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[Terminé] [Flashback] [PV Nokuto] Débarque-pas ton sac, on va pas lézarder ; c'est pas encore demain qu'on va se reposer !
Phadria Red
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ô saisons, ô châteaux !
[Et, si le malheur m'entraîne,
Sa disgrâce m'est certaine.

Rimbaud



Spoiler:



Les deux frères se trouvaient à l'étage d'une auberge peu reluisante, sur les quais d'un port malpropre et sordide, au bas mot, de La Verte, l'une des sept îles des Îles de Jade situées au Nord-Ouest de Ryscior. L'aîné abaissa la capuche verte qu'il portait, et prit le temps d'observer de ses yeux clairs sont interlocutrice. La femme était fort mystérieuse et faisait froid dans le dos. Une foulard dissimulait la partie inférieure de son visage, et ses deux yeux, perçants, n'avaient point lâché un seul instant ses interlocuteurs qui lui faisaient face.

Il allait de soi que les trois protagonistes n'étaient pas censé se trouver en ce lieu en cette heure.

Le plus âgé, Jian, âgé de trente-trois Tours en ce jour, déposa un petit sac d'écus d'or sur la table qui le séparait avec son frère de celle qui se faisait appeler, ou surnommer, il n'en avait cure, Nokuto. Nokuto, la tueuse à gage réputée de la Verte.

« Nous sommes bien d'accord, reprit le frère aîné, la moitié en ce jour, et le reste une fois que notre cible sera dans les enfers de Canërgen, preuve à l'appui.

Il croisa les bras tandis que la femme mystérieuse prenait l'or, et semblait compter le nombre de pièce. C'était une très jolie femme, songea le frère aîné, jeune et bien faite de sa personne. Pour sa part, il en aimait une autre et était marié à ce jour, donc peu lui importait les formes généreuses de la tueuse à gage. Mais il songeait bien que son frère cadet, Beryl, ne devait point penser de même.

- Il y a peu de temps, reprit Jian, je me suis rendu sur l'une des petites îles quasi désertes entourant les sept Îles de Jade principales, tout à l'est de celles-ci. Et c'est tout-à-fait par hasard que j'y ai découvert la présence de trois pirates non moins réputés. Le Capitaine est un homme qui se fait appeler l'Ondinois. J'ignore qui sont les deux autres, il y a une femme et un vieux. Surement son Second ou des forbans. L'Ondinois est connu pour avoir mené il y a environ cinq Tours l'attaque d'une de nos petites îles que comporte les sept principales des Îles de Jade : Eudézée. Les pirates ont attaqué sans coup de semonce, comme des lâches et des chiens. Ils ont mené leur raid un jour de grand marché, n'ont épargné personne. Les enfants étaient éventrés sous les yeux de leurs mères qu'on violait, les hommes passés au fil de leur sabre. Je le sais. J'y étais et mon frère aussi.

Il s'accorda une pause avant de reprendre.

- J'aurai pu avertir les habitants de mon île natale ou prévenir la garde blanche de Kaer afin qu'ils arrêtent ce fils de pute dans les règles. Mais je ne l'ai pas fais. J'en ai simplement parlé à ma femme, qui m'a supplié de ne rien tenter de risqué. Je l'aime, alors je l'ai écoutée et n'ai rien dit à personne. Je ne suis pas retourné sur l'île pour tuer ce chien d'une flèche entre les deux yeux. Je me tourne vers vous. Si je n'ai pas averti la garde blanche de l'île voisine, c'est parce que je ne souhaite pas que ce pirate passe en jugement de façon officielle, même si au final, il serait pendu. Ces bâtards ont attaqué des innocents et ont fondu sur eux comme une meute de loups s'en prend à des agneaux, sans leur laisser la moindre chance. L'Ondinois à agi comme un chien, et je veux que vous le tuez comme un chien à présent. Je veux qu'il meurt rapidement, sans comprendre ce qui lui arrive, sans avoir le temps d'implorer les dieux.

Il desserra les poings qu'il avait serré de rage durant le temps de son discours.

- Vous devrez débarquer de façon discrète sur l'île du cap vert, c'est là où l'Ondinois se cache. Lorsque vous m'aurez rapporté sa tête, je vous paierai le reste de la somme convenue.

Ce fut son frère qui ajouta, croisant les bras à son tour.

- Une fois cela fait rendez-vous sur l'île d'Athor, à l'est des Îles de Jade, et demandez Jian ou Beryl Red. Marché conclu ?
Dim 1 Mai 2016 - 22:39
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Nokuto
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Tueuse à Gages
Nokuto
 Le Capitaine avait arrêté son navire, le temps de ravitailler avant de partir pour "un long voyage". Nokuto n'avait pas vraiment saisi de quoi il parlait. Mais elle pouvait comprendre, peut-être, son désir de voyager. Partir, recommencer sa vie. Ailleurs. C'était ce qu'elle avait toujours voulu, elle.
 Et désormais, elle en avait l'occasion. Le Capitaine l'avait déposé sur une île, la Verte. Il lui avait dit qu'ici, elle pourrait user de ses… talents comme elle le souhaitait. À l'époque, elle était pleine d'appréhensions, de peur même, un peu. Où aller ? Par quoi commencer ? Existait-il une place pour elle ici ?
 Mais elle avait balayé ces angoisses d'un revers de la main. Elle se créerait elle-même sa place, quoi qu'il en coûte.

 À présent, des lunes plus tard, tandis qu'elle se trouvait face à ces deux hommes qui lui demandaient un service, dans le coin reculé d'une auberge miteuse et discrète, elle se sentait à sa place. Elle se trouvait là où elle devait être.
 Dès son arrivée sur la Verte, elle s'était senti dans son élément. Les Îles de Jade étaient un lieu propice au meurtre, en particulier la Verte, et Nokuto avait vu sa renommée croître très rapidement, elle fut contactée par des clients de plus en plus aisés et gagnait donc de mieux en mieux sa vie. Elle envisageait sérieusement de s'installer ici à long terme.
 Sortant de ses pensées, l'Amazone considéra les deux hommes qui lui faisaient face.
 L'un portait une longue cape vert sombre, dont il abaissa la capuche au début de leur entretien. Un homme honnête, donc. Généralement, la plupart de ses interlocuteurs dissimulaient le plus possible leur identité. Comme s'ils avaient honte de la fréquenter, ce qui était sûrement le cas d'ailleurs, les hommes se trouvaient lâches s'ils n'effectuaient pas le travail eux-mêmes. Mais ces deux-là, dont les traits étaient d'ailleurs assez semblables, ne se cachaient pas.
 Le visage du deuxième, plus jeune, comportait beaucoup de points communs avec celui de l'autre. La Tueuse en déduisit qu'ils devaient être frères.

 L'aîné commença son récit tandis qu'elle comptait soigneusement les pièces de la bourse qu'il venait de lui donner, la moitié du salaire prévu. Elle recevrait le reste après.
 L'histoire qu'il lui raconta la choqua un peu. Un peu seulement. Maintenant, elle était habituée aux horreurs dont étaient capables les humains envers leurs semblables. Mais ce qu'elle apprit là atteignait un niveau tout de même difficilement supportable. Ce qui la révolta le plus, ce fut le fait que des femmes furent violées. Comment pouvait-on se permettre de féconder des femmes sans leur accord ? Qui pouvait être assez barbare pour oser faire cela ?
 L'homme lui avoua qu'il n'avait pas agit car sa femme ne l'avait pas souhaité. Sa femme… elle avait eu peur pour lui. Au point de ne pas le laisser faire son devoir de vengeance. Et lui l'avait écouté. Pourquoi ? L'Amour, tel était le nom que Nokuto entendait ici et là, depuis qu'elle avait quitté la Jungle. L'Amour… L'Amazone ne comprenait toujours pas ce sentiment.
 Mais ce n'était pas le moment d'y penser. C'était le moment de passer à l'action. On lui avait confié une mission, elle la mènerait à bien. C'était tout. Les sentiments humains étaient pour l'instant bien trop complexes pour qu'elle se permette d'y réfléchir.
 La Tueuse hocha la tête pour marquer son accord et montrer qu'elle acceptait le marché et ses conditions, puis s'en fut comme elle était venue, silencieusement.

 Nokuto nota mentalement tout ce qu'il était bon à savoir sur sa cible.
 Il se faisait appeler l'Ondinois, avait attaqué l'île d'Eudézée, ou plus précisément son grand marché mensuel, Port-Dual, il y avait cinq Tours. Lui et son équipage avaient tué et humilié femmes, hommes et enfants. Il était à la tête de 800 pirates sanguinaires. Les forbans se trouvaient actuellement sur l'île du Cap Vert. Le Capitaine devrait mourir rapidement, sans comprendre ce qui lui arrivait. Puis elle devrait ramener la tête de l'Ondinois à ses clients, sur l'île d'Athor, en demandant Jian ou Beryl Red. Les consignes étaient claires, simples, précises. Les deux frères étaient des hommes efficaces, qui savaient ce qu'ils voulaient.

 L'Amazone décida de se rendre tout d'abord sur le lieu de l'attaque. Même si celle-ci commençait à dater un peu, cinq Tours n'étaient pas suffisants pour effacer la douleur, les habitants survivants pourraient sûrement lui en apprendre un peu plus. Aucune information n'était négligeable. Quand elle saurait tout ce qu'il était nécessaire de savoir, elle passerait à l'attaque, d'un seul coup précis.

 Le lendemain matin donc, Nokuto débarqua dans le port d'Eudézée. Devant elle, une ville aux murs de pierre grise s'étendait sur des kilomètres. Les maisons paraissaient assez cossues. Elles étaient plus ou moins disposées en cercle autour d'une immense place centrale, plus grande que la ville en elle-même. Sûrement le lieu du massacre.
 Les villageois étaient plutôt renfermés, on n'entendait pas de cris d'enfants dans les rues, et seuls quelques étales peu garnis animaient la place. Cela faisait cinq Tours que le grand marché n'avait pas eu lieu. La ville n'était presque plus animée à présent.
 Nokuto s'approcha d'un étale. Une grosse femme à l'air aigri y vendait des pommes aux couleurs attrayantes, et pourtant personne ne se pressait devant son stand. L'Amazone l'aborda directement. Elle n'aimait pas tourner autour du pot.

 -Bonjour. Depuis combien de temps habitez-vous ici ?

 La vendeuse eut l'air surprise par sa question.

 -Depuis assez longtemps pour avoir vécu, voyez-vous… certains évènements qui se sont déroulés ici-même.

 Nokuto, satisfaite de la réponse, décida d'entrer dans le vif du sujet :

 -Je suis justement venue pour en apprendre un peu plus sur ces "évènements". J'aimerais que vous me parliez de ce qui s'est déroulé sur cette île, il y a cinq Tours, le jour du grand marché, Port-Dual.

 La femme se décomposa, frémit, puis elle se ressaisit quelque peu et réussit à répondre, la voix toutefois tremblante :

 -J… J'étais installée au même endroit que maintenant, c'est ma place, au marché j'ai réservé mon stand ici, parce-que, voyez-vous, on est à l'ombre au moment le plus chaud de la journée, et puis du coup les pommes ne pourrissent pas et les clients s'approchent plus facilement, enfin… Ce matin-là, un matin comme d'habitude, l'aube venait de se lever et la place était déjà bondée, voyez-vous, notre île est réputée pour son grand marché… Tout se passait bien, la vente était au-dessus de mes espérances, les clients souriants. Et puis ils ont débarqués.

 Elle s'interrompit, les yeux écarquillés, semblant revivre une scène qu'elle seule pouvait voir. Nokuto ne dit rien, attendant patiemment qu'elle continue, le visage impassible.

 -Il y en avait des centaines. J'ai vu l'homme, le Capitaine je pense, en premier. Il est arrivé en courant, le regard fou, le sabre à la main. J'ai vu le soleil se refléter dans sa lame quand elle s'est abattue sur le vendeur voisin. Sur le moment, nous étions tous trop choqués pour pouvoir réagir. Je… je me souviens, j'étais comme… comme hypnotisée par le sang qui coulait par terre. Et puis, j'ai vu la vague des pirates qui ont débarqué en hurlant, ils arrivaient par centaines, de tous les côtés ! C'était terrifiant ! Ça m'a sortit d'un coup de ma torpeur, voyez-vous, et le premier réflexe que j'ai eu a été de m'enfuir. Alors j'ai couru, couru, couru… Je suis allée me cacher dans le petit bois de derrière. Et… en courant… j'entendais les cris des femmes qu'on violait, des hommes qu'on égorgeait sous les yeux de leurs enfants épouvantés… Et… et… quand je suis revenue… les pirates étaient partis… et… j'ai vu… le sang… partout…

 Elle s'effondra, prise de sanglots incontrôlés. Nokuto avait eu raison, les souvenirs étaient encore frais dans les mémoires. Cette femme, traumatisée, n'avait oublié aucune des images rebutantes qui s'étaient imprimées à jamais dans son esprit.
 L'Amazone ne savait pas comment réagir à ces pleurs. Alors elle ne dit rien, ne s'approcha pas de cette femme, seule et terrifiée à l'idée que les forbans puisse revenir la tuer elle aussi, pour la réconforter. La Tueuse ne fit que déposer une pièce sur le comptoir, prit une pomme rouge sang, et s'en alla en croquant dans la chair juteuse. Elle avait eu de la chance de tomber sur cette femme qui avait parlé facilement.
 Il n'y avait rien d'autre à apprendre ici que ce que les deux frères lui avait déjà dit. Une preuve de plus de leur efficacité.

 Il ne lui restait à présent plus qu'à se rendre sur l'île du Cap Vert. L'Ondinois brûlerait bientôt dans "les Enfers de Canërgen", comme avait dit l'aîné. Même si Nokuto n'avait aucune idée de qui était Canërgen et où se trouvait son royaume appelé "enfers".
Sam 21 Mai 2016 - 15:25
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Phadria Red
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« Par des farces de nuit ton front est épié,
Ô Juste ! Il faut gagner un toit. Dis ta prière,
La bouche dans ton drap doucement expié ;
Et si quelque égaré choque ton ostiaire,
Dis : Frère, va plus loin, je suis estropié ! »

Rimbaud



[Terminé] [Flashback] [PV Nokuto] Débarque-pas ton sac, on va pas lézarder ; c'est pas encore demain qu'on va se reposer ! Chien_10

Fillipe L'Ondinois, Capitaine du Grand Corsaire



Le Capitaine pirate Fillipe, fils de Darko L'Ondinois, avait amené son fameux Grand Corsaire, vaisseau de ligne de fort tonnage, avec une capacité d’accueil de plus de trois-cent âmes et quarante-deux pièces de canon jusqu'au rivage de l'une des petites îles inhabitées de l'archipel des Îles de Jade.

Après un combat en mer qui s'était avéré éprouvant, le pirate avait eu un besoin urgent de calfater et caréner son bâtiment, et cette île lui avait semblé être un bon compromis. La moitié de ses compagnons avaient péri durant l'affrontement, et l'autre moitié, victime d'une étrange et soudaine épidémie, avait été enterrée sur l'île.

Le Capitaine L'Ondinois se trouvait donc seul et seul rescapé de cette tragédie. Où plutôt, presque seul. A ses côtés, deux de ses officiers, respectivement Maître Hidalgo, très bon bretteur et Maître Stu, originaire des Marches. Ainsi que la maîtresse des pièces du vaisseau, son amante depuis que le Grand Corsaire s'était affalé sur le sable blanc de la baie de l'île déserte, Camille dite Dagger, Fine Dague. L'épidémie avait atteint la jeune femme à la jambe, et très vite cette dernière avait commencé à pourrir vive, agressant les narines d'une odeur de mort, gagnant jour après jour des centimètres de peau saine. C'était le Capitaine en personne qui avait pris le risque d'épargner la vie de sa maîtresse des pièces en lui tranchant la jambe sur son sabre, au dessus du genou. Stu et Hidalgo avaient ensuite réussi à lui confectionner une jambe de bois, et, la donzelle devait véritablement tenir à la vie, car cette-dernière ne s'était point affectée.

Camille Fine Dague marchait de nouveau, plus vive que jamais, même si elle n'avait plus qu'un pied.

Quant à l'Ondinois, il tentait de se ressaisir. Il lui fallait réparer son vaisseau, et cela prendrait le temps que ça prendrait. Plusieurs semaines, probablement. Ensuite et bien... Il espérait que quelqu'un viendrait s'échouer sur l'île. Il s'en servirait comme moyen de la quitter, se joindre jusqu'aux Îles de Jade les plus proches et plus peuplées, et lever un nouvel équipage malgré la difficulté d'une telle entreprise.

On ne manœuvrait pas un vaisseau de la taille du Grand Corsaire à trois !

Mais pour l'heure, le Capitaine et ses trois hommes s'étaient construit sur la plage, à l'ombre des feuillages un abri un bois, ainsi qu'un puit leur permettant de récupérer l'eau de pluie et empêcher l'évaporation de celle qu'ils parvenaient à récupérer des lacs de l'île.

Hidalgo et Stu étaient parti en chasse aujourd'hui. Lui avait passé la matinée à collecter du bois pour son bâtiment, du bois et de la résine, afin d'en confectionner une pâte qui recouvrirait la carène du navire. Camille s'était placée à l'ombre, sur les récifs, et lancé sa ligne au travers les vagues et les eaux indigos.

Ils avaient partagé un poisson à deux, puis le Capitaine et son amante piquaient un somme tandis que les deux hommes avaient pour instruction de ramener du gibier. Heureusement pour eux, l'île ne manquait pas de tortues, de singes, d'oiseaux et de sangliers qu'ils pouvaient attraper et faire cuire.

Ainsi, nus l'un dans les bras de l'autre, Fillipe l'Ondinois et Fine Dague observait les vagues embrasser le sable blanc sans lassitude, déposant à chacune de leurs allées une fine particule d'écumes blanches.

Après tout, songeait le Capitaine. Puisque nous sommes naufragés, profitons-en. Demain est un autre jour. Nous pourrions tout autant être mort. Et il attira à lui le visage de sa jeune compagne afin de lui arracher un énième baiser.
Mar 24 Mai 2016 - 20:51
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Nokuto
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Tueuse à Gages
Nokuto
 Le Capitaine Jorje Dupré avait daigné emmener Nokuto jusqu'à l'île du Cap Vert pour une vingtaine de pièces d'or. "J'vais pas faire un aller-retour jusqu'à c't'île paumée gratuitement non plus hein !" avait-il bougonné. Et puis, c'était le seul à avoir accepté. L'Amazone avait donc payé sans trop rechigner et était montée à bord d'un vieux rafiot de pêcheur à la peinture toute écaillée. Le bateau était tellement petit qu'une dizaine de matelots suffisaient à le manœuvrer. Tous absorbés par leur tâche, ils n'avaient pas abordé Nokuto, et cela lui allait tout-à-fait. Accoudée prudemment au bastingage branlant, à l'avant, elle faisait face au vent avec bonheur, les yeux plissés. Les embruns salés lui fouettaient le visage. Étonnant qu'un vieux tas de bois comme celui-ci aille aussi vite.

 Après quatre bonnes heures de navigation, l'île commençait à devenir distincte, et bientôt elle se dressait devant eux. L'Amazone détailla la verdure qui recouvrait l'île. Une forêt touffue recouvrait presque la totalité du terrain. Une forêt vraiment touffue… Une jungle ?
 Nokuto écarquilla les yeux et son esprit replongea dans un souvenir flou.

 Une fillette d'environ cinq ans est assise à califourchon sur la branche basse d'un immense arbre. Dénudée, elle balance nonchalamment ses petites jambes potelées dans le vide. Ses longs cheveux de jais sont assemblés en une tresse défaite, piquée de feuilles et de brindilles. À une dizaine de centimètres en-dessous d'elle, une grande femme mure se tient adossée au tronc. Elle se taille une lance dans le bois sombre.
 Soudain, la petite bascule ses deux jambes du même côté, et se laisse tomber la tête en arrière. Ses genoux, fermement agrippés à la branche, la retiennent pourtant et elle se retrouve en cochon pendu. Elle regarde en silence l'Amazone qui se trouve en face d'elle, pas le moins du monde gênée de cette posture incongrue, puis elle dit :
 - Zar'Ila ?
 - Oui ?
 - Jusqu'à quel âge vivent les araignées géantes ?
 - Pourquoi cette question ?
 - Donne-moi d'abord une réponse.
 - Je ne sais pas trop… Je pense qu'aux alentours de 30 Tours, elles commencent à se faire vieilles. Pourquoi cette question ?
 - Elles me font peur. Je suis contente de vivre plus longtemps qu'elles.
 Puis la fillette se saisit d'une liane et glisse jusqu'au sol en silence.
 - On va s'entraîner, dis ?

 Nokuto s'ébroua. Pourquoi ce souvenir en particulier lui était-il revenu ? Mais elle recala cette pensée au fond de son esprit. Ce n'était pas le moment de se laisser aller à la nostalgie de sa vie passée. Il fallait se concentrer sur le présent, et justement le bateau venait d'accoster dans une petite crique sablonneuse.
 L'Amazone se tourna vers le Capitaine. Celui lui désigna une barque dans laquelle elle monta avec circonspection. Même si la sensation de glisse sur le bateau lui avait plu, elle préférait quand même la terre ferme aux eaux sombres et profondes, et cette barque lui paraissait très instable. Elle s'assit donc en tenant fermement les bords de l'embarcation et adressa un signe de remerciement au Capitaine tandis qu'un marin ramait vigoureusement jusqu'à la plage.

 La Tueuse ajusta sa besace sur son épaule, prit le temps de refaire correctement sa coiffure, inspecta le dessous de ses bottes en cuir solide pour vérifier qu'elles n'étaient pas trouées, puis pénétra sous les frondaisons de la jungle.
 L'humidité et la chaleur combinées collèrent aussitôt à sa peau, et elle inspira profondément pour s'imprégner de toutes ces odeurs familières. Ou presque. On était ici dans le Nord de Ryscior, et la végétation n'était pas exactement la même que dans son pays natal. Les couleurs étaient moins bariolées, il y avait moins de plantes carnivores qu'elle ne l'aurait cru. On entendait le bourdonnement incessant des moustiques, mais il n'était pas aussi agressant que dans la Jungle. Par contre, il y avait un nombre incroyable de lianes qui tombaient en cascade jusqu'au sol, formant parfois des rideaux de verdure.
 Plus elle s'enfonçait dans ce lieu où la nature régnait en maître, plus la luminosité baissait, et plus les bruits devenaient sourds. La sueur lui coulait sur le visage, le long de sa colonne vertébrale, de ses membres. La vie en-dehors de la forêt lui avait fait quelque peu oublier les conditions extrêmes de ce milieu souvent hostile, et elle en ressentait maintenant les conséquences. Avant, elle n'avait jamais eu aussi chaud… Néanmoins, il ne fallait surtout pas qu'elle baisse la garde. Elle était seule dans un endroit inconnu. Quels secrets renfermait cette jungle sombre ?
 Nokuto avançait donc prudemment, prête à dégainer une dague ou même un de ses sabres à la moindre occasion.
 Cette prudence lui sauva la vie.

 Le premier signe d'alerte se manifesta par un simple bruissement. Pourtant anodin, il fit s'arrêter net l'Amazone. Les yeux grands ouverts, les jambes fléchies, elle observa avec une immense attention ce qui l'entourait. Lentement, elle se saisit d'une dague dans sa main gauche et d'un de ses sabres dans sa main droite. Un long moment de silence lourd et total passa. On aurait dit que même le chant des oiseaux s'était arrêté. Cette partie de la jungle était très peu éclairée, et beaucoup de coins d'ombres l'entouraient.
 Le frottement, ultra léger, recommença, plus proche. Puis encore plus proche. La Tueuse plissa les yeux. En face d'elle se dressait un mur de lianes opaque. Le bruit venait de derrière.
 Un pas. Lent. Silencieux. Suivi d'un autre, tout aussi mesuré. Nokuto raffermit la prise de ses doigts sur le manche de ses lames. Elle respirait à peine. Elle était maintenant tout près du rideau de verdure. Elle mobilisa tous ses sens. Et c'est là qu'elle l'entendit.
 Une respiration. Humaine.
 Son sang ne fit qu'un tour, et avant que la personne cachée derrière les lianes ne puisse réagir, l'Amazone détendit soudainement les muscles de ses jambes, se propulsant à une hauteur inhumaine grâce à ses facultés de demi-elfe, rengaina en un mouvement fluide son sabre et se saisit au dernier moment d'une branche noueuse sur laquelle elle se hissa en un rien de temps. Un cri rauque retentit et elle vit de ses yeux écarquillés par l'adrénaline qui en était l'auteur.
 En dessous d'elle se tenait un homme à la peau mate et aux cheveux noirs. Il n'était habillé que d'un simple pagne dévoilant sa peau nue couturée de cicatrices. On voyait ses muscles rouler sous l'épiderme. Et il fixait Nokuto de ses yeux noirs et sombres, pointant un arc bandé sur sa cible.

[Terminé] [Flashback] [PV Nokuto] Débarque-pas ton sac, on va pas lézarder ; c'est pas encore demain qu'on va se reposer ! 480_76923_vignette_Indiens-Amazonie-0-PECHE6

 La forêt était le territoire d'indigènes ! C'était pour cela que les frères Red lui avaient dit que l'île était presque inhabitée !

 L'homme cria dans un dialecte incompréhensible, sûrement pour appeler ses congénères, puis ses doigts relâchèrent la corde de l'arc. La flèche, fine et légère, fusa en direction de Nokuto. Celle-ci se plaqua sur le bois, rangeant ses membres contre son corps. Le trait mortel la rasa de près, laissant une courte estafilade le long de son bras.
 L'Amazone réagit aussitôt et, avant que l'indigène puisse armer son arc à nouveau, elle se redressa d'un bond, se saisit d'une liane et sauta.
 Ses jambes tendues cueillirent l'homme en plein thorax, et il fut éjecté contre un tronc, la mine stupéfaite. Nokuto profita de son élan pour se projeter plus loin, et à peine ses pieds touchaient le sol qu'elle se mit à courir. Les autres membres de la tribu ne tarderaient pas à rappliquer.

 Des plantes lui giflaient le visage, ses bras dénudés étaient striés de marques rouges, mais pourtant elle ne ralentissait pas. Elle esquivait habilement les racines et les nids de poules, s'aidant de lianes solides pour se balancer plus loin, plus vite. Derrière elle, le silence s'était fait. Seuls les bruits de branches brisées et de feuilles froissées lui indiquaient qu'elle était poursuivie.
 C'était leur territoire. Nokuto était une étrangère. Ils allaient tout faire pour lui faire payer son intrusion. En tant qu'Amazone, elle comprenait parfaitement ce sentiment. Et elle savait très bien qu'ils n'abandonneraient pas facilement. Dans la nature, il fallait savoir se faire respecter.

 Pourtant, au bout d'une longue course harassante, la Tueuse finit par ralentir, puis par s'arrêter. Plus aucun bruit suspect ne retentissaient derrière elle. Pour une raison qu'elle ignorait, les indigènes avaient abandonné la traque. Pourquoi ?

 La réponse lui parvint vite. Elle entendit des éclats de voix.
 Prudemment, elle se glissa entre les grandes feuilles tombantes d'une plante grimpante, et elle les vit. Deux hommes, pas des autochtones. Armés de machette et de fusils, ils avaient l'air en chasse. Piètres chasseurs, à vrai dire, puisqu'ils produisaient un raffut supérieur aux bourdonnements incessants des insectes. C'était peut-être pour cette raison que Nokuto avait cessé d'être poursuivie.

 Et soudain, une pensée lui traversa l'esprit. Ces hommes, d'où venaient-ils ? Étaient-ils les marins de l'Ondinois ?
 L'Amazone décida de les suivre pour les observer. Si, en écoutant leur discussion, il s'avérait qu'elle avait juste, elle trancherait la gorge de l'un et interrogerait l'autre. Puis il faudrait le tuer lui aussi. Le laisser en vie, ce serait prendre le risque que le Capitaine soit averti de sa présence sur l'île. Or, il ne fallait en aucun cas qu'il l'apprenne.
 Elle attaquerait en profitant de l'avantage de la surprise.
Mar 31 Mai 2016 - 18:20
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Phadria Red
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Phadria Red
Toutes m'enivrent ! mais parmi ces êtres frêles
Il en est qui, faisant de la douleur un miel,
Ont dit au Dévouement qui leur prêtait ses ailes :
Hippogriffe puissant, mène-moi jusqu'au ciel !

Baudelaire



« Putain retournez baiser dans les enfers de Canërgen saloperies !!
- Même Canërgen n'en voudrait pas de ceux-là, haha !

Les deux pirates contemplèrent un instant la boucherie autour d'eux. La quinzaine d'indigènes qui venait de leur bondir dessus était partie en fumée, tremblante sous une pluie de crachats d'espingoles, et à présent réduite en lambeaux de chairs, parfois même éparpillées, en cercle autour de Hildago et Stu.

- Putain, j'leur enfoncerai bien leur arc dans le trou du cul à ces péquenauds !! cracha Hidalgo en pointant l'un des cadavres de sa machette puis en crachant par-dessus son épaisse barbe brune.
- Moi j'le ferai pas, réplique la Nordien. On sait pas c'qui pourrait en sortir, de leur fion.
- Ou y entrer !

Et ils éclatèrent de rire en se tenant les côtes !

- C'est comme la grosse Rosa, ça ! Celle d'Argenterie tu te rappelles ?
- La pute ? Bien sûr ! Qui ne connaissait pas Rosa ? Toute Argenterie lui est passée dessus, par la Garce ! Elle m'a même offert son cul, à moi !
- Elle offrait son cul à tout le monde t'façons.
- Ouais. C'est son mac. Pour pas tomber enceinte.
- Tu dis n'importe quoi Gros-Pif ! C'est juste que Rosa c'était une sacré salope et qu'elle aimait c'qu'on lui mettait, v'là tout et v'là ce que j'en dis, moi !
- Hé une minute !

Les deux pirates se turent.

- Tu as entendu ?
- Quoi ?
- Je sais pas. Y en a encore un, je crois.
- Pfft ! Si un autre de ces trous du cul face-de-palmier se pointe, je lui fais un troisième trou de nez !
- Ou un deuxième trou du cul.

Et sur cette plaisanterie tout autant fine que spirituelle, les hommes de l'Ondinois se baissèrent afin de ramasser le gibier qu'ils avaient tombé avant de tomber sur les indigènes. Le sanglier, lié à une perche taillé dans du bois, pendait par les pattes dans le vide. Les deux hommes hissèrent chacun la perche sur leurs épaules, et tournèrent les talons.

- Tu crois que le Cap'tain est encore dans Dagger là ?
- 'Sais pas. Mais il devrait partager un peu, pour c'que j'en dis ! »
Sam 18 Juin 2016 - 22:09
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Nokuto
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Tueuse à Gages
Nokuto
 Nokuto s’était figée, choquée. Les deux hommes avaient massacré toute la tribu des indigènes, sans états d’âme. Ils avaient tranché leurs membres, déchiré leur peau à coups de tirs violents et dévastateurs. L’Amazone ne pensait pas que l’on pouvait être aussi sale en tuant. Si c’était ça, des pirates, alors ils étaient la pire espèce d’humains qu’elle n’ait jamais rencontrés !
 La jeune fille se reprit et se saisit silencieusement de deux couteaux à lancer. Elle allait arrêter ces tueurs tout de suite. Bien placée, pile dans le dos des deux hommes qui soutenaient une poutre sur laquelle pendait un énorme sanglier, elle arma ses bras.

 Les deux tirs fusèrent, mortels. Elle avait visé l’un des deux dans la nuque, et il mourut sur le coup. Le second, touché en plein milieu du dos, tomba au sol tandis que la poutre qu’il portait sur son épaule s’effondrait à moitié sur lui. Il se tortilla et parvint à saisir la garde de l’arme plantée entre ses vertèbres. Comprenant qu’on venait de lui tirer dessus, il chercha son agresseur du regard. Nokuto ne bougea pas un cil, immobile dans l’ombre des frondaisons.
 Au bout d’un moment, le pirate lâcha le poignard et se saisit d’une arme à feu tombée non loin de lui. L’Amazone, comprenant ce qu’il essayait de faire, bondit hors de sa cachette, le sabre tendu vers la gorge de l'homme. Ce dernier n’eut pas le temps de réagir et relâcha lentement la prise de ses doigts autour du fusil tandis que la lame pointée sur sa gorge faisait perler du sang.

 L’Amazone le domina de toute sa hauteur, guettant le moindre mouvement suspect. Il s’agissait de ne pas se faire surprendre.

 -Qui es-tu ?

 Il lui répondit le souffle haché, surpris de tomber sur une jeune fille en plein milieu d’une île présumée vierge. Dans une situation aussi délicate, de plus.

 -Toi, qui… es-tu ?

 Nokuto lui lança un regard noir, éludant sa question. C’était elle qui posait les questions.

 -Tu es un pirate ?

 -Un naufragé… Un putain de naufragé.

 Cette fois, il lui avait répondu. Bien. La jeune fille décida de retenir que, sous la menace d’une arme, un simple regard suffisait à faire parler. Elle continua donc son interrogatoire, gardant un masque froid et impassible.

 -Qui est ton Capitaine ?

 -L’Ondinois.

 Nokuto acquiesça de la tête. Parfait. Les frères Red ne s’étaient pas trompés.

 -Où se trouve-t-il en ce moment même ?

 -Tu lui veux quoi, au Cap’tain ? T’es qui… d’abord ?

 -Je veux lui parler.

 -Il est… sur la plage côté nord, la petite baie.

 Nokuto fronça légèrement les sourcils. Elle n’était plus la petite Amazone perdue, à peine sortie de la Jungle, qu’avait sauvée le Capitaine à Kelvin. Elle avait appris qu’il ne fallait pas faire confiance aux humains sans avoir auparavant une preuve de leur bonne foi. Elle accentua donc la pression de sa lame sur le cou de l’homme.

 -Tu n’as pas intérêt à me mentir. Est-il seul ?

 -Non… Il y a la maîtresse des pièces avec lui. Dagger.

 Le pirate sembla comprendre le message. Il était en position de faiblesse, allongé dans une mare de sang, un couteau planté dans le dos, sans arme et menacé d’un sabre pointé sur sa gorge. Il était prêt à coopérer.

 Nokuto murmura :

 -Dagger… D’accord. Merci pour ces renseignements.

 Puis elle grimaça. Ce qu’elle allait faire la répugnait un peu, mais c’était nécessaire. Il ne fallait prendre aucun risque, ne pas sous-estimer ses adversaires, c’était ce que lui avait appris Zar’Ila.
 Elle hésita un dernier instant, puis enfonça brusquement le sabre dans la gorge du pirate. Elle la retira d’un geste vif, libérant un flot de sang.

 -Ça, c’est pour avoir massacré le peuple de cette île.

 Cela n’était pas seulement un prétexte. L’Amazone qu’elle était s’identifiait beaucoup à ces indigènes. Qu’ils aient été ainsi exterminés l’avait touchée, elle les vengeait donc.
 Puis elle s’écarta de toute cette boucherie avec dégoût. Tant de morts pour si peu de choses.
 Elle traversa un rideau de lianes, laissant la clairière ensanglantée aux bêtes sauvages.
Jeu 23 Juin 2016 - 18:23
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Phadria Red
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Je suis à toi pour toujours
Phadria Red
Mais sachant la vie, qu'il nous faut aimer
Nous autres, frères de la côte : Radiance !
J'n'ai pu refréné de ma viole un air
Pour tenir compagnie aux vers
La corde au cou sur la fin de journée
Toute droite, sur ma peau, elle balance
L'ultime ballet des pantins costumés.



« Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian ! Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian !

Voilà les termes -fort peu aimables- que faisait en boucle l'oiseau au plumage jaune et bleu, au bec courbe et à la longue queue, perché sur l'un de ces gigantesque arbres feuillus, et qui regardait de son perchoir naturel les deux amants.

- Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian ! Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian !
- Par la Garce, si ce sac à plume ne ferme pas son clapet sur l'instant je jure de le faire rôtir vif !

L'Ondinois, adossé contre un cocotier et le tricorne rabattu sur ses yeux, ne cilla même pas. Torse nu, il se contenta de se gratter distraitement l'épaule droite avant de glisser de nouveau ses pieds nus dans les feuillages.

- Bonne chance pour l'attraper, Camille.
- Par l'enfer ! Il ne te dérange pas, toi ?
- Quand je fais ma sieste, rien ne me dérange. Bonne nuit, Dagger.

Et l'Ondinois se laissa tomber sur le flanc, sensible à la plus ancestrale des traditions lors de siestes en pleine nature : faire abstraction de toutes les emmerdes autour de soi.

- Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian ! Canaille ! Lascar ! Traîne-cul ! Ruffian !
- Rhaaa !

Et la maîtresse des pièces se leva en un bond -autant qu'on puisse bondir avec une jambe nouvellement de bois- et balança sur l'oiseau parleur un galet qu'il ne vit point venir. L'oiseau fut touché en pleine tête, assommé quelques secondes, il chuta de son perchoir et lorsqu'il reprit connaissance, la surnommée Fine Dague le tenait fermement entre ses mains.

- C'est qui le traîne-cul maintenant, sale volatile ! Canaille ! Bourricot ! Ruffian ! Merdeux !

Et comme Camille Dagger prenait grand plaisir à tenir parole devant son Capitaine, elle fit effectivement de l'oiseau doué de la parole un repas fort savoureux, brûlé vif, et à la broche s'il vous plait !

Les deux compères dînaient de cet étrange met devant un soleil rougi par le crépuscule, noyant les vagues dans un défilé de couleurs dorées, Dagger posée contre le poitrail du Capitaine.

- Dis, tu ne trouves pas que les deux trous duc' mettent du temps à revenir ?

L'Ondinois contemplait avec nostalgie et une vague de tristesse la carcasse de son Grand Corsaire, brisée sur les récifs qu'embrassaient les vagues.

- Ils ne tarderont pas à rentrer.
- J'ai hâte de quitter cette île, avoua la pirate. On s'y emmerde à mourir.

Et l'Ondinois lui arracha un baiser, faisant de même avec les pans de sa chemise déjà déchirée, qui craqua davantage. Et tandis qu'il lui dispensait les premières caresses indispensables à toute union, il souriait sous sa barbe.

- Considère que nous prenons des vacances bien méritées. Après tout, nous sommes à la tête de l'un des derniers fleuron de la piraterie ! »
Jeu 14 Juil 2016 - 1:57
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Nokuto
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Tueuse à Gages
Nokuto
Nokuto avait observé toute la scène en silence, dans l’ombre des frondaisons. Les cris de douleur du cacatoès brûlé vif l’avait fait grimacer, et elle avait bien failli se trahir pour tenter de sauver le pauvre oiseau.
 Elle avait prévu d’attaquer une fois les deux pirates rassasiés et endormis, mais à présent…
 Très gênant.
 Pourquoi L’Ondinois et cette Dagger souhaitaient-ils avoir un enfant alors qu’ils étaient échoués sur une île déserte ? La jeune Amazone, les joues cramoisies, tentait de comprendre, assise dos aux deux amants. Plusieurs fois, elle était tentée de se boucher les oreilles à un gémissement trop insistant, mais elle résistait en essayant de se concentrer sur autre chose.
 Quand les attaquer ? Une fois leurs ébats terminés, ils se rendraient bien vite compte que l’absence prolongée de leurs compagnons n’était pas normale, et alors ils seraient sur leurs gardes. Nokuto rechignait à accepter l’évidence, mais le sentiment d’urgence qu’elle ressentait la décida. L’occasion ne se reproduirait sûrement pas.
 Il lui fallait opérer maintenant.

 La plage de sable fin et blanc était lisse et dénuée de cachettes, mais les branches des grands arbres qui la bordaient s’avançaient parfois bien plus loin que la lisière de la forêt. Nokuto en choisit une qui lui paraissait solide et s’avança en rampant silencieusement sur l’écorce rêche. Elle s’arrêta au-dessus de ses cibles, dissimulée parmi le feuillage fourni. La tueuse profitait de toutes les circonstances bénéfiques à un meurtre : la nuit était presque entièrement tombée et ses futures victimes totalement inattentives à ce qui les entourait.
 Dans un silence total, elle abaissa la main à sa ceinture et se saisit de l’arme qu’elle avait consciencieusement choisie. Elle n’aurait droit qu’à un essai, car à peine sa première cible touchée, la deuxième ne manquerait pas de s’alarmer et Nokuto n’aurait alors plus que de peu de temps pour agir.
 Lentement, elle tendit la fine sarbacane à ses lèvres entrouvertes, plissa un œil en visant, puis souffla d’un coup sec.

 La fléchette enduite d’un poison foudroyant émit un léger sifflement en fendant l’air frais du crépuscule avant de se ficher dans la cuisse de L’Ondinois. Il poussa un petit cri quand la longue aiguille perfora sa peau jusqu’à une veine, mais Dagger le confondit avec un jouissement et sourit en l’embrassant.
- T’en veux encore ? demanda-t-elle d’un ton aguicheur avant d’encore augmenter l’audace de ses caresses.
 Mais son amant ne lui répondit pas. À vrai dire, elle ne sentait plus la ferme poigne de ses mains sur ses fesses. Elle s’écarta un peu de lui et observa son visage. Pourquoi ses yeux étaient-ils ainsi révulsés… ?
 La jeune femme bondit sur ses pieds, choquée, et c’est ce qui lui sauva momentanément la vie. Le deuxième trait mortel que venait d’envoyer Nokuto se planta dans le torse du pirate mort à l’endroit même où se trouvait Camille l’instant précédent. Celle-ci leva brusquement le visage vers les feuillages et aperçut la meurtrière.
- Salope… murmura-t-elle, sous le choc.
 La pirate réagit très vite et couru aussitôt en boitant vers son sac posé à côté du feu pour se saisir de son tromblon chargé. Mais sa jambe de bois la ralenti considérablement et laissa à l’Amazone le temps de se saisir d’une dague. La Tueuse se laissa tomber de son perchoir et visa Dagger en même temps que cette dernière.
 Les deux femmes se firent face une fraction de seconde qui parut durer une éternité. Nokuto avait les yeux fixés sur le trou noir du canon de l’arme, la pirate était hypnotisée par la lame acérée qui reflétait les derniers rayons du soleil mourant.
 Le coup de feu résonna dans la crique et un groupe d’oiseau s’égaya au-dessus du faîte des arbres.

 Jamais l’Amazone n’avait été touchée par une arme à feu.
 D’abord, elle ne sentit rien, puis la douleur éclata d’un coup, foudroyante, et déchira sa jambe. Elle s’effondra, aveuglée par la souffrance. Elle pressa ses mains sur la blessure ouverte, essayant vainement de retenir tout ce sang rouge, si rouge, qui s’épanchait sur le sable. Nokuto poussa un râle furieux en usant de toutes ses forces pour se redresser et ne put retenir des larmes de douleur quand elle étendit sa jambe blessée devant elle. Elle posa avec réticence les yeux sur la plaie pour évaluer les dégâts.
 Les bords déchiquetés dévoilaient la chair mise à nu, et la quantité astronomique de sang qui s’échappait du trou noir au centre donna un haut-le-cœur à la jeune fille.
 Que devait-elle faire ? Affolée, elle tourna la tête de tout côté sans rien voir, tel un oiseau blessé.
 Que devait-elle faire ? Sa respiration devint hachée et son pouls s’accéléra tandis que de la sueur lui dégoulinait dans le dos.
 Que… devait-elle… faire ?? Un voile rouge recouvrit ses yeux, puis elle sombra dans l’inconscience.
҉

 Quand elle émergea de sa léthargie, il faisait nuit noire. Sa jambe saignait toujours, et des grains de sable s’étaient incrustés dans la blessure.
 Il faut me soigner.
 Nokuto inspira un grand coup pour se donner du courage, et l’air frais lui éclaircit les idées. Son cerveau se mit à réfléchir à toute allure, ses pensées se heurtant les unes aux autres dans un ballet effréné, jusqu’à que l’Amazone réussisse à les ordonner. Elle se fit une liste mentale de priorités, puis entama la dure besogne qu’elle s’était imposée.
 Nettoyer la plaie.
 Des larmes se remirent à couler quand elle se traîna douloureusement jusqu’au foyer éteint des deux pirates, et c’est à peine si elle jeta un œil sur le corps de Dagger. Celle-ci s’était effondrée sous le coup du poignard qui l’avait atteint en pleine poitrine, et elle était tombée le visage dans le feu. Le haut de son corps était carbonisé et méconnaissable.
 La blessée fouilla dans leurs sacs et dénicha une gourde d’eau douce qu’elle engloutit d’une gorgée. Un examen plus poussé lui fit découvrir un petit flacon d’alcool que l’un des pirates s’était sans doute secrètement gardé pour un usage personnel. Elle n’hésita qu’un bref instant avant de verser le liquide désinfectant sur la plaie, ce qui ne l’empêcha pas de pousser un cri en sentant la brûlure sur les chairs ouvertes. Elle serra les dents et épongea ensuite le sang avec une couverture posée auprès du feu, ôtant soigneusement les grains de sable.
 Retirer la balle.
 Nokuto se saisit de deux brindilles qu’elle désinfecta avant de s’en servir comme une pince. Elle crispa sa main inoccupée dans le sable tandis que l’autre, tremblante, plongeait les bouts de bois au cœur de la plaie.
 La jeune fille dû fouiller longuement avant d’extraire enfin la bille de plomb, éreintée et les mains rouges de sang.
Faire un bandage.
 L’Amazone déchira ensuite un pan de la chemise blanche que L’Ondinois avait jeté au loin avant de passer ses derniers moments avec son amante, et garrotta fermement sa cuisse. Une image fugitive du Capitaine Théoden quand il lui avait corrigé son pansement dans les bas-fonds de Kelvin passa devant ses yeux, et elle se demanda un bref instant s’il était arrivé sans encombre au but de son voyage.
҉

 Le lendemain, Nokuto se confectionna une béquille avec la jambe de bois de Dagger, et réussit à marcher jusqu’au corps inerte de L’Ondinois. Le tuer avait été si facile, mais comment aurait-elle put prévoir que la femme éclopée était si vive ? Elle aurait dû être bien plus prévoyante…
 Elle s’ébroua. Elle était vivante et avait accompli sa mission. C’était ce qui comptait.
 Elle affermit la poigne de sa main sur son sabre, puis trancha d’un geste vif la gorge du cadavre nu. Se saisissant avec répugnance de la chevelure grasse, elle emballa soigneusement la tête de sa victime dans la couverture tachée de sang. Ce serait la preuve qu’elle avait bien tenu le contrat passé avec les frères Red.

 La jeune fille attendit la fin de cette journée de repos pour réunir ses – maigres – affaires et entreprit de traverser une nouvelle fois la jungle vers la crique où Jorje Dupré était censé venir la chercher le lendemain. Elle espérait ne pas s’être trompée dans le décompte des jours, et surtout que le capitaine ait tenu parole, sans quoi elle se retrouverait bloquée sur cette île jusqu’à, sans doute, la fin de ses jours.
 C’est cette inébranlable envie de vivre qui lui donna la force de se débattre parmi les lianes.
҉

 Jorje Dupré avait jeté l’ancre depuis des heures. Accoudé au bastingage, il jura. Mais qu’est-ce qu’elle foutait ? Elle aurait déjà dû l’attendre sur la plage depuis bien trop longtemps. Il était temps de partir, tant pis pour elle.
 Le capitaine cracha dans l’eau avant de scruter une dernière fois la berge vide. Il soupira et se tourna vers son équipage.
- On lève l’ancre !
 Puis il se retourna une dernière fois, plus machinalement que par réel espoir. Et vit sa cliente émerger de la jungle en titubant avant de s’effondrer dans le sable.
҉

 Une fois que les frères Red l’eurent payé pour le macabre trophée qu’elle leur ramena, Nokuto donna la moitié de la récompense à Jorje Dupré car, à ses yeux, il lui avait sauvé la vie. Puis elle se retira dans un lieu de la Verte où elle ne risquait pas d’être importunée pendant un bon bout de temps, le temps que sa jambe guérisse. Elle ne s’était heureusement pas infectée.
Sam 29 Oct 2016 - 17:54
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