Marina donnait de puissants coups de queue pour monter vers la surface. Ses longs cheveux bruns, bien loin de flotter autour d’elle, pour former une étoile autour de sa tête, étaient plaqués le long de son buste de femme, s’arrêtant là où commençait sa queue de poisson. La sirène savait qu’une mortelle allant à la même vitesse qu’elle verrait sa chevelure réagir sembablement. Mais à l’arrêt, cette dernière se déploierait tout autour d’elle, contrairement à la sirène, dont les cheveux continueraient à tomber en cascade. Elle se demandait ce qui la rendait différente des mortelles de temps en temps, mais chassait très vite ces pensées. Elle était une demoiselle de compagnie de la Dame des Mers après tout, il était normal qu’elle soit sensiblement différente des mortels.
Et pour l’heure, elle songeait à la mission que lui avait confiée sa maitresse. Un étrange navire voguait depuis quelques temps à la surface de l’océan. Etrange, car Ariel qui entendait habituellement les cris, les chants, les rires et les jurons des marins n’entendait rien venant de celui-ci, et ce phénomène l’intriguait. En temps normal, si certains capitaines arrivaient à ponctuellement garder le silence, aucun n’arrivait jamais à faire taire ses marins pendant des semaines de traversée. Et de plus, ce navire ne suivait aucune route maritime logique. C’était comme s’il voguait dans l’océan, allant de ci de là, sans savoir quoi faire, et sans chercher à toucher terre.

Marina émergea non loin dudit navire, et effectivement, fut surprise par le silence de mort qui régnait sur ce dernier. Pourtant, elle pouvait voir les silhouettes des marins s’activer sous le soleil de midi. Qu’est-ce qui pouvait les motiver à se taire ainsi ? Prise d’un doute, elle suivit le navire pendant deux ou trois jours. Toujours aucun son. Pas même le moindre ordre du capitaine. La Dame des Mers avait raison, quelque chose n’était pas normal. Et d’ailleurs, Marina se demandait pourquoi avait-elle remis en cause la parole de sa maitresse. Mais il n’était pas encore l’heure du repentir. Pour l’instant, il était l’heure de passer à l’action. Elle devait tirer ce mystère au clair. Et pour cela, rien de mieux à faire que d’attirer un marin, et l’interroger avant de le dévorer.
Cette pratique ne la choquait pas. Dévorer les marins qu’elle séduisait, c’était dans sa nature. Et ils n’avaient qu’à résister à son chant. Elle se mit alors d’ailleurs à faire résonner sa voix, s’assurant d’être assez proche du navire pour que tout le monde à bord puisse l’entendre. Les marins percevraient tout d’abord un murmure dans le vent, puis peu à peu, une voix de femme. Cette voix, la voix d’une sirène, séduisait tous les hommes sans exception. Et les femmes aussi. Et elle ne romprait le charme, cessant de chanter, que lorsque que quelqu’un se serait jeté à la mer pour la rejoindre.

« Quand une sirène grandit, elle doit regarder vers l’avenir, commença-t-elle. »

Puis elle continua, haussant la voix, et guettant le « plouf » qui annoncerait qu’un marin s’était jeté à la mer pour la rejoindre, croyant qu’elle allait lui donner du plaisir, mais ne récoltant qu’une mort horrible.

« Viens devant moi sirène, créature des mers ! Tu ne charmeras pas mon équipage ! »

C’était la première fois que Marina entendait une voix sur ce navire. C’était déjà un progrès en soit. Mais ce qui l’étonna beaucoup plus, c’est que l’équipage avait semblé avoir la réaction du capitaine. Ils s’étaient arrêtés quand elle avait commencé à chanter, mais sans plus. Et lorsque celui qu’elle savait désormais être le capitaine s’était approché du bastingage, tous l’avaient suivi. A ce stade-là, il devait normalement déjà y avoir eu un marin pour sauter à l’eau, mais cette fois, ils avaient semblé l’attendre. Et voilà qu’en quelques mots, il rompait le charme.
Mais plus intéressant encore, il la défiait. Elle s’approcha de lui, curieuse d’en savoir plus, et amusée de sa conduite en même temps. Qui se croyait-il pour défier ouvertement une demoiselle de compagnie de la Dame des Mers ? Assurément, il devait être jeune capitaine. Elle émergea, hors de l’eau, sous ses yeux. Il était sur le pont du navire, elle était dans l’eau, mais les deux pouvaient se voir tranquillement.
Elle le dévisagea. Il était plutôt bel homme, elle devait l’avouer. Enfin, plus beau que les marins qu’elle avait l’habitude de dévorer, car ceux-là mis à part, elle n’avait pas l’habitude de voir d’aussi près, et aussi paisiblement, des humains. C’est d’ailleurs ce manque d’habitude qui expliqua son instant de réflexion. Que faire, à présent qu’elle était aussi proche que cela du capitaine du navire qui intriguait sa maitresse ? Elle ne parlait que très rarement avec les humains. Quand elle le faisait, c’était au moment de les entrainer sous l’eau avec elle. Mais lui, il ne se jetait pas à la mer. Etait-ce que son charme ne fonctionnait pas sur lui ? Ca ne coutait rien de réessayer.
Elle se remit à chanter. La précédente chanson parlait de l’âge adulte d’une sirène, qui cherchait l’amour. Elle était destinée à faire penser aux marins qu’ils seraient cet amour. Cette chanson-là, elle, parlait d’un marin riche et sans peur. Un marin séduisant. Un marin que lui, capitaine de cet étrange navire, il était. Elle lui promettait également la récompense d’Ariel pour sa valeur. A lui, et à personne d’autre. Et lorsqu’il bondirait la rejoindre, de quoi pourrait-il se plaindre ? Après tout, elle n’avait fait que lui obéir. Elle était venu à lui, et elle le charmait, personnellement.

« Donnant donnant… »

Marina ne comprenait pas que ses charmes aient pu échouer par deux fois. Aucun homme n’aurait dû pouvoir y résister aussi bien ! Il se passait définitivement quelque chose d’étrange. Et il allait falloir négocier avec ce capitaine bizarre pour savoir quoi ? La sirène se méfiait. Et elle n’allait certainement pas faire confiance à un être capable de résister à son chant, ça c’était certain.
Elle réfléchit à nouveau à ce qu’elle allait faire. Charmer le capitaine ? Elle avait déjà vu que ça ne marchait définitivement pas. Charmer l’équipage ? Au premier chant, un geste du capitaine l’avait fait taire, au deuxième, l’équipage l’avait tout simplement ignoré, sans même prendre la peine de l’écouter.
Marina ne comprenait pas ce qu’il se passait, réellement. C’était la première fois de sa longue vie de sirène qu’elle entendait parler d’un navire où personne ne se soucie de son chant, ou de celui d’une de ses sœurs. Même les fiers navires elfiques, lorsqu’elles les approchaient, voyaient parfois un de leurs marins sauter à la mer ! Bon il était vrai que cela était plus rare, car les elfes connaissaient des charmes de protection inconnus des humains.
Oh, mais peut-être ce capitaine étrange connaissait-il les mêmes charmes ? La sirène en était désormais certaine. Ne sachant absolument pas ce qu’il se passait sur le continent, elle ignorait qu’il fut bien entendu impossible que des elfes noirs s’abaissent à révéler un tel secret à des humains. Mais toujours était-il qu’elle était désormais persuadée qu’il connaissait leur secret. Il allait donc falloir négocier avec lui. Elle réfléchit…
Il y avait non loin un haut fond qui à marée basse verrait un petit rocher approcher de la surface. Il n’émergerait pas, car on était en période de morte-eau, mais il permettrait à la sirène de s’allonger tranquillement, et au capitaine humain de mettre pied à terre. Sans mot dire, elle se dirigea vers ce dernier. Lorsqu’elle réalisa que l’humain ne mettait pas de chaloupe à la mer pour la suivre, elle repartit vers lui.

« Il y a là-bas un rocher sur lequel tu auras pied, et moi je pourrais m’y reposer, dit-elle. Nous sommes à marée basse, je t’y attendrais. »

Elle réfléchit. L’humain devait connaitre les sirènes de réputation. Il se méfierait.

« Les conséquences seront pires si tu ne viens pas que si tu viens, ajouta-t-elle. Je ne te veux aucun mal, mais ne me vexe pas pour autant »

C’était une menace en l’air. Il serait difficile de convaincre la Dame des Mers d’éveiller sa colère contre l’étrange navire, à moins d’avoir de bons arguments pour la convaincre. Et ces arguments, elle devrait les étayer par un témoignage fort. Voilà pourquoi elle espérait réellement qu’il la rejoindrait.
Elle atteint à cet instant le rocher. Elle se hissa tranquillement dessus, s’allongeant au soleil, et se retourna, pour vérifier si le capitaine avait ou non mis une chaloupe à la mer.

« Mes salutations ma Dame. Me voilà devant vous comme promis. »

Bien, et maintenant, que faire ? Tenter de le séduire ? Lui dire qu’il y avait quelque chose de pas normal avec son équipage ? L’attaquer ? Ou peut-être tente discrètement d’aller parler au marin resté dans la chaloupe ? Oui, c’était même la meilleure idée.
Feignant de bouger innocemment, elle se dirigea tranquillement vers la chaloupe. Le manège n’allait certainement pas échapper au capitaine, mais bon. Marina était convaincue qu’il ne lui en tiendrait pas rigueur si elle n’essayait pas de charmer ce membre de son équipage.

« Pourquoi ne nous rejoint-il pas ? demanda-t-elle en s’approchant de lui. Tu es timide petit marin ? Viens nous rejoindre, je ne vais pas te dévorer. Et montre-moi ton visage, que je voie si tu es aussi beau que ton capitaine… »

Elle attendit patiemment une réaction du marin, qui ne vint jamais. Il restait aussi muet qu’à l’accoutumée, et aussi immobile que le capitaine le lui avait ordonné. Il se contentait d’attendre dans la chaloupe, comme s’il n’était qu’une extension de la volonté de son capitaine.

« Capitaine, dit-elle tranquillement, mon nom est Marina. Et puis-je savoir, si cela ne vous offense pas, pourquoi votre marin ne me répond-il pas ? Je ne vais pas le manger … Je suis juste curieuse de savoir la raison de ce mystère. »

Elle mit la main sur le rebord de la chaloupe. Le marin restait immobile, aussi commença-t-elle à se hisser, sans se soucier de ce que pouvait bien faire le capitaine derrière elle.

« Vous comprenez, un navire d’où ne vient aucun chant et aucun rire, aucun cri et aucun gémissement, et qui contient des marins pareils… C’est bien la première fois que je vois cela. »

Elle était presque hissée dans la chaloupe à présent, quand elle entendit un mouvement derrière elle.

Ainsi, ce capitaine ne voulait vraiment pas qu’elle parle à ses marins. Et il lui assurait qu’elle n’aurait de toute façon aucune réponse. Soit, la langue coupée, ça expliquait l’absence de voix sur le pont du navire. Et même si Ariel réprimait certaines choses, couper les langues n’était pas dans les choses qu’elle condamnait, aussi sa messagère décida-t-elle de passer outre. Mais qu’il lui interdise de parler à son marin, sous peine de le punir lui ? Ca par contre ça n’était pas normal. Il lui fallait poursuivre vers le marin, et passer outre son donnant donnant, d’une façon ou d’une autre. A voir la règle qu’avait posé le capitaine et l’immobilité persistance du marin, il lui paraissait évident qu’elle en apprendrait plus auprès de ce dernier.

« Donnant donnant hein ? demanda-t-elle. Soit, je vais répondre à votre question. Je m’intéresse à votre marin, car je suis curieuse, rien de plus. Ne peut-il vraiment pas me suivre dans les océans ? Vous ne serez pas le premier capitaine à perdre l’un de vos marins entre les douces mains d’une sirène. Et toi mon beau, tu n’as vraiment pas peur d’échapper à ton capitaine, hein ? Comprenez-moi bien, ô capitaine, je ne vous souhaite pas de mal. Je suis juste une sirène qui examine un peu ses proies avant de se nourrir. C’est comme ça que j’ai appris que vos marins ne chantaient pas. Un peu de renseignements, avant de me nourrir, c’est toujours amusant. Mais puisque nous en sommes au donnant donnant, mon nom est Marina. Pourrais-je connaitre le vôtre ? »

Ce faisant, elle n’avait pas bougé de la barque, toujours appuyé sur son rebord, à regarder droit dans les yeux le marin. Il y avait quelque chose d’étrange dans son regard. Il était éteint et sans vie. Il ne battait jamais des cils, gardait constamment un regard fixe et perdu vers l’horizon… Il y avait autre chose que la langue coupée, c’était désormais certain.

- Vous voulez connaitre mon nom ma dame, ce n'est rien d'autre que Jack. Maintenant que vous avez mon nom et que j'ai donc répondu à votre question, c'est à vous de répondre à la mienne. Je suis à la recherche de ruines anciennes pour mes recherches. Pourriez vous m'aider dans mes recherches en m'indiquant une ou plusieurs ruines se trouvant dans les Océans ou dans les mers? 

Il dit cette phrase en se rapprochant de la sirène de façon à l'obliger à porter l’attention sur lui. Tout en faisant ça, il se prépara à sortir son couteau pour la tuer si elle continuait à rester à coté de son marin mais il attendait comme même qu'elle réponde à sa question car c'était la seule raison de pourquoi il avait proposé ce rendez vous. Mais par contre il réfléchissait de pourquoi elle, cette sirène, avait accepté ce rendez vous car elle n'avait rien gagné sauf si elle lui cachait quelque chose mais qu'est que ça pouvait être. Mais par contre si c'était juste pour manger quelqu'un, elle aurait passé son chemin voyant que ça ne marchait pas et aurait essayé sur un autre bateau. Il était sur qu'elle lui cachait quelque chose mais comment découvrir qu'elle était cette chose. Il pourrait peut être demander conseil à son amulette car il était sur qu'elle aurait un conseil à lui donner mais il refusait de s'avouer faible en lui demandant. Peut être que si elle gardait son attention sur son zombie, avant de la tuer, il demanderait l'avis de son amulette pour être sur de ne pas faire une grosse erreur qui pourrait lui coûter cher. 

« Dans les océans ou dans le mers ? Je ne me suis jamais intéressée à ce genre de choses, moi. Je suppose qu’en en parlant à quelques-unes de mes sœurs qui s’y connaissent mieux que moi, je pourrais aisément en trouver, mais en attendant, il vous faudra vous contenter de cette réponse. »

Elle n’avait pas bougé d’un centimètre. Elle continuait à fixer le marin, qui avait le regard obstinément vide. A force de l’observer, elle nota une chose. S’il portait des vêtements qui nuançaient cet effet, la sirène aurait déjà dû voir, normalement, sa poitrine se soulever et s’abaisser à un rythme régulier.  Peut-être n’était-ce qu’une erreur de ses sens abusés, mais elle devait en être certaine. Et si l’homme était mort, cela expliquerait pourquoi ses charmes n’avaient aucun effet sur lui. Mais alors, cela voudrait dire que l’équipage entier était composé de zombies en même temps. Et que le capitaine était un …
Marina plongea pour quitter l’ilot, sans prévenir, et refit surface à quelques mètres, là où elle était sûre d’être hors de tout danger. Et lorsqu’elle se tourna, elle constata qu’elle avait eu raison, le capitaine nécromancien avait un poignard en main.

« Dis-moi, le nécromancien, dit-elle, d’une voix qui n’avait plus rien de charmant ou d’amical. Tu n’espérais tout de même pas me tuer j’espère ? Sais-tu ce que la Dame des Mers fait à ceux qui agressent ses demoiselles de compagnie ? Réponds-moi, je suis curieuse. Et il n’y a plus de donnant donnant, je veux des réponses à présent. Et je suis certaine que la Dame des Mers n’appréciera pas d’apprendre qu’un nécromancien et son navire de zombies naviguent sur ses terres… »

- Plus rien ne sert de mentir maintenant, ma chère Marina. Oui tu as bien deviné, je suis un nécromancien mais par contre, je ne comptais pas te tuer, j'ai juste une arme au cas où je dois me défendre. Comme on le dit si bien, on est jamais trop prudent.

Tout en disant cela, il rangea son arme dans l'endroit où elle était avant, dans sa manche et continua son discours sur un ton ironique: 

- Maintenant que tu sais ça, que comptes-tu faire? Partir pour tout dire à ta chère Dame des Mers? Vas-y, qu'est qui te retient de le faire maintenant que je t'ai répondu et que tu es donc sur de ce que je suis moi et mon équipage. 

Il disait ça en espérant que Marina jugerait qu'il ne soit pas dangereux et puisse partir tout en continuant de sillonner les mers car il ne pouvait rien faire d'autres. 

Ayant fini avec sa phrase, il remonta sur sa barque et ordonna à son zombie de pagailler vers son navire en donnant l'impression qu'il n'avait pas peur de la sirène et de sa supérieure et qu'il avait l'air sur de lui car il n'avait plus que ça, le bluff comme carte jouable pour espérer s'en tirer de manière positif ou au moins de manière égale de cette échange. En tout cas, il aurait des conséquences de cette échange, surtout à cause de son secret enfin découvert par cette sirène. Il ne reste plus qu'à prier maintenant.

Aller parler à sa chère Dame des Mers ? Bien sûr que Marina allait le faire. Et pas plus tard que tout de suite d’ailleurs. Aussitôt que le capitaine et son navire furent hors de vue, elle replongea. Ariel ne vivait pas sur le plan d’existence matériel, les conséquences seraient bien trop importantes. Mais toutes les sirènes savaient d’instinct où trouver, au fond de l’océan, les portes qui menaient à son royaume.
Elle s’enfonça donc, toujours plus profondément. Pendant quelques instants, un requin nagea auprès d’elle. Il s’agissait de l’un de ces fameux grands requins noirs et blancs que les humains appelaient grands blancs. Elle avait entendu dire qu’ils étaient redoutés parmi les marins, comme des prédateurs dangereux. Elle ne comprenait pas pourquoi. En ce moment même, il nageait pacifiquement à côté d’elle, ne se souciant guère de l’attaquer. Mais au bout d’un moment, il désintéressa de sa compagnie et partit chasser au loin.
Pour sa part, Marina continua, puis finit par arriver dans une faille océanique. A cet endroit, la lumière du jour ne parvenait plus, et l’eau autour d’elle devint noire. Elle était désormais uniquement éclairée par de nombreuses créatures marines qui se servaient de la lueur qu’ils produisaient pour attirer jusqu’à eux des proies. Mais la sirène n’avait pas besoin de lumière pour se repérer, et elle n’était donc pas gênée par l’obscurité, pas plus que la pression, qui aurait eu raison de n’importe quel mortel, ne l’affectait.
Puis finalement, elle arriva au fin fond de l’océan. Ici se trouvait un édifice de pierre, deux colonnes soutenant une arche triangulaire, sur laquelle des sculptures figuraient la reine des mers entourées de ses dame de compagnies. Par un curieux phénomène magique, aucune algue ne s’était accrochée à cet édifice, et ni la pression ni l’humidité n’avaient attaqué ses pierres. Lorsque Marina passa sous l’arche, d’un seul coup, tout devint plus lumineux autour d’elle. Elle sourit. Elle était arrivée chez la Dame des Mers. Devant elle, un gigantesque corail, qui avait été modelé par la Dame en personne pour prendre la forme d’un palais humain. Elle y entra par la grande porte, puis se dirigea aussitôt vers le salon qui servait de salle du trône, d’où Ariel régnait sans partage sur les océans.

Dans la salle, trois sirènes, qui entouraient une femme à l’apparence humaine. Une femme brune, vêtue d’une robe blanche à capuche, et portant un médaillon bleu ciel. Marina, sachant avoir affaire à une déesse, lui fit pourtant son rapport sans crainte d’aucune sorte.

« Et il a donc dit, demanda Ariel lorsqu’elle eut fini, que j’étais ta chère Dame des Mers ?
-Ce sont les mots qu’il a employé, madame, répondit Marina. »

Elle se tut. Ariel était célèbre pour ses moments de colère, et vu qu’elle gardait le silence, celui-ci promettait d’être important. Elle savait cependant qu’elle n’en serait pas la cible, la Dame des Mers aimait trop ses demoiselles de compagnie pour les châtier. Cependant, elle n’enviait pas le sort du nécromancien. Pour détestable qu’il fut, ce qui allait certainement lui arriver ne serait pas agréable.
Mais au lieu de s’énerver, Ariel éclata de rire.

« Ah, dit-elle quand elle put enfin se reprendre, l’insolence de certains mortels ! Ça en devient amusant. Ainsi donc, ce moucheron me nargue ? Qu’il se méfie, il est sur mes terres ! Ah… je vais le laisser vivre. Sa stupide témérité m’amuse. Cependant, qu’il ne s’imagine pas avoir la vie facile sur l’océan, voyons, après tout, même s’il est drôle, il n’en demeure pas moins un dégoutant nécromancien. J’espère qu’il aime les mers agitées, car il n’aura rien d’autre que cela, à présent. »