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[La mer][Terminé]A la proue du Seigneur Emeraude
Noire
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Noire
Ce RP se situe à la suite de celui intitulé "A la Taverne des Pièces de Huit", avec Jack Lissander.



Cela faisait plusieurs heures à présent que Phadransie La Noire avait rejoint le Seigneur Emeraude, en tant que Membre d'Equipage. Et en plus de compter à son bord l'Elue Divine d'Ariel, Brecianne Leocadas, entre la vie et la mort, le fier Navire tenait à son bord la Déesse elle même, sous sa forme charnelle. Ariel tenait la barre, souvent d'une main ferme, l'air fier et le regard toujours tourné vers l'horizon. Parfois, la Garce des Profondeurs parlait à son Navire, elle lui sussurait des mots discrets à la proue, comme si elle s'était adressée à un jeune enfant.

Phadransie n'avait toujours pas réussie à trancher et se faire une opinion. Du fond de sa Cabine, allongée sur le dos, elle en contemplait le plafond en se posant pour la énième fois la question ? S'était-elle vraiment entretenue avec Ariel ? Avait elle vraiment vu, de ses yeux, la Grande Garce des Profondeurs ? Et si oui, était-il possible qu'elle ressente autant de haine envers la femme qui venait d'accéder à sa requête ? Pouvait-elle haïr la Déesse qu'elle était censé honorer en tant que Pirate ? Depuis quand la situation était devenue si compliquée ? D'autant qu'elle s'était fait un devoir moral d'aider Brecianne Leocadas, officiellement son Capitaine, à s'en sortir. Et là aussi, la situation lui avait échappée. Brecianne Leocadas venait d'être torturée avec la plus grande violence, et bien qu'elle s'en soit sortie sans perdre un oeil ou un membre, elle était néanmoins au plus mal. 
Phadransie La Noire analysa pour la centième fois peut être, surement, sa situation. Jamais Ariel accepterait de remonter des mers le Galion Déité, coulé par le Dieu Lorin. Et c'était là son bût premier. Quant à Brecianne... Brecianne accepterait-elle de l'aider ? En vérité, Phadransie ne savait même pas si Brecianne la considérait comme une alliée ou une ennemie. Et dans son état actuel, son aide était fort limitée, pour ne pas dire nulle. Il ne lui restait donc plus qu'à attiser la haine de la Déesse envers Lorin ? Non, même comme ça, c'était trop risqué. 

Phadransie La Noire remit son Tricorne qui trônait non loin d'elle, et se releva du lit sur lequel elle était allongée. Ariel était une vraie Garce. Borch Klay ne semblait pas beaucoup l'apprécier. Les autres Pirates la méprisaient ou la craignaient. Elle n'avait que très peu d'options.

*


-Je peux entrer ?

Phadransie ne prit pas la peine d'écouter la réponse -en l’occurrence négative- de son interlocutrice, et referma doucement la porte de la cabine de Brecianne Leocadas. Elle avait de la chance, cette dernière ne dormait pas. Elle s'approcha du lit de sa Capitaine, dans la Cabine étroite. Brecianne Leocadas luttait contre une fièvre grandissante, son visage était trempé de sueur et son corps tremblait doucement, de façon presque naturelle à force de régularité. Phadransie dévisagea un moment l'Elue Divine déchue. Son corps était anéanti. Lissander avait fait du très beau travail. Phadransie se saisit fermement du poignet gauche de Brecianne afin d'examiner sa main. Cette dernière réussit à murmurer faiblement.

-Comment..ça se présente ?
-Comme de la merde. On va devoir trancher.
-Je...m'en doutais.
-Hum... Ton Second s'en chargera.
-Toi..
-Pardon ?
-Fais le...toi.

Phadransie sourit. Elle leva son crochet et le dévisagea d'un air narquois.

-Je te rappelle que je n'ai pas tout à fait les compétences pour faire ceci.  Klay s'en chargera je te dis.

Sur ce, elle laissa retomber la main déchiquetée de l'Elue Divine et s'assit adossée au mur, en face de son lit.

-Que t'a promis...ce Jack...Lissander ?
-A quoi bon le savoir ?
-Réponds.
-Il m'a promis...un Trésor.
-Et tu as besoin..de moi pour l'avoir..n'est-ce pas ?
-Non.
-Tu me mens...
-Brecianne écoute. Peu importe cette histoire de trésor, de pouvoir, de richesse. Il faut que tu vives d'accord ? Ce  n'est qu'une fièvre de merde, une affliction de passage. Comporte toi en digne Pirate, Elue de ton rang. Tu fais pitié à tout ton Equipage, ta Déesse te considère déjà comme morte. On doit lui prouver qu'elle se trompe.
-Merde..Mais que vaux ma vie pour..toi.
-Rien.
-Mensonges, encore. Je ne vois...pas l'utilité de rester...en vie. Ariel a raison. Je vais mourir...et mon âme la rejoindra. Mon corps, de toutes manières...est déjà parti.
-Non, tu es bel et bien là, et tu y resteras. J'y veillerai.
-En tant que Capitaine..tu me dois la vérité. Que..cherches-tu réellement ?

Pharansie détourna une seconde son regard de Brecianne. Elle allait devoir se mouiller.

-Une Légende. La Gemme Légende du Dieu Fou. Un pouvoir sur les forces de la nature, un pouvoir sans limite. Un artefact sur lequel j'ai réussi à mettre le crochet, il y a moins d'un Tour de cela. Et un Artefact au fond des Mers, à bord du Galion Déité. Coulé par Lorin en personne. 
-Je vois...
-Brecianne, j'ignorais ce que le Nécromancien avait...
-Lissander.
-Quoi ?
-Appelle le par son nom, après tout vous vous connaissez bien...
-Non, c'est faux ! Ecoute Brecianne. Je ne suis pas responsable de ce qu'il t'a fait subir.
-Va t'en. Va t'en et dis..à Ariel que je ne vais...pas tarder à m'en aller.

Phadransie sentait son sang bouillir dans ses veines. Elle se leva en arrangeant son Tricorne, d'un air dur.

-Tu me dégoûtes. Je viens de tout perdre, je me suis offerte à la Déesse pour qu'elle accepte de te laisser la vie sauve. Et toi la seule chose à laquelle tu songes, c'est crever. Bêtement, comme un rat. Brecianne Leocadas, en fait, ne vaut pas mieux que les pestilences de Lissander, tous ces chiens à son bord !
-Sors de ma vue !

Brecianne avait dû faire un effort surhumain pour hausser la voix. Phadransie sourit en constatant que sa tirade avait au moins provoqué une réaction chez l'Elue Divine.

-Volontiers, Elue Divine Brecianne Leocadas. Après tout nous n'avons plus rien à nous dire.
-Une dernière chose...sais-tu qui...deviendra la nouvelle..Elue..d'Ariel ?

Phadransie haussa les épaules.

-Aucune idée.
-Toi..?
-A vrai dire, Ariel m'en a parlé, et la proposition est tentante. Mais j'ai deux bonnes raisons qui me refroidissent grandement à propos de cette "offre". Déjà, je n'aime pas Ariel. Elle ne prend pas soin de ses Elus, elle te considère déjà comme morte et se fout totalement de ton état alors que tu lui as consacré ta vie. Les marins n'exagèrent pas, lorsqu'ils la traitent de Garce. C'en est une. Une déesse puissante, certes, mais une Grande Garce.
-Tu as...dis deux.
-...Crois le ou non, mais je ne souhaite pas ta mort. Et si je dois devenir Elue D'Ariel, alors ça implique que tu rendes ton âme. 
-Mon âme rejoindra ma Déesse...je serai..apaisée.
-Je me fous complètement de ton âme.

Pharansie La Noire claqua la porte. Elle avait parlé de la Gemme à Brecianne Leocadas, c'était fait. C'était un pas de plus en avant. Elle repasserait la voir demain soir, en espérant qu'elle l'aiderait à formuler sa demander à la Grande Garce. Phadranie savait que Brecianne le ferait.

Elle regagna sa Cabine, et se rallongea de nouveau sur son lit. Elle balança son Tricorne au travers la petite chambre, et le vit taper contre le mur. Phadransie n'arrivait même pas à desserrer les dents, énervée. Putain, mais pourquoi tenait-elle tant à cette foutue Elue Divine ? Qu'elle crève.

Phadransie La Noire voulut s'endormir sur cette pensée finale. Mais elle n'y parvint pas.
Lun 10 Nov 2014 - 22:08
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Dargor
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Ariel, tranquillement en train de barrer le Seigneur, avait brusquement viré de bord. Cela n’échappa pas à Borch Klay, qui redescendit de son poste de vigie.
 
« Déesse ! dit-il. On a changé de cap ?
-Oui, répondit cette dernière. Je n’ai pas envie de rentrer à Port-Argenterie. Cette ville est ennuyeuse. Je veux aller à Kelvin.
-Puis-je vous demander pourquoi vous faites ça ?
-C’est le plus grand chantier naval du monde non ? Et le Seigneur a besoin de quelques  petites retouches. J’ai envie de retouches de qualité. Donc on va à Kelvin. Ça te pose un problème ?
-Ben… On a pas les vivres, ni le matériel, ni l’équipage nécessaires pour entreprendre un tel voyage.
-On fera une escale dans le premier port venu, répondit-elle. Je veux emmener le Seigneur à Kelvin, et je le ferais. Ça te pose un problème ?
-Non madame, répondit le gabier, n’osant pas énerver Ariel. »
 
Plusieurs heures passèrent, tandis que le navire avançait dans des conditions idéales. Borch était descendu de son mât, car après tout il restait second, et Ariel ne semblait pas assumer un rôle de capitaine, aussi devait-il le faire lui-même. Puis un marin vint l’informer que Brecianne se trouvait de plus en plus mal. Lorsqu’il alla la voir, elle ne parvint à dire qu’une seule chose. Aller trouver Ariel. Il alla prévenir la déesse que la capitaine semblait à l’article de la mort. Elle se contenta de sourire.
 
« Bientôt, dit-elle, ses souffrances physiques seront terminées. C’est mieux pour elle. Elle restera ma demoiselle de compagnie, mais je n’aurais plus à la voir souffrir, car elle sera libérée de toute contrainte charnelle. Et celui qui lui a fait cela payera pour ses crimes. Au fond, même si elle traverse un moment désagréable, il n’en ressortira que des bonnes choses pour elle comme pour moi. »
 
Borch Klay se tut, comprenant qu’il n’y avait rien à faire. Pourquoi la déesse était-elle ainsi avec son élue ? Il réfléchit pendant des heures à la question, avant de comprendre. Ariel était éternelle. Et elle récupérait les âmes de ses élus. Que pouvait représenter le laps de temps que durait la vie d’un homme pour elle ? Rien. Voilà pourquoi elle semblait ne pas se soucier de ce qui arrivait à Brecianne. Cela ne changerait rien pour elle, et elle n’avait même pas conscience du temps que durerait les souffrances de Brecianne… Il alla essayer de trouver le sommeil sur ces pensées, tandis qu’Ariel, infatigable, tenait la barre.
Mar 11 Nov 2014 - 15:05
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Noire
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Lame D'Or était la seule arme qu'elle avait pu récupérer sur le Navire de Jack Lissander avant qu'elle ne le quitte en compagnie de Brecianne. Intuitivement, Phadransie La Noire posa sa main sur la garde précieuse de l'arme, éternelle alliée. Seule alliée. Plus de 24 heures étaient passées depuis sa dernière visite au Capitaine Leocadas. Le Seigneur Emeraude avait brusquement changé de cap, voguant droit vers le Port de Kelvin, et les rumeurs concernant la mort imminente, pour ne pas dire qu'elle avait déjà frappé l'Elue d'Ariel, allaient bon vent. Phadransie s'était principalement reposée dans sa Cabine. Elle s'était aussi saoulé, en terminant à elle seule une bouteille de rhum finement dissimulée dans les cales du Seigneur. En fait, c'était même la dernière qui faisait office de provisions. Personne ne savait ce qu'Ariel avait en tête, mais elle devait rapidement faire escale quelque part, si elle ne voulait pas se retrouver très vite seule encore en vie sur le Pont de son Navire. Ou peut être était-ce justement ce qu'elle recherchait ?

Phadransie La Noire se décida enfin à abandonner sa Cabine. Elle savait que les rumeurs allaient toujours trop vite, elle parlait d'expérience. Brecianne Leocadas ne pouvait pas mourir. Elle allait la remettre sur pieds, elle allait montrer à Ariel que son Elue était encore capable de la servir. Après tout, il y avait 24 heures de cela, n'était-elle pas en mesure de lui parler, l'interroger et lui répondre, et même lui donner des ordres ?

En allant rejoindre la cabine de son Capitaine, Phadransie croisa l'actuel Second, Borch Klay. Elle le dépassa sans rien dire, espérant qu'il n'ouvrirait pas sa grande gueule. Elle ne l'appréciait pas, et savait que lui se méfiait d'elle.

-Si vous allez dire au revoir au Capitaine, dit il finalement, dos à elle, vous feriez tout aussi bien de lui présenter également vos excuses. 
-Et qu'est ce qui vous fais croire que j'ai des excuses à présenter à Brecianne, Monsieur Klay ?

Ce dernier haussa les épaules, l'air impuissant. Une comédie stupide, en particulier venant d'un gaillard qui faisait facilement deux têtes de plus que Phadransie.

-Je ne sais pas, Phadransie La Noire. Brecianne Leocadas avait plus de cent Tours derrière elle, elle vous a rencontré il y a deux mois de cela, vous l'avez vendu à un Nécromancien, et là elle se meurt.

Phadransie serra les phalanges de ses mains, à les faire blanchir. Déchirer la gorge de cet importun ne lui apportera visiblement rien de bon. 

-Je ne suis pas responsable de ce qu'il lui a fait. Et Brecianne Leocadas ne mourra pas tant que je serai à ses côtés !
-Et moi je ne suis pas là pour me disputer avec vous, vous savez. De plus, vous devriez prendre garde à vos dires. N'oubliez pas que l'âme de notre Capitaine appartient à la Reine des Mers. Et Ariel est à bord. Je ne veux pas de tension entre nous, je ne veux pas d'un ennui supplémentaire.
-Dois-je en conclure que vous considérez le fait que notre Déesse soit à bord comme un ennui ?

Cette dernière réplique avisa de mettre un terme à leur échanges. Borch Klay ne dit plus rien, et continua sa route, dans le dos de Pharansie. Cette dernière pu se décrisper à son tour. Aucun doute, ce type là non plus n'aime pas Ariel.

Elle ne tapa pas à la porte de la Cabine de Brecianne, et entra directement.


*

Il faisait sombre. Le brin de soleil qui flirtait au travers le hublot tombait directement sur le lit de Brecianne. Cette dernière avait les yeux fermés, et était plus fiévreuse que le jour d'avant. En sentant la présence de Phadransie, cette dernière pu la voir se troubler, et remuer faiblement. 

-Brecianne ?

Voyant que l'Elue Divine était trop faible pour ouvrir les yeux, où même se redresser, elle s'approcha de son visage. Sans crier gare, elle sentit la main droite de Brecianne se refermer sur sa chemise. Brecianne ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais les mots étaient inaudibles. Elle tira Phadransie à elle, afin qu'elle entende mieux, mais là aussi, le son était toujours aussi faible. Tout ce que la Pirate au crochet pu comprendre des inspirations douloureuses de Brecianne, était qu'elle la prenait pour Ariel. Est-ce possible ? Elle me confond avec la Déesse ? 

-Morbleu ! Brecianne, c'est moi. Putain, c'est moi !

Elle sentit la pression de Brecianne se relâcher doucement, et sa tête s'affaler de nouveau sur l'oreiller. Phadransie cru discerner entre ses souffles les mots "Lorin" et "Port-Argenterie". Enervée, sentant qu'elle était en train de perdre Brecianne, elle la saisit fermement par l'épaule et la secoua. La plupart de ses plaies s'étaient rouvertes, du sang macula les doigts de Phadransie. 

-Brecianne,  je t'ai promis que tu t'en sortiras ! Ariel a fait changer le cap du Navire, nous nous rendons à Kelvin. Une fois à destination je te trouverai des médicaments et de quoi aider à te rétablir ! Mais putain, ne crève pas comme ça. Tu m'entends ?

Involontairement, Phadransie serra davantage sa poigne dans l'épaule de Brecianne, qui parallèlement, réagissait de moins ne moins à ce contact douloureux. 

-Tu m'entends ?!

Elle pu nettement l'entendre émettre une sorte d'inspiration à la fois inquiétante par son silence et son bruit étouffé. 

-Putain Brecianne, tu m'entends ?! Ecoute moi ! Ecoute moi, merde !!

Ce fut lorsque Brecianne Leocadas mourut, qu'elle réussit à articuler péniblement les mots coincés au fond de sa gorge.

-Pardonne moi.


*


Phadransie, d'un air sévère, grimpa deux à deux les marches de la passerelle. Elle vint se tenir bien droite, à la gauche de la Déesse, inlassablement debout aux commandes du Seigneur Emeraude.

-Votre Elue Divine vous a quitté. Ou vous a rejoint. Cela dépend l'angle de vue que l'on adopte. 

Ariel ne dit rien, elle se contenta d'esquisser un faible sourire, au coin des lèvres, en fixant l'Océan. Phadransie reprit, la voix très grave.

-Dame Ariel, comment choisissez vous vos Elus ?
Mar 11 Nov 2014 - 21:25
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Dargor
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Ariel tenait toujours la barre du Seigneur, le faisant légèrement virer de bord. Borch Klay était revenue à la charge, tout à l’heure, rappelant que si elle continuait ainsi, elle n’aurait plus d’équipage lorsqu’elle arriverait à Kelvin. Que des marins meurent importait peu à Ariel, en vérité, après tout la mort n’était qu’un autre commencement, mais qu’il n’y ait plus d’équipage pour conduire le Seigneur à Kelvin lorsqu’elle-même serait revenu dans les plans d’existence divins la gênait un peu plus. Ses jours sur Ryscior étaient comptés après tout. Et avec l’apparition du Juge, elle savait que ses actions sur le monde des mortels seraient bien plus limitées. Elle ne pouvait pas se permettre de tout perdre sur un caprice. Il lui fallait donc nourrir cet équipage avant de l’amener jusqu’aussi loin qu’elle le pouvait, puis ensuite, leur confier la mission d’amener le Seigneur sain et sauf à Kelvin. Rien de plus, rien de moins. C’est alors que la pirate qu’elle avait libérée en même temps que son élue arriva.
 
« Votre élue divine nous a quitté. Ou vous a rejoint. Cela dépend de l’angle de vue qu’on adopte. »
 
Elle marqua un temps de silence.
 
« Dites-moi, comment choisissez-vous vos élues ? »
 
Ariel commença par ignorer la question, puis choisit de répondre à la première remarque. Si cette Phadransie, comme elle s’appelait, était venue pour lui arracher des larmes à cause de la mort de son élue, alors elle se trompait lourdement. Ariel ne comprenait pas le soin que les mortels mettaient à s’attrister de la mort des leurs. Cela n’avait purement et simplement aucun sens. La mort n’était rien de plus qu’un changement de forme.
 
« Elle traverse une mauvaise passe, dit-elle. C’est une étape pénible, mais nécessaire. J’ai fini par me faire à l’idée selon laquelle quitter leur enveloppe charnelle est toujours pénible aux mortels. Pour autant, ce nécromancien constatera que je ne tolère pas qu’on fasse du mal à mes demoiselles de compagnie.
-C’est étrange que vous disiez cela, répondit Phadransie, parce que moi, je ne pardonne ni le mal qu’on lui a fait, ni  le fait que personne ne lui soit venu en aide, y compris vous, sa déesse.
-Allons, répondit Ariel, ce ne sont que quelques jours de souffrance pour elle. Le nécromancien en payera chacun d’eux, vous pouvez en être sûre, mais après tout, quelques jours, ça n’est rien. »
 
De fait, la déesse étant éternelle, elle n’avait plus, depuis longtemps, la même notion du temps que les mortels. Certains de ses camarades divins, qui se souciaient beaucoup plus de l’évolution du monde des mortels, comme Canërgen ou Elye, savaient ce que pouvait représenter une journée. Mais pour la déesse des mers, les jours se ressemblaient tous les uns aux autres, et passaient en l’espace d’un soupir.
 
« Je ne parlais pas des jours de souffrance, répondit la pirate. Brecianne avait encore des centaines d’années devant elle. Elle menait la résistance et préparait la défense de Port-Argenterie. Elle ne méritait pas de mourir maintenant, et pas comme ça.
-Finir comment ? demanda Ariel, qui commença déjà à se lasser de cette discussion. La mort n’est que la suite de la vie.
-En vérité, vous vous êtes lassée d’elle. Autrement, vous l’auriez sauvée. Vous en aviez l’occasion.
-Sauvée de quoi ?
-De la putain de lame de Lissander ! Des ses blessures, et de sa fièvre !
-Allons, ce ne sont que deux petits jours, répondit Ariel. »
 
Il était vrai que le nécromancien devait payer pour ses crimes. Pour autant, Brecianne n’avait souffert qu’un court laps de temps, et maintenant, elle était parmi ses autres demoiselles de compagnie pour l’éternité. En outre, il avait fallu que le destin décide que le nécromancien choisisse les deux semaines où elle n’était pas en mesure de couler sur place son navire. Mais ça, elle ne pouvait pas le dire à la pirate. Ce serait admettre qu’elle était pour l’instant en position de faiblesse. Et la Dame des Mers n’est jamais en position de faiblesse face à ses marins.
 
« C’est bien ce que je dis, dit la pirate. Vous vous étiez lassée de votre élue et vous attendiez sa mort. »
 
Ariel ne put s’empêcher de soupirer devant une telle étroitesse d’esprit. D’où venait-il que cette femme n’en sache aussi peu sur la mort ?
 
« Mais non ! dit-elle, sur un ton légèrement énervé. La mort n’est que la suite de la vie, je vous l’ai déjà dit. Si je m’étais lassée d’elle, je l’aurais destituée. Là elle ne m’aurait jamais rejoint, vous pouvez en être sûre.
- Vous êtes une Déesse puissante, Ariel. Mais je suis une humaine. En tant que telle, je ne suis pas convaincue par de simples paroles. En fait je crois que je ne désirais pas la mort de Brecianne, et je n'arrive pas à l'accepter aussi bien que vous. C'est si simple que ça.
-Ah oui c’est vrai, dit tranquillement Ariel. J’avais oublié, vous êtes de ces mortels qui ne comprennent rien à la vie et à la mort… Pourtant il y en a beaucoup qui savent bien des choses… Les teikokuens, tous les elfes, même bien des habitants du continent… »
Evidement, Ariel ignorait que ne rien savoir sur la mort était devenu la norme. Les gens qu'elle avait cité et auxquels elle pensait faisaient plutôt office d'exceptions.
Mer 12 Nov 2014 - 10:15
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Phadransie sentait que la Déesse tendait vers l'impatience dès le début de leurs échanges. Puis cette impatience semblait se métamorphoser, lentement mais sûrement, en énervement. Et ça, c'était mauvais pour elle. En vérité, Phadransie s'était faite à la mort de Brecianne. Elle était partie, c'était fini. Peut être pas pour l'Elue Divine, mais pour elle, sur terre, en tant que mortelle, son attachement avec Brecianne n'avait plus lieu d'être. Et deux choses l'insupportaient. Tout d'abord, le fait que la mort de la Pirate n'ait rien apporté à personne. Ni à Lissander. Ni à Ariel. Ni à elle même. Quoique... Elle allait transformer cet échec en victoire. Brecianne ne serait pas morte pour rien, son enlèvement lui permettra au moins de reconquérir la Légende de Lorin. Ce qu'elle s'apprêtait à faire immédiatement. 
Le second fait qui la mettait hors d'elle, était la nature profonde que la Déesse laissait apparaître. Celle d'une Garce, et rien d'autre. D'ailleurs, elle même semblait apprécier qu'on l'appelle ainsi. Phadransie était autant écoeurée par la nature de Lissander que celle d'Ariel. A un détail près, mais qui changeait toute la donne hélas. Si elle pouvait faire le choix de se lever contre Jack Lissander, il était totakement hors de question qu'elle fasse de même avec la Reine des Mers. Lorin voulait déjà sa peau sur Terre. Les Mers étaient son seul échappatoire. Phadransie était déterminée plus que tout à obtenir cet Artefact qui lui avait été volé. Elle avait Ariel à côté d'elle. Le tout était de la chatouiller doucement, petit à petit, sans la vexer, et l'amener au sujet final qui devrait l'interesser.

-Je n'ai pas votre omniscience, Ariel. Je veux vivre ma vie pleinement, en défendant coûte que coûte les plus grandes valeurs de la piraterie. La liberté, le bonheur, les richesses, les mers. De ce fait, j'aimerai vous poser une question. Les mers peuvent être dangereuses, mais j'ai assisté, il y a quelque temps, à un phénomène des plus étranges. Une sorte de "tempête"... mas bien plus puissante. Vous avez dû entendre prononcé le nom du "Galion Déité"..n'est-ce pas ?

L'expression d'ennui profond dépeint par les traits du visage de la Déesse changèrent radicalement. Phadransie -et n'importe qui d'autre, de plus ou de moins avisé- pouvait à présent y discerner une profonde contrariété. La Déesse avait serré les mâchoire, ses doigts refermés sur la barre du Seigneur, à s'en faire ressortir les veines. Je continue..? Vu que la Déesse ne semblait pas vouloir répondre à sa question, la Pirate tenta de nouveau de poursuivre, l'air aussi tendue que la Déesse.

-Ce n'est pas vous, qui avez coulé ce Navire. Il s'agit du Fou, j'ai raison ? Afin de prendre sa revanche sur ceux qui lui ont dérobé un bien précieux.

Ce fut d'une voix tranchante comme une lame qu'Ariel coupa presque Phadransie : 

-Vous pensez vraiment que nous laissons sur le plan matériel, de façon involontaire, des artefacts auxquels nous tenons ? Bon il est vrai que Lorin est un idiot...
-J'ignore si il tenait ou non à celui ci, mais toujours est-il qu'il n'avait pas l'air franchement satisfait lorsqu'il a pris en chasse le Déité...Et ce n'est pas la première fois qu'il fait ça, n'est-ce pas ? S'immiscer sur vos Eaux. Il doit aimer prendre des libertés sur votre territoire.

Phadransie sursauta en voyant deux des poignées de la barre du Seigneur Emeraude voler en éclat, sous la pression des doigts de la Déesse. Elle voulait reculer jusqu'au bastingage, mais dévoiler sa peur maintenant n'était surement par le moment propice. Elle choisit de fixer le pont qui se profilait devant elles, d'un air neutre.

-C'est un sujet de discorde fréquent entre lui et moi, c'est vrai... Mais c'est pour le principe, il n'a absolument pas à déclencher une tempête sur MES mers !
-Dame Ariel, vous êtes la Reine des Mers. C'est à vous que va ma loyauté, et non à Lorin. Nous pouvons lui faire payer ses intrusions sur votre propriété. Mais pour ça, il me faudrait remettre le crochet sur ledit Artefact. 
- Je n'ai pas besoin de l'aide d'une mortelle pour lui régler son affaire ! J'ai juste besoin qu'Ohiel accepte enfin de trancher en MA faveur ! Cet idiot s'obstine à piétiner mes plates bandes ! Les tempêtes en mer viennent de moi ! De personne d'autre ! Il n'a pas le droit d'en déclencher ! Chacune d'entre elles il la payera !
-Je le harcèlerai ! Je suis la seule cible qui n'ait pas été coulée dans le Naufrage du Déité. Je suis celle qui a trouvé la Légende du Fou sur Ryscior. Je suis la Pirate qui n'a reculé devant rien pour s'en emparer. Ariel, je suis votre servante. Acceptez de remonter le Déité, et je rendrai à Lorin la monnaie de sa pièce. Je pillerai temples et terres, et chacun de mes butins, chacune de mes richesses seront pour vous.
Mer 12 Nov 2014 - 22:04
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Dargor
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« JE ME FICHE DE TON AIDE ! hurla la déesse. »
 
De là où il était, Borch se tourna vers le pont arrière. Phadransie y discutait depuis quelques minutes avec Ariel, et semblait être en train de franchement l’énerver. Le marin observa qu’il manquait deux poignées à la barre du Seigneur, comme si elles avaient volé en éclat. Mais ce qu’il observa surtout, c’est qu’Ariel avait saisi la pirate par la gorge, et du bout du bras la soulevait du sol au-dessus de sa tête, plongeant son regard dans le siens, comme si elle ne pesait pas plus lourd qu’un bébé.
 
« Je n’ai besoin de l’aide d’aucune mortelle, continua la déesse, sur le même ton, et certainement pas de toi, qui a livré mon élue à ce rat de nécromancien, pour régler mes conflits avec Lorin ! Je peux le faire seule, tu m’entends ? Seule ! Je suis une déesse ! Qu’est-ce que tu ne comprends pas avec ça ? J’ai assisté à la création des premiers humains. J’ai aidé à donner la vie à ce monde ! Sans moi, tu n’aurais pas ton métier ! La liberté de la mer, les fiers frères de la côte ? Vous me faites rire tous ! Si j’asséchais les océans, du jour au lendemain, vous ne pourriez rien y faire ! Et si Lorin décidait d’éveiller des volcans dans chacune de vos misérables cités, vous ne pourriez rien y faire non plus ! Vous vivez avec cette épée de Damoclès au-dessus de vous, et vous osez dire que nous ne vous facilitons pas la vie ?
« Peu m’importent ton Déité et ta gemme ! Ils sont dans mon royaume, ils m’appartiennent ! A moi, et à personne d’autre ! Dans quelques minutes, toutes les sirènes qui nagent autour du Seigneur depuis son départ vont partir fouiller l’épave. Et la gemme, elles la ramèneront sur MON plan d’existence ! J’ignore ce que tu veux, Phadransie la pirate, mais tu n’auras ni galion, ni gemme. Tout cela est à moi désormais. Comme ça l’a été à partir du moment où ce navire a quitté le port ! Comme chacun d’entre vous ! hurla-t-elle à l’adresse de l’équipage.
« Il ne dépend que de mon bon vouloir de vous faire parvenir à bon port ou de vous couler en route quand vous naviguez ! Vous avez un peu tendance à l’oublier, pas vrai ? Allons, dites-le franchement ! Qui parmi vous s’est déjà embarqué en oubliant de me remercier ? Allons, je sais ça mieux que vous ! Tous ! Au moins une fois ! Je vous ai déjà concédé beaucoup trop de largesses ! Nous ne rentrerons pas au port ! Que ce navire mette le cap sur Kelvin, maintenant, et il ne s’arrêtera qu’une fois à destination !
« Quant à toi, dit-elle, d’une voix plus basse, une voix mauvaise, à l’adresse de Phadransie, en l’amenant jusqu’au bastingage, lâchant complètement la barre, sans se soucier du navire qui se mit instantanément à tanguer à et rouler, oui toi, ajouta-t-elle en la tenant au-dessus de la mer, jetant un coup d’œil en bas où on pouvait apercevoir plusieurs visages féminins émergeant de l’eau, donne-moi une seule bonne raison de ne pas te lâcher maintenant… »
 
Derrière elle, plusieurs marins avaient récupéré la barre et s’affairaient à calmer le navire.
Ven 14 Nov 2014 - 11:41
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Noire
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« Quant à toi, oui toi, donne-moi une seule bonne raison de ne pas te lâcher maintenant… »


Des bonnes raisons, Phadransie en voyait plein. Mais ce n'était pas sur en revanche, que la Déesse les estimait autant qu'elle. Phadransie sentit derrière elle, à quelques pieds au dessous, la surface des flots se crever, et des créatures maritimes -des sirènes donc- émerger. Elle pouvait presque sentir leur regard glacial sur elle. Une seule bonne raison, avait dit la Déesse.

-Attendez. Ariel attendez !

Elle tenta de gagner du temps en se débattant, mais c'était peine perdue. Comment diable une bonne femme de chair et de sang, ce que semblait être en tout points la grande Garce, pouvait avoir autant de force ? Justement, car ce n'était pas qu'une bonne femme. Ariel était une Déesse. Phadransie avait plutôt intérêt à mettre cet aspect de sa personnalité en valeur si elle  voulait vivre un peu plus. Oui mais la Gemme ? Alors, c'était terminé ? Non, jamais. Tant que je vivrai, ce trésor sera le mien, même au fond des mers. 
Oui mais pour l'heure, il y avait plus urgent. Phadransie La Noire détestait devoir s'humilier encore, mais quel autre choix avait-elle ?

-Ariel attendez ! Je suis désolée, je vous demande pardon pour...-elle dû faire un effort considérable pour laisser jaillir de sa gorge les mots suivants, malgré l'étreinte de la déesse- pour mon comportement. Loin de moi l'idée de vous prendre pour un être inférieur...Vraiment. Je ne souhaitais pas vous mettre en colère, je suis votre servante sur cette terre. Ne faites pas ça..s'il vous plait..

Le regard d'Ariel, aussi mauvais, ne l'incitait pas à s'arrêter là. Pour faire bonne mesure, et surtout pour espérer sauver sa vie, Phadransie La Noire continua :

-Je souhaiterai vous servir comme il se doit...être à vos pieds lorsque nous atteindrons Kelvin. 
Ven 14 Nov 2014 - 22:33
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Dargor
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S’il y avait bien une chose qu’Ariel aimait dans la vie, c’était de se sentir puissante. Lorsqu’on est l’océan, on est quelque chose dont la force ne peut être quantifiée. Les humains peuvent construire des digues, mais lors d’une tempête, les vagues passeront dessus. Ils peuvent construire les navires les plus solides au monde, mais tous finiront par couler un jour. L’océan est d’une puissance sans égale. Mais l’océan peut également être pacifique, et nourrir les pêcheurs et leur famille, permettre le commerce, permettre le passage d’armées… C’est une zone neutre, qui n’appartient à personne. Sauf à elle. Sauf à Ariel. Elle incarne l’océan dans tout son paradoxe. Dans toute sa majesté. Dans toute sa puissance destructrice.
Voilà pourquoi Ariel aimait se sentir puissante. Et elle aimait que l’on reconnaisse sa puissance. Aussi, les propos de Phadransie lui plurent. Mais pour autant, il fallait plus à la dame des mers, beaucoup plus. Phadransie l’avait offensée. Elle devait payer. Ainsi, les pirates aimaient leur liberté ? Eh bien elle allait lui en retirer une bonne partie.
Nonchalamment, elle la jeta sur le pont, sans rien dire, puis reprit la barre, et sans même se tourner vers elle, lui adressa la parole.

« Tu serviras à bord du Seigneur, dit-elle. Tu ne pourras jamais avoir un poste supérieur à celui d’officier de quart. Tu seras toujours fidèle à son capitaine, peu importe qui est-ce. Est-ce clair ? »
Sam 15 Nov 2014 - 20:18
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Noire
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« Tu serviras à bord du Seigneur. Tu ne pourras jamais avoir un poste supérieur à celui d'officier de quart. Tu seras toujours fidèle à son capitaine, peu importe qui est-ce. Est-ce clair ? »

Phadransie crut, au sein de l'espace contenu dans la seconde où Ariel avait laissé jaillir de ses lèvres ses paroles, qu'elle avait mal entendu. Mais non. Elle avait très bien entendu les propos de la Déesse, tout était vrai. Tout comme le fait que la Déesse avait strictement refusé de remonter le Galion Déité. Tout comme le fait que, la Légende de Lorin, après laquelle elle avait couru des Tours entiers de sa vie, lui échappait définitivement. Tout comme celui que Brecianne Leocadas était morte, qu'Ariel n'avait plus d'Elu Divin en ce monde, et que le responsable de tout ça, celui qui avait causé son trépas et l'avait elle même livré à la Grande Garce, s'en était tiré admirablement, en vie et sans une égratinure. Avec une menace tout au plus. Phadransie La Noire ne comprenait plus rien. Pourquoi devrait-elle se retrouver enchaînée au Seigneur Emeraude, privée de ce que son âme convoitait, alors que Jack Lissander voguait tranquillement sur son Navire ? Pourquoi Ariel n'avait pas appellé l'une de ses créatures marines pour lui régler son compte immédiatement  ? Pourquoi n'avait-elle pas soulevé une vague afin de le couler définitivement ? La seule réponse logique que trouvait Phadransie était que la Déesse, sous sa forme charnelle, ne disposait pas de la quasi totalité de ses pouvoirs, ou qu'elle n'était simplement pas en mesure de les utiliser pour l'instant. Cependant, elle semblait en avoir suffisamment pour la jeter, elle, par dessus bord et la livrer aux créatures abyssales qui l'attendaient, quelques pieds plus bas.

-Ca l'est madame, répondit Phadransie, toujours à terre, empêchant sa voix de trembler face à la prestance et le tranchant de celle qui ressemblait à rien de plus qu'une femme brune en robe blanche. Je vous ai fais une promesse, non ? Je suis à votre service.

Elle réussit enfin à se relever. Son Tricorne était passé par dessus le bastingage, au vent puis à l'eau, elle nétait pas prête de le revoir. Elle allait devoir s'en procurer un autre une fois arrivés (si ils y arrivaient) au Port de Kelvin. Elle repéra le Second de Brecianne Leocadas, Klay, à plusieurs mètres derrière Ariel, dans son dos, observant d'un œil aiguisé la scène depuis un nombre indéfini de...secondes ? Minutes ? Quoi que ce fut, son temps n'avait visiblement pas été perdu. Phadransie s'appréta à quitter rapidement la Gace qui tenait la barre du Seigneur, mais se décida sur impulsion, presque malgré elle, à lui poser une dernière question.

-Ariel...concernant le corps de votre Elue. Devons nous vous le rendre par la voie des Eaux ?

La Déesse ne prit même pas la peine de la regarder lorsqu'elle répondit.

-Son corps n'est rien de plus qu'une coquille vide. Vous pouvez l'exposer à la cérémonie que vous souhaitez.

Phadransie La Noire aquiesça d'un hochement de tête. D'ailleurs sa tête commençait à lui tourner. Signe de fatigue, d'angoisse, de surmenage ou de faim ? Les quatre options, bien qu'indépendantes au possible, n'étaient guère réjouissantes. Elle descendit la passerelle, passant à quelques centimètres de la Déesse, la frolant. Puis elle regagna sa Cabine, la rage au ventre. Dès demain, elle savait qu'elle n'aurait plus le droit à une cabine privée.


*


Elle n'était pas parvenu à s'endormir malgré la fatigue. Durant des heures, Phadransie avait contenu cette rage qui paraissait lui dévorer les intestins. Puis elle s'était mit à fantasmer. Elle fantasma sur la mort d'Ariel, sur la destruction de cette femme en robe blanche, celle qui paraissant tant humaine, elle rêvait de la jeter par dessus bord, de la lacérer avec son crochet, de la vider de son sang, puis de ses tripes, puis de tout le reste. Elle s'imaginait rabaisser la Déesse, l'humilier, la crucifier au Mât du Seigneur. De son Seigneur. Puis, au bout de plusieurs heures, elle changea de cible. Il était inutile de fantasmer sur la mort d'une Déesse, cela ne servait à rien. Ca soulageait, certes, mais c'était inutile au proxysme. En revanche, il y avait une personne sur laquelle elle pouvait déverser sa rage, une personne sur laquelle elle pourrait un jour, peut être, brandir son crochet.
L'homme responsable de la mort de Brecianne Leocadas, alors qu'il lui avait promis de la laisser en vie.
Celui qui l'avait livré à Ariel, en prétendant qu'elle même lui avait vendu Brecianne.
Celui qui avait torturé son Capitaine sous ses yeux afin d'attirer l'attention d'Ariel, et lorsque cette dernière s'était présentée à lui, s'était enfui en la vendant à sa place.

Celui qui lui avait promis la Gemme, et qui, au final, lui faisait subir la totalité des conséquences de son plan désastreux.

Ce Jack Lissander.

Alors, Phadransie La Noire fantasma sur l'agonie du Nécromancien. Elle le haï autant qu'une personne peut en haïr une autre, et son supplice imaginaire dura des heures.


Lorsque la Pirate émmergea de nouveau, elle n'aurait su dire si ses pensées l'avaient endormie. Tout avait semblé si vrai. Tellement vrai que sa tête lui tournait deux fois plus que la veille. Mais elle n'en avait cure, désormais. Putain Brecianne, pute d'élue, je te déteste. Tu n'étais pas obligée de mourir comme ça. Maintenant Lui s'en est tiré, et c'est sur moi que ta Déesse passe sa rage. Tu m'entends, hein, Brecianne ? Toi tu es partie, mais moi je suis là, à ta place, coincée sur ton Seigneur merdeux, en route pour Kelvin. En route pour Kelvin, c'est vite dit ; sans vivres et eau, ce n'est même pas sûr que la moitié d'entre nous l'atteigne, cette destination.  
Dim 16 Nov 2014 - 18:31
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