a besoin d'un forgeron... »

La conversation dévia un peu et le lendemain Dren, Léon et le frère Alband ne purent que constater l'importance du convoi en prenant le même chemin que celui-ci.
Ven 12 Aoû 2016 - 18:03
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Le Pygargue
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Le Pygargue
Je t'implore et réclame ;
Ne fuis pas loin de mes maux,
O fauvette de mon âme
Qui chantes dans mes rameaux !

Hugo



Une Lune entière était passée, depuis l'incarcération du Pygargue à la capitale. Et avec elle, son lot de tourments, de remords et de solitude. De solitude, car personne, ni de la maison De Everhell, ni de la maison De Klemmens n'était venu le visiter. Cela faisait onze Tours qu'il avait quitté les siens. A l'époque, s'amusait-il à songer dans sa cellule, il n'était encore qu'un jeune homme. Il avait pris la mer âgé de pas même trente Tours. Vingt-sept pour être précis.

Tant de temps s'était passé depuis.

Sur la missive que lui avait remis le valet à Prébois, avant cette sordide affaire de possession, il y avait indiqué que le Pygargue était ''invité'' à son propre procès (c'étaient là les termes employés par le Premier Secrétaire, Maître D'Angualmar, et le Capitaine songeait là que cet individu retors ne manquait point d'ironie !) invité en tant qu'accusé, évidemment, et procès dont il se doutait bien qu'il n'en ressortirait pas vivant. Surtout après la substitution de tous ses papiers par celui-là même que l'on (sur)nommait Théoden. Toujours était-il que cette fameuse invitation parlait du second Jour de la Lune du Déclin du Tour 5333 comme du jour où ce grand procès qui trompetait d'avance serait ouvert.

C'était aujourd'hui.

Le Pygargue partageait sa cellule avec un homme, passé en cour martiale, il y avait plusieurs Tours de cela, ancien Capitaine, jugé coupable de transactions avec l'ennemi et condamné à 10 Tours de prison ferme. Peu bavard au début, la présence loquace de son compagnon de cellule et leur passion commune lui avait délié la langue. Le Pygargue avait ainsi passé sa Lune derrière les barreaux à conter pour son voisin ses exploits dans les eaux de Ryscior. Il parlait avec un certain détachement, avec la sensation d'échec total qui planait lourdement entre chaque mot, entre chaque syllabes, mais son compagnon lui avait assuré qu'il y avait là bien de quoi rédiger un bon récit ! Le Pygargue avait souri. En prenant la mer, onze Tours en arrière, c'était bien là ce qu'il s'imaginait faire à son retour, couvert de richesses, d'exploits guerrier et de gloire.

« Mémoires d'un cadet de famille, avait rit son compagnon de cellule, par un De Everhell et l'authenticité de tout un récit ! Avec cela, vous auriez pu ranger dans votre poche l'opinion publique ! Après tout, il est vrai que vous avez traversé Ryscior d'un bout à l'autre en empruntant les sentiers d'Ariel !

C'était une manière de voir les choses nota Le Pygargue. Mais en dépit des encouragements en toute bonne volonté de son interlocuteur, il n'avait plus l'envie d'écrire. Juste avant de se faire arrêter, il avait passé des semaines enfermé à bord de l'Eradicate à retranscrire son Journal de bord que Théoden lui avait dérobé il y avait presque deux Tours. Il était fatigué d'écrire pour raconter des exploits imaginaires -quand même ils étaient réels- !

On vint le chercher pour son procès. Il avait passé ses dernières heures à prier respectivement Ohiel, puis Finil. Tout serait bientôt finis. On lui accorda l'opportunité de se faire propre et présentable pour l'événement. Un devoir moral auquel il ne manqua pas. Les pires, songeait le cadet De Everhell, sont toujours ce qui font le mal en s'abritant sous l'autorité des autres, un besoin mielleux, un traumatisme d'enfance ou il-ne-savait-quoi. Il allait répondre de ses actes, et serait ensuite jugé à cause d'eux.

Il avait de la chance. Il avait exercé à la cour en tant que prévôt dans sa jeunesse.

- Mieux vaut connaître un peu la musique avant que ne commence le bal. »

On l'escorta jusqu'à la cour de justice. Le Ministre de la Marine en personne l'y attendait. Impatient de l'envoyer pour une séance de cordes. Le Pygargue sourit intérieurement en réajustant son col de chemise. Par corde, il ne parlait pas précisément de cordes de luth ou de guiterne. Même si ses opposants savaient très bien faire chanter un accusé.

Il espérait qu'à défaut de corde de chanvre, ce serait juste un billot de bois et une épée. Une épée pour signer son appartenance à l'aristocratie Impériale. Définitivement et à tout jamais.
Dim 11 Sep 2016 - 18:35
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Dren Hortys
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Dren Hortys
Dren marchait d'un pas léger accompagné de Léon dans les couloirs du palais.
« -Je me sent comme dénudé. » Fit remarquer le forgeron.
Léon énuméra alors la longue liste des armes dont il avait dut se séparer à l'entrée du tribunal.
« - Une épée bâtarde, deux faucilles à lame inversées, une quinzaine de couteaux, trois dagues sans compter deux dissimulées dans les bottes, une arbalète de poing et une quarantaine de carreaux dont la moitié en argent, une épée courte, une hachette et une barre d'acier. Dois-je mentionner également le fouet tressé en maille d'argent ainsi que les poings de fers ou dois-je plutôt porter mon attention sur toutes ses petites pointes qui parsèment ton armure ?
-Je suis prêtre de Dwilin. Je suis forgeron. C'est tout à fait normal que je me promène avec un éventail de mes créations. Bref maintenant nous sommes en retard. J'ai horreur de cela Léon. »

En suivant un couloir, il finirent par croiser frère Alband qui rassura Dren concernant sa crainte  sur un éventuel retard.

Lui venait à peine de finir de déposer les dossiers du ministère des finances concernant la dette du prévenu auprès du calife.
« - J'ai aussi prit le temps de témoigner qu' à aucuns moments vous vous êtes retrouvé seul avec le prévenu durant le voyage. 
-Je ferai bien d' en faire de même. »
Pensa tout haut Léon avant de s'en aller en direction d'une des nombreuses portes. Laissant seul Dren avec Frère Alband.
A défaut de laissé le silence s'installer Frère Alband entama la conversation en invitant le forgeron à marcher un peu.
« - J'ai eut la chance d'apercevoir les deux sabres que vous avez confectionnez. De vous à moi j'aurai fait un bien piètre enfant de Dwilin.
-Et moi un piteux prêtre d'Ohiel.
-Comme vous me l'avez mentionné durant le voyage. Vous avez mené enquête sur votre client. C'est déjà tout a votre honneur. Tout comme l'est votre souhait de témoigner en faveur du prévenu. La possession est la pire chose qui puisse arriver. »
Dren grimaça en repensant a ce soir où il avait trouvé Sire de Everhell dans cet état.
« - J'escomptais pouvoir vous donnez quelques leçons sur ce sujet. Bien que vénérant chacun une divinité différente. Nos dieux respectifs ont, j'en suis persuadé, le même regard sur les démons et autres spectres.
-J' en serai heureux frère Alband. Il est vrai que je me suis senti quelque peu désemparé devant ce …  Phénomène.
-Nous aurons l'occasion d'en reparler. »
Léon rejoint le duo avec en mains deux parchemins cachetés du sceau impérial.
Dren le questionna sur leurs natures. Son ami lui répondit qu'il s'agissait de deux remises de médaille.
L'une pour son père. Revenu du front et blessé, l'autre pour lui. Pour avoir déjoué une tentative d'assassinat contre l'impératrice.
« -Loué soit Ohiel. »
Lança frère Alband en précisant que l'empire bien qu' en guerre savait récompenser ses loyaux sujets tout en donnant procès équitable à d'autres.
Bientôt des gardes en armes vinrent trouver le trio en leur disant que le procès était sur le point de commencer.
A l'énoncé des accusations contre le prévenu. Tous les trois sans en dire pour autant un mot pensèrent qu'il faudrait un miracle pour que le pygargue garde la tête sur les épaules.

Frère Alband se leva pour attesté des dettes contractés par le prévenu auprès du calife d'Alkhala qui se faisait nommer Cheik Alhed El Oussam.
Il attira l'attention de la cours sur le fait que bien moins grave que de multiples désertions. Le prévenu serait bien plus apte à rembourser ses dettes envers le calife en vie.
Puis ce fut au tour de Dren d'être appelé à témoigner.
Bientôt la séance fut levée. La défense du prévenu souhaitant entendre la prêtresse.
Le ministre de la marine quitta quelque peu outragé la salle non. Léon laissa entendre qui si il avait fait appel à l'ordre de Sainte-Croix dès la première désertion il n' y aurait pas eut récidive. Le ministre lui jeta un regard noir et sortit encore plus énervé lorsque Léon lui fit remarquer que sa perruque était de travers.
Une fois dehors Dren était passablement décontenancé. A quoi bon attester des choses sur l'honneur en en appelant à la grâce d'une divinité que l'on sers en lui dévouant sa vie si ce n'est pour qu'un témoignage écrit ne suffise pas ?
« - N'en voulez pas à la défense maître Hortys. Dame Hyme sait très bien ce qu'elle fait. Je peux vous assurez qu'il n'y a en cela rien de personnel. La parole de cette Mariel est loin d'être remise en cause. Quoi qu'en pense le ministre. Cette attestation est tout à fait recevable. Même si ici personne ne connait cette prêtresse d' Ariel. Reste que la justice d'Ohiel préfère entendre de vive voix un témoignage.
De toute évidence ce n'est certainement pas au ministère de la marine de s'occuper de la venue de cette témoin. Les risques qu'elle disparaisse sont bien trop élevés. »
Il restait à Dren de donner le signalement de Mariel la prêtresse d'Ariel aux autorités compétentes. Ce qui lui prit moins d'une demi-heure avant de sortir du tribunal non sans donner l'adresse de son lieu de résidence. Il logerait dans les appartements de l'ordre de Sainte-Croix. Léon ayant insisté pour qu'il en soit ainsi.
Cela arrangeait bien Léon qui aurait pour compagnie une autre personne que son père difficile à vivre pendant sa convalescence.
« -Lui qui souhaitait une mort honorable sur le champ de bataille, le voilà contraint à superviser l'entrainement des recrues en tenant une canne, son armure ornée d'une médaille. Il va être invivable au quotidien.
-Et toi demanda Dren pourquoi cette médaille ? 
J'ai sauvé la vie de l'impératrice. » Répondit Léon sur un ton des plus naturel
« Il n'y a rien d'exceptionnel a cela. Chaque impériaux en aurait fait de même si il en avait eut l'occasion.
Ce n'est quand même pas rien. Avança Dren.
Certes, mais j'y penses voulez-vous venir à la cérémonie ? Nous avons le temps désormais. Ce n'est pas demain que ce procès sera terminé. »
Frère Alband et Dren acceptèrent de concert.
L'idée de croiser la haute société ne pouvait qu'éventuellement engendrer des commandes prestigieuses pour Dren.


Frère Alband:
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Sam 17 Sep 2016 - 10:43
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Le Pygargue
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Le Pygargue
Il est hors de notre pouvoir de renoncer à cet amour.
- Hélas ! dit Ogrin, quel réconfort peut-on donner à des morts ?



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Le procès du Pygargue avait fait couler de l'encre en grande quantité. Était-ce la cause de cette sordide affaire de possession qui pressait les curieux ? Ou alors celle d'un Grand de l'Empire, un De Everhell de Palmyre, qui paraissait les fers aux poignets pour triple désertions traînant dans les foulées de ses bavures le déshonneur de sa Maison ? Ou encore tous ces échanges, ces tractations passées avec Ram qui venait saupoudrer le tout d'une pincette d'aventure aux allures de contes de milles et une nuit ? Il y avait les accusateurs, les badauds, les outragés, les opposants, les adeptes.. De partout dans la cité de Jade, on trompeter, on jurait, on parlait, on accusait, on défendait. La Maison De Klemmens s'était mise de la partie, demandant justification et réparation -à comprendre rémunération- pour la mort de l'un des leurs. Ce fut la fin de la Résolution des deux Maisons liant depuis des temps immémoriaux les De Everhell aux De Klemmens. Le Ministre de la marine de l'Empire d'Ambre, messire Honoré De Duprat en personne, avait suivi l'affaire de près, ajoutant ce grain de poivre au scandale déjà grondant qui secouait toute la cité. En tant que représentant suprême de l'ordre naval de l'Empire, il réclamait à grands coups de poings sur la table la peine de mort pour le Pygargue.

« Après avoir assassiné, forniqué, déserté par trois fois, volé, endetté l'Empire, mené à la mort tout un équipage et menti sans se cacher, l'accusé va risquer quoi ? Un séjour au bagne pour quelques Tours et après nous le renverrons chez lui ?

Le Ministre réveillait les vieilles querelles et mésententes au sujet du billot et de la peine de mort, censément abolie dans tout l'Empire par Akemi Hime. Très vite, divers partis de par l'Empire élevèrent leurs voix à celle du Ministre. Comment récompenser une triple désertion doublé d'un assassinat, si ça n'est à l'aide d'une douce corde de chanvre et d'un bel échafaud ?

Les De Klemmens appuyaient les propos du Ministre, se dissimulant sous leur dû compensatoire en propos de l'assassinat de Horace De Klemmens à Prébois. Plusieurs fois, la cour avait dû interrompre le procès, la cause étant l'absence de divers témoins, divers témoignages ou divers documents.

- La vraie justice ne sera satisfaite qu'une fois ce traître pendu ! déclarait avec insistance le Ministre. Bons Dieux, qu'on en finisse !

Si l'on eut comparé auparavant le Premier Secrétaire Général Messire Madère d'Angalmar à un rat, alors le Ministre eût été un dragon, et ses élocutions étaient de véritables combustions, mettant le feu aux poudre des quatre coins de l'Empire ! Le cas des Ramiens qui réclamaient leur solde, l'arrivée de Akemi Hime comme avocate de l'accusé, celui de ces enfants orphelins à qui le Pygargue avait promis bel et glorieux avenir, l'Eradicate volé à un autre Everhell et tracté dans le sillage du Prince de Palmyre, ce mystérieux prêtre de Dwilin ayant fait le chemin depuis Prébois afin de témoigner en faveur de l'accusé, l'ordre de Sainte-Croix qui s'en mêlait ; tout contribuait à enfiévrer corps et esprits.

...Jusqu'au silence révoltant de la maison De Everhell elle-même sur l'affaire qui concernait l'un des leurs, et à laquelle elle ne prit aucune part. Terrés au fond de leur manoir dans la Palmyre, il eût été vain de chercher à la capitale ne serait-ce que l'ombre d'un De Everhell, à défaut de l'accusé, quand Sainte-Croix, le Ministre de la Marine et toute la maison De Klemmens avaient fait le déplacement avec clairon et trompettes.

Et c'est en tout un incendie juridique, économique, militaire et religieux (puisqu'il concernait la Marine nationale ainsi que l’Élue Divine d'Ohiel elle-même) qui faisait se pourlécher toute la capitale de la grande nation de l'Est.

- J'entrerai en cour martiale, confia Le Pygargue à son avocate Akemi Hime, non par crainte du châtiment que j'appréhende, il m'est fort requis ; mais si cela pouvait l'être, par le rachat de l'honneur. Non point le mien. Mais celui de mon Lieutenant.

Akemi Hime lui avait conseillé de garder le silence tout le long de l'audience, ce qui lui avait valu par la suite un : "il se tait ! Mais bien sûr qu'il se tait ! Cela prouve bien qu'il n'est qu'un lâche !" de la part d'un Ministre de la marine outragé.

Au bout de trois assises, dont l'effervescence ambiante ne demeurait plus à faire ni à parfaire, les réquisitions du procureur furent suivies, et l'on entra en voie de condamnation. Le Pygargue ne fut point inculpé pour le meurtre de Horace de la Maison Klemmens, ni pour sodomie. Le témoignage de Dren Hortys, qui avait pratiqué lui-même l'exorcisme sur sa personne comme son frère défunt en avait pris possession fit bon effet. Le juge lâcha sa sentence.

En premier lieu, Le Pygargue devra racheter son honneur aux yeux de l'Empire, et principalement aux yeux de l'offensé, désigné ici comme étant Messire le Ministre Honoré De Duprat.  Il devra marcher vêtu d'une simple bure de tissu (portée par de nombreux criminels avant lui) du tribunal de la cité de Jade Étincelante jusqu'au ministère de la marine, ce qui impliquait traverser presque la capitale entière. Une fois arrivé, les lois imposaient qu'il lave les pieds du Ministre comme demande symbolique de pardon. A cette seule condition, le Ministre de la marine devrait le lui accorder. Par la suite, il était condamné jusqu'à la fin de ses jours au bagne impérial, comme on l'appelait, ou aux chantiers forcés. Il s'agissait de l'entretien de routes, de bâtiments publics, de ruelles sous la surveillances de gardiens accomplis. Le solde des marins Ramiens sera payé par l'Empire d'Ambre, et les enfants perdus confiés à un orphelinat. En revanche, la maison De Everhell, étincelante de par son absence, rembourserait à ce dernier toutes les dettes accumulées par l'accusé au cours des dix derniers Tours, en plus des dettes contractées à Alkhalla, auprès de Ram. A moins que l'accusé, à la demande du calife, aille purger sa peine en terres Ramiennes jusqu'à épuisement de cette dernière. La cour se désintéressait des requêtes de la Maison De Klemmens.

~



Un céleste souvenir que tente de garancer les mauvais sanglots faisant écho à ma détresse, une douce empreinte, voilà ce qui m'apparut au travers la Lune d'Ocre du règne d'Isielle de notre Tour au lendemain de ce procès, tandis que je me suis placé là, prenant plume, encrier et écritoire, et vous écrivant remémorant votre doux souvenir. Une blessure ne guérit point parce que l'arc est affaibli. J'escompte, mon âme, que le vieil arc que je suis devenu, lézardé et fendu, ne puisse faiblir davantage. Tant de fois j'ai dû recommencer l'écriture de cette lettre. Ma main tremble. Elle tremble toujours. Je suis devenu mauvais calligraphe. Si j'avais pu lever un coin du voile épais qui couvre l'avenir, ou si j'avais seulement rêvé le sort qui nous attendait, je me serai brisé la tête à l'encontre des barreaux de cette geôle.

Il n'existe point de bel idéal qui justifie de si grands tords, je me le répète en mon âme et confiance. Si la ferveur d'une justice divine existe bel et bien, mon ami, vous ne devriez requérir de cette place aux cieux qui est la vôtre l'aboutissement d'une telle affaire. Un jour, tout prendra fin, nous sauverons toutes nos âmes et les enverrons joyeuses à leur domiciles. Ensemble.


Je dois vous laisser, bien-aimé camarade, car je m'apprête à entreprendre ma marche de la honte.


A vous corps et âme, mon très cher Horace, car vous fûtes à la fois mon ciel et ma mer.



Ps : Vous êtes parent d'un fils fort charmant.




M.V.D.E


Le Pygargue


~



- Celle-ci est pour toi, mon doux ami.

Le Pygargue expédia sur le sol de sa geôle la cigarette qu'il venait de consumer jusqu'à sa moitié, et l'écrasa avec son talon. L'heure était l'heure. Les Dieux comme les hommes n'aimaient pas attendre. Il balança aux côtés de la cigarette fumante -la seule qu'il avait réussi à se procurer en plus de quatre Lunes d'incarcération- son haut-de-forme et sa cape. Il se débarrassa de son pourpoint, son gilet, ses ceinturons, sa chemise. Il se débarrassa de tout. Une fois revêtu comme la coutume -et le juge- l'exigeait, il sortit, presque nu et encadré par quatre gardiens munis de gysarmes. On frappa du tambour.

L'Empire d'Ambre était habitué à ces "marches de la honte" comme on disait ; ou bien "marches de pardon". Lorsqu'il y avait insulte à l'honneur, la capitale prescrivait réparation pour l'honneur. Théoriquement, les impériaux étaient donc habitués à ce que des criminels défilent de la sorte, d'un bout à l'autre de la ville. A chaque fois, la destination était différente. Le point de départ, en revanche, demeurait le même : le grand tribunal Impérial de Jade. Parfois, le peuple et la noblesse se désintéressait royalement de l'affaire, et il arrivait donc qu'un criminel fasse sa marche de pardon sans rencontrer autre chose sur sa route que des regards vite désintéressés et la curiosités des enfants dans les rues. Voici donc, se dit Le Pygargue, que j'entame ma marche de la honte. Vers mon cœur tout mon sang se retire, pourtant je ne devrai rencontrer trop de fous à mon passage. Il fut surpris de constater qu'il se trompait lourdement. Tout comme les aspirations du Ministre Honoré De Duprat avaient ébranlé la capitale toute-entière, cultes y compris, la marche de pardon imposée au cadet De Everhell devait ébranler les rues comprises entre le tribunal et le ministère. L'aube en habit bleu, le soir en haillon, ce fut par une impassibilité hélas habituelle que Le Pygargue riposta à l'amas de personnes -petites gens comme seigneurs- qui avaient fait le déplacement jusqu'au tribunal dans le but de le spolier. L'utilité des quatre gardiens gysarme en main fut attestée. Ils aidèrent le prisonnier à se frayer un passage au sortir du tribunal, et entamer sa procession.

Le soleil couchant face à lui, du haut des marches du tribunal de Jade, l'aveuglait tant qu'il dû placer son bras en visière. Il ne vit donc point la foule qui le huait, dans un premier temps. Lorsqu'il la remarqua, un assaut de panique le prit à la gorge, mais c'était trop tard car les gardiens avaient forcés le passage et le poussaient déjà avant, de peur de perdre la brèche qu'ils venaient de créer. Avant même que la marche ne commence, Le Pygargue les entendait appeler des renforts "au cas ou". Effectivement, en cas d'émeutes, quatre hommes ne sauraient faire le poids face à la hargne de toute une ville.

Il entendit crier à sa gauche et à sa droite des insultes comme s'écrasaient à ses pieds des crachats. Le Pygargue avait gardé enfermé dans ses geôles des pirates durant des Tours entiers. Il était habitué à cela. "Sodomite" , "enculé", "pédé" , "fornicateur" , "fillette". Il eut un rictus en les entendant. On croirait refaire Prébois. Il ne put s'empêcher de songer à son frère. A une époque lui-aussi avait eu des ennuis avec la justice de l'Empire suite à des accusations de fornications. Mais Mickël-Bervers avait été acquitté, donc il n'avait pas dû se plier à une marche de la honte. Mais Bervers avait un père qui s'était précipité à son aide et l'avait tiré de là. Aujourd'hui, leur père n'était pas là pour lui.

Donc il avança.

Le sol de la cité de Jade Étincelante étincelait réellement avec les rayons d'un soleil crépusculaire à ras du sol. Néanmoins, il parvint tout de même à surprendre le Pygargue par sa froideur sous ses pieds nus. Peu importait. On envoya à son visage quelque chose de malodorant et il vit qu'il s'agissait d'une charogne de pigeon biset. Le Pygargue s'en écarta. On lui en envoya une autre, de corbeau. Les corps de plume grises, noires ou blanches selon, s'écrasaient au sol de façons distordues et démises. Du sang lui jaillit plus d'une fois au visage, il en tâcha son vêtement. On le huait.

- Tu es la ruine de l'Empire, Everhell !
- Mort au traître !
- Mort à ta maison !
- On devrait t'empaler !

Avance, Pygargue...

Il y avait même un barde malformé et disgracieux qui accompagna tout guilleret la procession, chantant sur son luth quelques-uns de ces vers qu'il semblait avoir composé lui-même pour l'occasion :



Everhell, pire est ta tête que mes pieds
Moi je boite des deux, je l'avoue,
Mais toi, pédé, des trois avoue.



Le Pygargue ne lui accorda point l'ombre d'un regard. De toutes façons, les gens laids ne pouvaient produire que des choses laides. N'est-ce pas ?
Le ministère se trouvait à un peu moins d'une demi-lieue de la cité de Jade Étincelante. Il n'en avait pas fait le quart. Autour de lui on huait, on tapait du pied, on riait.

- Lorsque nous dépasserons les quartiers des ménorhées, lui souffla l'un des gardiens près de l'oreille, cela se calmera.

En plus d'oiseaux morts qui s'écrasaient à son passage, on lui lançait au visage des nœuds coulants. Des amuseurs parmi la foule tentaient de faire fortune en se produisant auprès des enfants, agitant sur chacun de leurs doigts des figurines confectionnées en vitesse, à l'effigie du Pygargue, de Akemi Hime, du juge et du Ministre de la Marine. Le clash avait marqué les esprits. D'autres vendaient des gris-gris ou des nœuds coulants déjà noués au public. De la boue, des pots de chambre, des vêtements et des poings levés brandissaient l'air. Ce fut une véritable pluie de nœuds coulant qui percutèrent le prisonnier, tandis que certains se servaient des leurs dans le but de le fouetter lorsqu'il passait près. Les gardes commencèrent à se servir plus ardemment de leur gysarmes. Du renfort arriva. Un homme se dévêtit complètement à la vue du Pygargue, et brandit son sexe entre ses mains sales dont le majeur droit manquait :

- Suce-moi Everhell !

Il reçut aussi des feuilles d'artichaut au visage, aliment jugé comme malpropre car habituel des parfaits libertins. Il n'avait point fait un kilomètre qu'il s'écroula, manquant de renverser un établi sur le marchand qui le tenait. La gorge en feu, le sang cognant si fort dans ses tempes que ses oreilles se bouchaient, Le Pygargue songea qu'il ne saurait faire un pas de plus. Un prêtre d'Ohiel, paladin, accourut afin de le bénir.

- Vous êtes un traître mon fils, un hérétique, un flétri et un sans-nom. Vous en avez trop dis. Vous en avez trop fais. Vous n'êtes plus qu'un cadavre palpitant qui, par la bonne grâce des dieux, se tient encore sur ses deux pieds à ce jour. Il y a eu insulte à l'honneur. Vous devez réparer par l'honneur. Après cela, le Ministre et Ohiel vous accorderont leur pardon. Relevez-vous.

Lorsqu'il atteignit le Ministère, le Pygargue songea que ce prêtre avait raison sur un point au moins. Il n'était plus rien d'autre qu'un cadavre ambulant.

~



- Fermez les portes ! ordonna l'un des prêtre présents au ministère et qui accueillit sous son épaule le déchu.

Effectivement, à la sortie des quartiers les plus enfiévrés, l'agitation était tombée. Cependant cela n'enlevait rien au fait que la capitale de l'Empire d'Ambre n'avait plus connue une telle marche de la honte depuis des Tours et des Tours !

- Vous allez bien ?

Le Pygargue, bien trop pressé de toutes parts lors de ses derniers instants, repoussa le prêtre sans pour autant répondre. Un épais voile blanc faisait à son visage un capuchon.

- Laissez-moi vous aider !

Ledit prêtre, au visage bien jeune, essuya les abjections qui salissaient son visage d'un mouchoir bien blanc.

- Et bien, monsieur mon cousin, vous avez bien changé ! Il est vrai que la dernière fois que je vous avais vu, je n'étais qu'un enfant. C'était lors de l'appareillage de votre Prince de Palmyre.

Le Pygargue leva ses yeux clairs à la recherche de ceux de son interlocuteur tandis que les gardiens laissaient se poser sur le sol du ministère leur gysarme, soulagés.

- Je n'ai point la prétention de vous connaître, lâcha simplement le Pygargue.
- Je suis le beau-frère de madame votre nièce.
- Cousin Lancen.

Le Pygargue fut surpris de constater les effets du temps sur autrui. Onze Tours. Onze Tours étaient passés depuis ce jour où il avait pris le commandement du Prince de Palmyre. Le cousin Lancen n'était alors qu'un jeune enfant. A présent, c'était un jeune homme qui se trouvait près de lui. Dont le frère, à ses dires, était marié à...

- Hilena est ici ?
- Seigneur, non !

La mièvrerie mesquine dansant dans les iris de ce jeune De Everhell rebutèrent le Pygargue. Il le repoussa sans un mot, se redressa et se dirigea vers les appartements du Ministre de la Marine, escorté par les gardiens de prison et deux valets. Le cousin Lancen lança dans son dos :

- N'oubliez pas monsieur mon cousin, pour laver les pieds du ministre, il faut s'agenouiller. Mais je ne m'en fais pas ! Vous avez l'habitude apparemment.



~



Six Lunes passèrent. Le Ministre de la Marine n'avait pas accepté les "excuses" du Pygargue, choisissant la tête haute de passer lui-même en jugement au tribunal de Jade, plutôt que, selon ses propres dires : "un simulacre de justice tout juste bon à nourrir et encourager la décadence jusqu'au cœur de l'Empire !" . Le déchu Pygargue se désintéressa de politique. On l'envoya aux travaux forcés, comme convenu, au nord de l'Empire.

La cru d'un fleuve provoquant de récurrentes et destructrices inondations aux cités et villages alentour, l'Impératrice se servait de ses criminels et repris-de-justice à l'édification d'un barrage. Ainsi, celui que l'on nommait Capitaine Pygargue passait ses journées, qu'il pleuve, vente ou neige, à tailler et tracter des pierres de la taille d'un taureau pour les plus grandes jusqu'à la digue future. Le soir, lorsque les forçats étaient en déplacement comme c'était ici le cas, ils dormaient à l'intérieur de grandes barricades de bois que les gardiens les obligeaient à monter eux-même sitôt la nuit tombée. Ils les démontaient chaque matin, car l'escadron était mobile la plupart du temps.

- Everhell, tu as de la visite !

Le Pygargue ouvrit un œil tandis qu'il venait juste de s'allonger, jouissant par avance d'un repos mérité. Il n'était point habitué au travail physique, ni taillé pour, et ses journées le minaient. Les forçats parlaient peu entre eux, non pas qu'on le leur interdisait, mais la plupart étaient des criminels endurcis, issus de castes sociales différentes, ou des prisonniers de guerre, et donc n'avaient rien à dire.

- De la visite, Messire ?
- Une dame.

On ne lui permit point de sortir de l'enclos, mais il put se rendre dans l'un des coins de ce dernier, isolé, afin d'y voir...

- Hilena ?

Depuis tout ce temps. Tous ces Tours, il n'espérait plus !

- Acceptez mes excuses. Nul homme ne devrait se présenter à vous dans une telle tenue.

Mal rasé, ses cheveux étaient sales et c'eut été un euphémisme de dire la même chose du morceau de brocart qui faisait sa chemise.

- Oncle Vinzent, nous nous sommes arrangés avec la compagnie du prince de la cité Topaze de Palmyre, ainsi que Ram et l'autorité impériale. Avec quelques fureurs qu'on ait fait votre mépris, veuillez prêtez oreille attentive à mes propos. Une proposition va vous être avancée, vous devrez y consentir. Alors mon oncle, vous quitterez l'Empire et pourrez éponger vos dettes dans la cité Ramienne d'Alkhalla sous les bonnes grâces du sultan Alhed El Oussam que vous connaissez, et qui vous connait.

Le Pygargue pressa ses mains autour des raies de bois qui faisaient office de barreaux.

- Vous vendez ma personne à Ram ?

Hilena De Everhell pressa davantage contre son visage délicat le châle noir qu'elle enserrait entre ses mains délicates aux yeux de son oncle.

- Vous vous êtes vendu tout seul.
- Mon honneur affligé n'imita point mes exécutions. J'ai antérieurement adressé une lettre d'excuses au nom du calife Oussam. J'ai fais don de mon épée de feu, celle-là même qui me coûta tout ce que j'avais, à la Maison De Klemmens dans l'espoir qu'un tel geste apaiserait les tensions effectives et élevées entre nos deux Maisons. J'ai courbé l'échine sous la soumission et l'humiliation ci-nommé Marche de la honte. J'ai abandonné tout ce que notre Empire a bien daigné m'aliéner aux pieds du Minitre de la Marine. Mon trépas ne calmerait point sa haine. Je me laissa enlever au nom de forçat jusqu'à ces chantiers publiques, ceux-là même que vous foulez au pied et dont vous apercevez aujourd'huy toute la misère. Et j'y demeurerai jusqu'à l'instant de mon trépas ! Jusqu'à ce que j'en crève ! Que demandez-vous de plus qui ne fusse au-delà de mes moyens !
- Retirez vos vilaines paroles aux frères des marauds, oncle Vinzent ! Êtes-vous donc aveugle pour ne point voir ? Vous nous avez endetté, mon cher oncle. Et sur plus d'une générations ! Vous souffrez, mais nous souffrons aussi. Notre Maison doit à ce jour encore six mille écus d'or et huit-cent-cinquante d'argent aux coffres d'Alkhalla, nous sommes contraint d’hypothéquer et de vendre ! Tous les jours des missives de menaces nous sont adressées. Des chiens furieux sont lâchés sans bonde sur nos propriétés, ainsi que des oiseaux morts à qui l'on a retiré les yeux. On parle de fornication derrière nos murs. Nombreux sont les De Everhell qui supplient Finil de parler de vous à l'oreille de Canërgen. Vous êtes mort aux yeux de votre père.
- Oyez que j'ai fais tout ça pour vous, Hilena. Vous et seulement vous. Comment l'homme que je suis supporterait ce que Bervers vous fit subir ? Je l'ai chassé par delà l'horizon et l'idéal ma nièce, dix Tours de ma vie, de la Mer sans Fin jusqu'aux froides eaux de la Passe. Par amour pour vous, pour venger votre honneur. Tout bon vouloir devrait avoir son dû. Nos dettes ne peuvent apparaître que comme les conséquences fâcheuses d'une mauvaise rencontre dans la grande mer de l'Ouest. Vous le savez. J'ai tout expliqué au juge !

Le Pygargue eut voulu briser entre ses poings serrés ces barreaux.

- Hilena. Soyons libres de nos obligations. Je n'ai que trop couru ces onze derniers Tours. Par la terre, par la nue et par les mers. Cela suffit. Soyez libres, vous de vos obligations, et moi des miennes.
- Comment osez-vous...? Mon père jamais ne me fis autant de tort que vous ne m'en causez vous à ce jour. Aujourd'huy, lui ne vit plus dans mes pensées. En revanche j'ai honte de vous.

Si un glas eût sonné en cet instant, le Pygargue l'aurait reconnu comme le sien. Il avait à présent la confirmation qu'il venait de tout perdre. Il tenta une ultime instance qui ne pourrait jamais rattraper la désespérance de la précédente, il le savait.

- Et Mashaëlle ? 
- Ah oui, votre épouse. Ce qu'il en est ? Qu'espérez-vous entendre oncle Vinzent ? Mashaëlle subit tous les désagréments de vos prérogatives judiciaires, bien sûr.
- Pourquoi n'est-elle point venue me voir ?
- Sa grossesse la fatigue. Vous ne pouvez exiger d'elle qu'elle fasse tout ce chemin.
- Je vous demande pardon ?
- Votre épouse est enceinte. L'auriez vous déjà oublié oncle Vinzent ?
- De moi, bien sûr. Ah tiens ! Fi ! Allons ! Et en onze Tours en mer, quand est-ce que j'aurai su estimer le moment afin de mettre enceinte ma femme, quand bien même les traits de son visage commencent à s'effacer de ma mémoire !

A ces mots, Hilena détourna un la tête, un peu, mais suffisamment aux yeux de son oncle.

- Allons, allons ! Vous le savez ! Avant que la garde de Palmyre ne vous conduise aux arrêts sur le port de la
Topaze ; vous fûtes déjà retourné au manoir afin de la trouver. En onze Tours de séparation, il n'y a rien qui puisse me sembler plus anormal à cela.
- Hilena je vous en prie. Qui a répandu ces aberrations ? Laisserez-vous tant de mots engouffrer votre esprit que j'eusse connu si éveillé ? Tout le monde sait que l'on m'avait ferré à bord du Palais d'Agathe du Capitaine Frédérique De Klemmens lorsque la garde m'emprisonna ! 
- Oncle Vinzent, pleura tout-à fait la jeune femme en s'éloignant d'un pas, la visage enfoui dans les mains, je vous en supplie, avec tout ce que Finil m'accorde de grâce, ne provoquez point de nouveau scandale ! Il faut que vous partiez au plus vite pour le sultanat de Ram.

Au loin, un oiseau de nuit hulula. Et une étoile filante vint s'écraser au-dessus d'eux. Ce fut les seuls perturbateurs de ce silence funèbre qui enveloppa les deux De Everhell. Le Pygargue avait compris très clairement tous les demi-mots échappés des lèvres de sa nièce.

- Devrais-je toujours faire don de ma vie afin de réparer les torts causés par mon frère ? 
- Vous aviez un poste qui vous était assuré en tant que Prévot mon oncle. Il était là, il vous attendait. Mais vous avez choisis Ariel plutôt que Ohiel, afin de donner la chasse à mon défunt père que vous avez crucifié par la suite. Donner de votre vie afin de réparer ses torts, vous l'avez toujours fais. C'est même ce que vous savez faire de mieux, oncle Vinzent. Et ce choix, vous l'avez fais de vous-même il y a plus de onze Tours.

Si le Pygargue n'avait point été un homme d'expérience, il n'aurait pas su.

- Ni propos mal avisés ni basses applications vous dominaient jadis. Vous parlez comme un autre, ma nièce. Je ne vous reconnais plus.

Hilena essuya les lourdes larmes qui noyaient ses joues.

- Vous parlez pour un autre, reprit le Pygargue d'une voix que le deuil brisait. Qui donc ? Le cousin Lancen, peut etre.
- Je vous dis adieu, mon très cher oncle. Puissiez-vous dorénavant avancer main dans la main avec Finil sous les étoiles de Ram. »

Les froufrous de sa traîne noire se confondirent avec la nuit, et les cieux parurent compatirent à sa peine car un fin crachat se mit à tomber sur le sol Impérial. Le Pygargue songea alors que sa nièce était depuis toujours sa plus douce, sa plus dangereuse et sa plus mortelle ennemie. Et elle venait de le vaincre.

Incapable d’étouffer le flot de sentiments menant en pleine tempête le navire démâté qu'il était, il se laissa aller et posa son front contre ses bras afin de mieux y pleurer.


Sois sage, ô ma douleur ; et tiens-toi plus tranquille...
Mar 4 Oct 2016 - 11:10
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